La vie est faite d’occasions. D’occasions manquées, parfois. D’occasions créées, également. En la matière, notre société de consommation est particulièrement créative, pour donner des idées à ceux qui en manquent, pour créer des instants de partage institutionnalisés. Certes, c’est assez artificiel et conformiste si on les adopte, cependant on peut leur reconnaître le mérite d’exister et de créer quelques moments de bonheur dans toute cette grisaille quotidienne…

Hier, 14 février, nous fêtions la Saint-Valentin. Fête des Amoureux, alors que l’amour devrait être une fête quotidienne, et que nous devrions nous employer à le célébrer chaque jour qui passe en partageant avec l’élue de notre coeur des attentions, des regards, des mots, des envies, des petits riens qui font que la vie est plus jolie à deux. Je m’égare. A cette occasion, nos créateurs de gourmandises avaient rivalisé d’imagination pour illuminer les yeux des couples en quête de moments d’exceptions, que ce soit au travers de menus élaborés ou de douceurs variées. Chocolats, mets fins, pâtisseries, rien ne pouvait manquer pour faire chavirer le coeur de l’aimé(e). Du rouge, des fleurs, des petits coeurs partout, voilà ce qu’il nous faut.

Du côté de la place de la Madeleine, le plus rose et noir des traiteurs parisiens s’était mis au diapason et proposait son offre dédiée à cet événement. Chez Fauchon, cette année, pas de « coeur de rockeur » plutôt tendancieux comme l’an passé. Mis à part une boîte de chocolats « 69 » plutôt équivoque, la ligne de conduite est restée sobre et élégante. La maison semble avoir à coeur (c’est le cas de le dire !) d’évoluer ces derniers mois, et de reprendre le pas sur cette image « sur le déclin » qu’elle pouvait véhiculer. Du côté de la pâtisserie, le chef Fabien Rouillard s’est employé à reprendre les douceurs en leur redonnant du goût et plus seulement un visuel comme c’était alors bien souvent le cas. Pour ma part, je trouve les améliorations assez sensibles et les dernières créations que j’ai pu déguster vont bien dans ce sens. Il reste du travail à abattre et du chemin à parcourir, notamment du côté de la boulangerie, mais la volonté semble être présente, ce qui est déjà une bonne chose. Il restera encore et toujours le problème des tarifs, qui demeurent à mon sens trop élevés. Je ne doute toutefois pas que la clientèle du quartier possède les moyens pour s’offrir les produits Fauchon.

Revenons au sujet du jour, la Saint-Valentin, les coeurs partout, le bon esprit, vous savez. A cette occasion, le chef pâtissier avait créé un entremets (je n’oublierai plus le s, promis, merci à mes lectrices férues de gourmandise, d’orthographe et d’histoire !) élégant et sobre, ne cherchant pas à trop en faire comme beaucoup d’autres propositions sucrées cette année. Un coeur poudré, une fleur, de la délicatesse. Au programme, une base de meringue craquante à la fraise, une mousse au chocolat enrobée d’une fine couche de ganache à la vanille, et deux coeurs fruités, l’un au yuzu, l’autre à la fraise accompagné d’éclats de chocolat croquants. Deux pâtisseries en une, en quelque sorte, et l’occasion d’un partage passionné entre l’acidulé du crémeux au yuzu et la douceur sucrée du coulis de fraise. On pouvait certes choisir de déguster chacun une partie, un coeur, mais le plus amusant était certainement de partager les bouchées, varier les saveurs et les sensations, partir sur l’acide puis revenir sur la douceur. L’effet est plutôt agréable, d’autant qu’il était accompagné par une onctueuse mousse au chocolat, douce et dépourvue d’amertume. La base de meringue à la fraise apportait quelques notes sucrées et fruitées, en plus d’un contraste de texture bien agréable. J’ai particulièrement apprécié la saveur du yuzu, ce fameux agrume japonais dont le goût se situe entre le citron et la mandarine, en contraste avec le chocolat noir.

La ganache à la vanille était peu présente, elle représentait simplement un « nappage », ce qui a eu pour conséquence de masquer sa saveur, car la mousse au chocolat s’exprimait beaucoup plus, que ce soit en parfum ou en volume. C’est un peu dommage, car la vanille aurait sans doute apporté une petite note de douceur sympathique.

Le jeu de texture demeurait néanmoins réussi entre les différents composants, alternant moelleux, onctueux et croquant, tout en restant assez peu sucré. L’ensemble était d’une grande finesse et pouvait très bien se déguster en dessert après un repas, et non pas uniquement seul, au goûter, comme c’est parfois le cas. Saluons également le travail réalisé par les équipes de la pâtisserie Fauchon en terme de finition.

Au final, on ne peut reprocher à cette création que son prix, 25 euros pour deux personnes, cela fait une certaine somme, et malgré tout l’amour que l’on peut porter à l’autre, c’est un budget assez conséquent… même si le moment est exceptionnel, plus qu’il ne devrait l’être d’ailleurs, mais c’est un autre débat.

Une pensée sur le coeur, Fauchon – Paris 8è, création proposée à l’occasion de la Saint-Valentin 2012, 25 euros la pâtisserie pour deux personnes

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