Sans doute ne mesure-t-on vraiment la grandeur des gens qu’à l’empreinte qu’ils auront laissé dans la mémoire des gens les ayant côtoyé, aux valeurs et aux pensées heureuses que l’on pourra rattacher à leur nom. On peut toujours se dire que l’on a le temps de bien agir, laisser les choses se faire, ne pas chercher plus que ça à mettre de la couleur dans le monde qui nous entoure. Un jour, le long fil de la vie se rompt, parfois brusquement, et avant de passer à la terre certains ne se priveront pas de faire l’inventaire.

Le Pain par Nature, début Avril

Au 12 rue Cavallotti, dans le 18è arrondissement parisien, les nombreuses fleurs, mots, dessins, … avaient couvert le rideau de fer de la boulangerie Le Pain Par Nature. Le décès tragique de Guillaume Viard début Avril avait laissé de nombreux habitués orphelins des douceurs que proposait l’artisan.
Depuis la reprise de cette discrète affaire fin 2012, il avait eu à coeur avec son associé Luc Poggio de développer une gamme portée par des valeurs de qualité et de fraicheur. Le nom choisi pour baptiser les lieux n’est d’ailleurs pas usurpé : une bonne partie des ingrédients utilisés sont biologiques, que ce soit pour la farine, les oeufs ou côté traiteur et pâtisserie… Un engagement parfaitement en phase avec les attentes des consommateurs, de plus en plus sensibles à la qualité de leur alimentation. La relation particulière entretenue par Guillaume -de par sa présence régulière en boutique- avec sa clientèle avait contribué à créer des liens forts avec les habitants du secteur, autant qu’avec les étudiants du lycée tout proche.

La boutique était bercée pour sa réouverture par le soleil de cette belle journée de printemps.

La boutique était bercée pour sa réouverture par le soleil de cette belle journée de printemps.

L’émotion avait dépassé le quartier pour toucher des journalistes, à l’image de ceux du Parisien ou de France Bleu Berry. Dès lors, l’histoire ne pouvait pas s’arrêter là. La meilleure façon d’honorer sa mémoire est de continuer à la rendre vivante. C’est le choix de Luc, qui a réouvert la boulangerie aujourd’hui, ce 3 mai 2016.
La nature reprend ses droits, le pain aussi. L’état d’esprit ne change pas, les valeurs non plus : du bon et de l’accessible, voilà le crédo qui animait les deux amis. Les amateurs seront donc heureux de retrouver le pain Cambrousse et ses notes rustiques de Sarrasin, la miche du Chef au Seigle, ou encore le fameux Mickagui, un pain brioché à la farine de Châtaigne et aux éclats de nougatine. Les viennoiseries qui avaient contribué à créer la réputation de l’affaire sont, elles aussi, bien présentes avec un superbe feuilletage, réalisé à partir de farine Label Rouge et de beurre de Poitou-Charentes.

Les pains toujours en vitrine, avec notamment le Cambrousse, véritable signature des lieux avec 20% de sarrasin, ce qui lui confère un caractère marqué.

Les pains toujours en vitrine, avec notamment le Cambrousse, véritable signature des lieux avec 20% de sarrasin, ce qui lui confère un caractère marqué.

Je ne peux donc que souhaiter le meilleur à Luc et son équipe. Son courage et sa persévérance méritent respect et soutien, et je ne doute pas que la clientèle lui apporteront quotidiennement.

Infos pratiques

12 rue Cavallotti – 75018 Paris (métro Place de Clichy, lignes 2 et 13 ou La Fourche, ligne 13) / tél : 01 42 93 54 96
ouvert du lundi au vendredi de 7h30 à 20h30.

Comme le disait très justement Milhouse à Bart Simpson dans l’épisode Mes sorcières détestées de la fameuse série, se marrer c’est marrant. Si je ne vous ai pas assommés avec la hauteur de ma référence culturelle et que vous continuez à lire ce billet, bravo. Je voulais simplement dire que j’essaie de prendre les choses en souriant, et d’observer les tendances avec amusement plutôt que désespoir, même si ce n’est pas toujours évident. Nos grands vendeurs de conseil et autres farces et attrapes sont particulièrement prolixes dans leur domaine, tout en sachant fort bien marabouter des individus en recherche de nouveautés et inspirations.

460 idées pour créer votre entreprise, chouette !

460 idées pour créer votre entreprise, chouette !

Le Salon de la Franchise se tenait du 20 au 23 mars 2016 à Paris Expo Porte de Versailles. Non, non, il n’était pas question de se dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Au contraire, cela s’apparentait plutôt à un jeu de dupes, puisqu’en définitive leurs franchiseurs restent toujours les grands gagnants : leur marque se développe grâce aux entrepreneurs qui s’y adossent, et ils empochent les différents frais prévus par contrat. Bien sûr, ce n’est pas comme ça que les choses sont présentées : ils apportent un grand savoir-faire, une enseigne reconnue, des conditions d’achat négociées, une assistance pour la vie quotidienne des entreprises, … en bref, de véritables sauveurs pour entrepreneurs d’habitude si esseulés.

Les Fromentiers, l'Art et la Manière du bon pain. A ce moment précis, je commençais à avoir les yeux qui saignaient.

Les Fromentiers, l’Art et la Manière du bon pain. A ce moment précis, je commençais à avoir les yeux qui saignaient.

Dans le secteur de la boulangerie, les marques sont toujours plus nombreuses, avec des positionnements sensiblement différents mais une tendance toujours plus grande à développer des réseaux de ‘boulangeries artisanales’ et non plus de simples terminaux de cuisson. Ange, Feuillette, Louise, Moulin de Païou, Firmin, les Fromentiers et maintenant Marie Blachère… ils utilisent une législation trop permissive pour s’offrir à bon compte une image plus qualitative et « authentique » car le « pain » est réalisé sur place.

Le Stand Moulin de Païou, où l'on retrouvait l'une des splendides photographies utilisées pour la communication de la Minoterie Forest, à qui le concept appartient. Je ne sais pas si sa tête faisait fuir les visiteurs, mais le stand n'attirait pas les foules. "Réussissez dans la boulangerie sans être boulanger", quelle bonne idée.

Le Stand Moulin de Païou, où l’on retrouvait l’une des splendides photographies utilisées pour la communication de la Minoterie Forest, à qui le concept appartient. Je ne sais pas si sa tête faisait fuir les visiteurs, mais le stand n’attirait pas les foules. « Réussissez dans la boulangerie sans être boulanger », quelle bonne idée.

J’ai tout de même quelques doutes quant à la durabilité de telles entreprises : quand on connaît les difficultés que peuvent avoir les franchiseurs historiques à raccrocher tous les wagons, avec pourtant des produits complètement calibrés et un besoin en humain et en savoir-faire beaucoup plus faible chez les franchisés, cela semble plutôt prétentieux de vouloir y parvenir avec ce nouveau modèle. Il ne faut pas oublier le passé et notamment le triste exemple du Pétrin Ribeirou, créé en 1991, et qui a fini par renoncer à la franchise après de nombreux déboires.

Le Stand Marie Blachère ne manquait pas d'animation, avec la fabrication en continu, la dégustation permanente et le remplissage de poches, entendez par là qu'il était possible de repartir avec de nombreuses baguettes.

Le Stand Marie Blachère ne manquait pas d’animation, avec la fabrication en continu, la dégustation permanente et le remplissage de poches, entendez par là qu’il était possible de repartir avec de nombreuses baguettes.

La société est faite de cycles et de modes. Aujourd’hui, la boulangerie est vue par quelques acteurs comme un eldorado pour faire de l’argent facilement et rapidement. En attirant des entrepreneurs peu au fait de la réalité du métier et portés uniquement par l’appât du gain, on ne créé rien de durable, et pire encore : en cassant le marché par les prix, on détruit de la valeur.
J’entends à longueur de journée qu’il faut se positionner sur le snacking, que les français veulent manger toujours plus vite et que le pain devient un simple accessoire du sandwich. Cela fait rêver, et pourtant c’était clairement le parti pris par l’organisateur du salon de la Franchise : les enseignes de boulangerie et de fast-food étaient regroupées dans un même espace, créant de fait un lien logique, un raccourci facile et déplacé.

La formidable littérature de nos amis de chez Ange, Marie Blachère ou Le Duff / Fournil de Pierre.

La formidable littérature de nos amis de chez Ange, Marie Blachère ou Le Duff / Fournil de Pierre.

Si j’ai essayé de me marrer, je pense que quelques uns n’en ont pas fait de même. Pour marquer son arrivée dans le secteur de la franchise, Marie Blachère n’avait pas lésiné sur le moyens et avait tout simplement installé une copie conforme de leurs boutiques, avec fabrication sur place en continu. L’animation et la dynamique ainsi créés, additionnés à la notoriété acquise par la marque et ses 310 points de vente, attirait de nombreux passants… sans doute au détriment de ses voisins et concurrents.
De son côté, le groupe Le Duff essayait de porter la nouvelle identité du Fournil de Pierre, dont le repositionnement haut de gamme (avec des farines biologiques) a été amendé pour se contenter de la fabrication sur place, ce qui devrait permettre de suivre un plan de développement soutenu dans les prochains mois.

Le Stand Le Duff avec ses enseignes : Brioche Dorée, Fournil de Pierre, Bruegger's, Del Arte...

Le Stand Le Duff avec ses enseignes : Brioche Dorée, Fournil de Pierre, Bruegger’s, Del Arte…

Est-il bien nécessaire de faire l’article sur tous les concepts présents ? Des Fromentiers qui se présentaient comme une « grande famille » (sic) au Moulin de Païou dont le lien de filiation avec la Minoterie Forest en fait un simple débouché pour des farines d’une qualité discutable, en passant par Pomme de Pain qui retombe comme un Soufflet, le paysage n’avait rien de bien réjouissant, en définitive.

La Mie Caline a modernisé son image et demeure une enseigne assez bien implantée et dynamique dans les centres ville. Bien sûr il ne faut pas trop s'intéresser à la qualité des produits.

La Mie Caline a modernisé son image et demeure une enseigne assez bien implantée et dynamique dans les centres ville. Bien sûr il ne faut pas trop s’intéresser à la qualité des produits.

Franchement? J’aurais mieux fait d’aller voir des gens plus francs ailleurs en France. Quand je vous disais que se marrer, c’était marrant.

L’an passé, à la même époque, j’apprenais à faire des baguettes et j’avais eu l’occasion d’en juger un certain nombre dans le cadre du Concours de la Meilleure Baguette de la Ville de Paris. J’ai pu retirer de nombreux enseignements de ces deux expériences, et si l’une d’entre elles m’a apporté un diplôme, l’autre n’a fait que confirmer des doutes que j’entretenais de longue date. Vous savez, il y a parfois des choses qui se produisent et que vous ne comprenez pas, un peu comme les magiciens à la petite semaine jouent avec des balles et des timbales. A ce jeu là, on finit toujours perdant. Quand bien même on pense avoir suivi l’objet des yeux de bout en bout, il nous échappe et le prestidigitateur empoche la mise. Nos boulangers et certains de leurs amis ont aussi de jolies baguettes magiques.

Souvenir des baguettes rejetées de 2015

Souvenir des baguettes rejetées de 2015

En 2016, je suis redevenu simple spectateur de la compétition. J’avoue que la position est plutôt confortable : je n’ai pas de responsabilité dans le résultat. Voici donc le classement :

1 – La Parisienne – Florian Charles – 48 rue Madame – 75006 Paris
2 – Boulangerie de Lourmel – Alexandre Fraysse – 121 avenue Felix Faure – 75015 Paris
3 – Le Grenier à Pain – M. Kourougkli – 33 bis rue Saint Amand – 75015 Paris
4 – Boulangerie Alexine – Alexandre Planchais – 40 rue Lepic – 75018 Paris
5 – Boulangerie L’Essentiel Blanqui – Anthony Bosson – 73 boulevard Auguste Blanqui – 75013 Paris
6 – Douceurs et Traditions – Nelly Julien – 85 rue Saint Dominique – 75007 Paris
7 – La Flûte Enchantée – M. Hamada – 104 rue du Faubourg Saint Antoine – 75012 Paris
8 – Boulangerie Brun – Sami Bouattour – 193 rue de Tolbiac – 75013 Paris
9 – Le Grenier à Pain – Vincent Joly – 52 avenue d’Italie – 75013 Paris
10 – L’Académie du Pain – M. Simoes & Vabret – 30 rue d’Alésia – 75014 Paris

La Rive Gauche est particulièrement bien représentée, avec 8 boulangers sur 10 primés. Le 18è arrondissement, qui a connu son heure de gloire par le passé, reste présent avec Alexandre Planchais. On notera également que le Grenier à Pain affirme sa présence, puisque son nom apparaît deux fois dans le classement, et ce malgré l’absence imposée de son champion Djibril Bodian.
A titre personnel, je suis toujours heureux de lire les noms de certains de mes boulangers préférés, vous savez, ces amis de longue date qui brillent à la façon des étoiles filantes, seulement quelques minutes dans la nuit infinie que représente le quotidien des fournils.

Gilbert Pytel m’avait interrogé il y a quelques jours pour Télérama Sortir, au sujet de ce concours et de son mode de fonctionnement. Son article, au titre évocateur, résume bien ma pensée et la nécessité toujours plus pressante de remettre de l’ordre et du sens dans ces compétitions. Les titres et récompenses ne valent rien si elles ne sont pas mises au service quotidien de la clientèle. J’ai aujourd’hui pleinement conscience que le changement ne viendra pas « du haut », de nos grandes instances et têtes pensantes. C’est à nous, panophiles de tous horizons, de reprendre la main. Comptez sur moi pour le faire dans les mois à venir.

Savoir transformer ses faiblesses en force, capitaliser sur sa sensibilité singulière pour construire des projets et une vision différents, … autant de façons d’utiliser les cartes que l’on reçoit dès notre plus tendre enfance. Dame de coeur, roi, valet, as de pique, il nous appartient ensuite de placer nos atouts intelligemment et de jouer une partie qui puisse être aussi gagnante que possible… à la fois pour soi et pour les autres. N’oublions jamais que le jeu de la vie reste collectif. La règle est immuable.

Les Belles Envies, Paris 5è

Alixe Bornon a ainsi décidé de faire de son diabète, déclaré à seulement 13 ans, une opportunité pour offrir aux autres l’univers gourmand qu’elle aurait elle-même souhaité découvrir. Cela a donné lieu cette semaine à la naissance de la pâtisserie « Les Belles Envies », au 3 rue Monge, Paris 5è. Peut-être vous en souvenez-vous, il y a quelques mois encore on pouvait y trouver la pâtisserie Ciel… qui est définitivement partie dans les nuages.

Sur chacune des étiquettes, le client est informé de l'Index Glycémique du gâteau. L'IG maximal est ici de 25, ce qui place ces pâtisseries dans la fourchette des IG "faibles", à l'inverse de celles proposées dans les boutiques traditionnelles qui ont tendance à être hyperglycémiantes.

Sur chacune des étiquettes, le client est informé de l’Index Glycémique du gâteau. L’IG maximal est ici de 25, ce qui place ces pâtisseries dans la fourchette des IG « faibles », à l’inverse de celles proposées dans les boutiques traditionnelles qui ont tendance à être hyperglycémiantes. Certaines propositions sont sans gluten.

Le parcours de cette jeune entrepreneuse combine ambition et engagement. Diplômée d’un Master RH, elle a bifurqué vers la pâtisserie et s’est formée à la discipline sucrée pour mieux en appréhender les contours. Pour parvenir à développer son concept et mettre au point les produits, il aura fallu plus de 2 ans de Recherche & Développement et de sourcing : la gamme a été pensée autour de l' »IGC » – Index Glycémique Contrôlé -, ce qui implique de nombreux essais pour établir de façon certaine l’index glycémique de chaque recette. Cuissons, associations de produits, sucres non raffinés, farines de Meule , de Lupin (en collaboration avec le Moulin des Moines), etc… les éléments sont nombreux pour parvenir à des douceurs ne faisant pas grimper de façon excessive le taux de sucre dans le sang, sans pour autant recourir à des solutions discutables, riches en additifs et autres substituts douteux.

Vue d'ensemble, Les Belles Envies, Paris 5è

La santé n’était pas la seule préoccupation dans le processus : il fallait que les pâtisseries et chocolat soient beaux et bons. Avec un positionnement haut de gamme, Les Belles Envies a pour vocation de s’imposer comme une marque forte sur son segment. Dès lors, pas question de laisser le moindre détail au hasard : Alixe Bornon s’est donné les moyens de ses ambitions en levant des fonds et en s’associant avec des cautions techniques et scientifiques. Un diabétologue pour la partie médicale, un chef pâtissier formé chez les Compagnons du Devoir – Louis Taine – au labo, une bonne dose de réseau pour le bruit médiatique… autant d’ingrédients additionnés pour un développement rapide, avec d’ores et déjà l’ambition d’ouvrir rapidement de nouvelles boutiques.

Ambition ne veut pas toujours dire absence de valeurs et de sens. Même si le marketing a été habilement orienté autour de l’IG – sans mention de calories, très souvent culpabilisantes – et du plaisir déculpabilisé ainsi créé, cela trouve un écho dans une nécessité réelle de revenir à une alimentation plus saine. Il faut simplement parvenir à trouver le juste équilibre.
Dans tous les cas, les gourmands ne pourront qu’apprécier les pâtisseries et chocolats proposés ici : elles conjuguent visuel abouti et associations de saveurs audacieuses, où les épices, alcools et infusions jouent le rôle d’exhausteur de goût habituellement tenu par le sucre. Jasmin, verveine, gingembre, cognac, … subliment ainsi le chocolat, la noisette et autres ingrédients issus de la pâtisserie traditionnelle. On retrouve également quelques classiques de la pâtisserie française, comme l’éclair au chocolat ou le Paris-Brest, revus et corrigés pour correspondre au concept du lieu. Les saveurs sont bien marquées et les textures agréables (y compris pour la pâte à choux ou les fonds de tartes, réalisés à partir de farines spécifiques). Côté tarifs, le positionnement « luxe » est pleinement assumé : entre 5 et 6 euros la pâtisserie individuelle, cela reste un budget, même s’il faut prendre en compte le coût matière plus élevé que pour des créations traditionnelles.

Un vrai travail a été mené sur le visuel : les pâtisseries sont très soignées visuellement.

Un vrai travail a été mené sur le visuel : les pâtisseries sont très soignées.

Saluons enfin le travail réalisé au sein de la boutique : l’espace de vente est fluide et casse les codes habituels de la relation client-vendeur par une absence de comptoir. Chacun navigue ainsi librement au sein des deux univers -pâtisseries et chocolats- pour une expérience client agréable et personnalisée. Le laboratoire est visible au fond, ce qui rassure sur la fabrication artisanale des produits.

Le laboratoire, visible derrière une vitre. Au sous-sol, un espace équivalent à celui de la boutique est dédié à la chocolaterie.

Le laboratoire, visible derrière une vitre. Au sous-sol, un espace équivalent à celui de la boutique est dédié à la chocolaterie.

Infos pratiques

3 rue Monge – 75005 Paris (métro Maubert – Mutualité, ligne 10) / tél : 01 42 38 01 41
ouvert tous les jours sauf le lundi de 10h à 20h.
site internet : http://lesbellesenvies.com

Les mots peuvent transformer des faits navrants en expériences exceptionnelles. Il faut savoir jouer, manier, retourner, transformer… pour obtenir le résultat souhaité. Bien sûr, cela s’apparente à de la pure malhonnêteté intellectuelle, mais peut-on encore s’en étonner et s’en outrer dans un monde où les valeurs semblent faites pour être piétinées ? On peut aussi voir ça comme une façon de réenchanter des scènes peu engageantes. Nos communicants deviennent alors de grands faiseurs de joie, et armés de leurs stylos -baguettes magiques, devrais-je dire-, ils bâtissent un monde meilleur. La fin du cynisme sera pour un autre jour.

Le stand Banette... ah non, de l'espace inoccupé dans le Hall 5.

Le stand Banette… ah non, de l’espace inoccupé dans le Hall 5.

Ainsi, il paraît qu’Europain est « le plus grand fournil d’Europe ». J’aurais bien dit qu’il s’agissait également du plus grand débit de champagne à bas prix, de la plus grande piste de clowns en costume-cravate… mais on va encore me dire que je suis aigri, à 26 ans, ce serait triste. Voyons les choses autrement.
Je connais ce salon depuis 2012. A l’époque, je découvrais l’univers de la boulangerie, qu’elle soit artisanale ou non. Quand je relis le billet que j’avais écrit, je me dis que les choses n’ont pas beaucoup évolué, à cela près que les problématiques frappent toujours plus fort à nos portes et que le besoin de changement se fait plus pressant.

Le Lab du Boulanger, une nouveauté sur Europain 2016. Pendant 5 jours, des ateliers et démonstrations ont été organisés pour traiter des actualités et tendances de la boulangerie : viennoiseries créatives, digital, levain, pain bio, ...

Le Lab du Boulanger, une nouveauté sur Europain 2016. Pendant 5 jours, des ateliers et démonstrations ont été organisés pour traiter des actualités et tendances de la boulangerie : viennoiseries créatives, digital, levain, pain bio, …

Si l’on doit se limiter à des considérations portées sur le salon en lui-même, il est impossible de passer à côté de son volume toujours plus réduit. De nombreux acteurs de la profession ont fait le choix de ne plus exposer, pour des raisons variées. Banette, Dumée, Vandemoortele, Backeurop, Ireks, Bongard… qu’on les apprécie ou non, l’espace laissé vacant par leur départ n’est pas compensé par de nouveaux entrants. GL Events continue dans la même logique tarifaire, avec des prestations particulièrement onéreuses (que ce soit en terme d’espace, d’emplacement, de services…) qui génèrent forcément leur lot de mécontents.
Cette année, l’organisateur a fait un choix original : traditionnellement, le salon se tenait du samedi au mercredi, ce qui permettait de balayer la plupart des jours de fermeture des artisans – le lundi étant l’un des principaux, le mercredi également. Ce changement de positionnement traduit sans doute une volonté de se tourner plus fortement vers les visiteurs étrangers… Un pari risqué si l’on tient compte des éléments avancés précédemment : Europain manque d’attractivité, et des salons plus petits, à portée plus régionale ou couvrant un champ de métiers plus large (SIAL, SIRHA, Equip’Hotel, …) finissent par lui faire de l’ombre. Est-ce forcément un mal ? L’image qu’il véhicule de la profession n’est pas franchement glorieuse. Faisons un petit tour d’horizon des scènes les plus marquantes…

Un champ de girouettes

Si leur parcours dans la boulangerie devait s’arrêter net, je pense qu’une reconversion dans le domaine de la météo, et plus particulièrement celui du vent, serait toute trouvée pour de nombreuses marques agissant en boulangerie-pâtisserie. Pour comprendre leur positionnement, il suffit de suivre les tendances. Les consommateurs ne veulent plus manger de gluten ? On fait sans, avec une jolie liste d’additifs. Les gens veulent des produits « santé » ? On leur envoie de la poudre aux yeux en ajoutant de petites graines. Ne parlons pas de convictions ou de réalité produit, il n’y en a tout simplement pas. C’est bien là le problème : leur façon d’agir n’est pas orientée au bénéfice des hommes, mais uniquement de leur profit.

Le mélange des genres

Le champ d’activité de certaines entreprises est particulièrement large, et couvre ainsi plusieurs marchés : de la fourniture de farine pour des artisans à la fabrication de viennoiseries et pâtisseries surgelées, il n’y a qu’un pas. Le mélange des genres se retrouve bien sur leurs stands, et il est aujourd’hui complètement assumé. Soufflet affiche sa « Collection Gourmande », les Grands Moulins de Paris servent les « Recettes de mon Moulin », … Dès lors, quel est leur intérêt de travailler à développer le savoir-faire artisanal, plutôt que d’entretenir la dépendance envers leurs « solutions » ? Arrêtez-moi si je me trompe, mais il est inexistant. Le conflit entretenu en permanence est un danger imminent pour la profession.

Un marketing forcené

Quand on n’a pas grand chose à dire de nouveau -l’innovation est en berne !-, il faut trouver de nouvelles couleurs, de nouvelles façons de présenter l’offre. Pour les artisans, cela peut passer par des boutiques toujours plus sophistiquées, des vitrines tape à l’oeil, des outils de communication et de commande modernes… Quant à leurs fournisseurs, les équipes marketing doivent se concentrer sur de nouveaux noms, des slogans dynamiques, des photos bien mises en scène… Tant que le fond ne changera pas, les artisans ne trouveront pas de nouveau dynamisme. La communication n’est pas une solution à nos problématiques : elle doit accompagner un travail de fond sur les valeurs que portent les artisans boulangers et les meuniers-céréaliers-transformateurs variés… mais certainement pas servir à occulter le fait que nous faisons du sur place, et tardons ainsi à répondre concrètement aux attentes des consommateurs.

L’humain et la force de production en retrait

Quand on regarde l’aménagement des stands de certaines entreprises placées au service des artisans (groupements de meuniers, meuniers, …) on constate que leurs équipes de démonstrateurs sont quasi invisibles, cantonnées dans des espaces contraints, comme si ce n’était pas l’essentiel. C’est assez symptomatique du peu d’intérêt qu’elles portent à ce qui est pourtant l’essentiel dans le métier : sans mains expertes ni savoir-faire, pas de bons produits… quoique, tout dépend de ce que l’on considère « bon ». Les pré-mixes sont très bons… pour le compte de résultats de celui qui les vend.

Des boulangeries toujours plus orientées vers la restauration

Au sein du « Restaurant du Boulanger » ou du « Café des conférences », les intervenants se sont succédés pour montrer que l’avenir de la boulangerie passait par la restauration. Ce discours n’a plus grand chose de nouveau, mais ils sont toujours plus nombreux à s’engouffrer dans la brèche et à distiller leurs si précieux conseils : consultants divers et variés, grands entrepreneurs… Leurs présentations sont remplies de statistiques et de tendances qui doivent nous aider à comprendre les attentes des consommateurs. Seulement, à vouloir faire tout sauf de la boulangerie, on finit par oublier qui on est… et par faire n’importe quoi, à commencer par faire entrer dans sa boutique des produits industriels. Le jour où il faudra revenir aux fondamentaux et redevenir artisan boulanger, l’atterrissage sera difficile, et cela se finira dans doute en crash. C’est justement ce qui est en train de se produire : les fermetures se multiplient, les redressements et liquidations également. On peut choisir de se voiler la face et mettre cela sur le compte d’une concurrence féroce. Je l’analyse plutôt dans le sens que le positionnement engagé par la profession n’était pas le bon.

Les équipes de Marie Blachère s'activaient sur le stand de l'agenceur italien Costa. Un drôle de choix pour cette entreprise qui se positionne plutôt sur un segment haut de gamme, et qui donnait lieu à un bien triste spectacle : des produits médiocres, dont la plupart d'origine industrielle, étaient proposés à la dégustation et bénéficiaient ainsi d'une mise en avant indue.

Les équipes de Marie Blachère s’activaient sur le stand de l’agenceur italien Costa. Un drôle de choix pour cette entreprise qui se positionne plutôt sur un segment haut de gamme, et qui donnait lieu à un bien triste spectacle : des produits médiocres, dont la plupart d’origine industrielle, étaient proposés à la dégustation et bénéficiaient ainsi d’une mise en avant indue.

… de l’espoir ?

Il en reste, malgré tout. Tant qu’il y a de la vie…
Les concours et la ferveur qu’ils génèrent nous prouvent que la boulangerie peut encore faire rêver, mais pour cela il faut y remettre du sens. Cela passe par une remise à plat de nos process, il faut tout simplement… ralentir, à tous les niveaux : revenir à des modes de culture moins intensifs, cesser de toujours renforcer la mainmise de certains acteurs sur la filière (notamment des coopératives céréalières), utiliser des variétés de blé à plus faible valeur technologique mais mieux assimilables, travailler sur la fermentations, les levains… C’est ainsi que la boulangerie pourra commencer à répondre vraiment aux attentes de ses consommateurs : aujourd’hui, il est question de produits sains. En effet, la santé est une préoccupation majeure de notre société, et on se rend bien compte que nos pratiques déraisonnables ne vont pas dans ce sens.

Il n’y a pas une seule vision de la boulangerie, c’est un peu comme la vérité en philosophie, nous devons adopter une vision plurielle. Europain correspond majoritairement à une approche, mais je suis à présent convaincu qu’elle finira par disparaître. A court terme chez les artisans, puisque ceux qui persisteront à y souscrire se feront tout simplement laminer, à moyen voire long terme chez les industriels qui devront faire face à d’inévitables scandales alimentaires et à la défiance de l’opinion.

Rendez-vous dans deux ans pour faire le point.

On passe une grande partie de nos vies à chercher le bon mot, la bonne formule. Déjà enfant, l’école nous apprend à courir après les belles lettres, après la réussite. Il faut savoir accepter que ce soit nos mots qui nous rattrapent. Parfois la rencontre est heureuse, car les intentions étaient bonnes, le contexte aussi. Dans d’autres cas, c’est un peu plus compliqué. La force de l’écrit réside aussi dans sa capacité à se rappeler à nos consciences. J’ai appris à ne jamais regretter mes mots, peut-être est-ce un tort, toujours est-il que j’assume chacun des articles présents ici. Parfois passionnés, imparfaits et mal calibrés, ils sont bien à l’image de la matière qu’ils traitent… vivants.

Pas de devanture ostentatoire : il faut s'approcher pour savoir ce qu'abrite cet ancien restaurant.

Pas de devanture ostentatoire : il faut s’approcher pour savoir ce qu’abrite cet ancien restaurant.

Il y a quelques mois, je titrais mon article au sujet du Fournil Ephémère de Montreuil avec ces mots « un projet durable ». La formule a pris tout son sens avec l’installation pérenne de ce projet atypique dans le paysage boulanger de la cité Séquano-Dionysienne : en effet, s’il était initialement prévu que l’installation ne reste que quelques mois en Région Parisienne, ses deux fondateurs ont vite mesuré l’impact que pouvait avoir une telle entreprise. La boulangerie n’est pas un métier ni un commerce anodin. Quand elle est portée par des valeurs de partage et de qualité, elle fédère une communauté de fidèles et créé un véritable lien entre les individus qui s’y intéressent. Dès lors, peut-on mettre fin sciemment à l’aventure en invoquant la seule raison de ‘l’éphémère’, de l’envie d’ailleurs ?

En vitrine, des affiches détaillent le projet aux passants.

En vitrine, des affiches détaillent le projet aux passants.

François et Gaultier n’ont pas renoncé à leurs aspirations initiales – ils continuent d’ailleurs à s’intéresser aux opportunités de rééditer l’expérience – mais ont fait évoluer leur vision… et quitté la Marbrerie qui les hébergeait pour rejoindre leur propre Atelier, à quelques rues. C’est dans cet ancien restaurant qu’ils fabriquent leurs pains et gourmandises, accompagnés de Myrtille, en charge de l’ensemble des douceurs sucrées (cakes, biscuits, …).

Cakes, sablés, brioches... rien ne manque pour les gourmands.

Cakes, sablés, brioches… rien ne manque pour les gourmands.

Le principe reste le même : une ouverture de 3h, trois jours par semaine. Les lundis, mercredis et vendredis, cela sent bon le pain rue de l’Eglise. Une production, plus limitée, est également réalisée le jeudi pour des AMAP et autres organisations.
Ici, tout a été pensé pour rendre le projet viable et cohérent : le travail est très peu mécanisé (seul le pétrissage l’est, les divisions et façonnages sont manuels, tout comme l’enfournement) et les pâtes ne passent pas au froid (exception faite pour celles réalisées à partir de blés anciens). Ainsi, le besoin en matériel est plus limité, les investissements et la place nécessaires le sont tout autant. Les deux compères ont organisé leur projet de vie autour de celui du Fournil Ephémère, qui leur permet de conserver un véritable confort de travail.

Seigle, campagne, pain noir ou aux céréales, la gamme est variée.

Seigle, campagne, pain noir ou aux céréales, la gamme est variée.

A la différence des boulangeries traditionnelles, ici, on ne travaille pas de nuit. Les pétrissages commencent vers 7h, les divisions vers 11h, tandis que les cuissons sont réalisées dans l’après-midi. Cette vision originale du métier correspond bien au parcours de François et Gaultier, qui se sont formés « tardivement » à la boulangerie. Si l’envie de faire du pain était nourrie chez eux depuis bien longtemps, il n’était pas question de le faire n’importe comment. Le choix de la formation au sein de l’Ecole Internationale de Boulangerie de Thomas Teffri-Chambelland, à Noyers sur Jabron, sonnait ainsi comme une évidence : l’enseignement est orienté autour du levain et des farines biologiques, avec un accompagnement pour la mise au point du projet professionnel. Ils ont ensuite complété leur savoir-faire au cours de stages variés, avec toujours le même mélange de curiosité et de rigueur.

Le fournil se confond avec l'espace de vente. Tout est ainsi transparent avec les clients.

Le fournil se confond avec l’espace de vente. Tout est ainsi transparent avec les clients.

La rigueur s’exprime avant toute chose par le choix des matières premières : les farines du Moulin Pichard, avec lesquelles les deux artisans ont suivi leur formation, ont naturellement rejoint leur fournil de par leur qualité et l’engagement de Stéphane Pichard en tant que meunier artisanal. Elles ont été récemment rejointes par celles du Moulin de Chantemerle, situé à Aulnoy, au coeur de la Brie (77). Ce dernier fournira des variétés anciennes de blé, mais avant tout une farine beaucoup plus locale, ce qui correspond parfaitement à une aspiration globale de consommation raisonnée.

Les pains siciliens (farine de blé dur & huile d'olive) au curcuma sur couche. Du sésame est disposé en topping pour apporter du craquant.

Les pains siciliens (farine de blé dur & huile d’olive) au curcuma sur couche. Du sésame est disposé en topping pour apporter du craquant.

Un système de filtration d’eau a été mis en place pour hydrater les pâtes et levains le plus sainement possible. En dehors de cela, la plupart des ingrédients sont biologiques (olives, graines, fruits secs…).

Un batteur et un pétrin à bras plongeants Salva, l'équipement est limité mais c'est aussi une volonté des deux associés : ils ne sont pas tentés de faire plus au risque de faire mal.

Un batteur et un pétrin à bras plongeants Salva, l’équipement est limité mais c’est aussi une volonté des deux associés : ils ne sont pas tentés de faire plus au risque de faire mal.

A l’arrivée, on obtient une belle gamme de pains, tous poussés à partir de levain naturel (de seigle, de khorasan, de petit épeautre…) sans levure (mis à part une pointe dans la brioche !). Tourte de Seigle, Khorasan, Petit Epeautre, Campagne … entre autres déclinaisons gourmandes ou créations aromatiques (ne pas manquer le Sicilien à base de farine de blé dur et d’huile d’olive le mercredi), autant de produits savoureux et bien hydratés. Si le visuel n’est pas toujours parfait, le goût se révèle tout à fait convaincant, sans acidité désagréable. Les prix restent très honnêtes compte tenu des matières premières (à partir de 6€/kg pour le Campagne).
Les gourmandises sont à l’avenant : entre les cakes vendus au poids, les sablés variés (cookies, shortbreads, …) et autres produits proposés selon l’envie et l’inspiration, il ne reste plus qu’à se laisser tenter. On reste toujours dans un domaine très boulanger, tout en lui redonnant des lettres de noblesse trop souvent perdues.

Le tableau décrit l'ensemble des pains, leur composition et les propositions du jour.

Le tableau décrit l’ensemble des pains, leur composition et les propositions du jour.

Le nouvel enjeu de ce lieu est de parvenir à transmettre l’état d’esprit à d’autres individus pour faire durer la dynamique, et faire en sorte qu’elle se renouvelle. C’est ainsi que les fondateurs pourront voguer vers d’autres horizons, et à chaque fois laisser dans les territoires visités une empreinte forte et durable : celle d’un savoir-faire artisanal, d’un métier passionnant. Tout comme les grains sont portés et semés par le vent, François et Gaultier feront germer des oasis de boulangerie artisanale. Pour que l’éphémère soit toujours plus durable.

Le four utilisé est initialement destiné à un usage de pâtisserie. Des appareils de buée ont été ajoutés. L'enfournement reste entièrement manuel.

Le four utilisé est initialement destiné à un usage de pâtisserie. Des appareils de buée ont été ajoutés. L’enfournement reste entièrement manuel.

Infos pratiques

11 rue de l’église – 93100 Montreuil (métro Mairie de Montreuil, ligne 9) / tél : 0782213017
ouvert les lundis, mercredis et vendredis de 17h à 20h.
site web : http://fournil-ephemere.fr

Chaque année, les amateurs de galettes sont prêts à se déplacer pour aller chercher le fameux gâteau. Si l’Epiphanie est célébrée au début du mois de janvier (le 6 janvier), la fête se poursuit pendant tout le mois de janvier chez nos artisans. Il faut dire que le sujet ne manque pas d’importance : il se traduit par une augmentation de plusieurs dizaines de pourcents de leur chiffre d’affaires. En bref, de quoi constituer de belles étrennes.

La galette des 13 desserts, Michel Fabre, Alfortville
La tradition veut également que des concours soient organisés par les chambres syndicales pour déterminer quelles sont les meilleures galettes. Pour Paris-Ile-de-France, la compétition a eu lieu la semaine passée et a couronné Sylvain Joubert roi de la galette pour 2016. Son nom n’est pas inconnu aux amateurs de douceurs, cet artisan étant régulièrement primé pour ses croissants et autres spécialités.
Le classement reprend des noms biens connus : Didier Duchesne, Raoul Maeder, Michel Fabre, … sont des habitués. D’autres apparaissent, comme Thierry Maillard, Benoit Cocardon ou réapparaissent comme Fabrice Pottier, à présent installé à Marcoussis.

La très surprenante galette Végétale (Azuki, miel et sésame noir) de Jean-Paul Mathon : notez la feuille en décor !

La très surprenante galette Végétale (Azuki, miel et sésame noir) de Jean-Paul Mathon : notez la feuille en décor !

En dehors de la compétition, j’ai -comme tout le monde !- mes préférences et les créations de quelques artisans ont retenu mon attention :
Olivier Haustraete – Boulangerie bo – propose une galette garnie à la frangipane aux amandes brutes et au confit de yuzu, ce qui apporte une note de fraicheur bienvenue sur les vives notes d’amandes, renforcées par la présence de la peau ;
Dominique Saibron a préparé une création associant la frangipane et une fine couche de caramel au beurre salé. Ce dernier est particulièrement bien dosé et apporte une belle note gourmande en fin de bouche. Comme d’habitude, le feuilletage est très maitrisé et les prix sont vraiment abordables ;
– Chez Dupain, Tanguy Lahaye et son équipe ont fait appel à leur partenaire « Fifi la Praline » pour concocter une galette au praliné aussi élégante qu’aboutie ;
Jean-Paul Mathon ne varie pas et réalise à nouveau sa galette à l’azuki, plus légère mais néanmoins très savoureuse.

Pour le reste, je vous laisse consulter le classement complet du concours, avec les catégories Patron, Salarié et Apprenti.

Quelques galettes, Michel Fabre, Alfortville

 Boulangeries

1

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

2

Didier DUCHESNE

38, rue J.P. Timbaud

75011

PARIS

3

Raoul MAEDER

BRETZEL FOR EVER

158, bld Berthier

75017

PARIS

4

Pascal BARILLON

6, rue des Abbesses

75018

PARIS

5

Reynald GILBERT

LE GRENIER A PAIN

101, av du Général de Gaulle

78300

POISSY

6

Benoit COCARDON

60, rue de la Convention

75015

PARIS

7

Vincent JOLY

LE GRENIER A PAIN

52, av. d’Italie

75013

PARIS

8

Thierry MAILLARD

LA MAILLARDISE

48, av. Mozart

75016

PARIS

9

Jean-Yves BOULLIER

LE MOULIN DE LA CROIX NIVERT

39, rue de la Croix Nivert

75015

PARIS

10

Abdennaceur KHORCHANI

LA REINE DES BLES

62, bld Jean Jaurès

92110

CLICHY LA GARENNE

11

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

12

Mickaël MASSET

6, Place Saint Louis

92380

GARCHES

13

Yacine MOUDJARI

LES SAVEURS DE WAGRAM

169, av. de Wagram

75017

PARIS

14

Guillaume JULIEN

LA TRADITION JULIEN

42, rue des Petits Champs

75002

PARIS

15

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

15 EX

HAMADA SHUJI

JAPON

HORS CATEGORIE

16

Nelly JULIEN

DOUCEURS ET TRADITIONS

85, rue St Dominique

75007

PARIS

17

Pascal PINEAU

13, rue du Général De Gaulle

77000

MELUN

18

Jean Paul CROSNIER

39, rue Boucicaut

92260

FONTENAY AUX ROSES

19

Arnaud DELMONTEL

39, rue des Martyrs

75009

PARIS

20

Fabrice POTTIER

MAISON POTTIER

12, Bld Charles mélaton

91460

MARCOUSSIS

Catégorie Salariés

 Boulangeries

1

Cyril SAUVY

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

2

Patrick FABRE

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

3

Aymond William LEDENTU

Fabrice POTTIER

12, Bld Charles mélaton

91460

MARCOUSSIS

4

Sikoumar MARENA

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

5

Hayatte KABOUCHE

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

6

Michaël KUSNIEREK

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

7

Patrick PIOLINE

Pascal BARILLON

6, rue des Abbesses

75018

PARIS

8

Benjamin PECOU

Dominique GUIGNIER – LA FOURNEE GOURMANDE

9, rue de la Mairie

92320

CHATILLON

9

Eric COSTANETO

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

10

Benoit PICQUENARD

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

11

Abdellah MOURAG

Nelly JULIEN – DOUCEURS ET TRADITIONS

85, rue St Dominique

75007

PARIS

12

Tareck BOUZIAINI

Nelly JULIEN – DOUCEURS ET TRADITIONS

85, rue St Dominique

75007

PARIS

13

Tony RAIMBAULT

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

14

Salah SCHERIF

Philippe GOSSELIN – GOSSELIN SAINT

258, bld St Germain

75007

PARIS

GERMAIN

15

Jérémy JOAQUIM

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

16

Yannick GARRY

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

17

Francis MAUBANT

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

18

Edgard BERTRAND

Jacky RENOUF – LE PUITS D’AMOUR

249, bld Voltaire

75011

PARIS

19

Marc BOUMEDDANE

Eric BLEUZÉ

28, av. Gabriel Péri

93160

NOISY LE GRAND

20

Matthieu CARDON

Fabrice POTTIER

12, Bld Charles mélaton

91460

MARCOUSSIS

Catégorie Apprentis

 Boulangeries

1

Maurane MEDJIKIAN

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

2

Dylan GORIUT

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

3

Cédric MACLE

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

4

Marine DETHEVES

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

5

Aurélien CANNY

Reynald GILBERT – LE GRENIER A PAIN

101, av du Général de Gaulle

78300

POISSY

6

Sophie DAZZY

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

7

Martin FLOURIOT

Pascal FLANDRIN

1, rue du Général Leclerc

94220

CHARENTON LE PONT

8

Marine SOCHARD

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

9

Benjamin BANOS

Arnaud DUMONT

8, rue du Plateau

91800

BRUNOY

10

Océane GUINHUT

David BAILLON

29, rue de Chézy

92200

NEUILLY SUR SEINE

On passe une bonne partie de notre vie à se battre pour avoir raison. Avoir raison face aux autres, face à soi même, face aux événements. L’enjeu qui nous paraît central -garder la maitrise du jeu, garder la tête haute- n’est qu’en définitive bien vain. La loi du plus fort nous ramène bien souvent à la réalité : ce sont ceux qui ont les plus gros bras, les comptes en banque les plus garnis, qui finissent par triompher. Un triomphe éphémère, même si à l’échelle de nos vies humaines il semble parfois absolu et total. Si l’on prend du recul, un peu de hauteur, on finit par comprendre qu’il vaudrait mieux se concentrer sur l’idée de défendre des positions qui ont du sens, et pas seulement pour sa personne.

Moulin de la Vierge, Victoires

Il y a aussi des fois où l’on voudrait avoir tort, car le constat est glaçant. C’était mon cas au sujet du Moulin de la Vierge. J’étais perplexe et inquiet : l’enseigne fondée par Basile Kamir a vu son management changer discrètement au cours de l’été, avec l’arrivée des frères Hakkam – comme en attestent les informations du registre du commerce. Ces discrets entrepreneurs, bien présents dans la boulangerie parisienne, ont ainsi les mains libres pour agir sur les boutiques et outils de production. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne s’en privent pas…

Le 105 rue Vercingétorix, aujourd'hui.

Le 105 rue Vercingétorix, aujourd’hui.

A commencer par la fermeture de l’adresse historique du 105 rue Vercingétorix, dans le 14è arrondissement. Vous savez, j’ai un attachement tout particulier à cet endroit, à cette boulangerie à l’ambiance si particulière, comme hors du temps. Même si je n’avais pas manqué d’émettre quelques critiques vis à vis de la qualité des produits, elle fait partie des premières adresses que j’avais visité, encouragé par l’éloge dressé par Michel de Rovira et Augustin Paluel-Marmont dans leur guide des boulangeries de Paris. Sans entretenir une quelconque forme de nostalgie, puisque ces faits demeurent relativement récents, je pense qu’il ne faut pas négliger l’importance de l’histoire dans un métier tel que la boulangerie artisanale.

Pains, Moulin de la Vierge, Victoires

Dans cette histoire, il y a aussi celle de la cuisson au feu de bois, entretenue avec passion par Basile Kamir. Avec l’arrêt de la production rue Vercingétorix, c’est un des derniers fours à bois de Paris qui s’éteint. Ce n’est pas le seul : les autres sont également à l’arrêt (notamment dans la boulangerie à proximité de la place des Victoires), et l’enseigne perd ainsi une bonne partie de sa « signature ». Les produits sont ternes, comme perdus dans cette histoire étrange. Le pain n’est pas vraiment un sujet pour les frères Hakkam, qui se concentrent plus volontiers sur la rentabilité de leurs affaires. L’exemple de Moisan en est une bonne preuve, et je serais bien en peine de vanter la qualité de la production réalisée dans les boutiques de cette entreprise aujourd’hui. Si la situation n’était pas glorieuse du temps du Groupe Bertrand, rien n’a été fait pour enrayer le phénomène.

Vitrine, Moulin de la Vierge, Victoires

Quel avenir pour le Moulin de la Vierge ? Quand on sait les difficultés que rencontrent les riverains à échanger avec l’équipe dirigeante -la Pâtisserie 152 (rue Montmartre) génère de nombreuses nuisances pour les riverains, sans que cela semble beaucoup inquiéter les pouvoirs publics ou même les dits gérants (!)- ou les clients pour joindre l’entreprise (le numéro de téléphone indiqué sur le site comme Contact est inopérant depuis plusieurs mois)… Il y a du soucis à se faire, autant pour les salariés que pour l’image globale de la marque.

J’entends souvent des acteurs de la profession me dresser un tableau quasi-idyllique du marché parisien, tout du moins sur le plan qualitatif. Le niveau y serait nettement plus élevé qu’ailleurs, avec très peu de « mauvais » artisans. Cela fait longtemps que j’ai cessé d’être candide. C’est tout simplement faux : à peine 10% de nos 1300 boulangers parisiens sortent la tête de l’eau. Globalement, on peut penser que c’est à peu près la même chose au niveau national, seulement la concentration n’est pas la même, il y a donc beaucoup moins d’arbres pour cacher la forêt. Certaines zones sont plus gâtées que d’autres.

Ainsi il persiste quelques « zones blanches » : on a beau tourner et se retourner, certains quartiers demeurent pauvres en pains et gourmandises de qualité. Il faut alors aller voir un peu plus loin si l’herbe est plus verte… et attendre qu’éventuellement la situation change au gré des mutations de fonds. Cela peut prendre longtemps, voire être complètement vain si les emplacements disponibles ne sont pas considérés comme intéressants.

Dans le 13è arrondissement, à proximité du métro Olympiades, on se trouvait justement dans l’un de de ces secteurs où les panophiles sont bien en peine. Tout comme le quartier, les choses sont en train de changer. De nouveaux habitants arrivent, attirés par des logements récemment construits et des loyers inférieurs à ceux pratiqués dans les arrondissements plus « centraux ». Le pouvoir d’achat augmente, et cela peut intéresser des artisans engagés dans une démarche qualitative.
L’Essentiel est arrivé au 89 bis rue de Tolbiac courant octobre 2015 et a pris la température pour mieux évaluer les besoins avant de se lancer dans des travaux de rénovation. Ils ont pris fin aujourd’hui avec la ré-ouverture de la boutique, entièrement remodelée, tout comme les laboratoires.

Le pôle pain & viennoiserie reste prédominant et affirme bien l’identité d’artisan boulanger. Malgré un espace de vente relativement restreint, le flux est bien organisé et on ne se sent pas l’étroit. Les jeux de miroirs « agrandissent » l’espace, c’est bien vu.

Nadine et Anthony Bosson ont fait appel à CMC Agencement pour réaliser la transformation, comme pour leurs deux autres boutiques. Le résultat est élégant, sobre et moderne. Si la façade s’inscrit clairement dans le style traditionnel du fameux agenceur, l’intérieur se démarque assez nettement et séduit grâce à des teintes plus claires et lumineuses. Les trois pôles d’encaissement, rattachés aux différentes activités (pain, pâtisserie, traiteur) permettront de gérer les flux de façon efficace en heure de pointe.
Il faudra du temps pour faire décoller la consommation de pain ici : l’établissement était principalement orienté sur l’offre déjeuner et les habitudes ne sont pas évidentes à faire changer.

L'un des pôles d'encaissement

L’un des pôles d’encaissement

Je ne doute pas sur la capacité de Jean-Pascal Detrait et de son équipe pour y parvenir. Ce professionnel aguerri, que l’on connaissait depuis 2013 en tant que démonstrateur au sein des Moulins de Chars après avoir été formateur chez les Compagnons du Devoir, est pleinement investi dans ce challenge et met progressivement en place les gammes pour y parvenir. Il faut pour cela impliquer le personnel repris avec le fonds, que ce soit en vente ou en production… autant de chantiers qui prennent du temps et de l’énergie, mais qui rendent sans doute ce métier riche et passionnant.

En janvier, les stars, ce sont elles : les galettes ! Chez les Bosson, elles se déclinent en de nombreuses saveurs au fil des semaines. Parmi elles, une création à la cerise.

En janvier, les stars, ce sont elles : les galettes ! Chez les Bosson, elles se déclinent en de nombreuses saveurs au fil des semaines. Parmi elles, une création à la cerise.

L’Essentiel grandit ainsi progressivement, et cette troisième implantation est réalisée plus de 3 ans après la seconde, ce qui dénote une réelle volonté de maintenir un développement maîtrisé et ancré sur des bases solides. De plus, en restant fidèle au 13è arrondissement où il a rencontré son premier succès, le couple Bosson continue à faire évoluer l’offre locale… et il serait bien difficile de s’en plaindre.

Devanture, L'Essentiel Olympiades

Infos pratiques

89 bis rue de Tolbiac – 75013 Paris (métro Olympiades, ligne 14)
ouvert du lundi au vendredi de 7h à 20h – ouverture exceptionnelle le samedi en janvier 2016.

Actualité

01
Jan

2016

2015, la rétrospective

1 commentaire

Les années passent, c’est inexorable. A chaque premier janvier, on incrémente le compteur et on essaie de formuler une longue liste de voeux, en espérant que cela rendra le monde meilleur. Bien sûr, il faut le souhaiter, mais aussi en devenir acteur pour pouvoir prétendre y parvenir.
En cette période troublée, certains ont tendance à parler de combat, de guerre, de souffrance… même si le ciel n’est pas toujours très bleu, je pense que nous devrions plutôt prendre les choses d’une autre façon et simplement nous souhaiter une année 2016 créative, ouverte, lumineuse, … et riche en partage, car c’est bien en apprenant, parfois ré-apprenant, à vivre ensemble en harmonie que l’on parviendra à bâtir une société durable et porteuse d’espoir. Aussi, il faudrait arrêter de chercher la paille dans l’oeil de nos voisins pour mieux appréhender la poutre qui nous bouche la vue.

Pour l’heure, jetons un dernier coup d’oeil sur 2015.
En plus d’avoir marché, couru, roulé, plusieurs milliers de kilomètres pour toujours revenir au même point, j’aurai été encore et toujours plus loin dans ma démarche de mieux comprendre et retranscrire la vie de cette filière vivante et mouvante que représente la boulangerie artisanale. Visites de salons, moulins, et bien sûr boulangeries… voilà pour l’ordinaire. Il aurait été idiot de ne pas l’agrémenter de quelques épices. Un CAP Boulanger, quelques polémiques parfois brûlantes, … le parcours que je trace n’est pas linéaire – et il n’a pas vocation à l’être. Depuis le début, je défends une vision portée sur le parcours et pas sur l’objectif. Si certains se voient boulangers, grands critiques, … à plus ou moins court terme, ce n’est pas mon cas.

Cette année comme les précédentes, j’ai du continuer à avancer avec une santé fragile, avec des doutes et de longs moments où le tunnel semble être d’une longueur infinie. Beaucoup me reprochent mon côté trop « engagé », comme s’il fallait être consensuel pour exister et être crédible. Je n’ai pas fait tout ce chemin pour trahir mes valeurs, et si j’ai acquis une seule conviction en 2015, c’est bien celle-ci.
Le changement est long, difficile, mais j’ai aussi envie que le painrisien soit porteur d’un message d’espoir. Il existe, de nombreux artisans le prouvent chaque jour, et je suis persuadé que nous arriverons à le faire grandir ensemble. C’est du moins mon engagement. Nous avons besoin d’espaces comme celui-ci, indépendants et curieux du monde. Demain je reprendrai mon bâton de pèlerin, je reprendrai la route. On a encore beaucoup de chemin à faire ensemble !
Bonne année 2016.

En route...