Le repli sur soi me semble être l’un des plus grands dangers de notre époque. Cela fait partie des grands paradoxes de notre monde moderne : nous sommes à la fois hyper-connectés, reliés en permanence les uns aux autres, nos actions sont toujours plus orientées selon leur caractère social… mais la différence n’en est pas pour autant mieux acceptée, la tolérance ne se développe pas suffisamment et l’individualisme continue à grandir. Pourtant, si l’on regardait nos voisins avec plus de bienveillance, nous n’en serions pas pour autant plus faibles, mais au contraire plus vivants…

Les Blés de Demain - Veigné. La boulangerie est engagée dans la démarche "Viennoiserie 100% maison" et affiche le label en boutique et à l'extérieur.

Les Blés de Demain – Veigné. La boulangerie est engagée dans la démarche « Viennoiserie 100% maison » et affiche le label en boutique et à l’extérieur.

Marc-Antoine Bosquet et Philippe Comte ont pu développer leur goût des autres, du partage et de la transmission au sein des Compagnons du Devoir, où ils ont évolué de façon parallèle et croisée. Les deux amis ont multiplié les expériences pour devenir des professionnels complets et appréhender pleinement les enjeux de leur métier. Que ce soit en France ou à l’étranger, dans la filière artisanale ou industrielle, en boulangerie ou en meunerie, dans de grandes villes comme dans des zones reculées, à l’image de Cucugnan… Ils ont appris autant qu’ils ont donné, en perpétuant la tradition du compagnonnage et en tissant des relations fortes avec de nombreux artisans. Anthony Bosson, que l’on connaît bien à Paris avec ses trois boulangeries, est d’ailleurs le parrain de Marc-Antoine Bosquet au sein de cette organisation. C’est un véritable modèle pour l’artisan tourangeau, qui a lui aussi voulu voler de ses propres ailes…

Les pains

Les pains

… cela tombait bien, puisqu’il en était de même pour son ami de longue date, Philippe Comte. S’ils avaient commencé leurs recherches de façon séparée, ils se sont vite rejoints. Ainsi sont nés Les Blés de Demain, à Veigné (37), en août 2014. Ce nom ne doit rien au hasard : il correspond à l’engagement pris ici dans l’utilisation de farines de qualité, moulues à partir de blés anciens. Une grande partie de la production est réalisée avec les farines de la Minoterie Bourseau, avec notamment la Tradition T65 Bagatelle, le Gruau T45 pour la viennoiserie et de la meule. Tous les pains sont réalisés à partir de levain naturel – liquide pour les baguettes et les brioches, dur pour les produits plus typés.

A Veigné, la boutique a conservé son caractère rustique et authentique, ce qui correspond bien aux produits proposés. Le pain est bien mis en valeur face au client avec une présentation à l'horizontale.

A Veigné, la boutique a conservé son caractère rustique et authentique, ce qui correspond bien aux produits proposés. Le pain est bien mis en valeur face au client avec une présentation à l’horizontale.

Pour le reste, c’est Roland Feuillas qui fournit du Kamut et des blés de population – Marc-Antoine Bosquet a passé de nombreux étés à Cucugnan et a ainsi été particulièrement sensibilisé au travail réalisé par le paysan-boulanger autour des variétés anciennes -, ainsi qu’un autre agriculteur de la région toulousaine. L’objectif est, à terme, de parvenir à engager la même démarche à proximité. Pour cela, il faut parvenir à convaincre des agriculteurs, créer la filière aboutissant à la farine. Un processus long qui n’a pas pour autant découragé Marc-Antoine, aidé par son ancrage dans le territoire et ses liens tissés avec des agriculteurs… et c’est ainsi qu’il suit son cours. Bien sûr, ces blés ne se retrouveront sans doute pas dans les pains demain, mais on peut d’ores et déjà saluer l’engagement.

Les Baguettes de Tradition, réalisées à partir de farine Label Rouge Bagatelle. Elles sont façonnées à la main.

Les Baguettes de Tradition, réalisées à partir de farine Label Rouge Bagatelle. Elles sont façonnées à la main. Elles offrent une croûte bien craquante, une mie fondante et un parfum de froment soutenu. Le levain demeure très discret, ce qui est très appréciable sur ce type de pain.

Ici, les recettes ont été pensées pour aboutir à des produits à la fois savoureux et digestes : de longues autolyses et fermentations pour dégrader au mieux les glutens et développer les arômes, un façonnage entièrement manuel, des pâtes bien hydratées… il n’y a aucun secret dans ces procédés, mais encore faut-il avoir à coeur de les respecter – et ce n’est pas toujours le cas dans notre boulangerie moderne.
Le savoir-faire s’étend également du côté de la viennoiserie, avec un croissant récemment classé en seconde position au Concours Départemental du Croissant d’Indre-et-Loire. Le feuilletage est en effet extrêmement bien maîtrisé, et cela se retrouve d’ailleurs sur les galettes des rois – réalisées à partir d’un feuilletage inversé pour plus de fondant.

Des viennoiseries au feuilletage léger et bien développé.

Des viennoiseries au feuilletage léger et bien développé.

La gamme de pâtisserie est également de bonne facture, avec des classiques généreux et quelques créations abouties. Les gâteaux de voyage -cakes, pains d’épices ou tendresses de Veigné (des moelleux garnis au chocolat ou aux fruits)- ne sont pas en reste tout comme les diamants aux multiples parfums. On retrouve ici et là les inspirations prises au fil du parcours professionnel des deux hommes… mais quoi de plus normal, c’est le fil de la transmission qui se prolonge.

Pâtisseries, Les Blés de Demain, Veigné (37)

Cette même transmission est un sujet central pour l’entreprise, que ce soit en vente ou en production. L’engagement de Marc-Antoine Bosquet et Philippe Comte est de transmettre le goût du bon produit à leur clientèle – et c’est loin d’être évident en zone rurale. Nombre de clients demandent du pain peu cuit ou sont habitués à la viennoiserie industrielle, il y a alors un véritable travail d’éducation à mener. Ces efforts finissent par payer : depuis leur installation, ils sont parvenus à inverser le rapport de ventes entre baguette de pain courant et Tradition, et à fédérer des habitués autour de leurs spécialités. Lors des fêtes de fin d’année, autant en boulangerie qu’en pâtisserie, les clients ont accordé une grande confiance à l’établissement. Pour cela, l’implication de l’équipe de vente dans le projet de l’entreprise aura été un élément déterminant, et les deux associés n’hésitent pas à être présents en boutique pour y participer.

La boutique de Sorigny

La boutique de Sorigny

L’équipe a pris pris de l’ampleur avec l’ouverture de leur deuxième boutique, à Sorigny, dans le courant de l’été. Même si toute la production reste centralisée à Veigné, des embauches ont été nécessaires pour assurer le volume supplémentaire.
Cette petite ville, traversée par un axe passant, représentait une opportunité intéressante de développement pour les Blés de Demain, un emplacement s’étant libéré. Les débuts sont un peu difficiles : entre l’ouverture d’un concurrent 7j/7 – ce qui ne permet pas de capter de la clientèle le jour de fermeture -, une visibilité un peu limitée et un voisinage peu dynamique, … le chemin sera long pour parvenir à redonner de la vie à cette boutique. Je ne doute pas que l’engagement et la qualité des produits parviendront à faire la différence.

Dans la boutique de Sorigny, ce sont les formes régionales réalisées par un apprenti qui participent au décor. Laisser à chacun la possibilité de s'exprimer et de développer son savoir-faire au sein de l'entreprise : des éléments importants pour fidéliser le personnel et créer une ambiance de travail agréable.

Dans la boutique de Sorigny, ce sont les formes régionales réalisées par un apprenti qui participent au décor. Laisser à chacun la possibilité de s’exprimer et de développer son savoir-faire au sein de l’entreprise : des éléments importants pour fidéliser le personnel et créer une ambiance de travail agréable.

Voilà en tout cas une belle aventure, portée par des valeurs et une envie de partager un savoir-faire authentique. C’est une preuve -s’il en fallait- que c’est par l’excellence que l’artisanat boulanger parviendra à faire la différence de façon durable… pour écrire le pain de Demain !

Infos pratiques

20 place du Maréchal Leclerc – 37250 Veigné / tél : 02 47 26 02 82
ouvert tous les jours sauf le mercredi de 6h30 à 14h et de 15h30 à 19h30 – jusqu’à 19h le samedi, fermé le dimanche après-midi.

67 route Nationale – 37250 Sorigny / tél : 02 47 65 27 36
ouvert du lundi au vendredi de 6h30 à 14h et de 16h à 19h30, de 7h à 13h le samedi.

Page Facebook : https://www.facebook.com/lepaindedemain

On passe une grande partie de nos vies à chercher le bon mot, la bonne formule. Déjà enfant, l’école nous apprend à courir après les belles lettres, après la réussite. Il faut savoir accepter que ce soit nos mots qui nous rattrapent. Parfois la rencontre est heureuse, car les intentions étaient bonnes, le contexte aussi. Dans d’autres cas, c’est un peu plus compliqué. La force de l’écrit réside aussi dans sa capacité à se rappeler à nos consciences. J’ai appris à ne jamais regretter mes mots, peut-être est-ce un tort, toujours est-il que j’assume chacun des articles présents ici. Parfois passionnés, imparfaits et mal calibrés, ils sont bien à l’image de la matière qu’ils traitent… vivants.

Pas de devanture ostentatoire : il faut s'approcher pour savoir ce qu'abrite cet ancien restaurant.

Pas de devanture ostentatoire : il faut s’approcher pour savoir ce qu’abrite cet ancien restaurant.

Il y a quelques mois, je titrais mon article au sujet du Fournil Ephémère de Montreuil avec ces mots « un projet durable ». La formule a pris tout son sens avec l’installation pérenne de ce projet atypique dans le paysage boulanger de la cité Séquano-Dionysienne : en effet, s’il était initialement prévu que l’installation ne reste que quelques mois en Région Parisienne, ses deux fondateurs ont vite mesuré l’impact que pouvait avoir une telle entreprise. La boulangerie n’est pas un métier ni un commerce anodin. Quand elle est portée par des valeurs de partage et de qualité, elle fédère une communauté de fidèles et créé un véritable lien entre les individus qui s’y intéressent. Dès lors, peut-on mettre fin sciemment à l’aventure en invoquant la seule raison de ‘l’éphémère’, de l’envie d’ailleurs ?

En vitrine, des affiches détaillent le projet aux passants.

En vitrine, des affiches détaillent le projet aux passants.

François et Gaultier n’ont pas renoncé à leurs aspirations initiales – ils continuent d’ailleurs à s’intéresser aux opportunités de rééditer l’expérience – mais ont fait évoluer leur vision… et quitté la Marbrerie qui les hébergeait pour rejoindre leur propre Atelier, à quelques rues. C’est dans cet ancien restaurant qu’ils fabriquent leurs pains et gourmandises, accompagnés de Myrtille, en charge de l’ensemble des douceurs sucrées (cakes, biscuits, …).

Cakes, sablés, brioches... rien ne manque pour les gourmands.

Cakes, sablés, brioches… rien ne manque pour les gourmands.

Le principe reste le même : une ouverture de 3h, trois jours par semaine. Les lundis, mercredis et vendredis, cela sent bon le pain rue de l’Eglise. Une production, plus limitée, est également réalisée le jeudi pour des AMAP et autres organisations.
Ici, tout a été pensé pour rendre le projet viable et cohérent : le travail est très peu mécanisé (seul le pétrissage l’est, les divisions et façonnages sont manuels, tout comme l’enfournement) et les pâtes ne passent pas au froid (exception faite pour celles réalisées à partir de blés anciens). Ainsi, le besoin en matériel est plus limité, les investissements et la place nécessaires le sont tout autant. Les deux compères ont organisé leur projet de vie autour de celui du Fournil Ephémère, qui leur permet de conserver un véritable confort de travail.

Seigle, campagne, pain noir ou aux céréales, la gamme est variée.

Seigle, campagne, pain noir ou aux céréales, la gamme est variée.

A la différence des boulangeries traditionnelles, ici, on ne travaille pas de nuit. Les pétrissages commencent vers 7h, les divisions vers 11h, tandis que les cuissons sont réalisées dans l’après-midi. Cette vision originale du métier correspond bien au parcours de François et Gaultier, qui se sont formés « tardivement » à la boulangerie. Si l’envie de faire du pain était nourrie chez eux depuis bien longtemps, il n’était pas question de le faire n’importe comment. Le choix de la formation au sein de l’Ecole Internationale de Boulangerie de Thomas Teffri-Chambelland, à Noyers sur Jabron, sonnait ainsi comme une évidence : l’enseignement est orienté autour du levain et des farines biologiques, avec un accompagnement pour la mise au point du projet professionnel. Ils ont ensuite complété leur savoir-faire au cours de stages variés, avec toujours le même mélange de curiosité et de rigueur.

Le fournil se confond avec l'espace de vente. Tout est ainsi transparent avec les clients.

Le fournil se confond avec l’espace de vente. Tout est ainsi transparent avec les clients.

La rigueur s’exprime avant toute chose par le choix des matières premières : les farines du Moulin Pichard, avec lesquelles les deux artisans ont suivi leur formation, ont naturellement rejoint leur fournil de par leur qualité et l’engagement de Stéphane Pichard en tant que meunier artisanal. Elles ont été récemment rejointes par celles du Moulin de Chantemerle, situé à Aulnoy, au coeur de la Brie (77). Ce dernier fournira des variétés anciennes de blé, mais avant tout une farine beaucoup plus locale, ce qui correspond parfaitement à une aspiration globale de consommation raisonnée.

Les pains siciliens (farine de blé dur & huile d'olive) au curcuma sur couche. Du sésame est disposé en topping pour apporter du craquant.

Les pains siciliens (farine de blé dur & huile d’olive) au curcuma sur couche. Du sésame est disposé en topping pour apporter du craquant.

Un système de filtration d’eau a été mis en place pour hydrater les pâtes et levains le plus sainement possible. En dehors de cela, la plupart des ingrédients sont biologiques (olives, graines, fruits secs…).

Un batteur et un pétrin à bras plongeants Salva, l'équipement est limité mais c'est aussi une volonté des deux associés : ils ne sont pas tentés de faire plus au risque de faire mal.

Un batteur et un pétrin à bras plongeants Salva, l’équipement est limité mais c’est aussi une volonté des deux associés : ils ne sont pas tentés de faire plus au risque de faire mal.

A l’arrivée, on obtient une belle gamme de pains, tous poussés à partir de levain naturel (de seigle, de khorasan, de petit épeautre…) sans levure (mis à part une pointe dans la brioche !). Tourte de Seigle, Khorasan, Petit Epeautre, Campagne … entre autres déclinaisons gourmandes ou créations aromatiques (ne pas manquer le Sicilien à base de farine de blé dur et d’huile d’olive le mercredi), autant de produits savoureux et bien hydratés. Si le visuel n’est pas toujours parfait, le goût se révèle tout à fait convaincant, sans acidité désagréable. Les prix restent très honnêtes compte tenu des matières premières (à partir de 6€/kg pour le Campagne).
Les gourmandises sont à l’avenant : entre les cakes vendus au poids, les sablés variés (cookies, shortbreads, …) et autres produits proposés selon l’envie et l’inspiration, il ne reste plus qu’à se laisser tenter. On reste toujours dans un domaine très boulanger, tout en lui redonnant des lettres de noblesse trop souvent perdues.

Le tableau décrit l'ensemble des pains, leur composition et les propositions du jour.

Le tableau décrit l’ensemble des pains, leur composition et les propositions du jour.

Le nouvel enjeu de ce lieu est de parvenir à transmettre l’état d’esprit à d’autres individus pour faire durer la dynamique, et faire en sorte qu’elle se renouvelle. C’est ainsi que les fondateurs pourront voguer vers d’autres horizons, et à chaque fois laisser dans les territoires visités une empreinte forte et durable : celle d’un savoir-faire artisanal, d’un métier passionnant. Tout comme les grains sont portés et semés par le vent, François et Gaultier feront germer des oasis de boulangerie artisanale. Pour que l’éphémère soit toujours plus durable.

Le four utilisé est initialement destiné à un usage de pâtisserie. Des appareils de buée ont été ajoutés. L'enfournement reste entièrement manuel.

Le four utilisé est initialement destiné à un usage de pâtisserie. Des appareils de buée ont été ajoutés. L’enfournement reste entièrement manuel.

Infos pratiques

11 rue de l’église – 93100 Montreuil (métro Mairie de Montreuil, ligne 9) / tél : 0782213017
ouvert les lundis, mercredis et vendredis de 17h à 20h.
site web : http://fournil-ephemere.fr

Chaque année, les amateurs de galettes sont prêts à se déplacer pour aller chercher le fameux gâteau. Si l’Epiphanie est célébrée au début du mois de janvier (le 6 janvier), la fête se poursuit pendant tout le mois de janvier chez nos artisans. Il faut dire que le sujet ne manque pas d’importance : il se traduit par une augmentation de plusieurs dizaines de pourcents de leur chiffre d’affaires. En bref, de quoi constituer de belles étrennes.

La galette des 13 desserts, Michel Fabre, Alfortville
La tradition veut également que des concours soient organisés par les chambres syndicales pour déterminer quelles sont les meilleures galettes. Pour Paris-Ile-de-France, la compétition a eu lieu la semaine passée et a couronné Sylvain Joubert roi de la galette pour 2016. Son nom n’est pas inconnu aux amateurs de douceurs, cet artisan étant régulièrement primé pour ses croissants et autres spécialités.
Le classement reprend des noms biens connus : Didier Duchesne, Raoul Maeder, Michel Fabre, … sont des habitués. D’autres apparaissent, comme Thierry Maillard, Benoit Cocardon ou réapparaissent comme Fabrice Pottier, à présent installé à Marcoussis.

La très surprenante galette Végétale (Azuki, miel et sésame noir) de Jean-Paul Mathon : notez la feuille en décor !

La très surprenante galette Végétale (Azuki, miel et sésame noir) de Jean-Paul Mathon : notez la feuille en décor !

En dehors de la compétition, j’ai -comme tout le monde !- mes préférences et les créations de quelques artisans ont retenu mon attention :
Olivier Haustraete – Boulangerie bo – propose une galette garnie à la frangipane aux amandes brutes et au confit de yuzu, ce qui apporte une note de fraicheur bienvenue sur les vives notes d’amandes, renforcées par la présence de la peau ;
Dominique Saibron a préparé une création associant la frangipane et une fine couche de caramel au beurre salé. Ce dernier est particulièrement bien dosé et apporte une belle note gourmande en fin de bouche. Comme d’habitude, le feuilletage est très maitrisé et les prix sont vraiment abordables ;
– Chez Dupain, Tanguy Lahaye et son équipe ont fait appel à leur partenaire « Fifi la Praline » pour concocter une galette au praliné aussi élégante qu’aboutie ;
Jean-Paul Mathon ne varie pas et réalise à nouveau sa galette à l’azuki, plus légère mais néanmoins très savoureuse.

Pour le reste, je vous laisse consulter le classement complet du concours, avec les catégories Patron, Salarié et Apprenti.

Quelques galettes, Michel Fabre, Alfortville

 Boulangeries

1

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

2

Didier DUCHESNE

38, rue J.P. Timbaud

75011

PARIS

3

Raoul MAEDER

BRETZEL FOR EVER

158, bld Berthier

75017

PARIS

4

Pascal BARILLON

6, rue des Abbesses

75018

PARIS

5

Reynald GILBERT

LE GRENIER A PAIN

101, av du Général de Gaulle

78300

POISSY

6

Benoit COCARDON

60, rue de la Convention

75015

PARIS

7

Vincent JOLY

LE GRENIER A PAIN

52, av. d’Italie

75013

PARIS

8

Thierry MAILLARD

LA MAILLARDISE

48, av. Mozart

75016

PARIS

9

Jean-Yves BOULLIER

LE MOULIN DE LA CROIX NIVERT

39, rue de la Croix Nivert

75015

PARIS

10

Abdennaceur KHORCHANI

LA REINE DES BLES

62, bld Jean Jaurès

92110

CLICHY LA GARENNE

11

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

12

Mickaël MASSET

6, Place Saint Louis

92380

GARCHES

13

Yacine MOUDJARI

LES SAVEURS DE WAGRAM

169, av. de Wagram

75017

PARIS

14

Guillaume JULIEN

LA TRADITION JULIEN

42, rue des Petits Champs

75002

PARIS

15

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

15 EX

HAMADA SHUJI

JAPON

HORS CATEGORIE

16

Nelly JULIEN

DOUCEURS ET TRADITIONS

85, rue St Dominique

75007

PARIS

17

Pascal PINEAU

13, rue du Général De Gaulle

77000

MELUN

18

Jean Paul CROSNIER

39, rue Boucicaut

92260

FONTENAY AUX ROSES

19

Arnaud DELMONTEL

39, rue des Martyrs

75009

PARIS

20

Fabrice POTTIER

MAISON POTTIER

12, Bld Charles mélaton

91460

MARCOUSSIS

Catégorie Salariés

 Boulangeries

1

Cyril SAUVY

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

2

Patrick FABRE

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

3

Aymond William LEDENTU

Fabrice POTTIER

12, Bld Charles mélaton

91460

MARCOUSSIS

4

Sikoumar MARENA

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

5

Hayatte KABOUCHE

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

6

Michaël KUSNIEREK

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

7

Patrick PIOLINE

Pascal BARILLON

6, rue des Abbesses

75018

PARIS

8

Benjamin PECOU

Dominique GUIGNIER – LA FOURNEE GOURMANDE

9, rue de la Mairie

92320

CHATILLON

9

Eric COSTANETO

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

10

Benoit PICQUENARD

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

11

Abdellah MOURAG

Nelly JULIEN – DOUCEURS ET TRADITIONS

85, rue St Dominique

75007

PARIS

12

Tareck BOUZIAINI

Nelly JULIEN – DOUCEURS ET TRADITIONS

85, rue St Dominique

75007

PARIS

13

Tony RAIMBAULT

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

14

Salah SCHERIF

Philippe GOSSELIN – GOSSELIN SAINT

258, bld St Germain

75007

PARIS

GERMAIN

15

Jérémy JOAQUIM

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

16

Yannick GARRY

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

17

Francis MAUBANT

Joël PICQUENARD

101, bld de la République

92420

VAUCRESSON

18

Edgard BERTRAND

Jacky RENOUF – LE PUITS D’AMOUR

249, bld Voltaire

75011

PARIS

19

Marc BOUMEDDANE

Eric BLEUZÉ

28, av. Gabriel Péri

93160

NOISY LE GRAND

20

Matthieu CARDON

Fabrice POTTIER

12, Bld Charles mélaton

91460

MARCOUSSIS

Catégorie Apprentis

 Boulangeries

1

Maurane MEDJIKIAN

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

2

Dylan GORIUT

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

3

Cédric MACLE

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

4

Marine DETHEVES

Sylvain JOUBERT

2, Av. de Verdun

95150

TAVERNY

5

Aurélien CANNY

Reynald GILBERT – LE GRENIER A PAIN

101, av du Général de Gaulle

78300

POISSY

6

Sophie DAZZY

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

7

Martin FLOURIOT

Pascal FLANDRIN

1, rue du Général Leclerc

94220

CHARENTON LE PONT

8

Marine SOCHARD

Michel FABRE

168, rue Paul Vaillant Couturier

94140

ALFORTVILLE

9

Benjamin BANOS

Arnaud DUMONT

8, rue du Plateau

91800

BRUNOY

10

Océane GUINHUT

David BAILLON

29, rue de Chézy

92200

NEUILLY SUR SEINE

A force de voir naître des tendances à peu près toutes les semaines, on finit par les regarder avec un oeil désabusé, voire même à les ignorer complètement. Pour certaines, c’est sans doute mieux ainsi, il faut juste les laisser passer. D’autres sont plus durables et méritent donc de s’y pencher un peu plus. L’apparition de boutique mono-produit est de celles-ci. Un nombre croissant d’artisans fait le choix de se concentrer sur une seule discipline, sans doute pour mieux la réaliser et y exprimer leur créativité. L’équation économique semble parfois difficile à tenir, notamment quand il s’agit de produits qui ne font pas partie de la consommation ‘courante’.

A Paris, plusieurs entrepreneurs ont fait le choix de planter les choux… Popelini, Odette, leurs petites gourmandises font autant couler d’encre que de salive chez les gourmands. Seulement, aucun n’a vraiment été plus loin : la pâte à choux peut être utilisée de bien d’autres façons et aboutir à des résultats surprenants. Philippe Conticini l’a prouvé avec son ouvrage Sensation Choux, paru en octobre 2014. Bien peu de pâtissiers s’en sont emparés, à peine certains utilisent la pâte à choux pour réaliser des biscuits roulés.

C& Choux, Caen (14)

Anthony Le Rhun a été plus loin, pour le plus grand plaisir des Caennais. Pour cet artisan, la pâtisserie a longtemps été une passion -il travaillait dans le secteur du textile-, elle est à présent devenue un métier. Propulsé par la victoire du « Cook Master Barrière », il a entamé sérieusement sa reconversion en développant son activité de cours à domicile et de traiteur… avant de parvenir à s’installer en mars 2014, notamment grâce à la générosité des internautes sur le site My Major Company.

Vitrine, C& Choux, Caen (14)

Si la Normandie n’était pas sa terre natale -il est originaire de Brest-, son déménagement à Caen semble lui avoir donné la possibilité de réaliser ses rêves… et surtout de les faire partager avec sa clientèle. Un peu à l’écart du centre ville, au 2 rue Léon Lecornu, on découvre un univers riche et tout aussi atypique que le parcours du pâtissier. Les créations sont présentées dans une boutique à l’ambiance très cosy, où quelques tables et une terrasse (aux beaux jours !) permettent de déguster sur place. L’accueil est particulièrement charmant et attentionné, avec de nombreux conseils sur les produits et la façon de les déguster.
Bien sûr, les choux sont à l’honneur, avec une sélection de parfums renouvelée tous les mois. Caramel, Vanille & Fève Tonka, Praliné Pistache, Citron Meringué… les créations reprennent parfois de grands classiques de la pâtisserie, tout en laissant la place à des associations de saveurs plus inventives.

Pâtisseries, C& Choux, Caen (14) Le plus intéressant à mon sens se situe à côté, avec des pâtisseries où la pâte à choux prend d’autres formes. Dans le Saint-Honoré, on la retrouve en biscuit parfumé à la vanille. Dans le Paris-Brest, elle est enrichie de noisettes. Pour les galettes des rois, c’est la crème d’amandes qui en intègre pour un résultat plus moelleux… Selon les saisons, elle s’invite aussi dans les bûches ou dans des déclinaisons en pot, à l’image du Tirami-Chou, Pop’Jito et autres déclinaisons gourmandes. Des versions salées sont également proposées, idéales pour l’apéritif ou un cocktail.
Les produits sont visuellement aboutis, et le goût est à l’avenant. Que ce soit en terme de textures, de dosage du sucre ou d’accords de saveurs, Anthony le Rhun et son équipe parviennent à remplir tous les critères d’une pâtisserie de qualité. A l’inverse de ce que j’ai pu déguster dans plusieurs enseignes parisiennes, le décor coloré des choux n’est pas trop présent en bouche et ne masque pas les saveurs.

Choux, C& Choux, Caen (14)

L’entreprise a à coeur d’impliquer sa clientèle dans son développement, en communicant de façon très régulière sur les réseaux sociaux ou en organisant des événements, comme un goûter début juin. Une belle façon de marquer sa différence et de créer une vraie relation avec ses consommateurs, qui deviennent ainsi des fidèles et de véritables prescripteurs de l’enseigne…
Difficile de ne pas être séduit par les tarifs, très accessibles : 1,90€ le chou à l’unité (avec des tarifs dégressifs en réglettes), 3,80€ la pâtisserie… Les gourmandises présentées un peu partout dans l’espace de vente s’inscrivent dans le même esprit, avec des sablés garnis caramel ou gianduja, des oursons de guimauve, des pots à tartiner…

Décor, C& Choux, Caen (14)

C& Choux nous montre ainsi développer une identité forte et cohérente autour d’un produit et faire du chou… à la mode de Caen.

Infos pratiques

2 rue Léon Lecornu, 14000 Caen / tél : 09 81 85 09 02
ouvert du mardi au samedi de 9h30 à 19h30, le dimanche de 9h30 à 13h30.
Site Internet : http://www.c-choux.fr
Facebook : https://www.facebook.com/C-Choux-204451676355126

On passe une bonne partie de notre vie à se battre pour avoir raison. Avoir raison face aux autres, face à soi même, face aux événements. L’enjeu qui nous paraît central -garder la maitrise du jeu, garder la tête haute- n’est qu’en définitive bien vain. La loi du plus fort nous ramène bien souvent à la réalité : ce sont ceux qui ont les plus gros bras, les comptes en banque les plus garnis, qui finissent par triompher. Un triomphe éphémère, même si à l’échelle de nos vies humaines il semble parfois absolu et total. Si l’on prend du recul, un peu de hauteur, on finit par comprendre qu’il vaudrait mieux se concentrer sur l’idée de défendre des positions qui ont du sens, et pas seulement pour sa personne.

Moulin de la Vierge, Victoires

Il y a aussi des fois où l’on voudrait avoir tort, car le constat est glaçant. C’était mon cas au sujet du Moulin de la Vierge. J’étais perplexe et inquiet : l’enseigne fondée par Basile Kamir a vu son management changer discrètement au cours de l’été, avec l’arrivée des frères Hakkam – comme en attestent les informations du registre du commerce. Ces discrets entrepreneurs, bien présents dans la boulangerie parisienne, ont ainsi les mains libres pour agir sur les boutiques et outils de production. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne s’en privent pas…

Le 105 rue Vercingétorix, aujourd'hui.

Le 105 rue Vercingétorix, aujourd’hui.

A commencer par la fermeture de l’adresse historique du 105 rue Vercingétorix, dans le 14è arrondissement. Vous savez, j’ai un attachement tout particulier à cet endroit, à cette boulangerie à l’ambiance si particulière, comme hors du temps. Même si je n’avais pas manqué d’émettre quelques critiques vis à vis de la qualité des produits, elle fait partie des premières adresses que j’avais visité, encouragé par l’éloge dressé par Michel de Rovira et Augustin Paluel-Marmont dans leur guide des boulangeries de Paris. Sans entretenir une quelconque forme de nostalgie, puisque ces faits demeurent relativement récents, je pense qu’il ne faut pas négliger l’importance de l’histoire dans un métier tel que la boulangerie artisanale.

Pains, Moulin de la Vierge, Victoires

Dans cette histoire, il y a aussi celle de la cuisson au feu de bois, entretenue avec passion par Basile Kamir. Avec l’arrêt de la production rue Vercingétorix, c’est un des derniers fours à bois de Paris qui s’éteint. Ce n’est pas le seul : les autres sont également à l’arrêt (notamment dans la boulangerie à proximité de la place des Victoires), et l’enseigne perd ainsi une bonne partie de sa « signature ». Les produits sont ternes, comme perdus dans cette histoire étrange. Le pain n’est pas vraiment un sujet pour les frères Hakkam, qui se concentrent plus volontiers sur la rentabilité de leurs affaires. L’exemple de Moisan en est une bonne preuve, et je serais bien en peine de vanter la qualité de la production réalisée dans les boutiques de cette entreprise aujourd’hui. Si la situation n’était pas glorieuse du temps du Groupe Bertrand, rien n’a été fait pour enrayer le phénomène.

Vitrine, Moulin de la Vierge, Victoires

Quel avenir pour le Moulin de la Vierge ? Quand on sait les difficultés que rencontrent les riverains à échanger avec l’équipe dirigeante -la Pâtisserie 152 (rue Montmartre) génère de nombreuses nuisances pour les riverains, sans que cela semble beaucoup inquiéter les pouvoirs publics ou même les dits gérants (!)- ou les clients pour joindre l’entreprise (le numéro de téléphone indiqué sur le site comme Contact est inopérant depuis plusieurs mois)… Il y a du soucis à se faire, autant pour les salariés que pour l’image globale de la marque.

Il y a des territoires plus marqués par certaines couleurs que d’autres. L’implantation d’une entreprise dans une zone lui confère une sorte de « supériorité » naturelle, ses clients pouvant ainsi avoir bonne conscience en faisant travailler l’économie locale. C’est bien, mais pas suffisant. Chacun doit garder à l’esprit que c’est la qualité des produits qui compte et, tant que l’on ne verse pas dans le domaine du déraisonnable en terme d’impact écologique et de transport, choisir les fournisseurs qui correspondent le mieux à ses exigences en terme de qualité.

Une devanture sobre et élégante.

Une devanture sobre et élégante.

Ainsi, quand on me cite la ville de Chartres, je pense inévitablement à la minoterie Viron (située au Coudray) ou au moulin Axiane. Fort heureusement, certains professionnels font le choix d’autres acteurs, ce qui contribue à enrichir l’offre locale.
Si le couple Jamin a fait confiance aux Moulins Foricher, c’est sans doute parce qu’ils ont pu apprécier la qualité de la matière première autant que du service associé… et notamment à Paris. En effet, c’est au 120 rue de Bagnolet, dans le 20è arrondissement, que Pascal Jamin avait reçu le 3è prix de la Meilleure Baguette de la Ville de Paris en 2011. Après avoir revendu son affaire, ce pâtissier de formation a repris pour quelques années le chemin du travail salarié, notamment au sein de la maison Potel et Chabot. Une expérience qui n’a fait que renforcer son goût du travail bien fait.

La Bagatelle ne manque pas d'allure avec sa belle cuisson et ses extrémités pointues.

La Bagatelle ne manque pas d’allure avec sa belle cuisson et ses extrémités pointues.

Pour cette nouvelle aventure, son épouse Violetta l’a rejoint. Un choix courageux, d’autant qu’il s’agit d’une reconversion professionnelle. Passer du conseil en communication à la boulangerie-pâtisserie n’est pas un choix anodin, mais on ne peut que saluer sa volonté et son implication : hors de question d’être uniquement en boutique, elle participe également à la production et casse ainsi les schémas classiques entretenus chez bon nombre d’artisans. Sa contribution a été également essentielle à l’installation, en réalisant la décoration. Lors de la reprise de l’établissement en août 2014, l’endroit n’avait pas grand chose à voir avec ce qu’il est à présent. L’espace de vente est clair, lumineux, et les produits sont disposés dans d’élégants présentoirs aux notes bleutées.
La mise en scène donne l’effet de rentrer dans un petit boudoir gourmand, ce qui contribue à l’ambiance générale du lieu.

Gourmandises, Maison Jamin, Lucé (28)

Les travaux ne se sont pas limités à la boutique mais ont été tout aussi importants dans le laboratoire, qui souffrait de nombreuses années d’abandon de la part des anciens propriétaires. Il aura fallu investir et réaménager l’outil pour parvenir à assurer une production de qualité, selon les standards définis par le couple Jamin. Ici, tous les produits sont faits maison, du pain à la viennoiserie en passant par les desserts fins et créatifs. On retrouve d’ailleurs en façade l’agrément « viennoiseries 100% maison », délivré par la Chambre des Métiers d’Eure-et-Loir. Le tourage est ici particulièrement bien maîtrisé et les spécialités feuilletées ne manquent pas d’allure : croissant, pain au chocolat, « violette » -un délicat hommage à Violetta Jamin!-, ou encore galettes des rois en ce mois de janvier… les gourmands apprécieront le croustillant et le goût de beurre frais.

La belle gamme de viennoiseries maison... avec une offre amusante : un croissant et un pain au chocolat offerts pour tout achat effectué le dimanche... en pyjama. Une belle façon de créer de la complicité avec la clientèle.

La belle gamme de viennoiseries maison… avec une offre amusante : un croissant et un pain au chocolat offerts pour tout achat effectué le dimanche… en pyjama. Une belle façon de créer de la complicité avec la clientèle.

La baguette de Tradition Française est également certifiée Label Rouge et porte fièrement les couleurs de la Bagatelle. Malgré cet effort et ses délicats arômes de froment, la baguette de pain courant reste un produit très demandé par la clientèle, peu de professionnels ayant fait le choix de continuer à la proposer à proximité. Cela n’a pas empêché la maison Jamin de développer une gamme de pains spéciaux qualitative, avec notamment de belles tourtes de Seigle et de Sarrasin, le pain Ancestral et ses notes acidulées, le pain énergétiques aux céréales et chocolat blanc… Le tout est réalisé avec soin et brio par le chef boulanger.

Cakes, pâtisseries fines, macarons... le savoir-faire sucré de Pascal Jamin s'exprime dans cette vitrine.

Cakes, pâtisseries fines, macarons… le savoir-faire sucré de Pascal Jamin s’exprime dans cette vitrine.

Ces efforts sont parvenus à séduire une clientèle toujours plus nombreuse, et cela récompense bien les efforts déployés ici. Espérons que l’arrivée pressentie d’un franchisé Feuillette à proximité immédiate de cette boulangerie-pâtisserie ne mettra pas en péril son bon fonctionnement, et que les consommateurs resteront fidèles à un artisan engagé. Malheureusement, ce ne sont pas des sujets qui semblent préoccuper ce type d’entrepreneurs, qui ne voient aucune limite à leur développement…

Les galettes des rois et leur feuilletage généreux.

Les galettes des rois et leur feuilletage généreux.

Infos pratiques

33 rue du Maréchal Leclerc, 28110 Lucé / tél : 02 36 67 42 50
ouvert tous les jours sauf le mercredi de 6h30 à 20h, jusqu’à 13h30 le dimanche.
Facebook : https://www.facebook.com/MaisonJamin

La cohérence est sans doute l’une des choses les plus difficiles à atteindre dans la vie. On tient souvent des discours pleins de bonnes intentions, on développe des idées généreuses… mais combien d’entre nous parviennent à les mettre en pratique ? Sans que ce soit forcément volontaire, nous sommes souvent condamnés à entretenir un écart entre nos actes et nos paroles. Que ce soit un ru, une rivière, un grand fleuve ou un véritable exercice de gymnastique, il faut aussi savoir s’arrêter au bon moment pour éviter de finir dans le mur à force de ne pas être ce que l’on prétend.

J’apprécie sincèrement de nombreux artisans boulangers – croyez-le ou non, puisqu’à force de me lire, on pourrait parfois croire que j’en apprécie qu’une poignée – mais je suis attristé par leur manque d’engagement et de cohérence. La plupart utilisent une bonne farine, un bon beurre pour leurs viennoiseries, … mais le reste ? Au moment de découvrir leur chambre froide ou leur économat, je préfère souvent fermer les yeux et baisser la tête. Entre les matières premières achetées en masse chez des fournisseurs devenus tristement célèbres par la force des choses et des médias, les conserves de « purée de pomme concentrée » joyeusement agrémentées de sirop de glucose et que sais-je encore… Est-ce ça, être artisan ? Oh, oui, j’entends déjà la ritournelle des coûts de revient, des prix qui ne peuvent pas être vraiment supérieurs à ceux du voisin, … Il faudra pourtant parvenir à se différencier nettement de la concurrence industrielle, et cela passe par le goût. Sans cela, je ne vois pas beaucoup d’avenir à la boulangerie artisanale.

A l'extérieur, la structure de l'ancien garage reste bien visible. Sur l'avancée vitrée, on peut lire les différentes activités développées ici : boulangerie & pâtisserie, café, épicerie, ...

A l’extérieur, la structure de l’ancien garage reste bien visible. Sur l’avancée vitrée, on peut lire les différentes activités développées ici : boulangerie & pâtisserie, café, épicerie, …

Heureusement, quelques uns en ont pris conscience et se sont engagés pour bâtir des projets ambitieux aussi bien pour les consommateurs que pour leurs équipes. Marie et Dominique Legay font partie de ceux-ci.
Ils ont ouvert ensemble leur « Tonton Farine » le 27 août dernier, en bordure d’un axe passant de Troyes, plus précisément au 46 boulevard Victor Hugo. Si leur nom n’est peut-être pas tout à fait inconnu à certains d’entre vous, c’est qu’on le retrouve encore aujourd’hui sur la devanture de deux boulangeries parisiennes : dans le Marais, « Legay Choc » existe encore, même si les affaires ont été cédées à Richard Legay.

Depuis la route, on appréhende mieux le bâtiment dans son ensemble et son caractère atypique. La transformation du lieu est remarquable.

Depuis la route, on appréhende mieux le bâtiment dans son ensemble et son caractère atypique. La transformation du lieu est remarquable.

Après avoir passé plusieurs années dans la capitale et acquis une forte expérience – dans le domaine de la pâtisserie/chocolaterie pour Dominique, dans l’hôtellerie pour Marie -, il était temps de passer à autre chose, de se tourner vers d’autres horizons.
Si le projet d’ouvrir une chocolaterie a été envisagé en premier lieu, le couple a finalement choisi de revenir à l’essentiel, aux valeurs fortes de partage et d’authenticité que porte la boulangerie.

La salle est particulièrement accueillante et donne envie de prendre quelques minutes pour se poser.

La salle est particulièrement accueillante et donne envie de prendre quelques minutes pour se poser.

Pour écrire cette nouvelle page de leur histoire commune, Troyes sonnait comme une évidence : Marie Legay en était originaire, et la qualité de vie dans la région a forcément pesé dans la balance. Le prix de l’immobilier également. Difficile d’envisager l’ouverture d’un tel lieu en plein coeur de Paris, en le dédiant à une activité de boulangerie artisanale. Ici, en Champagne, ils l’ont fait… et il y aurait de quoi déboucher une bonne bouteille tant le résultat est réussi, malgré des retards de chantier.

La grande verrière arrose l'ensemble du bâtiment en lumière naturelle. Sur les murs, les mots et illustrations renforcent l'univers.

La grande verrière arrose l’ensemble du bâtiment en lumière naturelle. Sur les murs, les mots et illustrations renforcent l’univers.

Cet ancien garage -le bâtiment date du début du 20è siècle !- a été entièrement rénové pour accueillir les nouvelles activités. Tous les éléments ont été repris, y compris la verrière au plafond. A présent, c’est une boulangerie-pâtisserie tout à fait atypique qui habite les lieux, avec un laboratoire entièrement de plein-pied et un large espace de vente. Aux beaux jours, la terrasse sera appréciée des gourmands, cette dernière se plaçant légèrement en retrait de la circulation routière.

Ici, pas de mur à pains traditionnels, mais des présentoirs ouverts.

Ici, pas de mur à pains traditionnels, mais des présentoirs ouverts.

Il fallait du courage mais aussi une volonté marquée pour se lancer dans une telle aventure. Si j’ai parlé de cohérence, c’est qu’elle s’exprime à plusieurs niveaux : en offrant au personnel des conditions de travail exemplaires, le couple a souhaité s’engager sur le plan humain pour intégrer chaque collaborateur dans leur démarche. En contrepartie, ils doivent accepter de travailler « sans filet », à partir de matières brutes et naturelles. Des fruits et des légumes bio, des ingrédients locaux quand c’est possible (notamment les oeuf frais), des graines et fruits secs fournis par Markal (entreprise spécialisée dans le bio), du beurre AOP … La différence se ressent forcément sur le goût.

Vue d'ensemble de la salle, Tonton Farine, Troyes (10) Le goût est d’ailleurs un sujet pris très au sujet par notre Tonton, qui élabore des recettes créatives et colorées : les buns variés donnent du relief à la pause déjeuner, les petits choux se déclinent à tous les parfums et se coiffent de décors chocolatés ou meringués, les tartes font la part belle aux fruits de saison… Les gammes sont la parfaite expression de l’univers déployé dans ces lieux.

Les choux variés correspondent bien à la tendance "street food", avec toujours le même engagement sur la qualité des matières premières.

Les choux variés correspondent bien à la tendance « street food », avec toujours le même engagement sur la qualité des matières premières.

On peut effectivement parler d’univers, car le mot prend tout son sens avec la forte identité graphique développée par Marie Legay en collaboration avec sa cousine -illustratrice pour enfants- et une graphiste. La boutique est remplie d’illustrations souriantes, de petits détails, … qui créent ensemble une atmosphère chaleureuse et dégage nettement l’ensemble de l’image habituelle d’une boulangerie-pâtisserie. D’ailleurs, en est-ce vraiment une ? Sans doute pas tout à fait. Tonton Farine est plus que cela, et le prouve par son espace dédié aux ateliers. Ici, enfants et adultes pourront recevoir un peu du savoir-faire entretenu par Dominique Legay et son équipe. Quelques animations ont été déjà organisées de façon ponctuelle, mais la pratique devrait s’installer plus durablement et régulièrement dans les premiers mois de cette nouvelle année 2016. Au final, c’est le mot de partage qui revient : aussi bien par des produits que par des gestes transmis, à des professionnels comme à des amateurs.

Derrière la baie vitrée, l'espace atelier. Une belle salle où les plans de travail pourront permettre à chacun de mettre les mains dans la farine.

Derrière la baie vitrée, l’espace atelier. Une belle salle où les plans de travail pourront permettre à chacun de mettre les mains dans la farine.

Il ne faudrait pas partir sans s’intéresser plus précisément à ce qui nous intéresse au quotidien : le pain. Les farines sont fournies par les moulins Foricher, un choix inspiré par la proximité et la rencontre de clients « emblématiques » comme Louis Tortochot (Du Pain pour Demain – Dijon). On retrouve ainsi une gamme travaillée sur base de levain naturel, avec des classiques (baguette de Tradition, pains aux céréales, …), des déclinaisons gourmandes (fruits secs, curry, noix et beurre, …) et des pains sur base de farines variées (seigle, petit épeautre). Si les cuissons sont parfois un peu courtes et que l’on sent que les produits se mettent en place progressivement, les fondamentaux sont là. A noter également la belle gamme de moelleux, dont un pain de mie marbré cacao particulièrement réussi, ainsi que des propositions aromatiques au miel et amandes, miel et chocolat…

Viennoiseries & gourmandises.

Viennoiseries & gourmandises.

Malgré l’arrivée quasi-simultanée de l’enseigne Paul dans le centre de Troyes et l’ouverture d’une autre boulangerie de grande taille, je ne doute pas de la capacité du couple Legay à imposer son style et sa différence, grâce à son engagement et cette fameuse cohérence que je mettais en avant précédemment. Ils participent activement au renouveau de leur zone d’implantation, tout comme au renouvellement de la profession d’artisan boulanger. A mon sens, cela passe par le développement d’identités fortes et claires pour le consommateur, en marge de tout marketing de masse. C’est ainsi que l’on pourra créer un lien durable avec la clientèle et partager avec elle des valeurs, une vision. L’enjeu est de taille : il faut parvenir à transmettre une certaine culture du goût aux générations suivantes. Tant qu’à faire, faisons-le en famille… et pour cela, faisons confiance à notre Tonton… Farine.

Chez Tonton Farine, on a le sens du merchandising ! Des sacs sont disponibles à la vente, de véritables pièces uniques tout à fait inscrites dans l'esprit des lieux.

Chez Tonton Farine, on a le sens du merchandising ! Des sacs sont disponibles à la vente, de véritables pièces uniques tout à fait inscrites dans l’esprit des lieux.

Infos pratiques

46 boulevard Victor Hugo – 10000 Troyes / tél : 03 25 76 04 62
ouvert du lundi au samedi de 7h30 à 19h30.

J’entends souvent des acteurs de la profession me dresser un tableau quasi-idyllique du marché parisien, tout du moins sur le plan qualitatif. Le niveau y serait nettement plus élevé qu’ailleurs, avec très peu de « mauvais » artisans. Cela fait longtemps que j’ai cessé d’être candide. C’est tout simplement faux : à peine 10% de nos 1300 boulangers parisiens sortent la tête de l’eau. Globalement, on peut penser que c’est à peu près la même chose au niveau national, seulement la concentration n’est pas la même, il y a donc beaucoup moins d’arbres pour cacher la forêt. Certaines zones sont plus gâtées que d’autres.

Ainsi il persiste quelques « zones blanches » : on a beau tourner et se retourner, certains quartiers demeurent pauvres en pains et gourmandises de qualité. Il faut alors aller voir un peu plus loin si l’herbe est plus verte… et attendre qu’éventuellement la situation change au gré des mutations de fonds. Cela peut prendre longtemps, voire être complètement vain si les emplacements disponibles ne sont pas considérés comme intéressants.

Dans le 13è arrondissement, à proximité du métro Olympiades, on se trouvait justement dans l’un de de ces secteurs où les panophiles sont bien en peine. Tout comme le quartier, les choses sont en train de changer. De nouveaux habitants arrivent, attirés par des logements récemment construits et des loyers inférieurs à ceux pratiqués dans les arrondissements plus « centraux ». Le pouvoir d’achat augmente, et cela peut intéresser des artisans engagés dans une démarche qualitative.
L’Essentiel est arrivé au 89 bis rue de Tolbiac courant octobre 2015 et a pris la température pour mieux évaluer les besoins avant de se lancer dans des travaux de rénovation. Ils ont pris fin aujourd’hui avec la ré-ouverture de la boutique, entièrement remodelée, tout comme les laboratoires.

Le pôle pain & viennoiserie reste prédominant et affirme bien l’identité d’artisan boulanger. Malgré un espace de vente relativement restreint, le flux est bien organisé et on ne se sent pas l’étroit. Les jeux de miroirs « agrandissent » l’espace, c’est bien vu.

Nadine et Anthony Bosson ont fait appel à CMC Agencement pour réaliser la transformation, comme pour leurs deux autres boutiques. Le résultat est élégant, sobre et moderne. Si la façade s’inscrit clairement dans le style traditionnel du fameux agenceur, l’intérieur se démarque assez nettement et séduit grâce à des teintes plus claires et lumineuses. Les trois pôles d’encaissement, rattachés aux différentes activités (pain, pâtisserie, traiteur) permettront de gérer les flux de façon efficace en heure de pointe.
Il faudra du temps pour faire décoller la consommation de pain ici : l’établissement était principalement orienté sur l’offre déjeuner et les habitudes ne sont pas évidentes à faire changer.

L'un des pôles d'encaissement

L’un des pôles d’encaissement

Je ne doute pas sur la capacité de Jean-Pascal Detrait et de son équipe pour y parvenir. Ce professionnel aguerri, que l’on connaissait depuis 2013 en tant que démonstrateur au sein des Moulins de Chars après avoir été formateur chez les Compagnons du Devoir, est pleinement investi dans ce challenge et met progressivement en place les gammes pour y parvenir. Il faut pour cela impliquer le personnel repris avec le fonds, que ce soit en vente ou en production… autant de chantiers qui prennent du temps et de l’énergie, mais qui rendent sans doute ce métier riche et passionnant.

En janvier, les stars, ce sont elles : les galettes ! Chez les Bosson, elles se déclinent en de nombreuses saveurs au fil des semaines. Parmi elles, une création à la cerise.

En janvier, les stars, ce sont elles : les galettes ! Chez les Bosson, elles se déclinent en de nombreuses saveurs au fil des semaines. Parmi elles, une création à la cerise.

L’Essentiel grandit ainsi progressivement, et cette troisième implantation est réalisée plus de 3 ans après la seconde, ce qui dénote une réelle volonté de maintenir un développement maîtrisé et ancré sur des bases solides. De plus, en restant fidèle au 13è arrondissement où il a rencontré son premier succès, le couple Bosson continue à faire évoluer l’offre locale… et il serait bien difficile de s’en plaindre.

Devanture, L'Essentiel Olympiades

Infos pratiques

89 bis rue de Tolbiac – 75013 Paris (métro Olympiades, ligne 14)
ouvert du lundi au vendredi de 7h à 20h – ouverture exceptionnelle le samedi en janvier 2016.

Actualité

01
Jan

2016

2015, la rétrospective

1 commentaire

Les années passent, c’est inexorable. A chaque premier janvier, on incrémente le compteur et on essaie de formuler une longue liste de voeux, en espérant que cela rendra le monde meilleur. Bien sûr, il faut le souhaiter, mais aussi en devenir acteur pour pouvoir prétendre y parvenir.
En cette période troublée, certains ont tendance à parler de combat, de guerre, de souffrance… même si le ciel n’est pas toujours très bleu, je pense que nous devrions plutôt prendre les choses d’une autre façon et simplement nous souhaiter une année 2016 créative, ouverte, lumineuse, … et riche en partage, car c’est bien en apprenant, parfois ré-apprenant, à vivre ensemble en harmonie que l’on parviendra à bâtir une société durable et porteuse d’espoir. Aussi, il faudrait arrêter de chercher la paille dans l’oeil de nos voisins pour mieux appréhender la poutre qui nous bouche la vue.

Pour l’heure, jetons un dernier coup d’oeil sur 2015.
En plus d’avoir marché, couru, roulé, plusieurs milliers de kilomètres pour toujours revenir au même point, j’aurai été encore et toujours plus loin dans ma démarche de mieux comprendre et retranscrire la vie de cette filière vivante et mouvante que représente la boulangerie artisanale. Visites de salons, moulins, et bien sûr boulangeries… voilà pour l’ordinaire. Il aurait été idiot de ne pas l’agrémenter de quelques épices. Un CAP Boulanger, quelques polémiques parfois brûlantes, … le parcours que je trace n’est pas linéaire – et il n’a pas vocation à l’être. Depuis le début, je défends une vision portée sur le parcours et pas sur l’objectif. Si certains se voient boulangers, grands critiques, … à plus ou moins court terme, ce n’est pas mon cas.

Cette année comme les précédentes, j’ai du continuer à avancer avec une santé fragile, avec des doutes et de longs moments où le tunnel semble être d’une longueur infinie. Beaucoup me reprochent mon côté trop « engagé », comme s’il fallait être consensuel pour exister et être crédible. Je n’ai pas fait tout ce chemin pour trahir mes valeurs, et si j’ai acquis une seule conviction en 2015, c’est bien celle-ci.
Le changement est long, difficile, mais j’ai aussi envie que le painrisien soit porteur d’un message d’espoir. Il existe, de nombreux artisans le prouvent chaque jour, et je suis persuadé que nous arriverons à le faire grandir ensemble. C’est du moins mon engagement. Nous avons besoin d’espaces comme celui-ci, indépendants et curieux du monde. Demain je reprendrai mon bâton de pèlerin, je reprendrai la route. On a encore beaucoup de chemin à faire ensemble !
Bonne année 2016.

En route...

Je n’ai pas souvent l’occasion de vous parler d’histoires d’amitié. Parfois un peu d’amour, d’autres fois de raison, les couples d’artisans boulangers pouvant tenir plus qu’à ça qu’aux sentiments. Il faut dire que l’engagement n’est pas anodin : avoir confiance en l’autre, être prêt à partager avec lui une aventure entrepreneuriale engageant une bonne partie de sa temps et même de sa vie, autant de choses qui ne s’accordent pas à n’importe qui. Ainsi, la rencontre avec ce type d’aventure, où la confiance a su durer avec les année, doit être appréciée à sa juste valeur.

Sébastien et Erwan. Des professionnels souriants, entretenant chaque jour une maxime héritée d'Escoffier : rester humble.

Sébastien et Erwan. Des professionnels souriants, entretenant chaque jour une maxime héritée d’Escoffier : rester humble.

Erwan Blanche et Sébastien Bruno sont de ceux-là, des fidèles. Non content d’être amis, ils partagent également un métier, celui de pâtissier… et maintenant de boulanger. En effet, c’est depuis l’été 2014 que les deux associés déploient leur Utopie gourmande au 20 rue Jean-Pierre Timbaud, dans le 11è arrondissement parisien.
Cette boulangerie-pâtisserie est la concrétisation d’un projet mûri depuis 15 ans, au cours desquels ils ont chacun suivi des parcours professionnels riches et variés.
Pour Erwan, les voyages se seront enchainés avec des phases de travail intensives, suivies de périodes de découverte. Les cuisines, les plages, les restaurants gastronomiques… tout y passe. Du côté de Sébastien, après un apprentissage à Thiais et au sein de la maison Montziols à Saint-Maurice, il rejoint les équipes d’un traiteur sucré à Londres, puis celles de la Maison Ladurée où il officiera pendant près de 8 ans. Vient alors le temps de croiser les parcours, de se retrouver, et même de passer… un diplôme de plongée ensemble, en Malaisie. Une bonne façon de ne jamais se noyer… même en cas de voyage en eaux profondes.

Le plafond, rénové par les deux associés, rappelle que cette boulangerie a une histoire.

Le plafond, rénové par les deux associés, rappelle que cette boulangerie a une histoire.

Il faut dire que les deux associés auraient eu toutes les raisons de couler à pic en reprenant cette affaire d’angle, sérieusement défraichie. Que ce soit en boutique ou au laboratoire, la feu-boulangerie Charlot portait bien son nom tant elle semblait avoir été tenue depuis quelques années au dépit du bon sens. C’est au prix d’un lourd investissement humain, matériel et financier que les choses ont changé au fil des mois. De la peinture tout d’abord, beaucoup de nettoyage, un nouveau four, … puis des vitrines neuves à l’automne. Les produits ont connu eux aussi d’importants changements : plus de pré-mixes mais uniquement des pains réalisés sur levain naturel, des viennoiseries et pâtisseries 100% maison, une gamme traiteur moderne… l’exigence entretenue par Erwan et Sébastien s’exprime sur tous les postes.

Des pâtisseries soignées, réalisées avec des matières premières sélectionnées : fruits frais, chocolat Valrhona, beurre AOP, ... tout en restant accessibles. Un des fondamentaux de l'Utopie gourmande développée par Erwan et Sébastien.

Des pâtisseries soignées, réalisées avec des matières premières sélectionnées : fruits frais, chocolat Valrhona, beurre AOP, … tout en restant accessibles. Un des fondamentaux de l’Utopie gourmande développée par Erwan et Sébastien.

Exigence mais pas pour autant tyrannie : il faut savoir placer le curseur et rester pragmatique quand c’est nécessaire. Un principe qui s’applique autant sur le choix des matières premières qu’en matière de management. Chez Utopie, l’essentiel est de prendre plaisir à participer à l’aventure, et que le travail ne soit pas ressenti comme une contrainte. Lors du recrutement, c’est la passion qui prime sur l’expérience. Chacun est ainsi impliqué dans le projet de l’entreprise, que ce soit en vente ou en production. Zohra, Gwladys, Lilian, Xavier, Valentin, Yaya … ont bien intégré ce mode de fonctionnement et c’est ainsi que l’on trouve ici une qualité régulière de service et de produit. Cet état d’esprit n’est pas vraiment monnaie courante dans la profession, et de nombreux artisans considèrent encore que la pression est le meilleur moyen pour maintenir la performance de leurs équipes. D’autres n’ont même pas le sens de la qualité. Les boulangers de l’ancienne équipe, pourtant reprise lors du changement de propriétaire, semblaient bien faire partie de ceux-là : ils ont quitté bien rapidement les lieux en constatant que leur quotidien allait être considérablement transformé.

Les pains à la coupe sont mis à l'honneur avec notamment le pain signature, l'Authentic. Réalisé à partir d'un mélange de farines, il séduit par son moelleux et sa légère acidité. Les plus gourmands choisiront le pain Muesli, riche en fruits secs, ou aux noix. Le week-end, ils sont rejoints par des créations aromatiques, au thé vert et riz soufflé ou au charbon végétal et sésame torréfié.

Les pains à la coupe sont mis à l’honneur avec notamment le pain signature, l’Authentic. Réalisé à partir d’un mélange de farines, il séduit par son moelleux et sa légère acidité. Les plus gourmands choisiront le pain Muesli, riche en fruits secs, ou aux noix. Le week-end, ils sont rejoints par des créations aromatiques, au thé vert et riz soufflé ou au charbon végétal et sésame torréfié.

Le travail du pain, le suivi de la fermentation, la sélection des farines… autant de sujets qui étaient bien nouveaux pour ces deux pâtissiers de métier. Leur curiosité naturelle et leur rigueur, accompagnés d’une absence d’à-priori négatif vis-à-vis du caractère besogneux de la boulangerie, leur ont permis de progresser rapidement et de mettre en place une gamme variée, associant goût et conservation. Près de 6 à 8 mois auront été nécessaires afin de parvenir à un résultat réellement satisfaisant à leurs yeux, et pour maitriser les différentes méthodes de fermentation que sont la poolish, le levain liquide et le levain dur. J’ai vu trop souvent des transfuges de l’univers sucré reprendre des boulangeries en négligeant complètement le fait que c’est le pain qui assure le bon fonctionnement de leur établissement, et le traitent comme un sujet négligeable… pour des résultats désastreux. Ce n’est pas le cas ici, et c’est à mon sens l’un des éléments clé du succès grandissant de leur entreprise.

Le choix ne manque pas en viennoiseries et gourmandises : cakes, financiers, cookies, madeleines, roulés feuilletés, ... sans oublier des classiques très bien réalisés, à l'image du croissant.

Le choix ne manque pas en viennoiseries et gourmandises : cakes, financiers, cookies, madeleines, roulés feuilletés, … sans oublier des classiques très bien réalisés, à l’image du croissant.

Pourtant, bien peu de monde y croyait. Malgré leur expérience, peu d’acteurs de la profession ont cru en leur projet. Les prises de contact avec les meuniers se sont soldées par des échecs, sans doute du fait de la faiblesse apport personnel. Fort heureusement, une personne a cru en eux et les a accompagnés aussi bien pour trouver un fonds de commerce que pour les différentes démarches liées à leur installation. Philippe Sautereau, directeur commercial des Moulins de Chars, a ainsi fait la preuve que l’humain et la prise de risque aux côtés des entrepreneurs n’étaient pas tout à fait perdus dans cette filière où les artisans sont souvent laissés bien seuls. L’enjeu est justement de parvenir à intégrer du sang-neuf dans la profession, pour dynamiser l’offre et participer à son évolution qualitative. Dans cette démarche, les compétences et la motivation comptent bien plus que les données financières, et il s’agit de ne pas se tromper dans les profils sélectionnés.

Le mur à pains

Le mur à pains

En effet, on voit beaucoup de gens ayant beaucoup de choses à dire, mais peu d’histoires à raconter. Quand on n’a pas ou peu d’identité, la boulangerie et la pâtisserie sont tristes, car ces métiers sont l’expression directe d’une sensibilité et d’un goût. Le 20 rue Jean-Pierre Timbaud en est une excellente illustration : les matériaux -bois et métal- correspondent pleinement à l' »univers Utopie », avec une approche assez brute et directe. En vitrine, les gâteaux associent des saveurs d’ici et d’ailleurs. Une tarte au Kalamansi ? Un souvenir de Malaisie. Un pain au charbon végétal et aux graines de sésame torréfiées, un autre au thé vert Sencha et aux grains de riz soufflé, … La créativité des deux compères est sans limites.
La clientèle a évolué au fil du temps, pour attirer des personnes sensibles à ce type de produits. Les six premiers mois ont été très difficiles, car les critiques furent nombreuses… le changement n’est pas souvent bien vu, même dans une ville comme Paris. Dans un quartier en pleine évolution – le 11è arrondissement accueille une population de plus en plus aisée – une boulangerie comme Utopie a parfaitement sa place et participe même à la valorisation des logements.

Les formules ne manquent pas d'humour, et cela correspond bien à l'ambiance décontractée mise en place ici.

Les formules ne manquent pas d’humour, et cela correspond bien à l’ambiance décontractée mise en place ici.

Pour accompagner le changement, l’ouverture du fournil sur la boutique aura été un élément déterminant. En plus de créer de la transparence sur la production et de rassurer les clients, cela permet de passer avec fluidité en vente… ce que les associés font avec plaisir, créant ainsi une relation privilégiée avec leur clientèle. Plusieurs restaurateurs situés aux alentours ont fait le choix de rejoindre l’aventure, attirés par l’état d’esprit et la qualité des produits. A présent, Erwan et Sébastien cherchent à consolider leurs premiers acquis, notamment en parvenant à garantir la régularité – si difficile et pourtant essentielle en boulangerie artisanale. Plutôt que de courir après des objectifs inatteignables, de réaliser des projections, de se voir déjà à la tête d’une seconde affaire… ils avancent sereinement avec leur équipe et nous prouvent que l’on peut encore faire vivre des Utopies… concrètes.

Le fournil ouvert sur la boutique, avec le four Bongard installé pendant l'été. Un investissement lourd mais nécessaire pour améliorer la qualité des produits.

Le fournil ouvert sur la boutique, avec le four Bongard installé pendant l’été. Un investissement lourd mais nécessaire pour améliorer la qualité des produits.

Infos pratiques

20 rue Jean-Pierre Timbaud – 75011 Paris (métro Oberkampf, lignes 5 et 9) / tél : 09 82 50 74 48
ouvert du mardi au dimanche de 7h à 20h.