Le pain est souvent consommé au petit-déjeuner, en accompagnement d’un repas… mais il peut aussi servir de support et de « base » pour lier des aliments entre eux. C’est ainsi que naissent les sandwiches, qui représentent le quotidien de millions de personnes à travers le monde. La restauration rapide représente ainsi une grande part du pain consommé quotidiennement, ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise chose.

McDonald’s au Carrousel du Louvre. Le géant de la restauration rapide a tenté « son » sandwich à la française, avec le McBaguette, en plus des pains bun utilisés quotidiennement dans ses hamburgers. Une expérience en demi-teinte, puisque le produit, réalisé à partir d’une base fournie par l’entreprise française Panavi, n’a pas suscité l’enthousiasme du public.

Bonne car le nécessité de rapidité et de simplicité ont rendu l’usage du pain, qu’il soit de type baguette, viennois ou bun, quasi-incontournable… ce qui implique que les consommateurs en mangeront, avec tout l’intérêt nutritionnel qu’il peut avoir. Seulement, ces mêmes atouts sont bien souvent remis en cause par la qualité du produit : farines très blanches, de provenance douteuse, issues de blé à fort rendement mais dépourvus d’une grande partie des nutriments que l’on devrait retrouver dans cette céréale…

Ainsi, de plus en plus d’acteurs de ce secteur mettent en avant la cuisson sur place des pains utilisés pour la réalisation de leurs sandwiches. Certes, cela garantit la fraicheur et la croustillance dans le cas d’une base « baguette »… mais justement, le pain est alors très frais, d’ailleurs cela porte un nom, surgelé ?
Fabriqué en industrie, rempli d’additifs et « d’améliorants de panification », voilà un cocktail qui ne manquera pas de pétiller une fois en bouche. Des exemples, je pense que l’on pourrait en citer des dizaines, voire des centaines. Pomme de Pain, Brioche Dorée, Mc Donald’s, Subway, et même des enseignes plus haut de gamme utilisent des bases précuites surgelées. Bien entendu, il faut mettre en balance la rationalisation des process nécessaire pour ce type d’entreprise, mais en définitive, on détourne complètement le pain pour en faire l’objet, un maillon, d’une chaine globalisée.

Face à cela, quelle attitude adopter ? On peut privilégier les propositions salées développées par nos artisans boulangers, toujours plus variées et nombreuses. Ces derniers ont bien compris qu’ils pouvaient s’emparer d’une part du généreux gâteau que constitue la restauration « sur le pouce », parfois un peu trop.
Au delà de ça, certaines enseignes parviennent à un compromis honorable entre quantité et qualité, notamment en faisant appel à des boulangers dont la vocation est de réaliser un certain volume, tout en conservant des recettes et des fabrications relativement artisanaux. On peut citer le bon exemple de Jour – connu pour son concept de bar à salade sur mesure, qui a récemment développé une gamme de buns fournis par la Boulangerie Thierry. Les créateurs de nouveaux concepts de restauration rapide devraient chercher à se différencier par la qualité de leurs matières premières, et donc sur le pain… malheureusement, on le sacrifie souvent sur l’autel des coûts et de la simplicité.

Un autre point important pour les sandwiches : leur fraicheur. Une baguette ayant passé de longues heures dans un réfrigérateur est une baguette… désagréable. Faites l’essai chez vous, vous verrez. A cela, la réponse immédiate pourrait être de réaliser les sandwiches à la demande ou en petits lots, mais cela demande une certaine organisation et des locaux adaptés. Cela fait partie du concept de Pomme de Pain depuis sa création, d’ailleurs, mais le résultat n’en est pas meilleur. A Paris, si vous souhaitez déguster des sandwiches de grande qualité, assemblés « minute », ne manquez pas de faire un tour du côté de cheZ Aline, au 85 rue de la Roquette, dans le 11è arrondissement. Dans ce « temple » du casse-croûte, Delphine Zampetti réunit les meilleurs ingrédients, doucement enveloppés par les baguettes de la boulangerie Landemaine située juste en face. Même constat à l’Epicerie du Verre Volé, dont je vous avais parlé précédemment. Certes, ce sera plus cher qu’un repas pris dans une de ces nombreuses chaines… mais cela redonne des lettres de noblesse au casse-croûte, et au pain consommé ainsi, sur le pouce.

Il ne faut pas oublier d’où l’on vient. Avoir des ancrages, des points de repère : c’est de cette façon que l’on peut avancer, car on parvient à tracer des lignes entre ce que l’on a déjà fait et ce à quoi on aspire. L’idée serait de pouvoir faire le tour du monde, de vivre des centaines d’expériences, de s’enrichir personnellement à l’infini pour revenir au même point… géographique, tout en ayant, par l’esprit, tellement changé et progressé. Le lieu s’en trouve alors transformé.

En réalité, si Guillaume Gil et sa compagne Charlotte sont revenus ici, à deux pas de l’école dans laquelle ils ont été formés, cela tient plus… au hasard. C’est en effet en haut de la rue de l’Abbé Grégoire, à quelques pas du métro Saint-Placide mais surtout de l’Ecole Grégoire Ferrandi, qu’ils ont ouvert aujourd’hui leur pâtisserie-salon de thé.
Un lieu atypique et gourmand, qui était précédemment un salon… de massage. L’objectif de plaisir et de relaxation demeure, « seule » la manière d’y parvenir change. Quelques travaux ont été nécessaires pour ouvrir les espaces, jusqu’alors plongés dans la pénombre. Cela nous permet aujourd’hui de découvrir cette superbe verrière ainsi que la cour intérieure, qui baignent les lieux d’une belle lumière naturelle.

La salle sous verrière

Lumière, couleurs et transparence, je trouve que c’est une bonne façon de décrire Colorova Pâtisserie. Les couleurs se retrouvent bien dans le choix du mobilier, dans un style assez ethnique et original. Elles expriment le parcours des deux associés, aussi riche que varié. Ainsi, le chef est passé dans les cuisines de palaces divers, a côtoyé des artisans passionnés dont les noms reviennent souvent dans mes lignes (Jonathan Blot, Claire Damon…) avant de vouloir voler de ses propres ailes.
Si j’ai parlé de transparence, c’est pour faire référence à l’aménagement du laboratoire, complètement ouvert sur la salle et la rue. Ainsi, la clientèle pourra se rendre compte du travail réalisé par Guillaume, Damien et Ornella. Idée originale, ce sont eux-mêmes qui réaliseront le réassort des pâtisseries – une gamme de 12 créations pour le début… Nous sommes bien loin des dizaines de kilomètres parcourus par les produits de la plupart des grandes maisons parisiennes.

Le laboratoire et le présentoir de pâtisserie communiquent directement : ainsi, ce sont les artisans qui assurent le réassort.

Justement, cela change tout, en terme de goût et de qualité. Libérées des contraintes dues à un transport parfois mouvementées, les créations peuvent ainsi se faire plus légères et savoureuses. Le choix sera difficile entre les propositions gourmandes de l’endroit : tartes, pâtes à choux, créations variées, mais aussi viennoiseries et gâteaux de voyage (cakes, sablés…). Cela s’accompagnera en semaine d’une offre de restauration rapide (salades, sandwiches), qui laisse place le week-end à un brunch, proposé de 11h à 16h. Quoi de mieux pour se détendre après une dure semaine ?

Il suffit de prendre place sur l’une des tables de cette salle de 20 couverts, et de profiter de la sélection de thés Lov Organic, ainsi que Confitures de la Ferme Fruirouge à Concoeur Nuit Saint Georges, des salades de fruits, brouillades d’oeuf… dont le service est assuré par Charlotte et son équipe.

Quelques pâtisseries, la gamme n’était pas encore complète lors de mon passage

Forcément, je ne pouvais pas passer ici sans essayer cette superbe « Superposition Vanille-Café », une sorte de millefeuilles composé de très fines feuilles de chocolat noir, entrelacées de couches de crème vanille et café, tout cela reposant sur un fond sablé. La force du café est équilibrée par la douceur de la vanille, tandis que les textures croquantes, onctueuses et craquantes s’enchainent pour une expérience de dégustation exceptionnelle. Tout cela pour 5,5€, un tarif somme toute bien raisonnable au vu de la complexité de l’assemblage. Bien sûr, il faudra quelques semaines à l’équipe pour roder complètement sa gamme, mais la barre est déjà placée bien haut.

On pourrait dire qu’une étoile est née ce samedi… sous le soleil. C’est assez rare pour le signaler, en ce mois d’août bien pauvre en activité et en découvertes. Dans tous les cas, cette sympathique équipe aura à coeur de vous accueillir, et pourquoi pas dès demain à l’occasion d’un brunch gourmand ?

Infos pratiques

47 rue de l’Abbé Grégoire – 75006 Paris (métro Saint-Placide, ligne 4)
ouvert tous les jours, du lundi au vendredi de 9h à 19h (petit-déjeuner de 9h00 à 11h00, déjeuner et snacking de 12h00 à 15h00, tea time jusqu’à 18h00), le samedi de 11h à 19h – 17h le dimanche – brunch les samedis et dimanches.
Facebook : http://www.facebook.com/Colorovapatisserie

Faut-il y aller ? Bien sûr ! Voilà un salon de thé dans un style contemporain, avec une offre de gourmandises de qualité, chose qui manquait cruellement à ce quartier où l’on a plutôt tendance à trouver des boutiques de… cupcakes (on en compte deux dans la rue de l’Abbé Grégoire). De plus, cet emplacement est intéressant : espérons que cela donnera des idées aux élèves de l’école Ferrandi, située à quelques mètres… ce qui nous promettrait ainsi de belles perspectives gourmandes.

Lorsqu’il s’agit de reprendre une affaire, on peut adopter plusieurs stratégies. Certains choisissent de proposer la même gamme que celle proposée jusqu’alors, à l’image de Sylvain Maurice dans l’ex-boulangerie de Stéphane Secco. Cela peut être un choix judicieux quand l’endroit jouit déjà d’une solide réputation : ainsi, pas de perte de clientèle ou très peu… D’autres apportent avec eux des recettes déjà bien éprouvées, c’est notamment le cas pour des artisans possédant déjà une ou plusieurs affaires. Je dois dire que je préfère de loin ce comportement, car au delà d’exprimer une véritable « identité boulangère », il est bien souvent une occasion pour les habitants des environs de découvrir de nouvelles saveurs… et de profiter d’une qualité supérieure.

C’est la démarche adoptée par Rodolphe Landemaine pour chacune de ses reprises, et bien sûr la dernière, à deux pas de la mairie du 18è arrondissement. J’avais déjà eu l’occasion de vous parler un peu de cette boulangerie, précédemment détenue par Guy Letellier, l’artisan derrière les « Délices de l’Etoile », qui ont essaimé dans la capitale et en banlieue. Le changement de propriétaire n’est pas passé inaperçu : en 3 mois, la clientèle a déjà doublé. Comme quoi, la qualité du produit et de l’accueil parviennent à faire la différence.

Dans le fournil de cette boulangerie oeuvrent actuellement les meilleurs éléments de la maison, dont le fameux Mickaël, que l’on a longtemps retrouvé rue des Martyrs. Cela n’est certainement pas étranger à la qualité du résultat : les pains affichent de superbes croûtes dorées et développent des parfums soutenus. J’aurais pu vous parler de la délicieuse baguette de campagne, du pain Summertime avec ses graines de sésame et son mélange de fruits secs, des nombreux petits pains aromatiques… mais c’est la Tourte de Seigle qui me fait venir et revenir ici. Réalisée à partir de farine de Seigle type 130 et d’un peu de levain, ce pain est typique des pays d’Auvergne… même s’il accommode très bien du climat parisien !

Le premier plaisir est visuel : difficile de faire un pain plus beau, dans sa complexe simplicité. Bien craquelé, offrant un contraste marqué entre la blancheur de la farine et la noirceur marquée de la croûte. Cette dernière est presque torréfiée, épaisse et craquante sans pour autant être amère. Au contraire : elle agit comme un concentré d’arômes et renforce le caractère de ce pain. Difficile de passer à côté du puissant parfum de miel qui se dégage de l’ensemble, ce dernier est d’ailleurs vivifié si vous choisissez de toaster légèrement cette tourte, qui développe pleinement ses arômes le lendemain de l’achat.
A la dégustation, on apprécie la bonne hydratation du pain, qui permet d’obtenir un résultat de bonne tenue, dense sans être collant. Pas d’acidité à dénoter, seule une belle douceur persiste en bouche.

Aucun problème de conservation pour un tel produit, il peut être consommé sur plusieurs jours – 3 à 4 sans difficulté – et développe des arômes différents au fil du temps. Cet auvergnat peut être dégusté seul mais il aime aussi être accompagné. Un véritable animal social qui sublimera fruits de mer variés, mais également le foie gras, en apportant une note rustique mais très « chic » en définitive.

On appréciera également le tarif relativement abordable pour un tel produit : la Tourte de Seigle est vendue au poids, pour le prix de 6,30€ le kilogramme. Compte tenu de la qualité et de la durée de conservation – limitant tout risque de perte -, c’est un plaisir accessible… et bien servi : l’accueil dans cette boulangerie Landemaine est vraiment appréciable, malgré l’affluence : à toute heure, une queue se forme rapidement devant les portes de l’endroit… quoi de plus normal, après tout.

Tourte de Seigle, Rodolphe Landemaine – Paris 18è, vendue en quarts, 6,30€ le kilogramme.

Généralement, lorsque l’on parle de boulangers « multipliés », il s’agit d’entrepreneurs gérant trois, quatre ou cinq boulangeries, tout au plus. Rare sont ceux qui sont parvenus, ou même ont souhaité, dépasser ce « cap ». A l’inverse, quand il est dépassé, tout va plus vite, plus grand. Le nom, la marque, prennent alors une importance considérable dans la profession.

Une boulangerie Kayser, dans le 16è arrondissement

C’est le cas pour Eric Kayser. La maison a fêté l’an passé ses 15 ans, en totalisant plus d’une centaine de boulangeries dans le monde (notamment au Japon, en Russie, au Maroc, au Sénégal, en Corée du Sud…), avec un nombre de salariés dépassant les 2000. Des chiffres impressionnants pour cet artisan boulanger alsacien, à l’ambition pour le moins dévorante. Depuis ses 19 ans, âge auquel il rejoint les Compagnons du Tour de France pour se former au métier, en droite ligne de la tradition boulangère familiale, elle ne le quittera pas. S’en suivront des années de transmission et de partage, avant d’aboutir en bas de la rue Monge en 1996, où il ouvre sa première boulangerie. Tout cela ne s’est pas construit avec son seul savoir-faire et talent. Dès le début, l’entrepreneur a su s’entourer, et notamment de Patrick Castagna, avec lequel il développera le « fermentolevain » – cette machine qui permet d’entretenir un levain liquide à température stable. D’autres sont passés à ses côtés avant de prendre leur envol : c’est le cas de Franck Debieu, à présent installé à Sceaux et Meudon, mais aussi de la fameuse famille Hakkam, dont les boutiques peuplent discrètement les rues parisiennes.

A Sceaux, Franck Debieu a pris son indépendance vis à vis d’Eric Kayser depuis bien longtemps.

Cette prise d’indépendance n’est pas le fruit du hasard : derrière son sourire quasi-angélique et cette allure avenante et sympathique se cache un homme prêt à tout pour défendre ses intérêts et son entreprise. J’ai eu l’occasion de le mesurer par moi-même. On peut bien sûr le comprendre, et tout cela revêt un caractère plutôt remarquable : après tout ce temps et ce chemin parcouru, le boulanger d’hier, patron d’aujourd’hui, continue à mener sa barque avec la même énergie. Il disait récemment, dans une interview donnée au magazine L’Hôtellerie Restauration, travailler 15 heures par jour et se lever tôt. Autant je pourrais douter du reste des propos, autant je ne doute pas une seule seconde de cela.

Il ne faudrait pas dresser un portrait trop sombre de cet artisan qui fait partie de ceux qui ont tiré la profession vers « le haut » ces dernières années, en étant l’un des premiers à croire en la « Tradition française » qui était à ses premiers balbutiements lors de son installation. Le travail sur levain naturel fait également partie des concepts « phare » de l’enseigne, imposant un certain niveau d’exigence. En faisant partie des premiers clients du meunier Foricher, il a contribué à son développement au fil de son expansion. Aujourd’hui, la situation a bien changé, puisque seule la boulangerie historique continue à être livrée par ce dernier. Ailleurs, l’approvisionnement est assez varié. A Bercy Village, c’est Baguépi/Soufflet qui fournit la matière première.

Parlons de Bercy, justement. C’est ici qu’Eric Kayser quitte un peu plus le secteur de la boulangerie pour s’approcher de la restauration, en s’entourant d’un chef télévisuel, Jean Imbert. L’expérience avait déjà été tentée boulevard Malesherbes, et plus modestement au travers d’espaces « salon de thé » dans plusieurs de ses boutiques (notamment rue Danielle Casanova, où l’activité de saladerie et sandwicherie est prédominante). L’entreprise diversifie ses activités et dépasse même les frontières légales, grâce à des tours de passe-passe : en effet, le restaurant-boulangerie installé dans ce centre commercial à ciel ouvert est ouvert 7j/7, grâce à son activité mixte…

Cette vitrine marque toujours plus les ambitions de l’entreprise, qui va toujours plus loin géographiquement mais aussi dans le développement de ses processus de production : à Ivry, c’est un laboratoire de 2000m2 qui réalise une bonne partie des gourmandises et plats que l’on retrouvera quelques heures après en boutique. Rationalisation, certes, mais où s’arrête l’artisanat ? Le pain continue, lui, à être fabriqué sur place, ce qui ne manque pas de donner lieu à des disparités entre quartiers… Certains sont mieux servis que d’autres, pour des tarifs identiques. Forcément, il faut bien accepter de ne plus maîtriser la qualité au quotidien, malgré tous les process de contrôle et de formation. Reconnaissons cependant une belle capacité à assurer un service accueillant, compétent et souriant la plupart du temps.

Difficile de savoir quelles seront les prochaines étapes de développement de la marque. Le groupe Eric Kayser s’essaime toujours plus sur la planète, mais reprend aussi d’autres enseignes. Midoré a rejoint la « famille » il y a plusieurs années déjà. Famille, ce mot conviendrait presque pour cette entreprise toujours très centrée sur son fondateur, porteur de certains principes qui influent toujours sur le quotidien. « Spirit of bread », vous disiez…?

Une partie du stand « Spirit of Bread » d’Eric Kayser sur le salon Europain 2012

Billets d'humeur

05
Août

2012

Un mois d’août à Paris

2 commentaires

Difficile de trouver plus calme que ce week-end. Les rues franciliennes se sont vidées, même les voitures se sont faites rares dans les rues et allées… Cela ne vous aura pas échappé, nous sommes bien en août. Les commerces ont fermé, l’ambiance s’est (un peu) apaisée.

A Paris, c’est toujours la même histoire. On finit par ne croiser que des touristes venus découvrir les charmes tant vantés de notre capitale. Certes, ces accents variés et ces difficultés à acheter une simple baguette de pain sont charmants, mais cela ne manquera certainement pas de faire râler les bons parisiens que nous sommes… moi le premier, que voulez-vous, la ville a bien fini par déteindre sur moi. Même si elle est en vacances d’elle-même, difficile de la changer… ou plutôt de nous changer.
Cette année, le temps n’est pas franchement clément, et ce sera sans doute l’un des sujets de discussion qui aura été le plus abordé. Les rares épisodes de chaleur ont su tout autant faire parler d’eux, beaucoup craignant une nouvelle canicule dès que le mercure s’affole un peu. Ce sont en définitive des préoccupations bien banales… vacancières, pourrait-on dire.

Pour ceux qui restent, le quotidien est un peu modifié, et je dois dire que j’ai un peu mal au nez… Oui, je me le suis cassé deux ou trois fois cette semaine, devant des boulangeries fermées. Même si la Ville de Paris a publié une liste des boutiques ouvertes en août, cette dernière est relativement inexacte et il ne faudrait pas la prendre comme référence. Mieux vaut appeler les établissements directement. Certains ne dérogent pas à leurs habitudes et restent au service de leur clientèle : ainsi, les boulangeries de Dominique Saibron ou de Rodolphe Landemaine ne prennent pas de congés, même si les horaires de certaines de ce dernier sont légèrement modifiés. Vous pourrez également vous rendre chez Gontran Cherrier, qui a ré-ouvert jeudi, à la maison Pichard, chez Bread & Roses, Raoul ou Benoît Maeder, et bien d’autres que j’oublie… Le choix demeure encore varié, nous sommes à Paris, tout de même ! Pour les becs sucrés, Pierre Hermé, Fauchon, le Café Pouchkine, Ladurée, Angelina, Dalloyau, Lenôtre, Sadaharu Aoki… entre autres institutions parisiennes, ne s’accordent pas de trêve estivale, même si ce n’est pas toujours dans ces maisons que l’on trouve les gourmandises les plus savoureuses. Si les températures montent, rien de tel qu’une bonne glace chez Raimo, Grom ou la charmante Mary Gelateria, discrètement nichée dans le haut du Marais. Les adeptes des « notes de frais » les plus « bling-bling » pourront aussi se tourner vers la terrasse du MiniPalais, qui se transforme en bar à glaces tous les après-midi.

Août, c’est aussi l’occasion de préparer la rentrée au calme. Certains artisans préparent leurs produits et leurs équipes. Côté pâtisserie, on donne les dernières touches aux bûches de Noël (photographies, dégustations…) avant de s’attaquer à la suite (les galettes des Rois ne sont pas si loin que cela !).
On profite des rythmes moins soutenus pour échanger un peu plus avec les clients, ou bien pour faire une petite promenade du côté de Paris Plage… ou pas, tiens. Chacun son style, après tout. Bel été !

La rue Jean Nicot est le lieu de successions bien curieuses, où les noms ne veulent visiblement pas s’effacer. En effet, lors de la vente de la boulangerie du 20 rue Jean Nicot, l’enseigne de la boutique rose a longtemps continué à afficher Poujauran, alors que le fameux Jean-Luc avait quitté les lieux. Cela avait d’ailleurs donné lieu à quelques conflits entre ce dernier et le repreneur, Stéphane Secco.

L’histoire semble s’être répétée en avril dernier, puisque la boulangerie-pâtisserie-traiteur a changé de mains en toute discrétion. A première vue, tout semblerait être identique, les clients continuent à recevoir des sacs plastiques au nom de l’ancien pâtissier du groupe Costes, les produits sont réalisés de façon identique… mais quelques détails dénotent du changement de propriétaire, comme des étiquettes apposées sur les paquets ou les pâtisseries. Nous sommes à présent chez Sylvain et Nathalie Maurice, même si le auvent indique toujours Secco.

Au vu de l’excellente réputation de la maison, on peut tout à fait comprendre que les nouveaux tenanciers aient fait le choix de ne pas communiquer sur leur arrivée, même si tout cela demeure assez opaque pour le consommateur. Il ne reste qu’à espérer que la qualité des produits ne soit pas affectée sur le long terme, comme c’est malheureusement souvent le cas dans le cadre de ce type de changements. Cela sera à voir à la rentrée, puisque le lieu sera fermé pour congés à partir de demain soir.
A noter qu’il semblerait que Stéphane Secco reste propriétaire de sa seconde boulangerie, acquise mi-2007. Vous pourrez donc être certains de retrouver les mêmes produits au 75 boulevard de Grenelle, dans le 15è arrondissement.

Les congés d’été sont bien souvent l’occasion pour nos artisans boulangers de réaliser des travaux au sein de leur établissement. Cela peut aller de quelques détails mineurs dans la surface de vente à des modifications matérielles au sein du laboratoire (changement de fours, réorganisation…) en passant par des transformations plus profondes, impactant de façon tangible la vie de la boutique et de ses collaborateurs.

Cette année, la maison Pichard avait choisi de profiter du mois de juillet pour donner un sérieux coup de jeune à sa boulangerie du 88 rue Cambronne. J’avais déjà eu l’occasion de vous en parler lors de ma visite en fin d’année dernière, d’importants travaux avaient déjà eu lieu au sein du laboratoire et plus précisément du fournil, avec notamment l’arrivée d’un four à bois « à Gueulard » en 2008. Ce dernier restait invisible pour la clientèle – au delà de l’apport sur la qualité de cuisson de la baguette Pichard ! -, ce qui est bien dommage compte tenu de l’aspect majestueux de l’outil.

A présent, les nombreux adeptes des produits de la maison pourront admirer le travail des boulangers affairés devant ce fameux four, grâce à une baie vitrée installée au fond de la boutique. Si seulement il s’agissait du seul changement ! Non, les modifications sont très profondes et c’est l’esprit même de l’endroit qui a été repensé. Adieu le style un peu rétro-années 80 qui était jusqu’alors en vigueur, bonjour les lignes sobres et élégantes, les éclairages doux et mettant bien en valeur décors et produits. J’ai bien parlé de décors, car on retrouve sur les murs de la boutique des sortes de bas-reliefs particulièrement travaillés, du meilleur effet. La devanture n’est pas en reste, avec des sculptures en bronze rappelant la vocation du lieu : des blés, quoi de mieux pour une boulangerie ?

Des épis de blé… en métal !

L’ensemble donne une belle impression d’espace, beaucoup plus que par le passé. Nul doute que le service n’en sera que plus fluide, au travers de trois pôles bien pensés (pâtisserie, boulangerie-viennoiserie et vente à l’extérieur). Un bémol toutefois : je ne suis pas certain que la télévision installée sur l’un des murs soit tout à fait utile, mais j’ai parfois tendance à être un peu « vieille école » de ce côté là, en essayant de limiter l’intrusion de la technologie dans des lieux où l’artisanat règne en maître. Attendons un peu pour nous prononcer toutefois : le lieu n’est pas encore pleinement investi, et je ne doute pas que le résultat n’en sera que plus probant avec le temps.

Bien sûr, tout cela ne serait rien si les produits n’étaient pas au diapason, et c’est eux qui ont permis aujourd’hui d’investir dans un tel écrin. La baguette Pichard n’a pas bougé, toujours aussi craquante et fine, avec sa belle douceur lactique et son tarif très démocratique : seulement 1 euro. N’oublions pas pour autant les autres pains, dont la belle gamme biologique, ni les viennoiseries au feuilletage bien croustillant, comme en attestent les nombreux prix reçus par la maison. Les plus gourmands marqueront aussi l’arrêt devant les douceurs élaborées par Geoffrey Pichard et son équipe.

Des pâtisseries très gourmandes

Impossible de finir sans saluer le travail réalisé par le personnel de vente, efficace et souriant, on se sent un peu comme dans la boulangerie du village, en famille. Les habitués ne s’y trompent pas et savent témoigner de leur attachement envers l’endroit, comme ils étaient nombreux à le faire en ce jour de réouverture. Ah, heureux sont les habitants du XVè arrondissement !

Les fameux bas-reliefs, très travaillés

S’il faut bien reconnaître une qualité aux services marketing et autres têtes pensantes tout droit sorties des écoles de commerce les plus prestigieuses, c’est celle de développer une exceptionnelle capacité à s’adapter et ainsi à faire face à de nombreuses situations sans jamais laisser paraître le moindre doute ou la moindre défaillance. Une chance pour eux sans doute, mais en définitive pas vraiment pour le consommateur qui ne sait pas à quelle sauce il va se faire croquer…

Du côté des « chaines » boulangères, des groupements tels que Festival des Pains, Banette, Baguépi, Copaline et autres Ronde des Pains, ces fameux communicants ne doivent pas manquer de travail. En effet, rien de plus difficile aujourd’hui que de se démarquer les uns des autres… Du côté de Banette, on a décidé de s’afficher sur le Tour de France et de distribuer du pain à tours de bras. Est-ce là la meilleure façon de mettre en avant le pain artisanal, ou cela consiste-t-il en une occasion de démontrer la puissance de ce réseau, pourtant en perte de vitesse (membres en désaccord, prise d’indépendance de plus en plus importante chez les petits moulins…) ?
Régulièrement, chacun de ses acteurs nous gratifie d’une nouvelle invention.

Pourtant, cela ne rend qu’assez peu compte de la réalité du terrain. Je ne suis pas certain que les artisans se retrouvent vraiment dans ces actions, coûteuses et pas toujours bien reprises dans les boulangeries (à l’image des pains saisonniers créés par Baguépi/Soufflet, rarement proposés en boutique). Aujourd’hui, cette stratégie de fédération autour d’une marque aurait-elle trouvé ses limites ?
En effet, pour faire face à l’industrie et à la grande distribution, il faut certainement chercher à valoriser le plus petit, et redonner sa place au nom de l’artisan. Cela signifierait donc que ces « chaines » boulangères sont appelées à muter pour survivre. Ainsi, quelques uns ont dors et déjà commencé à développer de nouvelles marques, comme « Le Pain Boulanger » chez Banette.

Tout cela n’en demeure pas moins cosmétique. Le pain ne se limite pas à être une affaire de marketing et d’apparence. La vraie révolution qui devrait être impulsée, c’est celle de la qualité et de l’honnêteté. Plutôt que de promouvoir des prémixes comme ils ont tendance à le faire, ces réseaux devraient au contraire chercher à développer un vrai sens de l’artisanat, en formant les boulangers à des méthodes de fabrication toujours plus respectueuses du temps et de la tradition (pétrissage délicat, longs temps de fermentation…) mais aussi en leur apportant une matière première de qualité. Rien de plus essentiel que la farine dès lors qu’il s’agit de pain. Certains l’ont bien compris et ont décidé de capitaliser autour de cet atout, à l’image du Club le Boulanger (association de 12 meuniers à travers la France, dont Foricher ou Girardeau), qui porte la marque Bagatelle et leur farine Label Rouge et CRC, ainsi que la valorisation de la viennoiserie artisanale. Plutôt que du marketing et de belles images, c’est sur cet essentiel que l’on devrait toujours se concentrer.

Alors, dans quelle direction vont se tourner ces acteurs de la profession ? J’aurais tendance à penser qu’ils iront toujours vers la facilité et la poudre aux yeux, en privilégiant leurs intérêts financiers plutôt que ceux des consommateurs. C’est donc à nous d’influer pour une démarche positive et qualitative, en étant toujours plus attentifs et rigoureux dès lors qu’il s’agit d’acheter notre pain en boulangerie artisanale. Cette démarche n’est pas anodine, tout le monde ne prend pas le temps et les moyens de la mettre en oeuvre, il faut donc qu’elle soit respectée par le secteur de la boulangerie… en espérant qu’il prenne bien conscience des enjeux auquel il a à faire face.

Non, ce n’était pas une blague. Le painrisien est bien de retour, sans doute certains auraient préféré qu’il reste réduit au silence, mais je pense que l’écrasante majorité des lecteurs, occasionnels ou réguliers, auront une autre position. D’ailleurs, j’en profite pour remercier toutes les personnes qui m’ont témoigné de leur sympathie suite à mon retrait, m’aidant ainsi à prendre conscience que je n’avais pas seulement écrit plus que de raison… mais bien que j’étais parvenu à construire un lien fort et particulier avec la profession et mon lectorat. Une communauté d’amateurs – souvent éclairés et passionnés – de bon pain est née ici, c’est suffisamment fort et intéressant pour que cela ne s’arrête pas là.

Du chemin, une certaine quantité a été déjà parcourue mais il reste beaucoup à faire : le petit painrisien deviendra grand. Cela passe par plusieurs chantiers, et changements. A commencer par le rythme des billets : cette contrainte écrasante d’un article quotidien n’était pas souhaitable, et c’est la première chose sur laquelle je veux revenir. Mieux vaut travailler de façon plus sereine et raisonnable.
Ensuite, il y a le site en lui-même. Je suis heureux d’être parvenu à mettre en place ce qui présage du painrisien auquel je veux aboutir : plus qu’un guide, un véritable outil permettant à chacun de trouver du bon pain, mais aussi de quoi nourrir son esprit de façon plus globale. Les prochaines étapes sont bien entendu la dimension géographique, au travers de la carte, mais aussi une meilleure articulation autour des expériences qui font la « vie painrisienne » : à déguster, à voir, à écouter, à débattre… voilà autant d’éléments qui auront de quoi nous occuper pour longtemps encore.

Il ne faut pas s’arrêter à cela, mais aller plus loin : le pain est porteur de valeurs fortes, dont celle d’une exigence de qualité et d’honnêteté. Ce n’est pas un aliment comme les autres, c’est une des bases de notre alimentation et cela implique d’y porter nombre d’égards : au four comme au moulin, les acteurs doivent s’engager durablement dans une démarche axée sur le goût et la santé du consommateurs. Je pense que le painrisien peut participer à sa façon à ce mouvement, en valorisant les bonnes pratiques en la matière. Au delà du simple support numérique, il y a nécessité de « s’aventurer » sur d’autres terrains… tels que le papier. Malgré toutes les tablettes, les appareils connectés, rien ne parvient à égaler le caractère accessible et instantané d’un livre. La matière est là, je pense, en plus de 470 articles nous avons de quoi faire ! A moi de travailler sur le sujet pour mettre tout cela dans toutes les poches curieuses et gourmandes…

En 15 mois, je n’ai pas fait qu’écrire. J’ai aussi rencontré des personnes passionnées par leur profession, approché toujours plus près un univers à la fois simple pour le client final – rien de plus normal et quotidien que d’aller acheter une baguette de pain – mais éminemment complexe pour parvenir à ce résultat magique : faire du bon pain au quotidien, c’est un peu un miracle ordinaire. Plus que jamais, j’ai envie de défendre et aider ces « héros » sans cape ni super pouvoirs. Pour cela, il me paraît approprié de leur proposer des services de conseil et de communication : trop peu d’acteurs de la filière savent partager leur savoir-faire, et malheureusement, ce sont souvent les moins talentueux et honnêtes qui parviennent à le faire. Cela doit toujours se faire dans l’esprit que j’ai développé depuis le début au travers du painrisien : exigence, sincérité, et réelle volonté de progrès. Ainsi, vous pourrez compter sur moi pour porter toujours plus haut les couleurs de notre artisanat boulanger français, si profondément ancré dans notre culture.

J’en ai déjà parlé ici, mais cela n’a pas changé : j’ai toujours voulu le monde – à défaut d’y parvenir tout à fait, je crois que contribuer à apporter un peu de bonheur simple et accessible à chacun est déjà une bonne étape !

Guess who’s back. Décidément, j’aurais pu faire une série de titres en Anglais, mais non, je ne cède pas à la facilité. Surtout que cela ne ferait pas honneur au sujet de mon billet du jour, qui n’est autre… qu’une boulangerie, et à mon sens, pas n’importe laquelle. Une découverte comme celle-ci me redonne un peu d’espoir et d’envie, car on finit bien souvent par en être dépourvu, à trop regarder le monde et ses noirceurs. Ainsi donc me revoilà. Même lieu, même adresse, mais en réalité les choses sont bien différentes : j’y reviendrai plus tard, ce n’est pas l’objet de cet article.

Difficile de découvrir de nouvelles adresses quand on en a visité autant que j’ai pu le faire. Les options sont alors limitées : soit on se limite aux « meilleures » pour mettre en avant leur travail, soit on se tourne vers d’autres éléments de la filière (meunerie, …)… soit on mélange un peu tout cela en restant à l’écoute du « fond sonore » qui fait toute la complexité de la vie parisienne.
Du bruit, des éclats de voix, il n’en manquait pas lorsque Carole, la pâtissière-fondatrice de la charmante Petite Fabrique du Marché des Enfants Rouges, me parla d’une boulangerie située dans le 18è arrondissement, en plein coeur du quartier de la Goutte d’Or. Je ne vous cache pas que c’est loin d’être le secteur dans lequel j’ai tendance à me perdre, mais le bon pain devrait pouvoir se trouver partout et en tout temps. En tout cas, c’est le cas dans la boulangerie Tembely et on ne peut que s’en réjouir.

C’est dans cette boutique d’angle à l’allure très sobre que Swan et son épouse Khabija se sont installés il y a tout juste un an, en août 2011. Un parcours professionnel atypique pour ce boulanger, issu d’un cursus dans le design et de quelques années dans l’hôtellerie, avant de se reconvertir pour épouser cet univers de sel, d’eau et de farine. Atypiques, le nom et l’histoire de sa boulangerie le sont tout autant. Tembely ? Une référence aux origines maliennes de Khabija. Si le projet et l’envie de s’installer de ce couple ont pu se concrétiser, c’est grâce au concours de la SEMAEST – Société d’Economie Mixe d’Aménagement de l’Est de Paris -, qui proposait un local à louer pour l’ouverture d’une boulangerie au 33 rue Myrha. L’envie et le fait qu’il s’agisse d’un projet « indépendant », non porté par une quelconque chaine ou un industriel, sont parvenus à convaincre l’organisme.

Bien leur en a pris, car le résultat est à la hauteur des espérances. Passé la porte, on pénètre dans ce large espace réunissant aussi bien la vente que la production. Tout est transparent, ce qui permet à la clientèle de s’assurer sans aucun biais du caractère artisanal des produits proposés ici. Dans les présentoirs aux couleurs naïves, on trouve des pains et gourmandises bien éloignés des réalisations plutôt approximatives qui sont fréquentes dans ce quartier. Si une chose frappe immanquablement, ce sont les superbes cuissons : les pains affichent des croûtes bien ambrées, de la baguette de Tradition au pain au levain, en passant par les bâtards. Tout cela n’est pas seulement une question d’aspect… mais aussi de goût ! Les arômes n’en sont que plus présents et développés. Ainsi, cela permet de bien mettre en valeur la farine des Moulins Bourgeois utilisée ici. La Reine des Blés a vraiment tout d’une reine : extrêmement craquante, offrant une mie sauvage et fraiche, aux délicats parfums de froment, voilà une baguette qui se déguste sans difficulté, bien au contraire.
Ce qui est tout aussi appréciable, c’est la qualité de réalisation du reste de la gamme : des pains au levain très doux, d’excellente conservation, une superbe tourte de Seigle, quelques pains garnis (figues-noix, entres autres mélanges de fruits secs)… sans oublier un pain plat aux graines de sésame et de nigelle, conformément aux « coutumes » du secteur. Du choix, de la qualité, des prix raisonnables, la boulangerie Tembely a décidément tout compris. Cela ne laisse pas indifférent les habitants des alentours, qui ont immédiatement repéré la différence avec les autres boulangeries de la Goutte d’Or. Comme quoi, les quartiers populaires savent apprécier les beaux et bons produits, parfois bien mieux que d’autres plus aisés…!

Les plus gourmands ne seront pas en reste, puisque les viennoiseries bénéficient de la même attention, avec notamment un superbe croissant au feuilletage bien croustillant. Côté pâtisseries, cela demeure très simple, on y retrouve quelques réalisations à base de pâte à choux ou des tartes à la part. Rien de bien extraordinaire, mais on ressent bien l’esprit d’honnêteté propre à la maison.
L’offre traiteur mélange les cultures autant que peuvent le faire les alentours : la foccacia aux légumes côtoie les sandwiches ainsi que des préparations plus atypiques. Cet ensemble cosmopolite reprend bien la multiplicité des couleurs du lieu… Une belle cohérence qui nous offre des perspectives de cohabitation et d’échanges apaisés. « Tout le monde vient ici » me disait l’artisan. Effectivement, une boulangerie est un lieu de vie et de partage, qui accueille ses clients sans considération de classe sociale ou de revenus.

En parlant d’accueil, ce dernier est bien à l’image de la boulangerie : sincère, simple et honnête. On sent une réelle implication du personnel, une volonté de bien faire et de toujours partager cette aventure avec la clientèle.

Infos pratiques

33 rue Myrha – 75018 Paris (métro Château Rouge, ligne 4)
ouvert du mardi au dimanche de 6h45 à 20h.

Avis résumé

Pain ? L’offre de la boulangerie Tembely dénote vraiment des « standards » du quartier, autant en terme de diversité que de qualité. Que ce soit la baguette de tradition Reine des Blés (farine Label Rouge des Moulins Bourgeois) – craquante et légère, à la mie fraiche et alvéolée et aux douces notes de froment -, les pains au levain (nature ou aux fruits secs (noisettes, « benoiton ») d’une belle douceur, la tourte de Seigle ou encore les déclinaisons de petits pains, rien ne déçoit et affiche à chaque fois de superbes cuissons, ce qui assure aux produits une excellente conservation. Ajoutez à cela des tarifs très raisonnables (1,10€ pour la baguette de Tradition – 250g, 2,20€ la boule au levain – 410g…), vous obtenez un résultat plus que convaincant.
Accueil ? Un sourire sincère, une vraie volonté de partager avec la clientèle et le quartier, voilà ce qui caractérise l’équipe de vente oeuvrant ici. Certes, ce n’est pas toujours parfait, l’encaissement est parfois un peu approximatif, mais il ne s’agit pas là de l’élément le plus important sur le plan humain.
Le reste ? On ne manquera pas d’apprécier le soin porté aux viennoiseries, avec un superbe croissant au beurre (0,80€ seulement !) ainsi que quelques spécialités dont un charmant pudding. Côté pâtisserie, c’est très simple, quelques déclinaisons autour de la pâte à choux, des tartes et cakes… on n’en demande pas plus. L’offre salée poursuit dans le même esprit, en faisant se côtoyer les cultures : foccacia aux légumes, sandwiches mais aussi plats plus « ethniques ».

Faut-il y aller ? Oui, bien sûr ! De telles entreprises doivent être encouragées afin que le bon pain soit disponible partout : cela ne doit pas être l’apanage de quelques privilégiées, bien au contraire. Le caractère profondément démocratique de ce produit est une source de bonheur potentiel pour tous : quoi de plus agréable qu’une baguette craquante et savoureuse pour commencer la journée ou accompagner un repas ? Si en plus cette dernière est servie avec le sourire, qu’elle s’accompagne de gourmandises sympathiques dans un lieu à la fois sobre et bien vu, on ne pourrait pas demander grand chose de plus… sinon qu’il y ait plus d’artisans tels que celui-ci ! Pour reprendre les mots de Carole, forts jolis et tout à fait à propos au sujet de la boulangerie Tembely, « loin des projecteurs, il y a des petites lumières qui éclairent merveilleusement notre quotidien »… Un peu de lumière et de poésie pour la Goutte d’Or, écrivons le monde en couleurs comme le font Swan, Khabija et leur équipe, autant au travers de leurs produits que de leur devanture colorée.