On vit une époque formidable. Si, si, croyez-moi. Rarement le monde aura autant changé en si peu de temps, rarement nos habitudes auront été bouleversées à ce point. Cela touche à peu près l’ensemble des éléments qui constituent nos vies, et ce caractère global et quasi absolu est autant fascinant qu’effrayant. Dans ce mouvement, deux choix s’offrent à nous : en être acteurs ou simplement spectateurs.

En matière de gourmandise, cela suit le même mouvement. Peu à peu dé-sucrées, revisitées, déstructurées puis restructurées, elles sont en changement perpétuel et dans un sens, on aurait bien tort de s’en plaindre. Pendant trop longtemps nous avons été otages de nos propres goûts, condamnés à l’uniformité gustative. Un peu de fraicheur ne nous fait pas de mal.
Au delà de l’aspect visuel et gustatif, il y a aussi une réflexion à mener sur la façon dont on consomme le dessert. Avec un mode de vie de plus en plus stressant et ‘nerveux’, nos habitudes en ce qui concerne les repas ont été profondément bouleversées. Pris sur le pouce, entre deux rendez-vous ou réunions, ils sont souvent peu savoureux et avalés avant même d’avoir eu le temps de chercher à les apprécier…

Doit-il en être de même pour les pâtisseries et le sucré ? On a tous des souvenirs de longs goûters pris entre amis ou en famille, de desserts après un copieux repas les jours de fête, … le sucré garde un côté sacré, même s’il peut très bien être synonyme de gourmandise ‘dans l’instant’ au travers de biscuits, viennoiseries et autres produits bien moins hautement considérés.
Pour autant, je pense que l’on pourrait tout à fait concevoir de consommer des desserts « haute couture » en les intégrant dans nos journées très actives, comme des notes d’élégance dans cette grisaille ambiante. Cela fait un peu partie du travail que réalise Christophe Adam avec son concept de « snacking sucré », qu’il décline à présent dans les deux restaurants Adam’s des 8è et 12è arrondissements.

Il n’est pas le seul à tenter de dépoussiérer la pâtisserie, en associant fraîcheur et inventivité. J’ai déjà eu l’occasion de vous parler des créations de Jonathan Blot, créateur de la sympathique boutique Acide Macaron, malheureusement blottie dans son 17è arrondissement. Ici, on casse les codes et on réalise chaque jour des gourmandises modernes et bien dans leurs baskets : macarons au bubble-gum, au yuzu et à la bergamote …, petits sablés très soignés tout en étant terriblement gourmands et régressifs, … mais aussi une gamme sans cesse mouvante de pâtisseries.
Parmi celles-ci est arrivée pour les beaux jours un surprenant « Yaourt ». Présenté dans ce petit pot très simple (le packaging est temporaire et devrait être remplacé très rapidement), il nous propose une expérience de dégustation plutôt originale et savoureuse. Si l’on se limite à l’intitulé, on peut bien entendu penser que tout cela n’a pas grand intérêt, et qu’il suffirait de se rendre dans le supermarché le plus proche pour y trouver un équivalent moins onéreux. Non, il s’agit bien là de ce que l’on peut appeler une pâtisserie, un yaourt « haute couture » si vous préférez.

Pour le déguster, pas besoin d’assiette ou de cérémonial. Une cuillère, quelques secondes de votre temps, et « vous êtes chez vous » comme l’auraient dit les publicitaires de France Télécom en leur temps. Une fois celle-ci plongée, vous découvrez alors cette association d’une crème parfumée aux agrumes, d’une gelée de fruits rouges et d’un mélange de fruits frais. L’onctueux de la partie lactique s’oppose avec le côté plutôt « froid » de la gelée, ce qui ne manque pas d’intérêt, tandis que les fraises, framboises et myrtilles craquent légèrement sous la dent avec leurs grains et pépins. Les agrumes apportent une douce saveur pour relever les fruits rouges, et leur acidité aura permis d’obtenir la texture souhaitée : en effet, la crème n’est pas trop prise comme on aurait pu le craindre, on est bien loin d’une panacotta ou équivalent, puisqu’aucune gélatine n’est utilisée ici.
C’est frais, léger, peu sucré. Une vraie gourmandise pour le printemps et l’été qui arrivent. La simplicité et la saveur du produit en font une création intéressante, avec une réelle volonté de dépasser les codes habituels de la pâtisserie. Cela n’est pas une verrine, un entremet, une tarte… Non, c’est différent. Ca n’en est pas moins joli, et très accessible.

Le Yaourt, Acide Macaron – Paris 17è, « tube » individuel vendu 3,5€ l’unité.

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