Actualité

27
Oct

2015

Ca bûche dans les Yvelines

Les fêtes de fin d’année approchent à grands pas. Nos artisans vont rapidement, ou l’on déjà fait, sortir leurs outils, partir en forêt, stocker du bois… bref, fabriquer des bûches. Ces desserts devront être le fin du fin, la fin de la faim, une façon de finir en apothéose ce repas de fête, ce moment partagé en famille ou entre amis. Pour les plus chanceux, la récolte aura été bonne, le bois sera de qualité et se consumera en un véritable feu de joie… Pour les autres, la partie sera un peu moins évidente à jouer, et il y a aura plus d’efforts à fournir pour allumer la flamme…

Maison de la Boulangerie, Le Chesnay (78)

Maison de la Boulangerie, Le Chesnay (78)

C’est un fait : nos boulangers-pâtissiers ne disposent que de peu de temps et d’énergie pour aller chercher de l’inspiration en dehors de leurs entreprises, car ils sont souvent pris par les contraintes du quotidien. Production, administratif, … ce n’est pas évident d’être bon sur tous les plans, et encore moins de se renouveler sans cesse comme on aimerait que ce soit le cas. Heureusement, certains de leurs partenaires cherchent des solutions à cet état de fait : en proposant des stages, des formations de plus ou moins courte durée, les meuniers et organismes de formation participent au renouvellement du champ créatif de nos artisans.

La bûche de Noël et le gâteau de la Saint-Valentin sont réalisés à partir du même moule.

La bûche de Noël et le gâteau de la Saint-Valentin sont réalisés à partir du même moule.

Ils ne sont pas les seuls. Cette année, le Syndicat Patronal de la boulangerie-pâtisserie des Yvelines, emmené par Olivier Gérard, a développé un beau projet. Il a été présenté à la presse le 15 octobre, et j’étais présent à l’événement. Sobrement nommé « Créations gourmandes », il propose aux artisans du 78 une belle gamme d’entremets festifs, développés en partenariat avec des pâtissiers locaux et Cacao Barry. Benjamin Hervet, Cyril Darras, Vincent Lefèvre, Aurélie Nicot, des noms que vous avez déjà pu lire ici pour certains et autant de talents mis à la disposition de la communauté : c’est un bel exemple de partage et d’esprit d’équipe que nous proposent ici ces professionnels… un peu comme un cadeau, avant Noël.

Pour chaque création, un atelier de dégustation était proposé autour du chocolat et des fruits. Ici, c'est la couverture Inaya et son procédé de double fermentation qui est présenté.

Pour chaque création, un atelier de dégustation était proposé autour du chocolat et des fruits. Ici, c’est la couverture Inaya et son procédé de double fermentation qui est présenté.

Une bûche, un entremets pour la Saint-Sylvestre et une création gourmande pour la Saint-Valentin, voilà les pâtisseries qui pourront être réalisées à partir du kit mis au point à partir des couvertures Cacao Barry et du moule associé. Chaque artisan pourra personnaliser les produits en apportant sa touche personnelle, en fonction de ses envies et de sa sensibilité. Ainsi, plutôt de d’apporter une solution clé-en-mains comme savent le faire certains industriels, la démarche est de stimuler le pâtissier en lui apportant un produit travaillé, des éléments de communication et un accompagnement dans la réalisation. Tous les artisans des Yvelines peuvent prendre part à l’opération, et même ceux de l’Essonne et du Val d’Oise car ils dépendent du même regroupement. Des vidéos et instructions leur permettront de produire les pâtisseries.

Les pâtisseries étaient proposées à la dégustation. Le résultat : des entremets légers et très travaillés, qui apportent un véritable "plus" qualitatif à l'offre festive de l'artisan, avec une création haut de gamme.

Les pâtisseries étaient proposées à la dégustation. Le résultat : des entremets légers et très travaillés, qui apportent un véritable « plus » qualitatif à l’offre festive de l’artisan, avec une création haut de gamme.

Un soin tout particulier a été porté lors de la mise au point des recettes pour aboutir à des gâteaux rationnels et pouvant être mis en oeuvre sans difficulté majeure au sein d’une entreprise de boulangerie-pâtisserie. L’expérience de Sébastien Cantrelle, Chef pâtissier Paris et Ile de France pour Cacao Barry, a été particulièrement bienvenue : son parcours professionnel riche et varié, que ce soit au sein d’entreprises artisanales ou en démonstration, a permis de mettre au point des recettes adaptées. De plus, cela correspond bien à la stratégie engagée par son employeur depuis déjà plusieurs années : la marque souffrait en effet d’un sérieux déficit d’image, notamment sur le plan qualitatif auquel il fallait remédier. En développant des partenariats avec les écoles ainsi que sa propre unité la Chocolate Academy (située à Meulan, dans les Yvelines… c’est presque local !), en participant à de nombreux concours ou en s’offrant les services de professionnels reconnus comme le MOF Philippe Bertrand, le couverturier n’a pas lésiné sur les moyens…

Mise en scène, Créations Gourmandes 78

… tout en travaillant également sur le produit, puisque les chocolats utilisés dans les « créations gourmandes » des Yvelines sont de conception récente et ont été dé-sucrés pour mieux correspondre aux goûts des consommateurs. Le résultat est plutôt probant, puisque les gâteaux réalisés sur ces bases sont à la fois légers et savoureux. Vanille-chocolat blanc-poire pour la bûche, chocolat au lait-passion pour le nouvel an, caramel-pomme & framboise à la Saint-Valentin… on retrouve un beau travail sur le goût et les textures, sans utilisation de gélatine.

Pour l'épiphanie, les fèves du 78 pourront garnir les galettes des artisans.

Pour l’épiphanie, les fèves du 78 pourront garnir les galettes des artisans.

Olivier Gérard ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et a déjà pensé à d’autres opérations, comme les fèves pour les galettes des rois. Autant d’initiatives concrètes à saluer, car elles placent réellement le syndicat au service de ses adhérents… comme quoi, c’est possible !

Plus d’informations : http://www.artisan-fr.com/creations-gourmandes/

Si les hommes ont inventé le langage, c’est sans doute pour communiquer et se comprendre. Dès lors, deux individus partageant la même langue devraient être en mesure d’échanger leurs idées et de créer du sens. La réalité est plus compliquée, plus contrastée. On finit parfois par aboutir à des situations où les mots ne veulent rien dire, où le discours tenu s’échoue lamentablement sur l’écueil de nos différences. Ainsi ce dénominateur commun que devraient être la parole et l’écrit deviennent autant de sources de malaises et d’incompréhensions. Le fossé se creuse, les pluies tombent, on finit par sortir les rames pour rejoindre les deux rives. Dès lors, quand bien même les hommes s’évertuent à continuer de parler, la langue commune paraît bien étrangère…

Univers Boulangerie 2015

J’avais passé mon tour pendant deux ans, mon expérience de 2012 aidant. Finalement, j’étais de retour à Univers Boulangerie ces 4 et 5 octobre. De retour, pas exactement, puisque le lieu a changé entre temps. Fini la grande sortie annuelle et la Cité des Congrès du Futuroscope, bonjour la Maison de la Chimie, à Paris. Le lieu est particulièrement bien choisi : organiser une réunion d’apprentis sorciers de la boulangerie dans un lieu portant ce nom, il fallait y penser.

Les interventions se sont enchainées, les idées se sont déchainées, le tout étant ponctué par les indispensables temps de repas et le très attendu spectacle de French cancan (que j’ai soigneusement évité, je dois dire, les échos que j’en ai eu le lendemain me confirmant que j’avais été bien inspiré ce soir-là !).

Soyons clairs : j’étais déjà perplexe en lisant le sujet choisi par la Confédération : la « Boulangerie connectée, un défi collectif ou déjà une réalité ? ». En sortant de cette grand-messe, j’avais changé d’état, passant au désespoir le plus complet, assorti d’une profonde consternation. J’ai passé plusieurs jours à me demander s’il valait bien la peine d’écrire quoi que ce soit sur ce gloubiboulga dont même Casimir aurait renié la paternité. Je me suis interrogé aussi sur l’intérêt d’écrire, tout simplement. Bref, vous repasserez pour la joie et l’allégresse, mais je ne suis pas du genre à faire l’impasse sur ce qui me dérange. Plutôt que d’abdiquer, mieux vaut continuer à se battre, à ramer, même si c’est souvent à contre-courant.

J’aurais du commencer par remercier tous les sponsors sans qui cet événement n’aurait pu avoir eu lieu. GDF Suez, la MAPA, la Banque Populaire, Medicis, l’Observatoire du Pain, l’AG2R, EKIP, Metro… avec pour résultante une belle sacoche garnie, avec la casquette qui va bien pour se tenir chaud pendant l’hiver. Il ne faudrait pas attraper un rhume de cerveau, même si je serais tenté de dire que c’est déjà trop tard pour certains…

Une organisation bien huilée pour un public encadré

Cela ne respirait pas vraiment la jeunesse dans la salle : on retrouve beaucoup de têtes grises, sans doute peu d’artisans encore en activité parmi eux, en bref il s’agirait de parler d’avenir à ceux qui ne s’en préoccupent plus vraiment ? Si le syndicat attendait en moyenne 400 personnes sur 2 jours, ce n’était vraiment pas pour leur donner réellement la parole ni même parler du fond des préoccupations du quotidien d’un artisan boulanger. Ne parlons pas de pain, des fondamentaux du métier… non, nous sommes dans les hautes sphères !

Le journaliste Thierry Guerrier était aux manettes pour animer les interventions et distiller quelques questions du public. Ces dernières devant être adressées par SMS, il était ainsi facile de les sélectionner précisément… et ainsi encadrer les « débats ». Pas question de prendre le risque de situations trop gênantes ou d’un dépassement horaire.

Des « Dossier chauds » et un argumentaire facile pour amener à « Regain »

Jean-Pierre Crouzet a naturellement lu ses discours et partagé avec l’assistance son profond engagement au côté des artisans. Personne d’autre n’aurait été mieux disposé pour traiter des « dossiers chauds » du syndicat.

Vous avez peut-être entendu parler du programme Regain, visant à aboutir à un taux d’adhésion à l’organisation professionnelle de 100%. Pour le présenter, la vidéo « Jérémy » a été diffusée. Vous pourrez la retrouver ici.
J’ai été frappé par la faiblesse de l’argumentaire déroulé ici pour prouver l’intérêt du syndicat : il se place en rempart d’« ennemis » cités tout azimut -banques, politiques, administrations, grands distributeurs, industriels…- et mène ainsi une guerre de communication plutôt que de se concentrer sur la construction de valeurs et d’intérêts communs. La musique, le ton choisi, tous les éléments y sont pour créer un discours anxiogène : la peur est un bon outil de manipulation…

Il n’aurait pas été question de s’arrêter en si bon chemin : toute la dream-team « Regain » est ensuite arrivée sur scène avec ses écharpes jaunes, comme autant de signes lumineux de sa volonté de faire « bouger les choses ». Naturellement, on comptait parmi eux un conseiller en communication – Philippe Sachetti – qui ne s’est pas privé pour assaisonner le tout d’un lexique vantant le caractère héroïque et inédit de la démarche : un « moment incroyable », une « aventure »…

Philippe Maupu – secrétaire général de la confédération – aurait pu apporter des éléments concrets d’action. Mis à part le travail sur le taux de sel, cela n’a pas été bien loin. Le sujet de la fermeture hebdomadaire a été évoqué, et je ne peux que me joindre au voeu exprimé de la conserver.

Bien sûr, je devrais mettre à leur crédit la grande aide apportée à des artisans en difficulté comme le couple Boileau lors de l’incendie de leur boulangerie, ou de Patrick Poncet, cerné par une procédure d’expropriation… mais tout cela n’est-il pas anecdotique ? Il y avait sans doute mieux à faire que de passer un peu de brosse à reluire.

Regain doit se mettre en place dans les mois à venir, avec notamment une phase d’« écoute totale », qui devrait permettre de mieux cerner les besoins des artisans et ainsi de mettre en place les outils pour y répondre.  Espérons simplement que le tout sera accompagné de plus de fond qu’il n’en a été présenté ici…

Les territoires, un enjeu majeur et stratégique pour la boulangerie

Philippe Laurent, Maire de Sceaux et Secrétaire Général de l’Association des Maires de France, était invité pour évoquer la place des boulangeries dans les villes et agglomérations. La tendance déjà bien engagée de désertification des villages en terme de commerces et services publics n’a pas échappé au secteur qui nous intéresse et il appartient aujourd’hui aux politiques de mener une démarche volontariste pour re-créer de la vie dans les territoires.

La situation est d’ailleurs assez amusante, dans le fond : les artisans attendent une aide d’un partenaire qu’ils n’hésitent pas à critiquer vivement. La liberté d’entreprendre devrait-elle être entravée pour protéger de petites structures ? C’est un sujet particulièrement délicat pour les élus, qui disposent de peu de moyens d’action, qu’ils soient réglementaires ou financiers. Le mouvement quasi-permanent dans les structures d’intercommunalité, de département et de régions n’aide pas, tout comme le désengagement de l’Etat.

J’ai pu le constater par moi-même en me déplaçant en France : les centre-ville sont délaissés par les artisans les plus talentueux, du fait de loyers prohibitifs et des difficultés de circulation. La culture du véhicule individuel a encore de beaux jours devant elle et est difficilement compatible avec les zones piétonnes souvent mises en place. Dès lors, il ne reste plus que quelques enseignes aux moyens conséquents, et les rues deviennent des showrooms de mode…

La concurrence exacerbée des graines chaines de boulangerie doit nous amener à mener une réflexion profonde sur le modèle que doivent adopter les artisans : faut-il s’installer dans des zones commerciales et « périphériques » et ainsi accepter la fin des villes commerçantes et artisanales que l’on pouvait connaître par le passé ? La question se pose.

Le « pari de la jeunesse » avec l’apprentissage

Ces deux jours n’auraient pas été complets sans l’indispensable intervention d’un membre du gouvernement. Le nom d’Emmanuel Macron trainait dans les couloirs, mais ce dernier était semble-t-il retenu par d’autres occupations. C’est ainsi Martine Pinville qui a enflammé l’auditoire pour débuter la session du lundi matin.

Il a été ainsi question de l’apprentissage et de la durée de sa période d’essai, Jean-Pierre Crouzet plaidant pour son allongement jusqu’à 6 mois. Les moyens donnés à cet outil de transmission du savoir-faire sont essentiels, tout comme la valorisation de cette filière trop souvent méprisée. L’enjeu est de donner envie, que ce soit par une attitude positive des artisans ou une image positive diffusée dans les structures éducatives. Cela passe également par l’amélioration des qualités d’accueil dans les CFA.

Voilà encore une bonne occasion de montrer le double discours dont savent faire preuve ces individus : pendant quelques minutes, les « bonnes relations » avec l’administration ont été valorisées, tout en demandant une intervention de l’Etat… qui me paraît difficilement compatible avec le libéralisme forcené prôné en parallèle. On ne va pas demander tous ces individus d’être cohérents, non plus, il ne faudrait pas trop élever notre niveau d’exigence ! mais le meilleur était à venir…

Quand les consultants entrent en scène

J’adore les paquets de lessive. Je dirais même que c’est ma plus grande passion. SI certains me croient passionné de pain, ils se trompent. En vérité, je préfère les agents blanchissants. Passons sur le choc de cette révélation fracassante, et intéressons nous à tous ces vendeurs de lessive qui parviennent à nous faire croire que leurs solutions lavent plus blanc que blanc.

En la matière, nous avons eu droit à l’exposé de deux professionnels, en la personne de Fanny Mével et Salah Eddine Benzakour.

Le marketing est un élément important pour développer la boulangerie artisanale, mais encore faut-il l’utiliser à bon escient. On peut dire qu’il entretient une belle histoire d’amour avec le secteur : les grands réseaux comme Banette, Baguépi, Festival ou Ronde des Pains l’utilisent depuis bien longtemps pour bâtir des stratégies globales, qui ne correspondent plus aux attentes des consommateurs. Au contraire, c’est l’identité de l’artisan qu’il faut construire et valoriser, avec toutes les spécificités qu’il peut développer et l’identité singulière qu’il porte.

Mettons au moins cela au crédit de Fanny Mével, qui semblait l’avoir compris. Pour le reste, l’analyse me semble partielle et inappropriée. En effet, les grandes études utilisées par cette experte dégagent plusieurs tendances : les clients veulent manger mieux, sans payer plus, tout en se faisant plaisir. Les actifs mangent plus vite, en dehors de leur domicile et se tournent vers les offres de snacking. La boulangerie serait ainsi le 2è lieu d’achat plébiscité par les consommateurs pour ce type d’achat.

Dès lors, il faudrait développer l’offre, « profiter des moments de consommation » avec des plats chauds, des cafés et thés, … et ainsi prendre un virage vers le métier de traiteur. Attention, notre brillante consultante nous rappelait tout de même l’importance de ne pas perdre de vue son ADN, non, il faut juste chercher à développer de nouveaux marchés. L’exposé s’est ensuite emballé : livraison, « drive », « click n’collect », bornes de commande, distributeurs automatiques de baguettes, mettre des écrans dans les boulangeries pour raconter le processus de fabrication du pain et développer le « marketing sensoriel », installer des tablettes en boutique pour prendre les commandes, proposer plus de produits emballés pour simplifier le parcours de vente, donner des conseils sur comment congeler le pain…

Où tout cela nous mène-t-il ? A mon sens, dans le mur, ou pas loin. En bâtissant un discours peu clair et presque incohérent, nos artisans ne parviendront plus à être identifiés comme référents et légitimes sur leur métier de base… faire du bon, parfois du très bon, pain. Revenons aux fondamentaux avant de chercher à raconter des histoires.

Je peux entendre que le numérique est devenu une part intégrante de nos vies et qu’il faut y être présent, mais gardons les pieds sur terre : nous ne ferons pas de nos boulangers des professionnels du marketing en ligne. Quand bien même on tenterait de le faire, ce serait un bien mauvais combat : chacun son métier. Salah Eddine Benzakour a ainsi déployé une présentation où les noms de solutions technologiques se succédaient : acheter des publicités Google, envoyer des mails via Mailchimp, … sans oublier de conseiller la mise en place de programmes de fidélité pour recueillir un maximum de coordonnées et ainsi construire un fichier de contacts. Quand on voit les difficultés que peuvent avoir les artisans à ouvrir une page Facebook et à la faire vivre en offrant un contenu relativement qualitatif (on découvre tellement souvent des photographies à dormir dehors), j’ai du mal à croire que tout cela ait un sens. Ce n’est pas impossible, mais nos boulangers doivent être accompagnés par des acteurs compétents dans ce domaine, et pas se lancer seuls à l’aventure… au risque d’un résultat contre-productif.

Conception en 3D, fonds de dotation, café philo…

Le reste des interventions s’est concentré autour de présentations et de débats encore plus éloignés du quotidien d’un artisan boulanger. Si l’outil Mavimplant, présenté par l’INRS, était sans doute le sujet le plus intéressant, le fonds de dotation EKIP et son caractère quasi-humanitaire semblait un peu hors sujet ici… si ce n’est pour faire plaisir aux partenaires.

Je dois avouer que j’ai séché les hautes réflexions de l’après-midi, pourtant animées par des orateurs visiblement reconnus (Cynthia Fleury, Jean-Paul Delevoye)… un peu lassé par les longues heures déjà passées à écouter ces grands discours.

Au final, quel intérêt à cette manifestation ?

Sous couvert de réfléchir à de grands thèmes d’avenir, ce genre de grand-messe sert avant tout… à entretenir son réseau. Il s’agit de voir, de se faire voir – et j’aurais bien ajouté d’aller se faire voir, mais on me va me taxer d’être malpoli en plus d’être désagréable.

Il n’y avait qu’à voir le bal continu des meuniers, vendeurs de solutions en tout genre et autres responsables d’entités variées. Ce doit être pour ça que le sens de l’ensemble m’échappe foncièrement, puisque ce n’est pas franchement ma discipline de prédilection, bien au contraire.

Bref, je crois que je passerai mon tour à nouveau pour les prochaines éditions. Il faut savoir se ménager, parfois.

Enfant, on rêve tous de grandir pour sortir de ces rythmes scolaires imposés par nos institutions : vacances, rentrée, tout est planifié… Le temps passe et on finit forcément par arriver dans le monde des « adultes », pour se rendre compte qu’en définitive les choses ne sont pas bien différentes. Le semblant de liberté que l’on pensait gagner n’était qu’en fait un leurre, car les contraintes qui se présentent à nous sont tout aussi nombreuses et rigides. Entre le poids des employeurs, des saisons, des envies de la clientèle, … on finit par se rendre compte que notre vie est réglée bien en dehors de notre champ d’action. Plutôt que de tenter de se défaire complètement de cette routine et de se placer en marge comme certains le font, écrivons simplement une histoire heureuse où ces impératifs représentent autant d’opportunités de faire… différemment.

Nos artisans respectent tout autant les rythmes observés par les consommateurs… à cela près qu’ils doivent souvent profiter des congés pour engager des travaux ou leurs mutations de fonds. Dès lors, difficile de dire qu’il s’agit pour eux de vacances. Tout naturellement, c’est à la rentrée que l’on a le plaisir – ou le déplaisir, c’est selon – de découvrir les changements.

Carole et Emmanuel Morange ont coupé les Chants de Blés

Je vous en avais parlé plus tôt dans l’été et la boutique a ré-ouvert hier. La seconde Maison Morange, au 113 rue Mouffetard, a subi d’importantes transformations. Adieu bois, bienvenue gris brillant. Le pain ? Disposé dans un espace contraint, il est assez peu visible. Ce sont surtout les pâtisseries et viennoiseries qui arrêtent les passants, ces dernières étant disposées dans des vitrines avancées sur la rue. Si les produits sont bien réalisés, on peut se demander si ce style très moderne correspond vraiment à une rue plutôt pittoresque. L’élément le plus surprenant est sans doute ce large tableau, disposé sur le mur situé dos à la clientèle. C’est à se demander s’il n’a pas été installé seulement pour casser le côté froid et impersonnel du lieu…

Quand Eric Kayser rencontre Diderot

Eric Kayser Diderot

Face à la gare de Lyon, la boulangerie Kayser du 13 boulevard Diderot a ouvert le 1er septembre. Les changements réalisés sont assez limités, la boutique étant récente, même si l’identité d’artisan boulanger a été, un peu paradoxalement d’ailleurs, réaffirmée par l’entreprise au travers d’une grille à pains élargie. On y retrouve la gamme habituelle de la maison, avec la baguette Monge, qui tend à se faire rare dans les nouvelles ouvertures de l’enseigne. Nul doute que cet emplacement et sa vaste terrasse fermée seront mis à profit par le nouvel arrivant, même si le couple Quévreux aurait été bien en peine de se plaindre du fonctionnement de l’affaire jusqu’alors.

En parallèle, le 14 rue Monge a terminé sa mue. Malgré l’espace contraint, les équipes de CMC Agencement sont parvenues à redonner de la lumière à cette boutique où le temps avait considérablement terni l’ensemble. Le pain est plutôt bien mis en valeur, tandis que les propositions salées bénéficient d’un espace dédié au fond de la boutique.

Maison Landemaine signe un tiercé estival

Et un, et deux, … je m’égare. Cette année, les équipes de Rodolphe Landemaine et de ses partenaires en agencement n’auront pas chômé. Que ce soit par Pep’s Création pour la rue de la Roquette ou par CMC à Asnières, les travaux réalisés affirment toujours plus l’identité du boulanger-entrepreneur. Il a d’ailleurs dévoilé son nouveau logo, plus moderne, qui orne dès à présent sa boutique fraichement rénovée du 11è arrondissement.
Non content de mener à bien ces deux chantiers, il s’est rapproché de la place de la Bastille pour s’installer dans la boulangerie classée du 28 boulevard Beaumarchais. Le travail à mener ici est important, tant la boutique avait été délaissée.

Maison Landemaine Roquette

Maison Landemaine Roquette

La prochaine étape aura lieu lundi avec l’ouverture à côté de la gare d’Asnières-sur-Seine, au 2 rue de la Station. Les grands volumes de cette boulangerie traduisent bien l’ambition de l’entreprise qui multiplie les ouvertures… le principal risque étant, à mon sens, l’indigestion. Un trop gros appétit mène parfois à vouloir trop manger. Le phénomène est alors similaire avec celui produit par le corps humain…

Carlos Marques imprime sa trace dans le 17è arrondissement

Les travaux n’auront pas tardé au 6 rue de Lévis. Peu de temps après la reprise, Carlos Marques a souhaité donner un nouveau visage à sa boulangerie, à raison tant la boutique faisait triste mine. Cela n’aura pas pris beaucoup de temps, mais le changement est net : l’ensemble est plus moderne, dans un style sobre. Le pain est mis en avant dès l’entrée avec une dégustation quasi-permanente. On peut d’ailleurs saluer les progrès réalisés sur ce point en quelques semaines, tant le niveau était faible. Même si l’artisan exprime une vraie identité de pâtissier, gageons qu’il parvienne à proposer des gammes cohérentes et que sa nouvelle affaire rencontre le même succès que celle d’Asnières, où les gourmands se pressent nombreux pour découvrir ses créations.

Laurent Venuat prend son envol à deux pas de République

Laurent Venuat, Paris 10è

Dans un métier aussi marqué par les hommes et leurs histoires, il me serait bien difficile de rester insensible aux rencontres que je peux faire et aux parcours que je découvre. Laurent Venuat, issu d’une formation initiale dans le secteur du commerce, a quitté une carrière dans la finance pour tomber dans le pétrin. Tenace et convaincu, il a pu acquérir les compétences nécessaires à son installation à Ferrandi puis au sein de Maison Landemaine. Son projet s’est concrétisé cette semaine avec la reprise d’une affaire au 17 rue du Château d’Eau, dans le 10è arrondissement. Cette petite boulangerie de quartier avait bien besoin de recevoir un nouveau souffle, et c’est précisément ce que va tenter d’apporter le « jeune » boulanger. Bien sûr, il y a du travail, que ce soit dans l’aménagement de l’espace de vente ou dans l’aboutissement de la gamme de produits, mais on ne peut que saluer l’engagement et la volonté mis au service de ce projet.

Arnaud Cimmati prend des cours à Assas

Parfois je suis partagé entre l’étonnement et la consternation. L’entrepreneur Arnaud Cimmati a récemment réouvert sa boulangerie du 31 rue d’Assas. Si la devanture et la boutique ont été rafraichis, quelques éléments demeurent assez gênants… comme la vitrine traiteur et pâtisserie ! De même, les produits n’ont pas ou peu évolué et demeurent toujours aussi approximatifs. La logique adoptée ici est claire : il s’agit de faire du chiffre et de capitaliser plus que de se soucier des fondamentaux du métier. Quelle tristesse.

… et la suite ?!

Ne nous arrêtons pas là, voyons plus loin : des travaux sont encore en cours.

  • La famille Huré a repris la boulangerie du 10 place d’Italie, placée en gérance jusqu’alors. Mosaïc Agencement est en train de transformer la boutique pour intégrer le coiffeur attenant, racheté il y a plusieurs années, et proposer ainsi un large espace de vente ;
  • Rue de Lévis, l’ex-Nature de Pains puis « Boulanger de Lévis » est encore en pleine transformation pour accueillir un entrepreneur-boulanger déjà présent à Neuilly et dans le 15è arrondissement ;
  • Thierry Racoillet doit achever les travaux engagés mi-août au sein de sa boulangerie de la rue de Douai la semaine prochaine ;
  • Cyril Lignac ouvrira prochainement deux nouvelles boulangeries-pâtisseries, au 55 boulevard Pasteur et au 133 rue de Sèvres ;
  • De nombreux pâtissiers vont éclore dans les jours et semaines à venir (Bulliz rue d’Hauteville, Michalak rue de la Verrerie, un concept autour des éclairs rue des Acacias, une deuxième adresse pour She’s Cake, …).

Je suis souvent perplexe quand je vois des entrepreneurs se positionner sur des sujets sensibles, notamment dans le domaine de la santé. Leur démarche répond-elle à une véritable conviction, ou bien ne font-ils que profiter d’une tendance pour faire du chiffre ? On ne peut le mesurer et l’apprécier que sur la durée, par la qualité de leurs propositions et leur engagement quotidien. Il y a parfois de beaux pétards mouillés, mais aussi -et heureusement- de belles découvertes.

En découvrant la marque Eugène et son projet de développer une boulangerie-pâtisserie adaptée aux diabétiques, mon enthousiasme était modéré. Cela était lié aux allégations particulièrement fortes : moins de matières grasses (les matières animales étant remplacées en partie par des huiles végétales, comme l’huile de pépins de raisins), moins de sucre (substitué par du sirop d’agave ou du fructose)… sachant que ces deux éléments comptent parmi les principaux vecteurs de goût en pâtisserie, il me semblait difficile de parvenir à proposer des créations intéressantes. La communication associée ne manquait pas de vigueur, c’était d’ailleurs un peu trop à mon goût. Qu’importe, j’ai tout de même été déguster quelques produits, qui ne m’ont pas convaincu à l’époque. J’ai fait part de mes remarques à Christophe Touchet et Luc Baudin, les deux créations de l’enseigne, et j’ai laissé le temps passer.

Eugène, 28 rue des Lombards, Paris 4è

Eugène, 28 rue des Lombards, Paris 4è

Revenons d’ailleurs sur le parcours de ces deux hommes : le premier a bâti sa réussite sur des activités immobilières puis dans le domaine des produits sans gluten outre-Atlantique, tandis que le second a développé ses compétences au sein de l’Ecole Nationale Supérieure de Pâtisserie. Le duo s’y est d’ailleurs rencontré, Christophe Touchet l’ayant rejointe suite à la découverte de son diabète. Pour ce grand gourmand, difficile de se passer de douceurs, il fallait donc trouver comment proposer des produits adaptés à cette pathologie sans perdre le plaisir.

Au delà du travail sur le sucre et le gras, il aura fallu intégrer des fibres (avec notamment des farines de Meule) pour ralentir le passage du sucre dans le sang et améliorer l’effet de satiété, intégrer des épices pour relever les saveurs… bref, une réflexion poussée, visant notamment à réduire l’index glycémique des produits.
Comme je l’ai indiqué précédemment, la mise en place aura pris un peu de temps, mais le résultat s’avère à présent tout à fait probant.
Côté pains, toute la gamme est élaborée à base de levain naturel, avec des farines livrées par la Minoterie Hoche. Une baguette de Tradition (sur farine T65) a récemment fait son apparition dans la gamme pour répondre à une demande des consommateurs, la « baguette Eugène » (sur farine de Meule T80) étant assez typée et segmentante. Réalisés en non-façonné, les produits ne manquent pas de saveurs et d’identité. Dans le 17è arrondissement, le jeune Florent Lehmann (passé chez les Compagnons du Devoir et des entreprises comme Eric Kayser) participe activement au projet.

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La pâtisserie n’est pas en reste avec des créations au visuel abouti et souvent inventives : associations de saveurs originales, finitions nettes, on serait bien en peine de les distinguer de douceurs plus conventionnelles. Bien sûr, certaines textures sont plus « légères », le sucre est peu marqué, c’est parfois déroutant. Il faut voir cela comme autre chose, une expérience différente, sans avoir d’à-priori. La pâte à choux, réalisée à partir de farine de lentilles, se révèle particulièrement convaincante en terme de texture et de goût.
La viennoiserie est un terrain où la réduction des matières grasses peut paraître être un combat perdu d’avance. Pourtant, les croissants, pains au chocolat et autres roulés proposés ici demeurent relativement gourmands. Je préfère bien sûr un feuilletage traditionnel et son côté riche qui enveloppe les papilles, mais le croustillant est bien là. La dégustation reste agréable.

Pains & viennoiseries, Eugène, rue des Lombards, Paris 4è

Le chocolat est un domaine où Luc Baudin excelle tout particulièrement. Il a d’ailleurs participé aux World Chocolate Masters en janvier 2015, où il a présenté de superbes pièces tout comme il l’a fait en boutique à l’occasion de Pâques. Ses tablettes et bonbons n’ont rien à envier aux produits traditionnels : de la tablette chocolat blanc-thé vert-baies de goji à la demi sphère sauge-combawa, les créations sont élégantes et savoureuses.

Aujourd’hui, Eugène ouvre sa seconde implantation en plein coeur de Paris. C’est à présent au 28 rue des Lombards, dans le 4è arrondissement, que l’on pourra découvrir cet univers particulier. Le lieu est beaucoup plus passant et accessible que ne l’est la boutique « historique » du 17è arrondissement, ce qui devrait contribuer à donner à la marque la visibilité dont elle a besoin pour continuer à se développer.
Au laboratoire, la pâtisserie est entièrement réalisée sur place, ce qui permet de libérer l’espace rue Guillaume Tell pour développer l’activité chocolaterie. Léa, la compagne de Luc Baudin, gère la production au quotidien… une histoire de coeur et de confiance, comme celle entretenue par Christophe Touchet avec ses équipes, qui a à coeur de mettre à disposition ses moyens financiers pour l’épanouissement de ces jeunes talents.

Les défis auxquels doit faire face Eugène sont nombreux : difficile en effet de se cantonner à une clientèle exclusivement diabétique, l’entreprise ne serait pas viable économiquement. Dès lors, il faut aussi s’adresser à un public « au régime » ou faisant attention à ses apports en sucre et matières grasses. Le positionnement me paraît un peu glissant, mais il faut croire que l’on doit vivre avec son époque…
L’entreprise doit parvenir à s’imposer sur son créneau, et cela passe notamment par la communication et la mise en avant des produits. Quand on connaît la jungle que représente l’espace médiatique, difficile de s’affirmer. Il faut également parvenir à former le personnel de vente pour assurer un conseil pertinent au quotidien.
Le travail ne manque pas… mais en présence d’entrepreneurs courageux et convaincus, on ne peut que saluer l’initiative et l’accompagner.

Infos pratiques

28 rue des Lombards – 75004 Paris (métro Châtelet, Métro lignes 1, 4, 7, 14 & RER A, B, D)
ouvert du mardi au samedi de 7h30 à 20h, le dimanche de 9h à 13h30

Dans la vie, la distribution des cartes n’est pas toujours équitable. Certains sont plus avantagés que d’autres et bénéficient d’un jeu plus avantageux dès le départ. Il appartient ensuite à chacun de savoir garder ses atouts, d’avoir à coeur de les entretenir pour les faire durer. Quelques mauvais choix peuvent rapidement changer la donne… difficile de reprendre la main ensuite. D’un côté, c’est sans doute mieux ainsi : nous sommes maîtres de notre destin, en dehors de toute forme de déterminisme.

Un emplacement original avec un double angle.

Un emplacement original avec un double angle.

L’exemple des Grands Moulins de Paris pourrait bien servir de cas d’école : cet acteur majeur du secteur de la meunerie a perdu du terrain ces dernières années, particulièrement dans la région francilienne. Les raisons ? Un certain manque de dynamisme, des choix parfois discutables, la difficulté de sortir d’une image écornée… et la présence d’acteurs de plus en plus vivaces en concurrence frontale. Au fil des années, leurs meilleures cartes ont disparu. Adieu As, Roi, Reine, Valet… le risque étant de ne plus avoir en main que le pouilleux et de le devenir à son tour.

Difficile de passer à côté des stores orange vif.

Difficile de passer à côté des stores orange vif.

Nous n’en sommes pas là et l’entreprise possède encore de belles ressources pour réagir. Aujourd’hui, l’actualité nous amène au 71 rue d’Alésia, dans le 14è arrondissement. C’est ici que le pilote du nouveau concept Campaillette a été installé. L’artisan boulanger Laurent Roperh a fait le choix de déployer la nouvelle identité en lieu et place de la marque Ronde des Pains qu’il avait adopté précédemment. Le changement est intéressant à noter : les Grands Moulins de Paris semblent vouloir se recentrer autour de l’identité associée à leurs produits et abandonner une enseigne dont la crédibilité a été nettement entachée.

On mettra cette baguette sur le compte d'une reprise difficile.

On mettra cette baguette sur le compte d’une reprise difficile.

Exit aussi le marron, place à un orange vif, beaucoup plus dynamique. L’identité visuelle est simple, il n’y a visiblement pas une quelconque volonté de développer un marketing massif et agressif. Au contraire, le message est plus souriant et orienté sur l’humain : de la sacherie avec son trait d’humour au portrait de l’artisan présenté au mur, valorisant le travail manuel, on peut constater un net changement dans le discours. On ne va pas s’en plaindre.

Plus que Campaillette, c'est l'humain et son engagement qui sont mis en avant ici. Le changement est important pour une entreprise comme les GMP qui a longtemps tout misé sur la force de sa marque.

Plus que Campaillette, c’est l’humain et son engagement qui sont mis en avant ici. Le changement est important pour une entreprise comme les GMP qui a longtemps tout misé sur la force de sa marque.

L’aménagement intérieur de la boutique se veut plutôt moderne et innovant : avec des présentoirs proches de la clientèle dans un esprit « marché », les produits sont bien mis en valeur et l’ambiance est plutôt chaleureuse : les matériaux s’y prêtent bien, avec une association élégante de pierre et de bois. Remettre l’humain et le produit au centre de l’espace de vente, voilà deux axes qui ont du sens. Pep’s Création a été sélectionné pour mettre au point ce concept, suite à une consultation lancée auprès des nombreux acteurs que compte le secteur de l’agencement. L’avenir nous dira si ce choix était judicieux, il marque dans tous les cas une nette rupture avec les codes développés jusqu’alors.

Des présentoirs très "aériens" dans un esprit marché.

Des présentoirs très « aériens » dans un esprit marché.

Bien sûr, il a la boutique… et ce que les artisans en font. On pourra créer tous les emballages du monde, s’il n’y a rien à mettre dedans, cela ne change pas grand chose. C’est sur ce point que les GMP devraient avoir à coeur de travailler : redéployer du savoir-faire au sein de leur clientèle, pour mettre en place des gammes de qualité, pas seulement portées par quelques pré-mixes. Au vu des moyens considérables dont l’entreprise dispose, elle pourrait tout à fait s’engager dans cette démarche et créer une vraie dynamique. Reste à savoir si cela fait partie de leurs projets…

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Infos pratiques

71 rue d’Alésia – 75014 Paris (métro Alésia)

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Il y a des moments où l’on aimerait bien être ailleurs, voir un peu si l’herbe est aussi verte qu’on le dit. J’ai beau être en vacances toute l’année comme j’aime si bien le dire (et même si c’est inexact), je suis aussi pris par ces envies d’autre part. Seulement voilà, la vie est ainsi faite, on regarde parfois les choses bouger autour de soi pour se contenter du voyage immobile.

Cette année, en août, le voyage dans les rues de Paris vaut vraiment le détour. En effet, la réglementation qui imposait aux boulangers deux groupes pour leurs congés annuels a été supprimée dans le cadre de la réforme du « choc de simplification » voulue par notre gouvernement. Si l’idée paraît plutôt séduisante sur le papier car elle répond à un réel besoin de dépoussiérage des règles qui régissent le fonctionnement de nos institutions, elle se heurte dans les faits à un facteur humain : la profession a bien souvent du mal à s’accorder, et cela n’a pas fait exception en ce mois d’août.

La lettre adressée par Dominique Anract aux boulangers à propos des congés annuels

La lettre adressée par Dominique Anract aux boulangers à propos des congés annuels

Dominique Anract avait envoyé une lettre en mars 2015 afin de sensibiliser les artisans à l’importance de faire en sorte que toutes les boulangeries ne soient pas fermées en même temps… mais il faut croire que c’était peine perdue. Depuis le début du mois, il est devenu très difficile de trouver du pain frais et artisanal dans certaines zones de la capitale. Au point que des médias anglophones se sont emparés du sujet. Voilà qui devrait contribuer à redorer notre image auprès des touristes… ou pas.

Bien sûr, le système de groupes et son caractère très fermé avait fait son temps, mais il avait au moins deux intérêts : il assurait une certaine répartition des fermetures entre les mois de juillet et d’août, et permettait de mettre en place une liste indicative des adresses ouvertes, diffusée par la Mairie de Paris. Comme la communication des congés n’est plus obligatoire, plus personne ne serait en mesure de reproduire facilement un tel dispositif. Même si les boulangers cohabitent dans des quartiers, vivent un quotidien similaire, s’inscrivent dans des communautés… ils n’ont visiblement pas pris goût à l’échange entre eux.

Pour ceux qui restent, l’exercice est difficile : les quantités à produire sont très incertaines, et leur marchandise est parfois prise d’assaut sans qu’ils aient pu prévoir quoi que ce soit. De plus, il n’est pas toujours évident de disposer de tout son personnel à cette période. En définitive, ce sont les « gros faiseurs » et l’offre industrielle qui tirent le mieux leur épingle du jeu : ils parviennent en effet à répondre à une demande toujours présente. Même si une partie des parisiens a quitté les pavés pour la plage, d’autres restent et sont rejoints par des vacanciers.

Si plusieurs boulangeries recommandables rouvriront la semaine du 17 août, il faut bien trouver de quoi se mettre sous la dent d’ici là. Quelques recommandations :

  • Dominique Saibron (Paris 14è) reste ouvert comme à son habitude ;
  • La plupart des boulangeries Maison Landemaine sont ouvertes, mis à part celle de Roquette actuellement en travaux.
  • Benoit Maeder (Paris 15è) reste ouvert ;
  • Les deux boulangeries Ernest & Valentin (Paris 3è et 12è) rouvrent lundi 10 août ;
  • Les boutiques La Parisienne (Paris 5è, 6è, 14è et 18è) restent toutes ouvertes ;
  • L’Essentiel (Paris 13è) reste ouvert ;
  • Sébastien Mauvieux et sa boulangerie « Pain Pain » en haut de la rue des Martyrs ne fermeront que fin août ;

C’est toujours amusant de donner tort à une expression populaire, de montrer combien la pensée commune peut parfois être dépassée et que son caractère si pratique et facile n’apporte pas grand chose en définitive. On peut ainsi entendre dire « rien de nouveau sous le soleil », comme si le beau temps et les températures élevées pouvaient endormir nos envies de changement et d’entreprise. Fort heureusement, c’est loin d’être le cas.

Chaque été, la tradition se répète : les sociétés d’agencement sont sur le qui-vive afin de donner un nouveau souffle aux boutiques en un minimum de temps, avec très peu de possibilités de dépassement du délai imparti : il faut bien reprendre l’activité pour ne pas risquer de perdre du chiffre d’affaires. C’est aussi l’occasion pour certains de passer la main, ce qui implique parfois quelques surprises pour la clientèle à la rentrée. Espérons qu’elles soient heureuses.

Maison Landemaine passe les frontières de la capitale

Si on connaissait surtout Rodolphe Landemaine pour son développement à Paris intra-muros et ses percées sur le territoire japonais, il semblerait qu’il faille à présent compter sur lui sur des terrains plus vastes. Les travaux ont commencé hier à côté de la gare d’Asnières-sur-Seine, et les équipes de CMC Agencement n’ont pas ménagé leurs efforts pour faire table rase d’une affaire qui avait laissé le temps passer sans savoir se réinventer… alors que son emplacement passant aurait pu être mis à profit. La concurrence qualitative n’est pas très développée à proximité, et ce sera au groupe Holder que les équipes du boulanger-entrepreneur auront à faire face, puisque l’on trouve un Paul à proximité immédiate.
J’ai hâte de voir le résultat : la surface est importante et la rencontre de cet agenceur avec l’identité de l’artisan peut être intéressante. Rendez-vous en septembre !

Le couple Morange fait bouger la rue Mouffetard

En bas de la rue Mouffetard, au 123, Carole et Emmanuel Morange représentent l’archétype du couple d’artisans talentueux et discrets. Au fil des années, ils ont su fidéliser une clientèle toujours plus nombreuse en proposant des produits de qualité et en développant un esprit « village », propre au commerce de proximité que représente une boulangerie.
Ils ont acquis l’an passé la boulangerie la plus proche, située au 113 rue Mouffetard. Ce choix peut paraître surprenant car le boulanger finit par se faire concurrence à lui-même. Pour tenter de limiter cet effet, il a développé une gamme de pains entièrement biologique dans la nouvelle boutique. Cet été, c’est au tour des murs et de la façade de revêtir de nouvelles couleurs. Le chantier a été confié à Mosaïc Agencement.
Le pari réalisé ici me semble risqué : ce boulanger, même si ses qualités professionnelles sont indéniables, parviendra-t-il à faire progresser cette affaire à la hauteur des investissements réalisés ? A suivre.

Chantier Morange rue Mouffetard

Arnaud Cimmati est sur les bancs d’Assas

L’entrepreneur Arnaud Cimmati s’est mis à la boulangerie en reprenant l’affaire du 31 rue d’Assas. Cette dernière avait besoin d’un coup de jeune, et c’est précisément ce qu’elle est en train de recevoir. Le résultat sera à observer car il s’agira de l’expression de la vision d’un homme plus porté sur la vision entrepreneuriale que sur le produit.
A noter qu’en plus d’être sur les bancs d’Assas, il est en train d’acquérir une seconde boulangerie, au 28 rue Geoffrey Saint Hilaire, dans le 5è arrondissement. Voilà donc un nom sur lequel il faudra compter à l’avenir…

La petite boulangerie d'Arnaud Cimmati rue d'Assas, en pleins travaux.

La petite boulangerie d’Arnaud Cimmati rue d’Assas, en pleins travaux.

La Maison Kayser continue à investir (à) Paris

Pour des acteurs déjà bien implantés comme la Maison Kayser, il y a à présent deux axes à tenir pour continuer leur développement : améliorer la performance des unités existantes et ouvrir de nouveaux points de vente… les deux éléments étant au moins aussi importants, car les boutiques vieillissent inexorablement, d’autant plus si elles accueillent une forte fréquentation.
Cet été, c’est au tour du 14 rue Monge de se voir remodelé. L’espace de vente était assez dépassé, et pour cause : il s’agit de la seconde boutique « historique » de l’enseigne. CMC Agencement est à la manoeuvre pour lui redonner un nouveau souffle.

Le 14 rue Monge en chantier

Le 14 rue Monge en chantier

A la rentrée, ce sera du côté de la Gare de Lyon qu’il faudra regarder, puisque le couple Quévreux a cédé son affaire du 13 boulevard Diderot au fameux boulanger globe-trotter. La fermeture estivale, qui ne devrait plus tarder, sera l’occasion de réaliser quelques travaux.

La future boulangerie Kayser du boulevard Diderot

La future boulangerie Kayser du boulevard Diderot

Rue de Charenton, on va être très… honoré(s)

Honoré Paris 12èLa pâtisserie Honoré (237 rue de Charenton, Paris 12è) a été cédée au début du mois de juillet. Les travaux ont bien avancé dans la boutique, qui devrait réouvrir mardi 4 août. La principale nouveauté, au delà de l’arrivée du couple Oursel (que l’on connaissait précédemment à Clichy, au sein d’une affaire revendue à Arnaud Sevin), sera le développement de l’offre boulangère : les stores le laissent clairement entendre. Même si ce choix peut se comprendre par la difficulté que connaissent les pâtissiers « purs » à faire vivre leur entreprise, la forte intensité concurrentielle déjà présente dans ce secteur risque de compliquer la venue d’un nouvel acteur.

 

Manon revisite la Bretagne

L’ancienne « Fougasse » du 25 rue de Bretagne arborait depuis déjà plusieurs années le nom de « Chez Manon ». La boutique n’était pas particulièrement réussie et se révélait aussi sombre que peu pratique pour la circulation des clients. Guy Crouin et ses équipes ont engagé des travaux depuis plusieurs mois afin de remédier à ce fait. La fermeture a été prolongée en raison de modifications à mener au sein du laboratoire, agrandi (notamment par la découverte de caves !) et modernisé.
La réouverture aura lieu ce vendredi 31 juillet au matin.

Une devanture sobre et élégante, voilà qui devrait faire mouche dans ce quartier assez bourgeois.

Une devanture sobre et élégante, voilà qui devrait faire mouche dans ce quartier assez bourgeois.

Du pain pour les Lombards

A la quasi-intersection de la rue des Lombards et du boulevard de Sébastopol, la boulangerie a été tenue pendant un temps par la famille Hakkam… avant d’être délaissée et fermée une longue période. Le nouvel occupant avait bâti un intérieur aux couleurs criardes, faisant preuve d’un goût douteux. Cela n’était pas parvenu à attirer l’attention de la clientèle, et la boutique est actuellement en travaux. Espérons que le résultat soit plus élégant.

Une devanture sobre et élégante, voilà qui devrait faire mouche dans ce quartier assez bourgeois.

Une devanture sobre et élégante, voilà qui devrait faire mouche dans ce quartier assez bourgeois.

Rue du Pas de la Mule, les Mulot s’en sont allés… par un trou de souris

Tout près de la place des Vosges (6 rue du Pas de la Mule), la boutique de Marie-Claude Mulot, exploitée sous le nom de son ex-mari Gérard, était sur le déclin depuis déjà bien longtemps. La situation a pris fin avec la cession du fonds de commerce au couple Gauthier, que l’on connaissait précédemment boulevard Saint-Marcel, dans le 13è arrondissement. Les travaux sont terminés depuis quelques semaines, pour un résultat… douteux. En pénétrant dans la boutique, on se demande où l’on est : l’espace de vente est occupé par des présentoirs de libre-service où l’on trouve un peu de tout… et même des sushis. Boulangerie ou épicerie ? Si le pain était de qualité, la question se poserait moins. Malheureusement, c’est loin d’être le cas. La baguette de Tradition (une Campaillette Grand Siècle) est aussi sèche qu’insipide. On passera sur le reste, et notamment sur la viennoiserie massacrée.

Du mouvement rue de Lévis

Dans le 17è arrondissement, la rue de Lévis brille autant par son nombre important de boulangeries par leur réputation médiocre. L’offre est en train de se renouveler avec des mutations de fonds. Au 6, l’ancienne boutique du Moulin de la Vierge a été reprise par Carlos Marques, déjà installé à Asnières-sur-Seine. Même si ce dernier exprime mieux son art en pâtisserie, il devrait sans nul doute faire mieux que ses prédécesseurs.

Marques rue de Lévis L’ancienne affaire Maison Privat (au 21) est en travaux depuis plusieurs semaines, ce qui laisse entendre une réouverture prochaine. Le nom du repreneur reste encore mystérieux.
Les mouvements dans la zone devraient se poursuivre dans les mois à venir.

Bientôt du pain de qualité pour les Olympiades

Le quartier des Olympiades n’est pas riche en boulangeries recommandables. La donne pourrait bien changer avec l’arrivée à l’automne d’Anthony Bosson et ses équipes, qui s’installeront au 89B rue de Tolbiac, en lieu et place d’une boulangerie Banette.

Si vous avez connaissance d’autres mouvements, n’hésitez pas à me le faire savoir !

Je regrette souvent le manque de discernement dont les artisans boulangers peuvent faire preuve quand il s’agit de sélectionner les matières premières destinées à la fabrication de leurs pâtisseries, sandwiches ou autres préparations faisant appel à d’autres ingrédients que de la farine ou du beurre. Entre chocolat bas de gamme, jambon premier prix, compote réalisée à partir de purée de pomme concentrée, … il n’y a pas beaucoup à chercher pour savoir pourquoi les produits que l’on consomme ont un goût bien étrange, désagréable voire proche de celui diffusé par l’industrie. Les fournisseurs très implantés dans le secteur (BackEurop, Transgourmet, Délice & Création…) ne font rien pour arranger les choses, et pour cause : ils s’assurent ainsi des marges confortables.

Les raisons à une telle situation sont multiples, mais cela tient surtout à un manque de culture et de volonté : plutôt que de chercher des producteurs, on va à la facilité.
Heureusement, quelques acteurs changent la donne et entreprennent un véritable travail de sourcing. C’est le cas des trois associés à l’origine du projet Dupain.
Si vous vous intéressez au paysage de la restauration parisienne, les noms de Julien Fouin et Ludovic Dardenay ne vous sont peut-être pas inconnus. En effet, ces deux entrepreneurs ont multiplié les ouvertures au cours de ces dernières années : Jaja, Glou, Beaucoup, ou plus récemment Grand Coeur et Bon Vivant… Leur réussite est aujourd’hui incontestable.

Boulangerie Dupain, boulevard des Filles du Calvaire, Paris 3è

Derrière la palissade les travaux vont bon train pour aménager la boutique au 20 boulevard des Filles du Calvaire.

Rien ne semble parti pour les arrêter, puisqu’on les retrouvera prochainement dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie. C’est avec Tanguy Lahaye qu’ils ouvriront à la fin du mois leur première boutique au 20 boulevard des Filles du Calvaire, dans le 3è arrondissement.
Le parcours de cet homme est aussi riche qu’atypique : parti d’une formation de restaurateur, il a évolué au sein de multiples entreprises reconnues dans la boulangerie-pâtisserie parisienne. Gérard Mulot, Midoré, … jusqu’à participer, avec ses deux futurs associés, à l’ouverture du concept de restauration rapide Aux 2 Vaches, boulevard Haussmann. L’idée d’en revenir au pain est venue très simplement, au cours d’un repas. Ce dernier représente un budget conséquent pour une entreprise de leur taille, dès lors la mise en place d’un outil de production dédié paraissait pertinente.

Pour parvenir à gérer efficacement ses équipes, Tanguy Lahaye aura donné de sa personne et pris le temps d’apprendre le métier : entre le CAP de Boulanger qu’il vient de passer et de nombreuses expériences dans des fournils d’artisans français passionnés, il a pu acquérir des compétences qui lui permettent d’être légitime et productif.
Si j’ai commencé en parlant de choix des matières premières, c’est qu’il a ici fait l’objet d’un processus particulièrement rigoureux. La farine, entièrement issue de l’Agriculture Biologique, est livrée par deux meuniers : Suire et Gilles Matignon. Ce dernier exploite un moulin artisanal en Seine-et-Marne, à Château-Landon. Travailler avec cette matière première représente une difficulté supplémentaire, car il faut s’adapter à chaque livraison, se poser des questions. Un choix qui dénote d’une véritable volonté de travailler avec des acteurs locaux et engagés.

Le pain au levain, future signature du lieu. Réalisé à partir de farine de Meule, d'une pointe de seigle et de levain naturel, il exprime une agréable note acidulée en fin de bouche.

Le pain au levain, future signature du lieu. Réalisé à partir de farine de Meule, d’une pointe de seigle et de levain naturel, il exprime une agréable note acidulée en fin de bouche.

Si la boutique verra le jour sur le boulevard, c’est en dessous que tout se passe. En effet, le fournil est visible au 111 rue Amelot. Dans les anciennes cuisines d’un restaurant asiatique, l’investissement réalisé est de grande ampleur : matériel neuf (four Bongard, façonneuse Merand, …), aménagement réalisé dans les règles de l’art, les créations de ce type ne sont pas légion.
Le personnel pourra ainsi réaliser les produits dans des conditions idéales. Bien sûr, les restaurants du « groupe » seront les premiers clients, et commencent déjà à être livrés (avec notamment près de 600 buns par jour pour Ground Control, bar éphémère installé dans le 18è arrondissement), mais les passants pourront profiter de la démarche au travers de gammes courtes et très soignées.

Les essais sont encore en cours sur la baguette, pour parvenir à un aspect et un alvéolage satisfaisants. Le parti-pris est de la proposer à un prix accessible - 1,10€ - pour montrer que l'on peut fabriquer une baguette biologique et de qualité abordable.

Les essais sont encore en cours sur la baguette, pour parvenir à un aspect et un alvéolage satisfaisants. Le parti-pris est de la proposer à un prix accessible – 1,10€ – pour montrer que l’on peut fabriquer une baguette biologique et de qualité abordable.

A l’ouverture, l’accent sera mis sur des pains de caractère, réalisés à base de levain naturel. Entre une généreuse miche sur base de farine de Meule et une baguette mélangeant astucieusement froment, seigle et petit épeautre, les amateurs seront satisfaits. Même choix en viennoiserie (sur base de beurre de Montaigu), où les croissants, pains au chocolat et chaussons aux pommes (fraiches et caramélisées) seront à l’honneur. La pâtisserie alignera moins de dix références (faisant la part belle aux fruits de saison), simples mais très travaillées en amont, tout comme l’offre traiteur. Tanguy Lahaye tient à ne proposer que des produits aboutis, goûtés, re-goûtés, et approuvés par ses associés.

Voilà donc un projet à suivre de près, car il apporte une vision intéressante de la boulangerie-pâtisserie tout en intégrant un engagement dans le savoir-faire métier. L’offre locale, aujourd’hui assez peu qualitative, devrait s’en trouver considérablement bousculée.

Infos pratiques

Boulangerie Dupain – 20 boulevard des Filles du Calvaire – 75003 Paris (métro Filles du Calvaire, ligne 8)
ouverture prévue fin juillet 2015.

J’ai parfois l’impression que nous sommes pris dans une vaste partie d’échecs, avec le simple statut de pion. A tout moment, un prédateur peut nous attaquer et nous extraire du plateau… Qui du fou, du cavalier, du roi ou de la reine, nous attaqueront ? Peu importe, car en définitive, on risque rien de terminer en échec, sans possibilité de se retourner. Rien de brillant, on pourrait même dire que c’est… mat.

Enseigne, Paris Baguette, rue Gaillon, Paris 1er

La boulangerie artisanale serait-elle prise dans une telle situation ? Entre les assauts répétés de l’industrie, des chaines aux offres commerciales agressives et la difficulté de plus en plus grande de s’installer, on pourrait bien le penser. Seulement, d’autres périls pourraient bien s’ajouter à la liste.
A commencer par l’arrivée d’acteurs étrangers de très grande taille, aux moyens financiers quasi-illimités. C’est précisément le cas du groupe coréen SPC-Paris Baguette. Avec plus de 3000 points de vente dans le monde (en Asie, mais aussi aux Etats-Unis), l’entreprise compte parmi les leaders mondiaux du secteur.

Paris Baguette, artisan boulanger, la signature aurait de quoi faire sourire quand on connaît l'identité du groupe !

Paris Baguette, artisan boulanger, la signature aurait de quoi faire sourire quand on connaît l’identité du groupe !

Malgré son nom faisant directement référence à notre capitale, cet empire ne s’était pas implanté sur nos terres. La donne a changé l’an passé, avec la reprise d’une boulangerie dans le centre de Paris, rue Jean-Lantier. La nouvelle n’était pas passée inaperçue, avec de nombreux articles dans la presse nationale. Je pense cependant que la question de fond n’avait pas été suffisamment traitée : quelles sont les ambitions de ce nouvel arrivant dans notre paysage boulanger ?

Devanture, Paris Baguette, rue Gaillon, Paris 1er

A l’image de la première acquisition, la reprise de l’affaire du 15 rue Gaillon, à proximité de l’Opéra Garnier, s’est faite sans bruit, dans le courant de l’automne 2014. Pendant plusieurs mois, la boutique a été exploitée sans grand changement visible… puis vint le temps des travaux, de la transformation. Le processus s’est achevé aujourd’hui, avec la réouverture de la boutique.

Pains, Paris Baguette, rue Gaillon, Paris 1er Le style est sobre et se fond bien dans le décor. Pas de faute de goût ni de volonté de se démarquer nettement de l’environnement concurrentiel. Cela avait même surpris : l’absence de spécialités asiatiques avait sans doute fait plus de bruit que le reste. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, puisque l’on retrouve dans ce nouveau point de vente des produits très typés : entre le chiffon-cake à la vanille ou garni de chantilly, les brioches aux haricots rouges ou encore les petits pains moelleux recouverts de crumble façon « melon pan », les amateurs seront comblés. L’offre salée n’y échappe d’ailleurs pas, avec des sandwiches incorporant des ingrédients tels que le saté. C’est d’ailleurs plutôt cohérent : la rue Sainte-Anne et ses nombreux restaurants asiatiques ne sont pas loin… on peut donc y voir un certain prolongement.

L'intérieur, Paris Baguette, rue Gaillon, Paris 1er

Sauf qu’à mon sens, c’est tout autre chose. Que ce soit ici ou près des Halles, les emplacements semblent avoir été choisis volontairement « en retrait », comme pour installer des laboratoires permettant de prendre le pouls du marché avant de lancer une offensive de plus grande ampleur. Doucement mais sûrement, l’enseigne acquiert du savoir-faire et pourra à terme rivaliser avec les acteurs les plus en vue sur notre marché.

Brioche red bean, petit pain crumble façon melon pan... les spécialités asiatiques sont finalement arrivées chez Paris Baguette France.

Brioche red bean, petit pain crumble façon melon pan… les spécialités asiatiques sont finalement arrivées chez Paris Baguette France.

Cela passe notamment par les hommes, avec le recrutement d’hommes et de femmes de métier. En boulangerie, le Chef est notamment passé chez Eric Kayser et Mickaël Morieux, mais aussi dans la maison Paris Croissant à Séoul. Ce dernier a mis en place ces derniers mois une gamme complète et plutôt qualitative, avec une baguette de Tradition aux vives notes de froment et des pains au levain naturel, réalisés à partir de farines issues de l’Agriculture Biologique.
En parallèle, les recrutements ont continué, comme en témoigne une annonce publiée récemment sur le site internet de l’école Ferrandi. Le descriptif est clair : l’entreprise recherche des professionnels accomplis et ne rechigne pas à y mettre les moyens.

Des pâtisseries fines, bien finies.

Des pâtisseries fines, bien finies.

S’il y a bien sûr des marges d’amélioration, le résultat se révélait plutôt probant pour une journée d’ouverture. Du costume soigné porté par les vendeuses aux gammes produit déjà bien développées, le groupe prend vite de l’assurance. Doit-on s’en inquiéter ? Sans doute. Comme je l’évoquais précédemment, c’est avant tout la question du savoir-faire qu’ils parviennent à acquérir qui me semble centrale. Leur puissance de frappe incite naturellement les différentes entreprises de la filière à les suivre : meuniers, agenceurs, fournisseurs de matières premières… jusqu’au jour où ils auront atteint une certaine maturité, ce qui leur permettra d’imposer leurs conditions. Le rapport de force sera alors bien inégal, les structures financières étant fort différentes.

La caisse nous annonce la vocation du groupe Paris Baguette "We make people happy"... Cela laisse songeur !

La caisse nous annonce la vocation du groupe Paris Baguette « We make people happy »… Cela laisse songeur !

Voilà donc un sujet à suivre de près, et je ne doute pas que plusieurs acteurs de la profession ont déjà commencé à le faire avec intérêt… à commencer par leurs concurrents, à l’image du groupe Holder ou de la Maison Kayser. En attendant, découvrons ce nouvel Opéra, qui se joue en face de cette si charmante fontaine Gaillon.

Infos pratiques

15 rue Gaillon – 75001 Paris (métro Quatre-Septembre, ligne 3 ou Opéra, RER A & lignes 3, 7, 8 et 9) / tél :
ouvert du lundi au samedi.

Retourner sur les terres où l’on a commencé, cela permet souvent de mesurer le chemin parcouru, l’expérience acquise… mais aussi d’effectuer des comparaisons plus pointues et pertinentes avec ce que l’on a vu depuis ou de comprendre la différence parfois abyssale entre le positionnement affiché et la réalité. C’est aussi l’occasion de se dire que le temps passe, sans doute trop vite, et que l’on est bien en peine d’avoir une quelconque prise sur ce mouvement perpétuel.

Le moulin

Le moulin

Je découvrais l’univers de la meunerie en janvier 2012 par la visite du Moulin des Gaults. Convié par Yvon Foricher, j’avais pu visiter cet outil de production, mais aussi et surtout toucher du doigt ce qui fait la force de cette maison : l’humain, au travers de professionnels engagés et passionnés, que ce soit dans la gestion du moulin ou au sein des équipes de démonstrateurs.
Depuis, j’ai passé du temps à me rouler dans la farine. Verdelot, Aiserey, Chars, Chérisy… sans compter sur les salons professionnels, qui permettent de mesurer la qualité et l’approche des différents acteurs.

Au bord de l'eau

Au bord de l’eau

Forcément, l’outil installé en bordure de la Notreure souffre un peu de la comparaison avec ses homologues. Que ce soit en terme de capacité de production, d’âge des machines ou de fonctionnement du moulin, on sent bien que les standards de la profession ont évolué. Cela n’empêche pas l’entreprise de réaliser un produit de grande qualité : les hommes et leurs choix importent parfois plus que les machines. Tout est lié. Il fallait une belle force de conviction et de la persévérance pour partir de rien comme l’a fait Yvon Foricher en s’installant ici, en reprenant un moulin à une époque particulièrement délétère pour le secteur de la meunerie artisanale. Forcément, l’assise financière n’est pas la même que celle détenue par de grandes familles, installées depuis plusieurs générations.

Les pains en dégustation permanente

Les pains en dégustation permanente

Il paraît que les bretons sont têtus. La famille Foricher pourrait difficilement renier ses origines, ni même donner tort à cette pensée commune, tant son opiniâtreté est indiscutable. Le développement de l’entreprise s’est fait grâce à une vision éclairée, laquelle demeure aujourd’hui : il ne suffit pas de livrer de la farine aux artisans boulangers, si qualitative soit-elle. Un meunier doit s’engager à leurs côtés et les pousser à faire toujours mieux. Yvon Foricher continue aujourd’hui à développer ce positionnement atypique, et ses 600 clients lui donnent raison au quotidien par leur fidélité et les relations privilégiées qu’ils entretiennent avec leur meunier. Ses équipes commerciales et techniques sont très impliquées dans cet effort.

Le fournil de démonstration, très animé ces jours-ci.

Le fournil de démonstration, très animé ces jours-ci.

Pour y parvenir, l’entreprise a mis l’accent sur la formation, l’accompagnement… et a ainsi développé des « moments forts », où ses clients se retrouvent et peuvent échanger de façon conviviale. Les Portes Ouvertes du Moulin des Gaults, organisées tous les deux ans, associent une ambiance festive et le sérieux nécessaire pour construire un projet commun.

50 nuances... de pain : la présentation des caractéristiques nutritionnelles des produits de la gamme Foricher regroupée au sein d'un nuancier.

50 nuances… de pain : la présentation des caractéristiques nutritionnelles des produits de la gamme Foricher regroupée au sein d’un nuancier.

Cette année, l’accent a été mis sur la santé, avec une mise en avant des qualités nutritionnelles des différents produits de la gamme : de la baguette de Tradition au Complet en passant par la brioche ou la tourte de Meule, chacune des recettes a été étudiée pour associer gourmandise et bien être. Parmi les nouveautés, on compte un pain d’inspiration nordique, réalisé à partir de farine de Meule T80 CRC‬, d’Epeautre T110, de Seigle T170 et d’un mélange de graines. Il procure ainsi une énergie durable, des fibres et présente d’excellentes qualités de conservation.

L'espace Bagatelle et ses chiffres détaillés situation par situation.

L’espace Bagatelle et ses chiffres détaillés situation par situation.

Il y a également du neuf dans et sur le moulin : depuis quelques mois, l’ensemble des céréales qui y transitent sont issues de la démarche CRC. A l’extérieur, la peinture a été refaite pour rafraichir un peu l’aspect du bâtiment.
L’organisation des différents espaces destinés aux visiteurs a été revue, et une zone dédiée à la certification Bagatelle a été créée. Elle présente des chiffres et des arguments tangibles pour inciter les artisans à s’inscrire dans cette démarche qualité. En plus de la baguette, le croissant pourra bientôt être certifié : de cette façon, la différenciation avec l’offre industrielle sera toujours plus importante, et l’engagement du boulanger sera mieux valorisé.

Le stand Dinamo-Montaloups et ses superbes devantures peintes.

Le stand Dinamo-Montaloups et ses superbes devantures peintes.

Sous le chapiteau, les partenaires des Moulins Foricher proposent comme d’habitude leurs solutions : de la vannerie aux fèves en passant par les formations de pâtisserie, les marchands de matériel, les banques ou encore les systèmes de caisse, il y a toujours de bonnes idées à prendre et des contacts à nouer.

L'espace transactions

L’espace transactions

On notera également la présence d’un large espace dédié à l’installation et aux mutations de fonds. Le sujet est toujours plus sensible et central dans un contexte où les artisans indépendants peinent à trouver des affaires accessibles tout en présentant un certain potentiel.

Pain d'antan, tourte de Seigle ou de Meule... les grosses pièces ne manquent pas d'allure !

Pain d’antan, tourte de Seigle ou de Meule… les grosses pièces ne manquent pas d’allure !

Les nouveaux médias sont aussi à l’honneur, car le meunier entend pousser ses clients à « rester à la page » en étant présents sur les réseaux sociaux ou en créant leur propre site internet. Les artisans demeurent assez réfractaires à ce type de démarche, malgré une demande parfois soutenue au sein de leur clientèle. Un accompagnement pas à pas est alors nécessaire pour lever les éventuelles questions et doutes vis à vis de l’outil informatique.

On s'active au sein du fournil de démonstration. Ici, Thibaud prépare des pains "nouveau-né".

On s’active au sein du fournil de démonstration. Ici, Thibaud prépare des pains « nouveau-né ».

L’événement est devenu une véritable tradition et fédère toujours plus de visiteurs : 1400 personnes sont ainsi attendues sur 4 jours, jusqu’au mercredi 24 juin. Cela nécessite une organisation d’ampleur, et les équipes ont réalisé un travail remarquable pour accueillir chacun au mieux.
Impossible de terminer ce billet sans souligner la qualité exceptionnelle des produits présentés au sein de la boutique éphémère : spécialités feuilletées salées ou sucrées, gâteaux de voyage, pains de tous formats, … autant d’idées qui devraient inspirer nos artisans pour renouveler leur offre et proposer à leur clientèle des gammes innovantes. Bravo à Patrick Cognard et à toute son équipe !