L’alimentaire suscite des concepts et des modes. Ces dernières années, on a pu assister à l’apparition de tendances telles que la cuisine moléculaire, la « slow food », la folie des verrines… j’en passe, j’en oublie, forcément. Cela reste toujours assez éphémère, et on peut observer un certain retour au classicisme, certes revisité et remis au goût du jour.

Côté boutiques, même chose, des concepts se sont développés et ont pu changer l’expérience client au cours de ses achats. C’est le cas pour les pâtisseries « haut de gamme », qui rivalisent d’inventivité pour trouver de nouvelles façons de vendre des douceurs, au grand plaisir des architectes d’intérieur, qui ne peuvent que se frotter les mains.

Chez Hugo & Victor, l’auteur de l’aménagement n’est autre que Francis Krempp, connu pour avoir conçu les boutiques Nespresso. Le résultat ? Définitivement chic, haut de gamme, c’est brillant mais sobre, les lignes circulaires sont bien pensées. Le problème, c’est que l’on ne se sent pas vraiment dans une pâtisserie, mais plutôt chez un concepteur de mode de luxe. Les pâtisseries et douceurs, dans leur bel écrin vertical, sont des objets inaccessibles, mettant un frein à l’instantanéité de la gourmandise. Aseptisé, intellectualisé, tels ces coffrets de chocolat prenant la forme de carnets Moleskine. Je suis assez critique mais c’est simplement car je ne suis pas persuadé que ce soit une approche pertinente pour de tels produits. A mon sens, l’univers du sucré se rapporte plus à l’émotionnel, à l’éveil de nos sens, qu’à une démarche intellectuelle. Pour autant, cela ne retire en rien la beauté de ces boutiques et leurs qualités architecturales indéniables : fluidité, possibilité de se « promener » entre les univers de produits, liberté créée par l’absence de comptoir… Tout cela est positif.

Passons au plus important, les gourmandises, car c’est bien ce pour quoi on vient. Le concept est le suivant : 3 saveurs intemporelles (chocolat, caramel et vanille), ainsi que 5 saveurs de saison. Pour chaque déclinaison, on retrouve une proposition « créative », un classique revisité, un chocolat sphérique et un accord avec un vin. L’idée est bien trouvée et appelle la curiosité.
Je suis un client régulier depuis l’ouverture en mars 2010. Je dois dire que j’ai beaucoup aimé leurs premières créations, notamment pour leur caractère peu sucré et riche en saveurs. Malheureusement, j’ai été de déception en déception au fil des mois. D’abord avec une déclinaison autour de la poire très fade, puis par un millefeuille vanille mal équilibré entre crème et feuilletage, par un gâteau à la praline rose qui n’avait que le goût de sucre et encore hier par une religieuse verveine dont la pâte à chou était molle et fade. Peut-être la promesse offerte par tout ce décorum est trop grande et entraîne inévitablement cet effet… toujours est-il que le rapport qualité/quantité/prix n’est pas vraiment à l’honneur des créations de monsieur Pouget.

Je terminerai sur les hommes et femmes qui font cette entreprise. Hugues Pouget, chef pâtissier de la maison, est issu de la maison Guy Savoy et a également beaucoup voyagé. Il en a retiré une passion pour les saveurs d’ailleurs, que l’on retrouve assez bien dans les déclinaisons saisonnières de la maison (combawa, canne à sucre, …). Son approche sur l’utilisation du sucre est intéressante : il le voit comme une épice et souhaite l’utiliser pour ses pâtisseries comme le sel en cuisine. Le co-fondateur de l’entreprise se nomme Sylvain Blanc, polytechnicien de son état. Il a notamment participé au développement de la marque Cacao Barry, et a occupé des responsabilités au sein du Printemps. Ce sont deux hommes très sympathiques, passionnés par leur travail et intarissables sur la qualité des ingrédients et process utilisés. Leur équipe de vente est également charmante, souriante et professionnelle. Je n’ai jamais eu de mauvaise expérience et ai toujours senti une grande attention à la satisfaction de la clientèle. Pourquoi le résultat est aussi décevant alors ? J’ai un peu de mal à comprendre et cela m’attriste…

Infos pratiques

Deux boutiques à Paris (une près du Bon Marché, boulevard Raspail – une autre à deux pas du Marché Saint Honoré, rue Gomboust) ainsi qu’un corner chocolat au Printemps de la Mode. Toutes les informations (adresses, horaires…) au sujet de ces points de vente sont indiquées sur http://www.hugovictor.com

Faut-il y aller ? Je suis partagé. J’ai eu d’excellentes expériences avec leurs produits par le passé et la qualité des ingrédients utilisés est indéniable. Cependant, j’ai aussi été tellement déçu que je ne peux qu’observer une grande réserve à présent. Cela reste une adresse à découvrir, avec des saveurs intéressantes (ne pas passer sur la Verveine, très fraîche), un concept singulier et un accueil charmant. J’espère juste que ces dernières petites tâches d’huile ne seront qu’un mauvais souvenir dans quelques mois. Restera alors uniquement ce côté très aseptisé, pas forcément compatible avec une certaine idée du sucré et de la gourmandise. Les goûts et les couleurs…

Une réflexion au sujet de « Hugo & Victor, la gourmandise aseptisée »

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