Je dois dire que le langage employé par nos ancêtres me fascine. Leur façon d’exprimer les choses et de décrire le monde était loin d’être la même que celle développée aujourd’hui, à tort ou à raison d’ailleurs. Toujours est-il que le vocable châtié de l’aristocratie de l’époque aurait bien du mal à intégrer mon quotidien, même si je pense que cela aurait quelques effets… cocasses. Certains mots rattachés à l’univers du pain étaient ainsi employés pour désigner tout autre chose, un bon moyen pour créer aujourd’hui des incompréhensions.

Parmi eux, on peut citer « ma mie ». L’intérieur du pain était ainsi une amante, une femme aimée… D’un côté, c’est toujours le cas lors de la dégustation, de par le plaisir qu’elle nous apporte et la joie que l’on peut avoir à la savourer jour après jour. Allons donc, ma mie, découvrir… La Mie des Amis, une boulangerie du 16è arrondissement. Celle-ci pourrait bien devenir notre amie.

La Mie des Amis, Paris 16è

« Boulangerie gourmande », c’est ainsi qu’elle est décrite par Estelle Lévy, sa fondatrice. Le parcours de cette franc-comtoise s’est d’abord écrit dans le secteur de l’agro-alimentaire, avant de passer son CAP de Boulanger. Elle souhaitait en effet entretenir plus de contacts avec des passants, vivre une véritable vie de quartier, ce qui n’était pas possible dans son « ancienne vie ». De plus, il était primordial pour elle de savoir ce qu’elle vendait, en maîtrisant la qualité de ses produits. On peut dire que c’est aujourd’hui chose faite. Installée sur l’avenue de Versailles depuis janvier 2011, c’est un lieu convivial et chaleureux qu’elle et son équipe ont développé.

Au delà d’être gourmande, cette boulangerie se veut également lieu de vie, avec un caractère « bistrot » porté par un coin bar et une terrasse. Cela ne manque pas d’attirer les étudiants et habitants du secteur, qui sont nombreux à se restaurer ici au déjeuner. Il faut dire qu’une offre variée leur a été réservée : salades, sandwiches, plats chauds… Une variété accompagnée d’une qualité appréciable, le tout pour des tarifs abordables.
Les painrisiens que nous sommes ne doivent pas se laisser distraire par tout cela, car s’il y a bien des produits qu’une boulangerie doit porter haut et fort, ce sont les pains.

Les pains, La Mie des Amis, Paris 16è

De ce côté là, la Mie des Amis parvient également à convaincre, avec justement des mies de très bonne facture, à l’hydratation bien dosée et à la tenue irréprochable. Au travers d’une gamme réalisée à partir des farines de la Minoterie Viron, Estelle Lévy nous propose les grands classiques du meunier, renommés par ses soins. Le « Noisetier » et son mélange de noix, noisettes et raisins n’est pas sans rappeler le fameux Raboliot, tout comme le Berlinois à la mie sombre et aux nombreuses céréales affiche clairement sa parenté avec le Hasting. On appréciera le soin porté à la réalisation de ces produits, tout comme de la baguette de Tradition, d’excellente facture. Cette dernière offre d’agréables notes de céréales torréfiées, accompagnées par un façonnage fin et élancé, offrant un bon rapport mie / croûte. Il est d’ailleurs intéressant de la faire vieillir un peu, car ses arômes se modifient pour devenir plus lactiques et crémeux avec le temps. Pour 1,15€ les 250g, voilà un bon produit, loin des sur-tarifications fréquentes dans cet arrondissement.

Les viennoiseries, La Mie des Amis, Paris 16è

Les viennoiseries sont un peu faiblardes, même si « honnêtes » car faites maison. On se tournera plus volontiers vers des gourmandises telles que les lunettes ou la fameuse galette Bisontine, une spécialité franc-comtoise : les origines de la propriétaire s’expriment ici, et c’est tant mieux, car cela donne une vraie identité au lieu. Les confitures de Marie Petit (« Ô Jardin Sucré ») ont également leur place en vitrine, cette dernière étant installée à Besançon.
Pour continuer dans le sucré, les pâtisseries ont le bon goût de rester simples, avec quelques tartes aux fruits, chocolat, caramel ou citron.

Les pâtisseries, La Mie des Amis, Paris 16è

Impossible de terminer ce tour d’horizon sans parler de l’accueil, qu’il soit réalisé par la patronne elle-même ou par l’une des sympathiques vendeuses de l’établissement. On sent ici une véritable chaleur humaine et une volonté de partager un peu plus que des produits avec la clientèle, ce qui donne à cette boutique un caractère profondément attachant.

Infos pratiques

118 Avenue de Versailles – 75016 Paris (métro Chardon-Lagache, ligne 10) / tél : 01 45 27 26 55 ‎
ouvert du lundi au samedi de 7h30 à 20h.

Avis résumé

Pain ? La gamme n’est pas particulièrement étendue, mais l’essentiel est là. Façonnages plutôt appliqués, cuissons bien menées, le tout épaulé par les farines de chez Viron, l’ensemble est proposé à des tarifs raisonnables. Noisetier, Berlinois, Rustique, Céréales, d’Autrefois… même si la baguette de Tradition demeure une base savoureuse et agréable : assez fine et élancée, avec une croûte bien craquante, elle offre des notes de céréales torréfiées avant de virer vers des arômes plus lactiques au bout de quelques heures « de vie ». A noter que la maison ne propose pas de baguette de pain courant, chose qui pourra en rebuter certains… même si j’approuve plutôt ce choix, en définitive.
Accueil ? Dynamique et charmant, le service parvient à satisfaire rapidement les nombreux gourmands venus se restaurer ici à l’heure du déjeuner. On appréciera le fait que la propriétaire des lieux passe du temps en boutique, cela faisant partie de sa conception et de l’une des raisons pour lesquelles elle s’y est reconvertie : le contact humain et quotidien.
Le reste ? Cette « boulangerie-bistrot » a particulièrement développé son offre traiteur, avec une gamme variée de sandwiches, salades et plats chauds. La terrasse et les tables disposées au sein de l’établissement permettent de les consommer sur place, même si l’on peut tout à fait les emporter. Pour le dessert, quelques pâtisseries simples, à l’image de ces tartes aux fruits, moelleux au chocolat, muffins, sablés et même galettes Bisontines, une spécialité franc-comtoise, région d’origine d’Estelle Lévy. Côté viennoiseries, rien d’exceptionnel, même si les produits ont le bon goût d’être faits maison.

Faut-il y aller ? La Mie des Amis constitue une adresse simple et chaleureuse, avec des produits dans le même esprit. La gamme de pain demeure courte et plutôt bien réalisée, même si reprenant des grands classiques du meunier. En bref, un lieu où il fait bon s’asseoir quelques instants, prendre une boisson chaude… et pourquoi pas une de ces fameuses galettes, si rares par chez nous !

S’il y a bien une chose que je n’ai pas connue, la « faute » à mon origine francilienne, c’est la petite fête annuelle du village, celle où tout le monde se retrouve pour passer un peu de temps ensemble, où la ville revêt vraiment un aspect de communauté. Cela doit être de plus en plus rare, notamment en raison de l’urbanisation. Tout prend vite des proportions importantes, et nous nous enfermons dans notre individualisme… Seuls parmi les autres.
Pour autant, certaines communautés continuent à organiser leurs événements, à se retrouver de façon ponctuelle.

Notre-Dame de Paris et ses chapiteaux ! Le temps n'était pas très clément pour la première journée de cette charmante fête, un peu plus aujourd'hui tout de même.

Notre-Dame de Paris et ses chapiteaux ! Le temps n’était pas très clément pour la première journée de cette charmante fête, un peu plus aujourd’hui tout de même.

On peut dire que les boulangers le font, ou tout du moins une petite partie d’entre eux, avec leurs concours… et la Fête du Pain, organisée chaque année début mai sur le Parvis de Notre-Dame. Cette dernière a débuté hier, et elle met à l’honneur en 2013 les jeunes en Boulangerie. Peut-on dire « enfin » ? Il faut en effet bien intégrer le fait que sans apprentis ni sang neuf dans la profession, elle finira par se perdre et ne plus attirer personne. Pour éviter cet écueil, il est ainsi nécessaire de mettre en avant les progrès faits ces dernières années en terme de conditions de travail (mécanisation, horaires plus « souples », …) et aussi le fait qu’exercer ce métier n’a rien de dévalorisant, bien au contraire : source de débouchés aussi bien en France qu’à l’international, il nécessite une grande sensibilité et une rigueur que trop peu peuvent se vanter d’avoir.

Les fours, Fête du Pain 2013

Ainsi, afin d’éveiller les vocations, petits et grands peuvent s’initier au façonnage dans ce fournil géant de 720m2, ouvert jusqu’au 16 mai de 9h à 18h. Le toucher de la pâte a toujours quelque chose de magique, et je ne doute pas que cette matière vivante saura intéresser nombre d’individus. Les enfants des écoles seront accueillis du 13 au 16 mai, ils façonneront et repartiront avec leur petit pain cuit.

Une petite toque, un peu de pâte, allez les enfants, aujourd'hui c'est vous les boulangers !

Une petite toque, un peu de pâte, allez les enfants, aujourd’hui c’est vous les boulangers !

L'atelier façonnage attire aussi des personnes plus âgées... même si c'est parfois un peu hésitant, à première vue. Oh les jolies... ficelles ?

L’atelier façonnage attire aussi des personnes plus âgées… même si c’est parfois un peu hésitant, à première vue. Oh les jolies… ficelles ?

Cravates et costumes se faisaient nombreux hier pour la remise des prix du Concours de la Meilleure Baguette de la Ville de Paris... avec notamment Jean-Pierre Crouzet au premier plan, toujours bien entouré !

Cravates et costumes se faisaient nombreux hier pour la remise des prix du Concours de la Meilleure Baguette de la Ville de Paris… avec notamment Jean-Pierre Crouzet au premier plan, toujours bien entouré !

En marge de ces activités en continu, quelques événements ponctuent cette fête, à commencer par la remise des prix du Concours de la Meilleure Baguette de Tradition de la Ville de Paris 2013, qui a eu lieu hier en présence de quelques personnalités : Jacques Mabille – président du Syndicat Professionnel de la Boulangerie-Pâtisserie d’Ile-de-France, Lyne Cohen-Solal, adjointe au maire de Paris chargée du commerce, de l’artisanat, des professions indépendantes et des métiers d’art, mais aussi le magique Jean-Pierre Crouzet, dont les responsabilités diverses achèveraient de remplir ce billet. Tout ce beau monde a donc récompensé les boulangers, entre serrages de mains de rigueur et jolis sourires.

Regardez comme c'est mignon, ces petites corbeilles de pain.

Regardez comme c’est mignon, ces petites corbeilles de pain.

Demain, ce sera au tour des maîtres du feuilletage d’être mis à l’honneur, avec la même cérémonie mais pour le prix du Meilleur Croissant francilien au beurre AOP Charentes Poitou. Enfin, samedi se tiendra le Master de la baguette de tradition française : les 2 premiers boulangers classés des prix départementaux (75, 92, 93 et 94) fabriqueront devant le public 40 baguettes, appelées à être jugées dans l’après-midi avant proclamation des résultats sur les coups de 16h.

Même si c'est la jeunesse qui est à l'honneur cette année, ce sont toujours des têtes bien grisonnantes qui préparent pains et viennoiseries... et on doit malgré tout reconnaître leur persévérance !

Même si c’est la jeunesse qui est à l’honneur cette année, ce sont toujours des têtes bien grisonnantes qui préparent pains et viennoiseries… et on doit malgré tout reconnaître leur persévérance !

Bref, tout le monde est beau et gentil dans l’univers de la boulangerie. Pas exactement, en réalité. Comme je l’avais déjà indiqué l’an passé, je trouve que tout cela ressemble plus à une foire qu’à une fête, d’autant plus par la localisation de l’événement. L’activité de vente de pain, de sandwiches et gourmandises participe à cet effet, les touristes en quête d’un repas simple et rapide étant nombreux aux environs de Notre-Dame. Les organisateurs l’ont bien compris et jouent le jeu à fond, avec des tarifs toujours aussi sympathiques (1,50€ la baguette de Tradition, 2,50€ le morceau de pain de campagne de 250g, 4 euros le sandwich jambon-beurre…). Ce n’est pas pour ce que leur coûte la main d’oeuvre : une armée de têtes grisonnantes oeuvre pour préparer et vendre les produits, et je ne suis pas persuadé que la matière première présente un coût élevé… si cette dernière n’est pas offerte, d’ailleurs.

Côté vente, cela ne traine pas : un sandwich, une viennoiserie, une brioche ? Faites votre choix !

Côté vente, cela ne traine pas : un sandwich, une viennoiserie, une brioche ? Faites votre choix !

Après un bon repas, on pourra aller se renseigner sur les céréales, avec un chapiteau dédié à ces dernières (« les céréaliers sèment la vie », quand on sait la façon dont les sols sont surexploités, il y a de quoi se poser des questions…), ou bien découvrir quelques entreprises exerçant leur activité autour de la boulangerie-pâtisserie (levure, technologie…).

"Les céréaliers sèment la vie", pas tous, malheureusement...

« Les céréaliers sèment la vie », pas tous, malheureusement…

Vous l’aurez compris, mon avis sur la manifestation n’est pas vraiment plus positif que l’an passé, il n’y a même plus l’attrait des spécialités venues d’ailleurs qu’il pouvait y avoir avec les boulangers réunionnais… Bref, à croire pour faire la fête, il suffit d’en écrire le nom.

Partir à l’aventure, sur une île déserte… Oui, pourquoi pas, mais ce serait alors sans pain ni boulanger ? Difficile à vivre quand on est habitué à en manger à tous les repas, comme d’ailleurs la plupart des français. Pour autant, je suis un peu un aventurier du pain, à ma façon. Oh, non, je n’ai pas besoin de machette pour me frayer un chemin parmi les boulangeries (quoique, vu les retours de certains, je crois qu’elle ne serait parfois pas de trop), mais 1300 adresses, cela représente presque la jungle et les mauvaises herbes ou autres insectes nuisibles y sont assez nombreux en définitive. A quand le Koh Lanta de la boulangerie parisienne ? Pas besoin de Denis Brogniart, on prendra une tête connue du secteur pour éructer un peu sur le sujet, en espérant que cela ne se termine pas avec un mort comme cette année pour la fameuse émission télévisée. C’est que ça peut être dangereux, un fournil.

Pain au Manioc, La Grande Epicerie (Paris 7è)

Pourquoi est-ce que je vous dis tout cela, au juste ? Tout simplement parce que les « aventuriers » sont souvent amenés à se nourrir avec les moyens du bord, offerts par la nature… et les racines de manioc reviennent souvent dans leurs gamelles. Aujourd’hui, il se trouve réduit en farine et panifié par les boulangers de La Grande Epicerie.
En effet, à l’occasion d’une thématique saisonnière autour du Brésil, l’institution parisienne propose quelques spécialités « typées ». Dans ce pays, le mot « farine » (en portugais farinha) désigne avant tout la farine de manioc, et non de blé.
Cette farine n’a d’ailleurs pas l’aspect de la farine de blé : elle ressemble plutôt à une semoule sèche plus ou moins grossière de couleur allant du jaune vif au gris en passant par le blanc.

Tranches, Pain au Manioc, La Grande Epicerie (Paris 7è)

La spécialité locale est de réaliser des pains garnis de fromage (proposés également à La Grande Epicerie, d’ailleurs), et dépourvus de gluten, le manioc n’en contenant pas. Ici, on est plutôt en présence d’un produit moelleux et légèrement brioché, de par la présence d’oeufs, de lait et de sucre dans sa composition. De plus, de la farine de blé malté est incorporée au mélange, ce qui apporte au pain son « architecture » et lui permet d’offrir une mie souple et non compacte comme c’est généralement en absence de gluten.
Au final, qu’obtient-on ? Une vraie gourmandise, avec un goût légèrement sucré, quelques notes d’oeuf sans pour autant tomber dans la brioche pure. Cuit dans un four dit « à chariot », le produit ne présente pas particulièrement de croûte, mais juste une enveloppe légèrement caramélisée qui accompagne agréablement le moelleux de sa mie. Difficile à dire si l’on ressent vraiment la présence du manioc. Ce dernier s’exprime plutôt au travers de la couleur, d’un jaune relativement marqué. Sa conservation est très bonne, et le dessèchement de la mie reste limité.
De par ses caractéristiques, ce pain se révèle être un compagnon idéal des petits-déjeuners, simplement tartiné d’un peu de confiture. Légèrement toasté, il peut aussi accompagner des apéritifs gourmands.

Au moins on sait ce qu'il y a dedans... Tout du moins à peu près, vu le caractère lapidaire et pas très clair des indications.

Au moins on sait ce qu’il y a dedans… Tout du moins à peu près, vu le caractère lapidaire et pas très clair des indications.

La Grande Epicerie nous propose là un produit à essayer avant tout par curiosité, le manioc n’étant pas très fréquent en boulangerie sous nos latitudes. Son petit goût sucré reste cependant un vrai facteur différenciant par rapport à d’autres produits, lui conférant une douceur et une « chaleur » bien appréciables sans être tout à fait dans le secteur de la viennoiserie, mais toujours du pain. On pourra tout de même regretter son prix, 3,5€ la pièce d’environ 300g, c’est assez onéreux… mais comme souvent, l’originalité se paie. L’aventure aussi.

Pain au Manioc, La Grande Epicerie (Paris 7è), vendu à la pièce dans le cadre de l’opération Brésil, 3,5€ pour environ 300g.

Paris est un centre d’attraction fascinant. On y vient, on y revient, on s’en éloigne, on y naît parfois… pour finalement souvent s’y retrouver par le jeu des hasards de la vie, ou parfois de l’activité économique bourdonnante qui s’y joue. Bien entendu, cela s’étend d’une plus large manière à la région parisienne, même si l’on cherche toujours à se rapprocher du centre. Cela n’est pas sans conséquence en terme d’infrastructures et d’aménagement urbain, car il faut bien parvenir à faire bouger tout ce petit monde… et le challenge est parfois bien difficile à tenir.

Parmi ceux qui se sont éloignés pour se rapprocher ensuite, on compte Jean-Marie Osmont. Ce Meilleur Ouvrier de France Pâtissier 1979 aura officié pendant 10 ans au Ritz, avant de quitter les étoiles de la capitale pour s’installer avec sa famille à Conflans Sainte-Honorine, dans les Yvelines (78). C’est ici qu’il a pu développer son entreprise, spécialisée dans la confection de douceurs : chocolats, macarons, pâtisseries ou confiseries… Nous sommes en plein dans l’univers du sucré.

Pâtisserie Osmont, Boulogne-Billancourt (92)

Si je parlais de partir pour revenir, ce n’est pas sans raison : en effet, le développement de la maison Osmont s’est opéré en deux étapes, la rapprochant toujours des portes de Paris. A commencer avec une boutique à Saint-Germain-en-Laye, inaugurée début 2009… et en ce début avril à Boulogne-Billancourt, tout près d’Auteuil. L’idéal pour jouer un set, gourmand celui-ci.

J’avais déjà eu l’occasion de parler un peu de cet artisan lors d’un de mes passages à Saint-Germain-en-Laye. Je dois dire que j’avais peut-être été un peu vite en besogne, car les produits proposés par la maison se révèlent corrects et abordables. Certes, les entremets aux couleurs assez tapageuses et à l’aspect très rectangulaire ne sont pas vraiment à mon goût, mais on trouve également des spécialités plutôt savoureuses, à l’image de la tarte citron-framboise ou de la « profiteroles », garnie de petits choux à la vanille et d’une ganache au chocolat noir. Les pâtisseries restent assez accessibles, et sont proposées à un prix moyen de 4,5€ la part individuelle. Malgré le voyage depuis le laboratoire « central » de Conflans Saint-Honorine, les produits affichent une belle tenue et les fonds de pâte croquent autant que l’on peut le souhaiter. En effet, la famille Osmont a souhaité impérativement conserver un contrôle permanent sur la qualité des réalisations, chose bien difficile dès lors que l’on commence à multiplier les équipes et lieux de production.

Vitrine pâtisserie, Pâtisserie Osmont, Boulogne-Billancourt (92)

Les autres gourmandises ne sont pas en reste, avec des chocolats de bonne facture, très accessibles. Les macarons sont tout aussi démocratiques – 1,15 euros la pièce – et même si leur réalisation s’avère parfaitement maîtrisée (croûte craquante et moelleux à coeur), on aimerait que le parfum d’amande soit un peu plus présent.
Difficile de ne pas repartir sans un tube de biscuits secs – cookies, tuiles et aux langues de chat au praliné maison.

Côté humain, rien n’a été fait au hasard, puisque Mme Osmont elle-même est en boutique et conseille avec beaucoup de sympathie les gourmands et curieux venus découvrir le lieu. Curieux, pas tant que ça en définitive, puisque beaucoup de boulonnais connaissaient déjà la maison : Saint-Germain-en-Laye est en effet une destination de choix pour des ballades dominicales à proximité de Paris, d’autant que la cité royale se situe également dans la banlieue nord-ouest de la capitale. Ainsi, ce choix d’implantation s’est révélé tout à fait naturel et c’est tant mieux car cela contribue à renouveler l’offre pâtissière de Boulogne : mis à part Dalloyau, on ne peut pas dire que la ville soit particulièrement bien pourvu côté sucré, à l’inverse de l’offre pléthorique et assez qualitative développée sur le pain.

Infos pratiques

46 avenue Jean-Baptiste Clément – 92100 Boulogne-Billancourt (métro Boulogne – Jean-Baptiste Clément, ligne 10) / tél : 01 46 04 96 80
ouvert le mardi et le vendredi de 8h30 à 20h, les mercredis, jeudis et samedis de 10h à 20h, le dimanche de 9h à 14h.

De curieux phénomènes de concentration sont parfois à observer en terme d’implantation de commerces. On peut ainsi trouver dans la même rue deux supérettes de la même enseigne (souvent franchisées, avec deux propriétaires différents, même si cela n’excuse pas pour autant le manque de clairvoyance de la marque), deux coiffeurs, bouchers, ou autre boutiques à l’activité identique… face à face. Rien de grave en soi, les consommateurs peuvent ainsi comparer facilement, mais je ne suis pas persuadé que cela permette un développement tout à fait harmonieux de chacune des affaires.

Autre possibilité de concentration, celle des titres. Ou plutôt, dans le cas présent, des artisans titrés. En effet, ce sont à présent trois Meilleurs Ouvriers de France boulangers qui assurent leur présence sur le territoire de la commune de Boulogne-Billancourt. Il y a bien sûr Mickaël Morieux et ses deux boulangeries (rue d’Aguesseau et avenue Jean-Baptiste Clément), mais aussi Frédéric Lalos, dont la présence reste toujours aussi… virtuelle, et Thierry Meunier, le dernier arrivé.
Son nom ne vous est peut-être pas inconnu si vous vous intéressez de près ou de loin à l’univers de la boulangerie parisienne, puisqu’il a longtemps officié dans le 18è arrondissement, au sein du « Duc de la Chapelle ». Après avoir passé le flambeau à son apprenti Anis Bouabsa, l’artisan a continué dans cette idée de transmission du métier : formations, stages, séminaires… De nombreux professionnels ont ainsi pu profiter de son expertise. A présent, c’est au tour des boulonnais.

La boutique n'a pas encore reçu ses dernières finitions.

La boutique n’a pas encore reçu ses dernières finitions.

Le lieu sent encore le neuf, et pour cause. Installée dans un quartier en pleine poussée, cette belle boulangerie d’angle affiche des lignes sobres et modernes, et est baignée par la lumière naturelle. Ainsi, la vue ouverte sur le fournil est particulièrement bien mise en valeur. Dans ce laboratoire, le MOF-Compagnon du Tour de France et ses collaborateurs oeuvrent à l’élaboration des gourmandises proposées de l’autre côté de la vitre… en boutique.
Les pains mettent à l’honneur les farines des Moulins de Chérisy, à commencer par une baguette de Tradition à la mie et texture très crémeuses, en plus d’une croûte fine et légèrement croustillante. Son excellente conservation est à saluer, tout autant que son prix : seulement 1€ pour 250g, voilà qui ne devrait pas manquer de séduire les boulonnais.

Les pains, Thierry Meunier, Boulogne-Billancourt (92)

Pour autant, le tableau n’est pas tout à fait idyllique. J’avoue avoir été surpris par le fait de retrouver des prémixes chez un Meilleur Ouvrier de France : en effet, le pain au maïs ou le Viking sont des produits développés par le meunier… et non par Thierry Meunier, comme on aimerait que ce soit le cas. (MAJ début 2014 : une gamme Biologique a été développée et les pré-mixes ne sont plus utilisés par ce boulanger)
On appréciera néanmoins la boule de Meule et sa belle douceur, ainsi que les façonnages et cuissons appliqués sur l’ensemble de la gamme.

Viennoiseries, Thierry Meunier, Boulogne-Billancourt (92)

En sucré, les viennoiseries demeurent juste moyennes, dans un registre par ailleurs très classique. Même constat pour les pâtisseries. Notre gourmandise s’arrêtera peut-être un peu plus sur les douceurs diverses disséminées dans la boutique : cakes, tuiles aux amandes, madeleines, sablés, meringues ou encore tigrés et financiers, rien n’a été oublié.
Difficile de juger de l’offre traiteur puisqu’elle n’était pas en place lors de ma visite, cela méritera donc d’être suivi.

Les pâtisseries & gourmandises, Thierry Meunier, Boulogne-Billancourt (92)

L’ouverture étant récente, les produits comme la boutique – dont les finitions et l’enseigne n’ont pas été encore réalisés – restent en devenir. Reste tout de même la qualité de l’accueil, chaleureux et souriant, ainsi que le fait que cette boulangerie comble un véritable manque dans ce quartier de Boulogne : en effet, pas de boulangerie artisanale aux alentours jusqu’alors, même si l’offre est assez pléthorique dans le reste de la cité.

Infos pratiques

8 place Jules Guesde – 92100 Boulogne-Billancourt (métro Billancourt, ligne 9)
ouvert du lundi au samedi de 7h à 20h.

Avis résumé

Pain ? La gamme n’est pas tout à fait en place, car les pains 100% Nature que devrait proposer l’artisan prochainement ne sont pas encore disponible. Cela ne nous empêchera pas de déguster avec grand plaisir la baguette de Tradition proposée ici : très crémeuse, façonnée avec soin pour une croûte finement croustillante, à l’excellente conservation et au prix particulièrement accessible (1 euro les 250g), voici un très beau produit. Le reste des pains n’en demeure pas moins soigné, avec des boules de Meule à l’agréable douceur, des pains de campagne dans la plus pure tradition, ainsi qu’un « pain du jour ». On regrettera tout de même qu’un Meilleur Ouvrier de France utilise des prémixes, alors qu’il devrait être porteur bout en bout d’une démarche valorisant l’artisanat dans toute sa noblesse.
Accueil ? Encore en rodage, inévitablement, mais néanmoins charmant et souriant. Il participe à développer une ambiance agréable dans cette grande boulangerie, lumineuse à tous points de vue.
Le reste ? Thierry Meunier est avant tout boulanger et cela se ressent dans ses produits. Les viennoiseries ne présentent pas de relief particulier, ni même les pâtisseries. Pour une pause sucrée, on préférera les gourmandises disséminées dans la boutique : sablés, financiers, cakes… L’offre traiteur n’étant pas encore en place lors de mon passage, il serait bien difficile de la juger.

Faut-il y aller ? Attendons un peu que tout soit en place, même si la baguette de Tradition est dores et déjà tout aussi délicieuse que l’accueil proposé dans ces lieux. En parlant de lieu, justement, l’aménagement sobre et la lumière naturelle offerte par la localisation en angle de la boutique sont du meilleur effet, et ne manqueront pas de séduire les habitants du secteur, lesquels manquaient jusqu’alors d’une bonne boulangerie près de chez eux.

« On ne voit bien qu’avec le coeur, l’essentiel est invisible pour les yeux ». Voici un des nombreux messages que l’on retrouve dans le Petit Prince, le fameux ouvrage d’Antoine de Saint-Exupery. Saviez-vous que cette tête blonde fêtait cette année ses 70 ans ? Pourtant, sa parole ne pourrait sembler plus actuelle, tant notre monde aurait besoin de cette sensibilité, de cette ouverture.
Avec le coeur, disait-il. Peut-être est-ce avec celui proposé par les compagnons-boulangers de la maison Poilâne en ce premier mai. Réalisé à partir d’une base assez ferme, moelleuse et beurrée, ce petit coeur offre toute la douceur qu’on pourrait en attendre… avec bien sûr un décor de muguet, réalisé à la main.

Le Pain Muguet, pour le 1er mai !

Le Pain Muguet, pour le 1er mai !

Le Muguet, signe de renouveau. Un renouveau que l’on aimerait voir venir dans la boulangerie-pâtisserie, tant les pratiques et manoeuvres semblent parfois moyennageuses, preuve en est encore une fois de ce concours de la Meilleure Baguette de Paris, dont les résultats et la méthodologie paraissent bien… énigmatiques. Justement, je parlais de sensibilité, mais je crois que c’est bien ce qui manque dans ce genre de dégustation « à la chaine », et plus globalement dans la profession.
Le pain ne se limite pas à un aspect purement froid et technique. S’il fallait uniquement de l’eau, de la farine, du sel et de la levure, tout le monde serait alors capable d’en faire de l’excellent. Seulement, dans chacun des produits de nos artisans s’exprime un savoir-faire et une façon de voir son métier.

A force de goûter des pains, j’ai fini par saisir le sens de tout cela. Beaucoup d’entre eux se révèlent très bien réalisés techniquement, mais n’ont aucune âme, et ne parviennent à véhiculer aucune émotion. Recettes standardisées, diagrammes millimétrés, amis artisans, où êtes-vous dans ces pains ? Vous y reconnaissez vous ? Pas sûr.
A mon tour, en écrivant, en décrivant tout cela, j’essaie d’y mettre de la sensibilité… de voir avec le coeur, et pas seulement avec les yeux. Suivre les artisans et comprendre leur démarche, au delà du goût.

Rien à voir avec le pain, mais ce sont les astucieux glaciers de chez Grom qui m’ont fait penser à tout cela. En effet, leur « parfum du mois » est dédié au Petit Prince… et aux petites et bonnes choses de la vie. Sur cette page, ils expliquent le pourquoi du comment : associer la ricotta de Brebis (en référence au mouton), aux amandes caramélisées (pour symboliser les étoiles) et aux graines de sésame (vous savez, ces fameuses graines qui attendent un jour de se réveiller…). Au final, lorsqu’on déguste cette glace, que l’on apprécie la douceur de la base lactée réveillée par les éclats de fruit sec et la vivacité du sésame, on comprend le sens de l’histoire que l’on voulait nous raconter – aussi étrange puisse-t-il paraître de prime abord.

Autre douceur pour ce mois de mai, la fougasse à la fleur d'oranger proposée dans les boulangeries Kayser... Une note provençale qui, espérons-le, parviendra à nous ramener un peu de soleil.

Autre douceur pour ce mois de mai, la fougasse à la fleur d’oranger proposée dans les boulangeries Kayser… Une note provençale qui, espérons-le, parviendra à nous ramener un peu de soleil.

Plaçons donc le mois de mai sous le signe de la douceur et de la compréhension, comme le temps devrait nous inciter naturellement à le faire. Ce n’est pas encore gagné de ce côté là, mais qui sait. Même si cette tradition du Muguet est un peu « cloche » ou même clochette (!), elle nous rappelle que la vie est faite de choses simples, d’attentions quotidiennes envers ceux et ce que nous aimons. Sans tout cela, la vie n’aurait pas tout à fait le même goût. Apprécions donc ces petites choses, ce bon pain… sans compétition, pour voir l’essentiel et aboutir, je l’espère, à un vrai changement. Un Petit Prince dans la boulangerie…

Appréhender un pain, ce n’est pas seulement s’intéresser à son goût. Certes, cela représente une grande partie de l’expérience de dégustation, mais ce n’est pas suffisant : il s’agit d’un produit bien plus riche que cela. Un premier contact visuel – oui, je défends le fait que le pain doit d’abord être un plaisir pour les yeux, et doit donc offrir un façonnage soigné et plaisant -, une appréciation olfactive, les sensations du toucher (qui résiste à faire craquer la croûte d’une baguette fraiche, sentir cette résistance et voir ce produit qui reprend sa forme de lui-même ?)… puis des textures, à la dégustation.

Ce dernier point est particulièrement important pour moi, car je considère qu’il représente une part importante du plaisir que peut nous procurer un pain. Même si les arômes sont présents et marqués, impossible d’apprécier un produit à la mâche collante et pâteuse. De plus, la croûte et son craquant contribuent à donner du relief à nos repas, que ce soit à table ou dans le cas d’une consommation sur le pouce : les sandwiches peuvent se faire de véritables objets de gastronomie si ceux qui les ont élaborés ont étudié les contrastes entre ingrédients. Malheureusement, en la matière, on aboutit souvent à un produit uniformément mou du fait de la réfrigération.
En ce qui concerne l’uniformité et une certaine mollesse, les brioches ne sont pas exclues du phénomène. C’est d’ailleurs ainsi que l’on peut les décrire la plupart du temps, leur croûte étant quasiment absente et le tout se révélant très fondant.

Dôme Pistache, Maison Landemaine, Paris 11è

Heureusement, quelques unes d’entre elles font exception. C’est le cas du Dôme Pistache proposé le week-end dans la boulangerie Landemaine Voltaire, récemment rénovée. En effet, ce dernier est recouvert d’une croûte de sucre, directement inspirée des fameux « Melon Pan » japonais. On retrouve bien là les liens qu’entretient cette maison avec l’Asie. Le format est ici bien différent, puisqu’il s’agit d’une brioche à partager, tandis que les Melon Pan sont généralement de petites pièces individuelles – à l’image de celles que l’on trouve chez Aki Boulangerie rue Sainte-Anne.

Grâce à cette fine couche de sucre, un jeu de textures s’installe en bouche : la croûte croustille légèrement sous la dent, avant de laisser ses douces notes sucrées s’exprimer et fondre sur la langue. Cela assaisonne le produit et relance le plaisir, mettant bien en valeur la douceur beurrée de la mie. Cette dernière offre un fondant et un moelleux remarquables. La pistache, quant à elle, demeure plutôt discrète malgré la teinte verte façon Incroyable Hulk. Un bon point quand on connaît les arômes artificiels et vulgaires présents dans nombre de pâtisseries et gourmandises. Le visuel est amusant et atypique : la brioche forme réellement un dôme, avec sa forme circulaire et son aspect bombé. Enfin, les plus gourmands n’en laisseront pas une miette : en effet, ces dernières ont tendance à concentrer de fins éclats de la fameuse croûte de sucre, pour un délicieux effet.

Vue tranchée, Dôme Pistache, Maison Landemaine, Paris 11è

Voilà comment les détails font l’expérience, comment on parvient à sublimer un produit et à le rendre particulier, au travers d’un peu de créativité et d’originalité. On ne peut qu’apprécier l’excellente conservation de cette brioche, d’ailleurs, sans pour autant qu’elle ait été dotée d’un excès de beurre qui aiderait à sa préservation. Bien sûr, son prix pourra paraître un poil élevé, mais il demeure dans la moyenne parisienne pour ce type de gourmandise et « récompense » bien le travail nécessaire pour réaliser la croûte, ainsi que la qualité des matières premières. Mickaël, le chef boulanger de la maison, et son équipe font merveille, comme d’habitude.

Dôme Pistache, Maison Landemaine Voltaire – Paris 11è, vendu le week-end à la pièce, 5 euros pour environ 300g.

Je dois bien l’avouer, j’achète très rarement du pain autour de chez moi. Malheureusement, rares sont les boulangeries de qualité dans ma banlieue, et il est préférable que je me rende à Paris pour y trouver « mon bonheur ». Certes, je me suis habitué avec le temps à une certaine qualité de produit, et cela joue sans doute sur mon appréciation. Certes, quelques boulangeries ne s’en sortent pas si mal, mais elles peinent à me fidéliser… et quand bien même, comment réaliserais-je dès lors ma tâche de painrisien ?!

Maison Perraud, Brunoy (91)

Dès lors, au moindre semblant de mouvement dans le paysage boulanger local, je ne manque pas d’aller voir de quoi il en retourne… et visiblement, je ne suis pas le seul, puisque les artisans alentour ont eu la même attitude. En effet, samedi a ouvert une nouvelle boulangerie dans ma ville, Brunoy, en Essonne. Située au sein d’un « centre commercial », la toute jeune maison Perraud déploie non seulement une activité de vente à emporter mais aussi de salon de thé, un fait plutôt rare dans notre banlieue. L’histoire de sa créatrice, Mireille Perraud, ne se déroule pas dans la boulangerie-pâtisserie mais plutôt dans… les chiffres, puisqu’elle a longtemps exercé dans le domaine de la comptabilité et également dans la fonction publique. Suite à cela, elle a travaillé plusieurs années aux côtés de son époux avant de vouloir prendre « son envol ». C’est aujourd’hui chose faite avec l’ouverture de sa boutique.

Pains, Maison Perraud, Brunoy (91)

Le pain se décline au travers d’une gamme « de Tradition », avec l’incontournable baguette mais aussi ses variations en petits pains parfumés : olives-pistou, chorizo, chocolat blanc… Autant de propositions gourmandes, même si on regrettera le fait que la base exprime un parfum de froment trop timide, et demeure un peu sèche. Une gamme biologique se déploie également aux côtés des classiques pains de mie, complets, aux céréales… Dans l’ensemble, les produits ont encore besoin de rodage même si cela demeure sérieux et assez appliqué, avec des cuissons relativement bien menées. Reste cependant le choix du meunier, les moulins Dumée, que je ne citerais pas parmi les entreprises les mieux disantes du secteur en terme de qualité… ni en terme d’éthique, puisqu’elle livre et possède également une autre boulangerie dans la même ville, cette dernière étant placée en location-gérance sous son enseigne « blonde de pain ». Ainsi, les deux entités se retrouvent en concurrence, et j’ai bien du mal à voir quel est l’intérêt d’entretenir une telle situation.

Viennoiseries, Maison Perraud, Brunoy (91)

On saluera le beau travail réalisé du côté des viennoiseries et pâtisseries : la maison s’est en effet offert les services de deux ouvriers passés par la prestigieuse maison Ladurée, et la qualité de finition des produits s’en ressent. « Drop », petites brioches, pains au chocolat, croissants, autant de propositions gourmandes et bien maîtrisées. Même constat du côté des religieuses, tartes, entremets et autres babas au rhum… tout cela pour des tarifs raisonnables.
Quand on sait que la plupart des établissements du secteur se fournissent chez Coup de Pâtes et autres industriels, le contraste est flagrant et bienvenu.

L’accueil est, quant à lui, des plus avenants et dynamiques, avec des jeunes filles pleines d’entrain et d’envie. Ainsi, la clientèle est servie efficacement et avec le sourire, ce qui ne gâche rien.

Infos pratiques

3 boulevard Charles de Gaulle – 91800 Brunoy (RER D, gare de Brunoy) / tél : 0178846431
ouvert du mardi au samedi de 7h à 20h, le dimanche de 7h à 13h30.

Avis résumé

Pain ? Encore un peu timide. Même si la baguette de Tradition est plutôt appliquée, son parfum manque de présence et elle se révèle un peu sèche. On saluera tout de même la gamme de pains gourmands (pistou-olives, chorizo, chocolat blanc, raisins…) et la volonté de proposer des produits issus de l’agriculture Biologique. Les cuissons sont bien menées, les façonnages corrects. Laissons le temps à tout cela de se mettre en place, même si je ne suis pas persuadé qu’il soit possible de faire de véritables miracles avec la farine des moulins Dumée.
Accueil ? Les jeunes filles au service et la propriétaire des lieux assurent un accueil des plus charmants, tout en ne manquant pas d’être efficace. Espérons que cela perdure dans le temps.
Le reste ? C’est sans doute « le reste » qui brille le plus ici pour le moment. En effet, les pâtisseries et viennoiseries proposées par la maison Perraud se révèlent d’excellente facture, d’autant plus quand on compare les offres développées dans les boulangeries alentour. Religieuses, babas, entremets, tartes… rien ne manque pour les gourmands, de même que pour les amateurs de feuilletage qui seront séduits par les croissants, pains au chocolat, aux raisins ou aux pommes. Les prix ont, de plus, le bon goût de demeurer modérés, ce qui ne gâche pas notre plaisir.

Faut-il y aller ? Surtout pour les douceurs, oui. Peu d’adresses proposent dans le secteur des produits soignés et accessibles comme c’est le cas ici. Pour le pain, laissons un peu de temps à l’entreprise pour prendre ses marques et faire ses preuves. Le profil de la chef d’entreprise à la tête de la maison est néanmoins intéressant : en effet, cette dernière n’a pas un profil la destinant à la boulangerie. Elle fait partie de ces personnes qui s’y lancent après un parcours professionnel varié… et la constitution d’un certain capital. La boulangerie est en effet vue comme un secteur pouvant générer une belle source de profits, même si cette analyse est un peu rapide. Ce type d’entrepreneur est en train de monter en puissance… Affaire à suivre, autant ici à Brunoy qu’ailleurs, même si le fait que la maison Perraud ne nous raconte pas d’histoires, en fabriquant l’ensemble de ses produits sur place, n’en demeure pas moins un fait appréciable.

Les années se suivent et se ressemblent. Les rituels sont bien inscrits et se répètent de façon immuable, comme s’il devait toujours en être ainsi. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose, car cela nous donne certains repères, même si l’on finit par ne plus trop savoir pourquoi ils se sont mis en place.

Ainsi, chaque année, à la fin du mois d’avril, la tradition veut que se tienne le concours de la Meilleure Baguette de Tradition de la Ville de Paris. Vous savez bien ce que je pense de tous ces classements et de leur validité sur le terrain, mais après tout, il en faut bien pour tout le monde, et ces compétitions ont pour effet – je l’espère – de créer une certaine « émulation positive » au sein des fournils.

Plusieurs baguettes bien alvéolées !, Fournil du Moulin des Gaults, Poilly-lez-Gien

Depuis quelques années, le 18è arrondissement était mis à l’honneur, avec plusieurs vainqueurs successifs : Djibril Bodian en 2010, Pascal Barillon en 2011, Sébastien Mauvieux en 2012… La « qualité de l’eau » avait même été envisagée par quelques grands esprits pour expliquer ces succès répétés. Cette année, la chaine est rompue, puisque le vainqueur se situe dans le 14è arrondissement. En effet, Ridha Khadher et sa boulangerie « Au Paradis du Gourmand » (156 Rue Raymond Losserand, 75014 Paris) a remporté le fameux prix, les 4000 euros associés, ainsi que l’honneur de livrer l’Elysée pendant un an. Cela me ferait presque sourire quand on sait toutes les « difficultés » éprouvées par la profession vis à vis de la part croissante d’artisans maghrébins présents dans ses rangs…

Voici le classement complet, parmi les 152 baguettes ayant été goûtées par le jury (204 avaient été présentées, mais une partie d’entre elles ne répondaient pas aux critères pour participer : longueur, poids, …) :

  1. Au Paradis du Gourmand, 156 Rue Raymond Losserand, 75014
  2. Boulangerie Raphaëlle, 1 rue Feutrier, 75018
  3. Boulangerie Damiani, 125 avenue du Clichy, 75017
  4. Christian Vabret, 27 rue Francois Miron, 75004
  5. Maison Cailleaud, 104 Cours de Vincennes, 75012
  6. Yosuké Fijié – Maison Landemaine, 56 rue du Clichy, 75009
  7. Dominique Saibron, 77 avenue du Géneral Leclerc, 75014
  8. Le Grenier à Pain Lafayette, 91 rue Faubourg Poissonière, 75009
  9. La Parisienne, 12 rue Coustou, 75018
  10. Ex-aequo – Claude Besnier, 40 rue du Bourgogne, 75007
    Ex-aequo – Jasmine MOUSSOUNI, 38 rue Rodier, 75009
    Ex-aequo – Samir BEN HABHAB, 5 bld Gouvion St Cyr, 75017
    Ex-aequo – Nicolas MARNAY, 24 rue Saint Martin, 75004

On appréciera le fait qu’en définitive peu « d’habitués » des classements se retrouvent nommés cette année, ce qui redonnerait presque au concours une certaine crédibilité. Je tiens bien sûr à saluer le travail réalisé par la Maison Cailleaud, laquelle a changé de meunier dans le courant de l’année 2012, pour un résultat visiblement probant.

Boulangerie Cailleaud, Paris 12è

L’honnêteté de la Maison Landemaine est à souligner, puisque ce n’est pas le chef d’entreprise qui est mis à l’honneur mais bien l’ouvrier ayant réalisé le produit présenté.
Je ne serais pas loin de penser que ce n’est pas tout à fait la même chose du côté de chez Christian Vabret, qui ne brille pas particulièrement par sa présence dans les murs de sa boulangerie du Marais… Une vitrine pour un homme bien occupé, plus entrepreneur qu’artisan.

La Parisienne, Paris 18è

La Parisienne, Paris 18è

La Parisienne du 18è arrondissement, tenue par Clément Saint-Georges en association avec Mickaël Reydellet se distingue également et cela récompense bien le travail réalisé au quotidien par ces boulangeries dynamiques (n’oublions pas de parler des produits de qualités proposés rue d’Odessa, dans le 14è arrondissement !).
Dominique Saibron renoue avec le top 10, même si j’imagine qu’il aurait souhaité un classement plus prestigieux.

Bien sûr, quelques noms me laissent un peu perplexes et prouvent que la production présentée à un tel concours n’est bien souvent pas la même qu’en boutique. Néanmoins, je ne manquerai pas d’aller rendre visite aux artisans que je n’avais pas eu l’occasion de découvrir… dont le vainqueur, même s’il sera sans doute plus prudent d’attendre quelques semaines dans son cas, puisque la visibilité soudaine procurée par ce concours est souvent source d’une certaine désorganisation au sein du fournil de la boulangerie lauréate.

Ca y est, le Printemps est arrivé. Je crois qu’on l’aura rarement autant attendu, tant l’hiver aura duré, avec le caractère profondément désagréable et déprimant que cela peut avoir. A présent, la verdure revient, et avec elle le plaisir de passer du temps dehors, de profiter de toutes ces jolies fleurs et couleurs, des chants d’oiseau… Bref, un véritable renouveau. Cela se manifeste aussi dans notre alimentation, qui va avoir tendance à se faire plus légère et remplie de verdure, l’arrivée de fruits et légumes variés aidant. Salades, fraises, framboises, tomates et autres ne tarderont pas à être de la partie… tout comme les fameuses recommandations des magazines autour de ce qui devrait être notre régime afin de « retrouver la ligne », d’être « belle/beau avant l’été », de « briller sur la plage ». Mieux vaut en sourire, et il faut croire que cela a un public, puisque c’est chaque année la même rengaine.

Pain du Printemps, Maison Kayser

Ce qui me gênerait un peu, ce serait que l’on commence à utiliser les mêmes arguments pour vendre du pain, et en faire ainsi un produit cosmétique. Certains ont visiblement décidé de ne pas s’en priver…
« Un pain de mie cranberries, graine de courges et noix, pour préparer sa peau et faire le plein d’antioxydants avant l’été. » – Voici la façon dont est décrite le pain du mois d’Avril – si joliment nommé « Pain du printemps » – par la maison Kayser. Aucune mention sur son goût, alors que c’est pour moi le principal intérêt de ce produit. Bien sûr, je ne remets aucunement en question le grand intérêt que peut avoir le pain pour la santé, mais je reste perplexe dans le cas présent.

Vue tranchée, Pain du Printemps, Maison Kayser

Pour autant, ne boudons pas notre plaisir : au delà de toute description marketing, cette nouvelle création 2013 se révèle tout à fait savoureuse. La douceur moelleuse et beurrée de la base de pain de Mie utilisée ici est fort à propos pour un produit qui se veut annonciateur d’une nouvelle saison, marquée par un redoux et le retour de journées lumineuses. L’ensemble ne verse pas dans l’excès de gras comme cela pourrait être le cas, on évite ainsi tout écoeurement.
Les fruits secs incorporés au mélange apportent une palette de texture fort agréable : dans cette enveloppe moelleuse, c’est ainsi un jeu entre croquant – pour les noix -, craquant – pour les graines de courge -, et humide/fondant – pour les cranberries. Au goût, ce sont des notes acidulées qui se mêlent à un peu d’amer et de grillé.

L’ensemble est ainsi très gourmand et riche, même si ces fruits secs et graines ne manquent pas d’intérêt sur le plan santé, comme sait si bien le mettre en avant la maison Kayser. Peu importe les arguments utilisés, voilà une déclinaison agréable autour du pain de Mie, et dans le cas présent je n’ai absolument rien à redire sur la quantité d’ingrédients présents dans le produit : ils étaient présents en quantité, et ce de façon assez uniforme. Reste toujours le prix, assez élevé, d’autant que l’aspect visuel manque parfois un peu de soin et ne confère pas à ce pain du Printemps tout le caractère attrayant et rayonnant qu’il pourrait avoir, mais qu’importe si le goût est là. On peut alors tout à fait le déguster seul, au petit-déjeuner ou légèrement toasté pour accompagner tartinables et autres foies gras, par exemple.

Pain du Printemps, Eric Kayser – plusieurs adresses dans Paris, en banlieue, en province et à l’international, vendu à la pièce – 4,5€ les 450g (soit 10 euros/kg).