Lisez également mon second billet au sujet de la boulangerie Raphaëlle, suite à ma rencontre avec ses propriétaires.

Certains jours, on pourrait dire que je ne suis pas énervé, mais plutôt que je suis en colère… à l’image d’une de nos actrices de la vie politique. En colère du fait du manque de professionnalisme et d’implication de la part de certains artisans, qui profitent de dispositifs d’image et de marques pour valoriser leurs produits, alors même que ces derniers sont en définitive bafoués par le non respect des valeurs d’excellence qu’ils portent. Dès lors, le problème n’est pas limité à un artisan, une boutique, mais concerne tous ceux qui font d’importants efforts pour respecter scrupuleusement le cahier des charges qu’on leur impose.

Boulangerie Raphaëlle, Paris 18è

Paris 18è. Une boulangerie discrète, à l’angle des rues André del Sarte et Feutrier. Derrière cette jolie façade rouge, ornée d’illustrations peintes du meilleur effet, c’est Raphaëlle qui régale. Ou plutôt Sébastien et Priscilla Hayertz, installés ici depuis fin 2009. Je dois dire que je n’avais pas eu l’occasion de découvrir les lieux avant d’en avoir eu vent suite au concours de la Meilleure Baguette de la Ville de Paris. En effet, l’artisan s’est distingué cette année en décrochant le second prix, tout comme au Master de la baguette francilienne, organisé sur le Parvis de Notre-Dame à l’occasion de la Fête du Pain.

Quelques semaines après, la fameuse baguette obtenait la certification Label Rouge et par la même occasion l’appellation « Bagatelle », la marque développée par le Club le Boulanger pour valoriser l’engagement dans ce produit haut de gamme. Il ne faudrait pas pour autant que notre ami boulanger se trompe sur le sens à donner à ce mot : non, il ne s’agit pas d’une chose de peu d’importance, bien au contraire. Pourtant, je dois dire que je n’aurais bien peu de choses positives à dire au sujet des produits de cet artisan.

Heureusement que le papier nous rappelle que cette baguette a été fabriquée de façon artisanale, sinon on pourrait presque croire qu'elle provient du point chaud au coin de la rue, vous savez, celui auquel on ne va que quand les placards sont vides. Pourtant, il s'agit bien là d'une baguette de Tradition française Label Rouge !

Heureusement que le papier nous rappelle que cette baguette a été fabriquée de façon artisanale, sinon on pourrait presque croire qu’elle provient du point chaud au coin de la rue, vous savez, celui auquel on ne va que quand les placards sont vides. Pourtant, il s’agit bien là d’une baguette de Tradition française Label Rouge !

« La baguette BAGATELLE Label Rouge est fabriquée exclusivement à partir de la farine BAGATELLE Label Rouge. Elle est pétrie et cuite par un artisan boulanger qui respecte une méthode de panification artisanale rigoureuse et qui a obtenu le Label Rouge pour l’excellence de son travail. » J’ai du lire l’intitulé pour en être sûr : il s’agissait bien de la baguette de Tradition. J’avais plutôt l’impression d’avoir en face de moi la version « de pain courant ». Elle en a tous les atours : une cuisson courte, une mie blanche voire grisâtre, dépourvue d’alvéolage… au delà de la description physique, il y a aussi le goût et le parfum. Ici, nous avons affaire à de la levure, et à rien d’autre. Autant dire que cela n’a rien d’agréable. Même constat du côté des variations agrémentées de blé noir ou de farine de Gaude. Pour parfaire le tableau, ce constat n’est pas isolé : pensant à un « mauvais jour », je suis retourné à plusieurs reprises dans cette boulangerie. Rien de mieux.

La lumière donne quelques couleurs aux pains, mais c'est assez illusoire, en fin de compte.

La lumière donne quelques couleurs aux pains, mais c’est assez illusoire, en fin de compte.

Dès lors, vous comprendrez fort bien que je n’irai pas vous faire l’article des pains spéciaux. Intégral aux graines, pain biologique à la farine de Meule, à l’épeautre ou à la farine de châtaigne, le choix varie selon les jours et les saisons. On pourra au moins leur reconnaître des cuissons mieux réalisées, même c’est une maigre consolation.
Les viennoiseries ne font pas mieux dans leur registre, avec un caractère approximatif qui pourrait être charmant si l’on ne virait pas dans les ratés : croissants parfois trop cuits, feuilletage plutôt sec… sautons les pâtisseries et consolons nous avec les madeleines aux parfums variés pour retrouver un peu de douceur.

Pâtisseries et gourmandises, Boulangerie Raphaëlle, Paris 18è

Pour les sandwiches, difficile de vous en faire l’article, dès lors que le pain n’y est pas, on pourrait bien mettre les meilleurs produits à l’intérieur, le résultat serait toujours aussi médiocre. Reste alors le service, plutôt sympathique, souriant et efficace. Certes, l’affluence n’est pas exceptionnelle dans ces rues un peu à l’écart de l’agitation du Sacré-Coeur, mais c’est aussi ce que l’on apprécie dans ces petites boulangeries « de quartier » : le calme et la sérénité.

Infos pratiques

Angle 1 rue Feutrier – 10 rue André del Sarte – 75018 Paris (métro Barbès-Rochechouart, lignes 2 et 4) / tél : 06 99 34 81 61
ouvert tous les jours de 7h30 à 20h, sauf le mercredi et le mardi à partir de 14h.

Avis résumé

Pain ? C’est sans doute sur ce point que je suis le plus en colère. En colère de voir les efforts mis en oeuvre derrière une démarche qualitative mis à néant par des artisans visiblement peu respectueux de leur clientèle. La Bagatelle, cette fameuse baguette de Tradition certifiée Label Rouge, se trouve ici bien blanche, dépourvue d’alvéolage et développant un fort parfum de levure. Ce qui devrait être un produit d’exception se retrouve au même rang qu’une baguette de pain courant… Malgré les processus de contrôle mis en place, il est anormal que de telles situations puissent avoir cours. Cela tient de la responsabilité du meunier – ici les minoteries Trottin – et des organismes certificateurs (Certipaq, Club le Boulanger). L’imposture continue avec des titres obtenus aux concours de la Meilleure Baguette de la Ville de Paris ainsi qu’au Master. J’ai bien du mal à comprendre, parfois.
Accueil ? C’est sans doute ce qui relève un peu la tristesse que nous inspirent les produits. Le service est agréable, plutôt souriant, et on profite un peu du calme dans cette rue placée à l’écart de l’agitation montmartroise. Une petite boulangerie de quartier, à la devanture soignée, que l’on aimerait juste aimer.
Le reste ? Inutile de s’étendre sur le sujet. Viennoiseries, pâtisseries et autres produits demeurent tout aussi approximatifs que les pains. On se consolera juste avec la douceur d’une de ces madeleines, déclinées en plusieurs parfums et couleurs.

Faut-il y aller ? Non. J’aurais bien du mal à vous inviter à aller chez un artisan qui porte aussi peu d’intérêt à une filière où il devrait se positionner en porte-drapeau de la qualité. Il ne me reste plus qu’à espérer que les procédures de contrôle parviendront à remettre de l’ordre dans cette « anomalie » bien désagréable. J’ai bien hésité avant de rédiger cet article. Parler de cette adresse me fait de la peine, en définitive.

Une réflexion au sujet de « Boulangerie Raphaëlle, Paris 18è, là où la Bagatelle devrait être prise au sérieux »

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