S’il faut bien reconnaître une qualité aux services marketing et autres têtes pensantes tout droit sorties des écoles de commerce les plus prestigieuses, c’est celle de développer une exceptionnelle capacité à s’adapter et ainsi à faire face à de nombreuses situations sans jamais laisser paraître le moindre doute ou la moindre défaillance. Une chance pour eux sans doute, mais en définitive pas vraiment pour le consommateur qui ne sait pas à quelle sauce il va se faire croquer…

Du côté des « chaines » boulangères, des groupements tels que Festival des Pains, Banette, Baguépi, Copaline et autres Ronde des Pains, ces fameux communicants ne doivent pas manquer de travail. En effet, rien de plus difficile aujourd’hui que de se démarquer les uns des autres… Du côté de Banette, on a décidé de s’afficher sur le Tour de France et de distribuer du pain à tours de bras. Est-ce là la meilleure façon de mettre en avant le pain artisanal, ou cela consiste-t-il en une occasion de démontrer la puissance de ce réseau, pourtant en perte de vitesse (membres en désaccord, prise d’indépendance de plus en plus importante chez les petits moulins…) ?
Régulièrement, chacun de ses acteurs nous gratifie d’une nouvelle invention.

Pourtant, cela ne rend qu’assez peu compte de la réalité du terrain. Je ne suis pas certain que les artisans se retrouvent vraiment dans ces actions, coûteuses et pas toujours bien reprises dans les boulangeries (à l’image des pains saisonniers créés par Baguépi/Soufflet, rarement proposés en boutique). Aujourd’hui, cette stratégie de fédération autour d’une marque aurait-elle trouvé ses limites ?
En effet, pour faire face à l’industrie et à la grande distribution, il faut certainement chercher à valoriser le plus petit, et redonner sa place au nom de l’artisan. Cela signifierait donc que ces « chaines » boulangères sont appelées à muter pour survivre. Ainsi, quelques uns ont dors et déjà commencé à développer de nouvelles marques, comme « Le Pain Boulanger » chez Banette.

Tout cela n’en demeure pas moins cosmétique. Le pain ne se limite pas à être une affaire de marketing et d’apparence. La vraie révolution qui devrait être impulsée, c’est celle de la qualité et de l’honnêteté. Plutôt que de promouvoir des prémixes comme ils ont tendance à le faire, ces réseaux devraient au contraire chercher à développer un vrai sens de l’artisanat, en formant les boulangers à des méthodes de fabrication toujours plus respectueuses du temps et de la tradition (pétrissage délicat, longs temps de fermentation…) mais aussi en leur apportant une matière première de qualité. Rien de plus essentiel que la farine dès lors qu’il s’agit de pain. Certains l’ont bien compris et ont décidé de capitaliser autour de cet atout, à l’image du Club le Boulanger (association de 12 meuniers à travers la France, dont Foricher ou Girardeau), qui porte la marque Bagatelle et leur farine Label Rouge et CRC, ainsi que la valorisation de la viennoiserie artisanale. Plutôt que du marketing et de belles images, c’est sur cet essentiel que l’on devrait toujours se concentrer.

Alors, dans quelle direction vont se tourner ces acteurs de la profession ? J’aurais tendance à penser qu’ils iront toujours vers la facilité et la poudre aux yeux, en privilégiant leurs intérêts financiers plutôt que ceux des consommateurs. C’est donc à nous d’influer pour une démarche positive et qualitative, en étant toujours plus attentifs et rigoureux dès lors qu’il s’agit d’acheter notre pain en boulangerie artisanale. Cette démarche n’est pas anodine, tout le monde ne prend pas le temps et les moyens de la mettre en oeuvre, il faut donc qu’elle soit respectée par le secteur de la boulangerie… en espérant qu’il prenne bien conscience des enjeux auquel il a à faire face.

4 réflexions au sujet de « Vers une mutation des chaines boulangères ? »

  1. Très bonne analyse. Beaucoup de personnes sans qualification propre à la fabrication du pain se lance à tort sur le marché du pain pensant détenir la clef marketing qui fera vendre. Hors, les gens achètent le pain pour sa saveur avant-tout. Vive l’artisanat donc !

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