La rue des Martyrs ne manque pas d’animation. J’en discutais avec Sabine, la tenancière de l’échoppe, qui m’expliquait un peu les différents mouvements, installations et changements d’enseigne. Cette rue est en effet très commerçante et certaines des adresses sont de véritables institutions.

Parmi elles, la pâtisserie Seurre, dont la fermeture était intervenue en fin d’année dernière. En effet, son propriétaire – Gérard Seurre – prenait sa retraite sans qu’une succession ait pu être trouvée. Suite à cela, le local avait été pressenti pour accueillir une boutique de cosmétique appartenant au groupe Monoprix, ce qui n’avait pas manqué de provoquer un certain nombre d’oppositions.

J’ai appris ce week-end, par l’intermédiaire du DailyNeuvième que Sébastien Gaudard était en cours d’installation dans cette boutique, pour une ouverture prévue courant octobre. Ce pâtissier apporte avec lui un parcours prestigieux : passé chez Fauchon à l’époque Hermé puis chef pâtissier de la maison, créateur du Délicabar de la Grande Epicerie et plus récemment consultant. Son expérience et son goût du produit assureront, je n’en doute pas, la succession de Gérard Seurre, dont les créations étaient particulièrement appréciées par la clientèle.
C’est une excellente chose, car on ne peut pas dire que cette zone de Paris soit particulièrement pourvue en pâtisseries, la plupart des lieux proposant ce type de produit étant généralement des boulangeries. Comme je l’avais écrit ici il y a quelques temps, je pense que ce sont deux métiers différents, dont l’association n’est pas toujours bienvenue.

J’ai donc hâte de voir le résultat et d’essayer les gourmandises de M. Gaudard… Rendez-vous en octobre !

J’aime beaucoup les pains vendus au poids. Cela permet de n’acheter que de petites quantités et de découvrir ainsi de nouvelles saveurs, d’avoir plusieurs pains à table. Le seul inconvénient serait pour les amateurs de croûte – et j’en suis -, car ils sont souvent assez massifs, condition indispensable pour pouvoir être découpés proprement.

Chez Raoul Maeder, on peut faire son choix parmi trois grosses tourtes, assez impressionnantes d’ailleurs. Parmi elles, celle que j’ai choisi de vous faire à partager, car assez inhabituelle et surprenant, c’est la Tourte aux Graines de Courge. En réalité, quand on regarde sa mie, on se demande si l’intitulé inverse n’aurait pas été plus adapté, car elle est particulièrement chargée en graines.

Une fois passé le temps à regarder ce pain original, il faut bien passer à la dégustation et c’est là que l’effet est le plus intéressant. La mie, de bonne tenue grâce à sa densité, créé une balance avec le croquant des graines de courge. Bien entendu, la saveur dominante est celle de ces fameuses graines, qui constituent une grande part du pain. Le reste est assez secondaire, en réalité, il ne sert qu’à maintenir le tout ensemble. Au delà de son goût, cet ingrédient supplémentaire est riche en atouts santé. Cette graine est très nourrissante car riche en protéines, et contient de nombreux sels minéraux (magnésium, fer, phosphore, zinc, cuivre, potassium, calcium), des vitamines (A, B1, B2) et des acides gras insaturés. La graine de courge aide à soigner les infections urinaires et à lutter contre les parasites intestinaux. Tout un programme.
Ce qui nous intéresse dans le cas présent, ce serait plutôt son goût. Difficile de le comparer à un autre car il demeure assez singulier, certains le rapprochent de celui de la cacahuète ou de la pistache.

L’arôme est assez puissant et il n’est pas recommandable de déguster ce pain avec des mets peu marqués en goût. En définitive, il pourrait être presque plus agréable de le manger seul, ou avec une salade, ce qui permettra de relever son goût. Attention toutefois à ne pas en abuser, de petites quantités suffisent, autant pour le côté dense et roboratif de ce pain que pour éviter tout désordre intestinal lié à la consommation des graines de courge.

Tourte aux Graines de Courge, Raoul Maeder – Paris 17è, vendue au poids, 7 euros le kilo.

C’est vrai, parfois il m’arrive de céder à la tentation des jeux de mots faciles et cela se finit avec des articles aux titres un peu ridicules. Que voulez-vous, je suis humain, après tout. L’essentiel étant qu’au final, j’arrive à parler d’un artisan et de son travail.

Grégory Desfoux est tout le contraire d’un fou, justement. C’est plutôt un artisan et chef d’entreprise bien implanté dans Paris, avec trois boulangeries disséminées dans le 19è, le 20è et le 1er arrondissement. Ses boutiques dégagent une ambiance assez sombre, un peu particulière. J’avoue avoir eu du mal à m’y arrêter la première fois, n’étant pas particulièrement attiré par les lieux. Passé cette « barrière », j’ai pu découvrir la gamme proposée par M. Desfoux et ses équipes.

Côté pain, la tradition est déclinée sous diverses formes, aussi bien en pavé, en gâche ou bien qu’en baguette. Les cuissons sont généralement assez abouties et les croûtes bien dorées. A la dégustation, on ne peut rater les notes de levain et la très légère acidité qui s’en dégage. Ainsi, la baguette ne manque pas de caractère ni de craquant, malgré sa mie relativement peu alvéolée. Proposée à seulement 1 euro rue de Belleville, elle offre à la clientèle un bon rapport qualité/prix.
On retrouve bien évidemment d’autres classiques, tels que des pains aux fruits secs, aux figues, ou un plus inhabituel curcuma-noisette (bien que proposé dans la plupart des boutiques Kayser). La réalisation est honnête, les tarifs corrects, cependant, un petit bémol du côté de la conservation qui n’est pas excellente. Les pains perdent souvent de leur consistance le lendemain, devenant extrêmement mous. C’est dommage car les saveurs demeurent et elles sont bien agréables.

Les divers sandwiches et en-cas salés rencontrent un certain succès, leurs prix sont dans la moyenne et les saveurs sont assez variées. Rien de surprenant à chercher ici cependant. Même constat du côté des viennoiseries et des pâtisseries, dont la réalisation est correcte mais sans plus d’intérêt. On notera la présence de diverses tartes sucrées en « plaque », vendues à la part. Constituées de fruits de saison, elles offrent la possibilité de contenter à peu de frais une envie de gourmandise.

L’accueil est assez variable, cela dépend des heures, des jours et des personnes. En règle générale, le travail est fait, de façon efficace. La chaleur humaine n’est pas toujours de la partie, mais il faut faire avec. Le seul point qui demeure gênant, c’est cet aspect « pas très net » dans la boutique, qui ne suscite pas vraiment l’envie d’acheter.

Infos pratiques

112, rue de Belleville – 75020 Paris (métro Jourdain ou Pyrénées, ligne 11) / tél : 01 47 97 18 75
ouvert du mardi au samedi de 7h à 20h de et 7h à 19h30 le dimanche.
Deux autres boulangeries dans Paris, une au 57 Rue d’Avron dans le 20è arrondissement et une au 20 rue Montorgueil dans le 1er.

Avis résumé

Pain ? Le pain est assez savoureux, la baguette craquante et particulièrement accessible. Les notes exprimées par le levain liquide utilisé pour la fabrication de la gamme se ressentent tout en étant bien dosées, le résultat est agréable et a du caractère. Les quelques pains spéciaux ne sortent pas beaucoup des sentiers battus. Une réserve cependant vis à vis de la conservation, assez bonne pour la baguette mais plus moyenne pour le reste de la gamme.
Accueil ? Variable, c’est souvent ce qui est reproché aux boulangeries Desfoux. Cependant, le travail est toujours réalisé avec efficacité et les clients sont servis assez rapidement. A noter tout de même la présence de sympathiques et dynamiques jeunes filles, qui ont un sourire communicatif. A encourager.
Le reste ? Les classiques sont toujours là, la réalisation est assez honnête mais sans point fort particulier. Eclairs, tartes, croissants, pains aux chocolat… Le choix ne manque pas, avec cependant une petite préférence pour les tartes « en plaque », qui permettent ainsi de choisir sa quantité de fond de pâte. Les propositions salées (sandwiches, quiches…) sont réalisées avec sérieux.

Faut-il y aller ? La qualité des produits est bonne, les tarifs demeurent à des niveaux très acceptable, c’est donc une bonne adresse. Cependant, je n’accroche pas du tout à l’ambiance sombre et peu attirante des boutiques, qui est loin de mettre en valeur le travail de l’artisan. C’est dommage car on garde l’impression d’un certain manque de netteté, ce qui met un frein à l’achat. L’accueil ne compense pas toujours ce sentiment, de par son caractère variable.

Vous l’aurez certainement remarqué, mais j’ai une fâcheuse tendance à accorder une importance toute particulière à l’aspect des gourmandises que je déguste. Pour moi, le goût en serait parfois presque secondaire, je veux que le pâtissier me fasse rêver, me donne envie de rentrer dans son univers. Ainsi je passe sûrement à côté de beaucoup d’excellents pâtissiers, simplement parce que leur style ne me plaît pas. Tant pis pour moi, mais d’un côté, cela me permet de vous montrer de bien jolis gâteaux.

Hier, une petite ballade dans le quartier des Batignolles avant de passer chez Gontran Cherrier, et un détour par chez Acide Macaron. J’aime y passer car justement, le visuel est toujours très soigné, mignon et sobre. Autant pour les macarons, certains sont poudrés d’argent, d’autres affichent de bien vives couleurs… que pour les pâtisseries. Jonathan Blot travaille autour de la « bouchée », donnant aux plaisirs sucrés proposés dans sa boutique une petite taille et un aspect très éphémère. Rien de complexant ou de lourd, une façon très painrisienne de voir la gourmandise : dans l’instant, sans penser à l’instant suivant !

Pour les pâtisseries, la gamme est très courte, maximum 3 à 4 variétés. Cela permet d’assurer une grande fraicheur des produits et une finition soignée pour chacun d’eux, les pâtissiers n’ayant pas à produire à la chaîne. Egalement, seuls des fruits de saison sont travaillés, en plus du chocolat ou du caramel.
M. Blot porte visiblement un grand amour pour la fraise, et je garde un très bon souvenir d’une fraisier parfumé à la verveine dégusté plus tôt dans la saison. Ce samedi, les Mara des bois – ma variété préférée – étaient à l’honneur au travers d’une charmante tarte, où elles étaient associées avec une crème pistache, une crème à la vanille ainsi qu’un délicat confit de fraise et un fond de pâte sablée.

En pâtisserie, le plaisir tient à peu de choses, et notamment à la fraicheur. Mon expérience chez Un Dimanche à Paris un peu plus tôt dans la semaine le prouve : trop de temps au réfrigérateur et l’effet est gâché, même si la création n’est pas dénuée d’intérêt. Ici, ce n’est pas le cas : le fond de pâte était bien beurré, croquant, si bien que l’on prendrait plaisir à le déguster seul. Cependant, ce serait se priver du plaisir de l’associer avec ces petites fraises bien mures et parfumées, qui se marient si agréablement avec le goût du beurre.

Les crèmes étaient légères, bien parfumées et assez peu sucrées. Elles cachaient de plus d’agréables inserts de confit de fraise, qui renforçaient la saveur des fruits frais. Au final, l’ensemble est cohérent, agréable et frais. De la douceur, du croquant, de l’onctueux, voici une sympathique pâtisserie de saison, qui pourrait paraître trop petite de prime abord, mais qui peut ainsi terminer un repas en l’absence de toute lourdeur inutile.
Ajoutez à tout cela un service toujours souriant et agréable, un prix assez raisonnable, que pourrait-on demander de plus ? Peut-être que la boutique ne soit pas si perdue dans Paris, mais dans un sens, j’aime bien fuir cette concentration de pâtisseries dans des quartiers tels que Saint-Germain-des-Prés. Non seulement les tarifs augmentent, mais cela finit par perdre toute authenticité… Tout l’inverse d’Acide.

Tarte Fraise Mara des Bois – Pistache, Acide Macaron – Paris 17è. Proposé en portion individuelle, 3,90 euros.

Comme le faisait très justement remarquer Estérelle sur Twitter, les « caisses automatiques » ont une fâcheuse tendance à se répandre au sein des boulangeries ces derniers mois. Ces dispositifs gèrent l’encaissement et le rendu de la monnaie en lieu et place du travail effectué par les vendeurs/vendeuses jusqu’alors.

J’en avais déjà un peu parlé dans de précédents billets, notamment au sujet des Berlingots d’Hier du Grenier à Pain des Abbesses ou encore du Moulin de la Vierge. Je ne peux me résoudre à accepter cette « évolution », que je qualifierais au contraire de régression. Peu à peu, on s’oriente vers un rapport complètement déshumanisé au sein des boulangeries, alors qu’elles représentent de véritables vecteurs de lien social. J’en fais peut être beaucoup pour peu de choses, mais c’est une question de principe. Il n’est pas normal de se cacher derrière des raisons d’hygiène pour justifier ce changement : il est toujours possible de respecter des normes de sécurité alimentaire strictes malgré un transit de liquidités entre le personnel de la boutique et la clientèle.

Le pain n’est pas une marchandise comme les autres. Il est porteur de valeurs fortes, presque « sacrées » : le partage, l’échange, la simplicité. Refuser tout contact humain lors de sa vente, c’est chercher à perdre un peu de tout cela. A terme, pourquoi ne pas en arriver à des boulangeries complètement automatisées, de véritables distributeurs de pain ? Pratique et hygiénique, sans doute, mais quelle tristesse. Acheter du pain, c’est aussi partager quelques mots, un sourire, un peu de chaleur humaine. C’est idiot et banal, mais cela peut représenter beaucoup dans des périodes de solitude.

J’invite donc nos amis les artisans boulangers à ne pas céder aux beaux discours des fournisseurs de matériel de caisse, qui sont bien souvent très habiles pour vendre des dispositifs toujours plus perfectionnés – et donc coûteux. Doit-on renoncer à l’humain pour quelques écarts de caisse ? Ne soyons pas ridicules.
De l’autre côté, je vous invite vous, consommateurs de pain, painrisiens, provinciaux et même étrangers qui me lisez (j’en profite pour vous remercier une fois encore !), à ne pas fréquenter des établissements faisant ce choix, pour exprimer une opposition de principe, en espérant que de cette façon nous continuerons à fréquenter des boulangeries humaines.

Mercredi, je croisais Dominique Saibron en terrasse de sa boulangerie d’Alésia. Cela m’amuse toujours de discuter avec cette homme, c’est un peu comme un grand enfant quand il parle de ses produits, la passion qui se dégage est assez indescriptible, on ressent à la fois de la fierté et beaucoup d’amour.
Ce jour-là, il tenait à me faire goûter sa baguette de tradition « Alésiane » car il venait de recevoir de nouvelles farines, issues des dernières moutures de blé. Bien entendu, je connaissais déjà cette baguette, mais ce « changement » en entraîne d’autres, sur le plan des saveurs.

L’Alésiane, je l’ai goûtée, re-goûtée et encore re-goûtée. Je dois dire que c’est une de mes baguettes préférées, elle est l’expression de tout le savoir-faire de Dominique Saibron. C’est un bel exemple de ce que peut offrir la boulangerie : un produit d’exception, accessible et simple. Proposée à 1,10 euros les 250g – soit le prix d’une baguette de tradition « courante » – elle dévoile dès son achat des atouts non négligeables.
On remarque tout d’abord son façonnage élégant, ces pointes et ce grignage bien marqué. Un petit regret cependant sur ma baguette de mercredi, la partie centrale était peut-être un peu trop épaisse, ce qui faisait beaucoup de mie par rapport à la croûte. Ce petit « écart » est largement rattrapé par les extrémités qui ne sont composées que de croûte, à l’inverse.

J’ai connu quelques périodes où les cuissons laissaient un peu à désirer, mais je dois dire qu’elles sont parfaites dernièrement : l’Alésiane peut alors exprimer pleinement tous ses arômes. La petite note de levain, signature de Dominique Saibron, est perceptible et apporte des notes de miel ainsi qu’une légère acidité, ce qui contribue à affirmer le caractère de cette baguette. Il s’en dégage un parfum presque entêtant. Sa mie est légère, bien élastique et alvéolée, ce qui s’associe très bien avec la finesse de la croûte. On prend un grand plaisir à la déguster sans façon, en déchirant négligemment quelques morceaux. Sa croustillance, sa douce saveur de blé et de noisette en font une gourmandise redoutable.

Un autre point à signaler, la baguette Alésiane se conserve très bien, beaucoup plus que la moyenne des baguettes de tradition. Cela m’a toujours surpris, mais elle reste « fraîche » sans difficulté une bonne dizaine d’heures, belle performance.

Est-il possible de ressentir, en tant que consommateur « moyen » de pain, la différence entre la précédente farine et le nouveau millésime ? Ce serait un peu arrogant que de le croire, pour autant, le plaisir est toujours intact. Un plaisir que l’on aimerait retrouver chez bien plus d’artisans, car en attendant… Il faut bien se rendre à Alésia pour la déguster. Je vous avoue que cela ne me pose pas de problème, tant je trouve qu’elle justifie le détour.

Baguette Alésiane, Dominique Saibron – Paris 14è – 1,10 euros les 250g. La gamme Alésiane est également déclinée en pavés, petits pains et diverses ficelles.

Certaines boulangeries parisiennes ont une vraie histoire, elles ont appartenu par le passé à des propriétaires relativement marquants, qui ont imprimé un certain « style », aussi bien aux produits qu’aux murs. J’aime m’y rendre par curiosité afin de voir si des éléments demeurent de façon visible.

C’était l’objet de ma visite au sein de la boulangerie située au 10 place d’Italie. En effet, celle-ci était auparavant la propriété de Jean-Paul Mathon, maintenant installé avenue Gambetta. Elle a été reprise par Benoît Huré depuis quelques années. Ce boulanger, qui se décrit comme un « créateur de plaisir », est également présent rue Rambuteau, où il propose la même gamme de produits.

L’endroit n’est pas très grand, et une queue se forme rapidement sur le trottoir au déjeuner, les travailleurs et habitants du quartier ayant pris pour habitude de se ravitailler ici. Sandwiches, tartes, quiches, salades, les classiques salés répondent à l’appel avec fraîcheur et choix, dans des prix corrects. Cependant, ce n’est pas là la signature de la boulangerie. Le plus remarquable est sans doute le large choix de petits pains fourrés, « héritage » de l’époque Mathon. Aussi bien en salé qu’en sucré (chocolat, fruits, fromages, viandes, tout y passe !), les saveurs proposées sont nombreuses et séduisent les clients, car ces produits partent… comme des petits pains. Il faut dire que cela représente une gourmandise simple, peu coûteuse et surtout terriblement tentante. De plus, cela évite l’habituelle lourdeur du feuilletage des viennoiseries.
Ces dernières se situent dans une moyenne honorable, pas de surprise de ce côté là, même Il en est de même pour les pâtisseries, à la réalisation assez soignée et aux tarifs raisonnables, même si leurs couleurs sont parfois un peu trop tapageuses.

Intéressons-nous au pain : chez Huré, les plaisirs se déclinent au travers de larges gammes, à tous les niveaux, et le pain n’y fait pas exception. Pains aux diverses céréales, au maïs, aux fruits secs (dont le « Pain Acajou », à la mie sombre et riche en ingrédients variés), baguette au miel … la liste est longue et permet de varier les goûts sans difficulté. Certains sont vendus au poids, un choix appréciable pour éviter d’acheter des quantités trop importantes. Là encore, les tarifs des pains spéciaux restent assez sages et il est possible de se faire plaisir sans se ruiner.
Ce qui est plus regrettable, ce sont les cuissons, peu marquées et limitant de fait le développement des arômes des pains. Leur conservation est correcte sans être exceptionnelle.

L’accueil est chaleureux, efficace et professionnel. Il ne cherche pas à trop en faire ou à instaurer une atmosphère guindée, tout cela fonctionne à la façon d’une boulangerie de quartier et c’est bien agréable. C’est d’ailleurs le cas pour ses deux adresses, signe que la maison ne porte pas des prétentions qui seraient peu en phase avec ses prestations.

Infos pratiques

10 place d’Italie – 75013 Paris (métro Place d’Italie, lignes 5, 6 et 7) / tél : 01 43 31 33 93
18 rue Rambuteau – 75003 Paris (métro Rambuteau, ligne 11) – tél : 01 42 72 32 18

Avis résumé

Pain ? La gamme est large, la réalisation honorable et les saveurs également, même si les cuissons mériteraient d’être plus poussées, ce qui aurait d’ailleurs un impact positif sur la conservation. On appréciera cependant les prix assez doux ainsi que le fait que beaucoup de pains spéciaux soient vendus au poids, ce qui permet de choisir ses quantités librement. Des pains tels que l' »Acajou » ou la baguette au miel ne manquent pas de surprendre et égayeront les petits-déjeuners gourmands.
Accueil ? Dynamique, chaleureux et souriant. Il participe à créer une ambiance sympathique au sein des deux boulangeries et c’est l’un des éléments qui, à mon sens, font le succès des ateliers Huré, qui accueillent une clientèle nombreuse à toute heure de la journée.
Le reste ? La signature des lieux est sans conteste la large gamme de petits pains, certainement l’une des plus étendues qu’il m’ait été donné de voir dans la capitale. Ce petit encas sucré ou salé séduit tout particulièrement les parisiens, il faut dire que ce n’est pas cher et que c’est plutôt agréable. Pour le reste, la gamme salée est bien ficelée, l’ensemble des essentiels sont présents, de même pour le sucré. Pas de fausse note particulière à signaler.

Faut-il y aller ? Benoît Huré propose des produits honnêtes, ses boulangeries sont agréables, il n’y a pas grand chose à redire. Ce n’est pas pour autant qu’il faut y chercher des pains ou douceurs d’exception, même si leur réalisation fait preuve de sérieux, tout cela pour des tarifs raisonnables. En bref, de bonnes adresses de quartier, qui méritent tout à fait que l’on s’y arrête à l’occasion.

Il n’y a rien de plus gênant que d’être déçu par un endroit que l’on tenait jusqu’alors en estime. On aimerait lui trouver des excuses, se dire que c’était un mauvais jour, que tout cela ne peut être que le résultat d’erreurs passagères… Pour autant, l’addition arrive et elle a un goût amer, un peu comme un chocolat de mauvaise qualité.

Le chocolat, c’est le centre du concept développé par Pierre Cluizel au sein d’Un Dimanche à Paris. Comme je l’avais déjà écrit précédemment, l’endroit ne manque pas de charme et on se laisse aisément séduire par l’idée d’y prendre une petite pause sucrée un après-midi. Ce fût mon cas hier, et j’ai eu comme l’impression que les prestations étaient parties en week-end… me laissant un peu seul dans cette grande salle. Le décor est impressionnant, il associe avec goût le caractère historique du lieu et la modernité de l’agencement, dans des tons gris et verts. L’ambiance qui s’en dégage est très sereine, on retrouve bien l’idée du calme d’un dimanche, ce genre de moments où le temps semble ralentir un peu et nous laisser souffler l’espace de quelques heures.

Ce qui rompt un peu le charme, c’est le reste. Les petites tracasseries du quotidien. Le fait que l’on doive choisir sa pâtisserie dans les vitrines de la boutique avant d’aller s’asseoir, ou qu’elle nous soit apportée avant même que la commande des boissons ait été prise. Cela ne manque pas de surprendre, mais je ne peux pas dire que ce soit vraiment la façon dont j’aime être diverti. La pâtisserie trône donc sur la table en attendant que le reste vienne. Original. Tout comme l’idée de faire infuser son thé au client, en lui précisant le temps conseillé et en lui remettant un sablier permettant de le respecter. Amusant oui, peut-être… beaucoup moins quand il s’agit de retirer le sachet.

Ce sont certainement des détails, je suis probablement trop tatillon, mais j’ai d’autres raisons de l’être : en effet, le produit principal, en l’occurrence une tarte au citron meringuée, avait de toute évidence effectué un séjour prolongé dans la vitrine réfrigérée, comme en attestait le caractère « pâteux » du fond de tarte. Malgré le fait que l’on me l’ait remplacée, la seconde était du même calibre. J’ai renoncé. Visuellement, la tarte était très sympathique, autant de par sa forme rectangulaire que par sa meringue très travaillée. Au goût, c’est agréable, la crème au citron est assez équilibrée entre acidulé et sucré, le fond de crème d’amande apporte un peu de douceur. La meringue est moelleuse, peu sucrée. Cela constituerait un dessert assez réussi, si seulement il n’était pas servi dans cet « état ».

Au final, on peut se demander quelle est la démarche de M. Cluizel et ses associés pour la création de Un Dimanche à Paris. Serait-ce un bel investissement, un showroom payé à grands frais afin de multiplier le concept ? La maison s’est en effet payée de grands noms aux parcours prestigieux, je pense notamment à Quentin Bailly – le chef pâtissier -, passé chez Anne-Sophie Pic et formé avec Philippe Rigollot.
La question se pose également de la rentabilité d’un tel lieu : la surface est particulièrement importante, répartie sur plusieurs niveaux, ce qui implique d’employer une masse salariale plutôt conséquente. Parlons d’ailleurs rapidement du service au salon de thé. Sa formation semble plutôt sommaire, et malgré une volonté de bien faire, des lacunes apparaissent rapidement.

Je ne vous cache donc pas ma déception vis à vis de ce lieu gourmand, qui m’avait jusqu’alors beaucoup satisfait sur le plan des pâtisseries. Cette accumulation d’approximations donne une impression un peu brouillon, et le fait de déguster une pâtisserie dans un état médiocre achève de laisser pantois lorsque la note arrive : 14 euros pour un thé et un gâteau, au vu de cette expérience, on se dit tout simplement que l’on ne reviendra pas de si tôt. Dommage. J’aurais mieux fait de rester couché, ce dimanche… ou plutôt, ce mercredi.

Un Dimanche à Paris – 4-6-8, Cour du Commerce Saint André – 75006 Paris (métro Odéon, ligne 4) / tél : 01 56 81 18 18 / site internet : http://www.un-dimanche-a-paris.com/

Réflexions

24
Août

2011

Parler d’amour

2 commentaires

J’en parle souvent ici même, mais c’est vrai que le sujet me tient… « à coeur », sans mauvais jeu de mot. Etre painrisien, c’est aussi pour moi une histoire d’amour. D’amour du pain, oui, mais pas seulement. Aimer les saveurs, aimer rencontrer des personnes passionnées, aimer découvrir, tout simplement aimer la vie. Je ne peux pas dire que cela a toujours été le cas mais je dois dire qu’écrire ici m’y aide.

L’amour, c’est certainement l’ingrédient le plus important d’une recette qui fonctionne. Pour du pain, il est facile de reconnaître ceux qui sont réalisés avec et sans. Les premiers seront souvent bien façonnés, savoureux et procureront du plaisir à ceux qui les dégustent. Quant aux seconds, ils pourront être bâclés et inintéressants, même s’il est possible de compenser ce manque d’implication par une excellente maîtrise technique.
Un artisan amoureux de son métier exprime dans sa boutique son univers, ce qui le rend unique. Une signature, un sens particulier. Comment trouver tout cela chez des boulangers affiliés à des « réseaux » tels que Banette ou la Ronde des Pains ? Facilité et amour ne savent pas franchement cohabiter…

Plus j’avance et plus je rencontre des personnes qui ont cette petite lumière dans les yeux, ce « petit quelque chose » qui leur donne envie de se lever le matin et de se donner entièrement pour produire et créer ce qui fera le plaisir de leurs clients. Je trouve cela admirable et c’est une des raisons qui me poussent à continuer à écrire, à aller plus loin dans ma démarche. Cela représente une formidable source d’inspiration que je souhaite transmettre au travers du painrisien. Partager un peu d’amour et de simplicité, comme on partage le bon pain.

Je ne suis peut être pas le mieux placé pour parler de ce sentiment, mais j’apprends chaque jour à mieux en définir les contours, à le saisir dans toute sa vérité et sa complexité. L’amour n’est pas seulement un sentiment, mais une formidable source d’énergie, qui peut nous inciter à nous dépasser, à chercher où sont nos vraies limites. Difficile de concevoir une vie sans, et je n’envie pas les personnes qui subissent chaque jour un métier ou une relation qui en serait dépourvu.

Le hasard fait curieusement les choses, j’avais commencé à écrire cet article ce matin et je ne pensais pas que cette journée prendrait cette tournure, donnant pour moi plus de sens et de gravité à ce « discours ». Cela m’a mis face à cette nécessité absolue de ne pas se fourvoyer dans des chemins où l’on ne trouve aucun plaisir, où l’on réalise ses tâches par automatisme, sans justement y mettre ne serait-ce qu’une once d’amour. Pourtant, c’est un peu ce qu’il devrait rester quand on pense que tout est perdu, que cela n’a plus d’intérêt de continuer.
Mon quotidien de painrisien ne m’apporte peut être rien sur le plan financier, il ne me permet pas de vivre, mais pour autant c’est une source infinie de chaleur humaine, de rencontre, de partage. C’est suffisamment rare dans nos sociétés égoïstes et individualistes pour que je me dise que tout cela en vaut la peine, et que dans un sens, je suis « chanceux » et un minimum utile. Il n’est pas là question de mon petit plaisir, mais bien d’aider et d’aimer ceux et celles qui m’entourent. Soyons un peu fous et utopistes, croyons simplement au fait qu’il est possible de mettre un peu de lumière dans la vie des gens, d’effacer le noir et le gris qui entourent les yeux de toutes ces personnes que le monde a perdu.

Ce billet restera sûrement parmi les plus étranges écrits depuis les débuts du painrisien, mais cela m’importe peu. L’essentiel, c’est aussi de garder une certaine liberté de ton et de ne pas ce censurer bêtement. Exprimer un peu sa passion, son amour, tout simplement.

En terme de pâtisseries, il devient toujours difficile à un certain point de se différencier en proposant des formes originales, des créations sortant des « carcans » habituels. Tartes, entremets, pâtes à choux… Les gourmands finissent par tourner en rond.

Heureusement, quelques chefs prennent les choses en mains et se décident à proposer en « pâtisserie boutique » des produits un peu différents, à mi-chemin entre le dessert traditionnel et celui proposé en restauration. C’est notamment le cas du Hugo Framboise, une vraie gourmandise d’été.
Son aspect est sympathique, à la fois sobre et travaillé. L’ensemble des composants de la pâtisserie sont visibles : de bas en haut, la dacquoise amande, le disque de chocolat blanc, la marmelade de framboise, les framboises fraiches, le mousseux au lait d’amande et enfin le « cerceau » de chocolat blanc.
Ce côté inhabituel nous force à réfléchir sur la façon de déguster la douceur, en effet, il est difficile d’envisager l’utilisation d’une cuillère seule, le résultat serait assez chaotique. L’emploi d’un couteau et d’une fourchette à dessert est préférable, d’autant que cela permet de créer ses propres associations plus facilement.

Comme la plupart des créations d’Hugues Pouget, le Hugo Framboise est très léger, peu sucré et il constitue une vraie pâtisserie de saison : en Eté, je ne suis pas certain que nous soyons réellement attiré par des gâteaux lourds et volumineux. Certes, il ne faut pas tomber dans l’excès inverse, et proposer une portion dont la taille serait frustrante. C’est un peu le cas pour moi ici, l’ensemble étant tellement fruité que l’on en mangerait bien un peu plus.

Si l’on met ces considérations de côté, les accords ont été bien travaillés et les matières premières utilisées sont de qualité, c’est incontestable. L’amande et la framboise sont deux éléments dont l’association fait merveille, la première apportant une note de douceur à l’acidulé du fruit. Le chocolat blanc, peu sucré et agréable, contribue à cet effet. Le fait qu’il soit intégré en deux plaques apporte du croquant, le jeu de textures est agréable. Les framboises fraîches sont bien parfumées, ce qui est trop rarement le cas, beaucoup de pâtisseries faisant le choix de rogner sur la qualité des fruits, ceux-ci représentant la plupart du coût d’un gâteau.

Les saveurs sont délicates et subtiles, c’est un style assez singulier et à contre courant de la démarche adoptée par nombre de pâtissiers, qui proposent des créations saturées en saveurs. L’exemple le plus poignant à mon sens est la mode des macarons, bien souvent sucrés et fortement aromatisés. Le parti-pris d’Hugues Pouget peut rebuter les plus « gourmands », j’avoue avoir été parfois déçu, notamment en raison du fait d’une trop grande « douceur » à la dégustation. Pour autant, la framboise étant un fruit au goût marqué, cela fonctionne bien ici.

Hugo & Victor nous propose donc là une création moderne et réussie, même si on pourrait lui reprocher un rapport taille/prix peu intéressant pour le client final, mais en matière de pâtisseries, mieux vaut privilégier la finesse et la légèreté, qui sont bien mieux adaptés à nos modes de vie urbains et contemporains.

Hugo Framboise, Hugo & Victor – Paris 7è et 1er,  proposé jusqu’à aujourd’hui (désolé de ne le goûter que tardivement !), 6 euros la portion individuelle.