La vie est faite de rencontres, dont certaines sont plus marquantes que d’autres. Ce que j’aime avec la boulangerie, c’est que l’on a la possibilité de rencontrer des produits avant des hommes, et que l’on accède ainsi à leur sensibilité profonde, car dans chacun de leurs produits se retrouve un peu de leur âme et de leur nature. Vous comprendrez pourquoi j’ai souvent tendance à fustiger les mélanges « prémixes » développés par les meuniers : certes, ils facilitent le travail du boulanger, mais comment peut alors se produire cette rencontre, cet enrichissement des sens ?
La devanture met bien en valeur les différents prix obtenus par l’équipe de la boulangerie, que ce soit le patron, les ouvriers ou les apprentis.
Cette boulangerie de Beaumont-sur-Oise, on m’en avait parlé, à plusieurs reprises. Un fou de pain, me disait-on. J’avais été le constater par moi-même, j’avais fait un voyage dans son univers, et plus loin encore, dans le détroit du Bosphore… Une rencontre gustative, certes, mais également un terrible goût d’inachevé et d’approximatif, car je n’avais pas pu toucher l’homme et son engagement quotidien. Un acte manqué qui devait être réparé… ce qui est à présent le cas.
Cette fresque représente la boulangerie et Beaumont, avec toute la « communauté » rassemblée autour de cette table. Aucun détail ne manque, puisque l’on retrouve même les chiens de Christophe Rouget au premier plan – même s’ils sont trois en réalité !
Chez Christophe et Sylvie Rouget, la boulangerie est bien plus qu’un métier ou même une histoire de famille. Non, cela va plus loin : dès lors que l’on pénètre ici, c’est un peu comme si l’on rejoignait une tribu, une communauté… Un lien fort qui trouve ses symboles au quotidien. Ainsi, quand l’un de ses membres la quitte, souvent à l’insu de son propre gré, cela ne laisse pas indifférent : on me parlait d’un pilote de ligne récemment décédé, ce qui n’avait pas manqué de provoquer l’émoi au sein du personnel de vente… Des histoires, oui, toujours des histoires, mais la boulangerie n’existerait pas sans elles.
La Tresse de Saint-Gilles, un clin d’oeil à David Sausseau, installé à La Réunion. Ce pain, au façonnage soigné, incorpore un mélange de céréales.
Tout cela forme une vie, un quotidien sans cesse changeant. Christophe Rouget n’est pas un artisan renfermé dans son fournil, bien au contraire : son pain exprime sa soif de partage et d’échange. Ainsi, on retrouve dans sa boutique des produits qui ont une histoire. La Tresse Saint-Gilles ? Un clin d’oeil à son ami David Sausseau, implanté à La Réunion. Le pain Noémia ? Une création dédiée à la fille d’un confrère, qui souhaitait un goûter sans ajout de sucre. Des recettes qui voyagent et sont reprises dans d’autres boulangeries.
Tout cela se résume en une phrase : savoir, savoir faire, et savoir faire-faire. C’est pour cela que l’on retrouve tant d’apprentis au sein du fournil de la maison : ces jeunes sont les chefs d’entreprise potentiels de demain, et il faut leur transmettre cette connaissance et ce goût pour un pain de qualité, produit dans des conditions irréprochables.
Une boutique simple, chaleureuse et accueillante. On y ressent une ambiance apaisée, avec de beaux produits.
Parlons-en, des conditions et du cadre, car ils sont des éléments particulièrement forts ici. A leur arrivée à Beaumont en 1995, les Rouget ont repris une ancienne affaire Banette, dans laquelle ils ont petit à petit inscrit leur marque tout en mettant en avant l’histoire du lieu. Le faux-plafond de l’époque a ainsi vite disparu pour retrouver ses dessins d’époque… et ces fameux blés et coquelicots. Pourquoi ces fleurs ? Tout simplement car, à l’époque, les champs n’étant pas traités, les coquelicots y proliféraient naturellement. On les retrouve ainsi en « fil rouge » dans l’ensemble de l’établissement, en fer forgé sur les vitrines, mais aussi dans les diverses fresques qui ornent les murs.
Le plafond d’origine a été remis en valeur par Christophe Rouget à son arrivée dans les lieux. On peut y voir les fameux coquelicots, qui sont aujourd’hui un des emblèmes de la boulangerie : ils sont d’ailleurs présents sur la vitrine, avec des fleurs en fer peint.
Impossible de rester indifférent devant ce goût du détail et du dessin. Que ce soit au fournil, dans les couloirs, ou encore au laboratoire de viennoiserie et de pâtisserie, de magnifiques peintures accompagnent le personnel au quotidien. Rien d’anecdotique là dedans, puisqu’elles racontent des histoires : celle de la boulangerie tout d’abord, mais aussi celle des ingrédients mis en oeuvre dans les produits. Une façon originale de toujours transmettre du savoir-faire. Quelques détails qui en disent long sur la capacité à voir toujours plus loin de notre artisan.
L’histoire du chocolat et cette fresque font presque partie des ustensiles de pâtisserie utilisés au laboratoire.
Voir plus loin, oui, c’est ce qui guide Christophe Rouget dans l’ensemble de ses actions. Que ce soit en rénovant l’ensemble de ses locaux pour les rendre irréprochables et pleinement exploités, en développant des gammes de produits gourmands et accessibles pour faire face à la concurrence de chaines telles que la Boulangerie de Marie – récemment implantée à proximité -, ou même en fidélisant dans son entreprise ses meilleurs apprentis et ouvriers… Nous avons affaire à un chef d’entreprise responsable et dynamique, peut-être des restes de la formation de gestion et de comptabilité que son père lui avait imposé. Dans cette famille originaire du Nord, la boulangerie est une affaire de famille (on retrouve d’ailleurs le frère au tourage), même si cela a parfois des mauvais côtés : cette étude des calculs et autres règles de gestion a en effet privé notre artisan de toute possibilité d’apprentissage en boulangerie, le réorientant de fait vers un CAP de Pâtissier et le « condamnant » à un statut d’autodidacte dans son coeur de métier.
Au tourage, c’est le frère Rouget qui réalise des viennoiseries bien feuilletées.
Cela importe bien peu, car j’aimerais souvent voir des autodidactes aussi méticuleux et rigoureux que lui. De la rigueur, il y en a dans ses préparations : la farine torréfiée, incorporée selon des grammages très précis dans les recettes, est fabriquée « maison » au travers d’un processus méticuleux, tout comme pour la nougatine incorporée dans le pain Bosphore. De la folie, vous trouvez ? Non, au contraire, beaucoup de clairvoyance à mon sens.
Avez-vous vu souvent cela dans un fournil ? Moi pas ! Il s’agit de la nougatine utilisée pour la réalisation du pain Bosphore. Ce nom n’a pas été choisi au hasard : la Turquie produit énormément de quantité de ce fruit sec, de plus, ce pain trouve ses origines dans l’Ekmek, un pain plat turc à l’huile d’olive et au miel.
Une même clairvoyance qui l’a amené dès le début à s’engager aux côtés d’acteurs engagés tels que la famille Foricher et le Club le Boulanger, défenseurs d’une farine Label Rouge, produite en Culture et Rendements Contrôlés (CRC). Si aujourd’hui ces démarches trouvent de l’écho auprès d’un public toujours plus large, c’était bien loin d’être le cas il y a 15 ans. Pour autant, notre artisan voudrait rendre les spécificités de ce processus plus lisibles pour le grand public… Le partage, toujours le partage.
Grosses pièces, Bosphore, Ciabattas, … rien ne manque pour les gourmands de pain !
Le partage passe aussi par des prix particulièrement abordables, avec une baguette de pain courant – très soignée – proposée à 0,80€, et une Tradition à 1€. Malgré l’augmentation du coût des matières premières, Christophe Rouget tient à maintenir ces tarifs, qui représentent pour lui une véritable porte d’entrée pour des clients qui seront ensuite prêts à dépenser un peu dans des achats « de plaisir », qui contribueront au chiffre d’affaires de la boutique. Donner pour recevoir, une pratique qui a fait ses preuves depuis bien longtemps.
D’ailleurs, le boulanger voudrait continuer à donner longtemps, même si c’est aujourd’hui son corps qui lui fixe des limites. Passionné de sport en plus de son métier, la fatigue ne manque pas de se faire ressentir. Cela l’incite sans doute à être moins catégorique qu’il avait pu l’être par le passé, à tenter de parvenir à des compromis pour continuer à avancer… et à faire avancer. Donner de la latitude à ses apprentis, voire à terme leur « offrir » une seconde boulangerie où exercer leur talent… L’histoire continuera à s’écrire pour cette communauté boulangère, et nous en serons pour la suivre avec attention.
Infos pratiques
39 rue Basse de la Vallée – 95260 Beaumont-sur-Oise (gare de Persan-Beaumont, Transilien ligne H) / tél : 0134700290
ouvert du jeudi au lundi de 6h à 19h30. (ouverture le mardi également à partir d’octobre)
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La mie du Bosphore offre des teintes orangées, qui proviennent de la fonte de la nougatine lors de la cuisson. Le miel incorporé au prétrissage renforce ce phénomène.
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Le Bosphore affiche une croûte presque torréfiée, mais ce n’est qu’une image : c’est en réalité un pain d’une belle douceur sucrée. La croûte apporte ainsi des notes grillées qui contrastent avec la mie.
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Avant d’être incorporée dans la pâte, la nougatine est concassée. Un coup de marteau, et hop, le tour est joué. A chaque fois, un délicieux parfum se dégage…
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Avez-vous vu souvent cela dans un fournil ? Moi pas ! Il s’agit de la nougatine utilisée pour la réalisation du pain Bosphore. Ce nom n’a pas été choisi au hasard : la Turquie produit énormément de quantité de ce fruit sec, de plus, ce pain trouve ses origines dans l’Ekmek, un pain plat turc à l’huile d’olive et au miel.
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Dommage que les appareils photo ne puissent capturer les odeurs, car ces ciabattas aux olives noires & vertes et aux herbes dégagent un parfum délicieux et entêtant.
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Grosses pièces, Bosphore, Ciabattas, … rien ne manque pour les gourmands de pain !
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Les éclairs attendent patiemment d’être garnis…
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Sur cette échelle, on aperçoit les croissants bien développés et feuilletés qui seront rapidement en vente, ainsi que des grisinis en attente de cuisson.
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Les grisinis avant cuisson. Cette spécialité, réalisée à partir de pâte de Tradition et feuilletée avec des beurres aromatisés, rencontre un vif succès, au point d’être à présent proposée toute la semaine. Plus d’une dizaine de déclinaisons existent. Voilà une gourmandise simple et accessible, particulièrement appréciée à l’apéritif.
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Les fruits mis en oeuvre dans les pâtisseries sont décortiqués en images.
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Dans les souterrains de Beaumont, un petit lieu de stockage et le système de ventilation très étudié.
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Une échelle « très chou », avec de nombreux éclairs en attente de cuisson.
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Cette fresque laisse une large place aux fameux coquelicots, présents en grande quantité dans les champs de blé d’autrefois.
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La culture de la cannelle est mise à l’honneur dans cette fresque, un rappel très instructif car peu de personnes connaissent l’origine de cette épice pourtant commune, mais généralement présentée en poudre ou en petit bâton.
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Avant le chocolat, il y a le cacao et la cabosse ! C’est ce que notre artisan souhaitait mettre en valeur, de même pour le café.
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L’histoire du chocolat et cette fresque font presque partie des ustensiles de pâtisserie utilisés au laboratoire.
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Au tourage, c’est le frère Rouget qui réalise des viennoiseries bien feuilletées.
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Cette fresque représente la boulangerie et Beaumont, avec toute la « communauté » rassemblée autour de cette table. Aucun détail ne manque, puisque l’on retrouve même les chiens de Christophe Rouget au premier plan – même s’ils sont trois en réalité !
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Les noisettes grillées attendent bien sagement de devenir nougatine dans la cour…
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Le levain liquide naturel utilisé pour la fabrication de la baguette de Tradition et des pains spéciaux est entretenu par un Fermentolevain, qui le maintient à bonne température. Cela apporte conservation, arômes et craquant aux pains de Christophe Rouget, dans une belle douceur lactique.
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L’un des deux pétrins en action.
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Dans la diviseuse de Christophe Rouget, on trouve des pâtes très hydratées, à des niveaux que peu de boulangers parviendraient à maîtriser. C’est l’un des « secrets » de la qualité de ses pains, cela leur procure cette croûte fine et craquante si agréable.
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Cette fresque est révélatrice du sens du détail de Christophe Rouget. Installée dans le couloir reliant la boutique au laboratoire, elle veut représenter le boulanger de l’époque, transportant le pain entre les deux espaces.
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De grosses pièces et de belles cuissons… Qui a dit que l’on ne pouvait pas vendre du pain bien cuit en banlieue ?
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La Tresse de Saint-Gilles, un clin d’oeil à David Sausseau, installé à La Réunion. Ce pain, au façonnage soigné, incorpore un mélange de céréales.
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Une boutique simple, chaleureuse et accueillante. On y ressent une ambiance apaisée, avec de beaux produits.
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Les coquelicots et les blés veillent sur le pain !
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Le plafond d’origine a été remis en valeur par Christophe Rouget à son arrivée dans les lieux. On peut y voir les fameux coquelicots, qui sont aujourd’hui un des emblèmes de la boulangerie : ils sont d’ailleurs présents sur la vitrine, avec des fleurs en fer peint.
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La fresque présente à côté du four met en image Beaumont, la rivière… et bien sûr la boulangerie, profondément inscrite dans ce paysage.
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Christophe Rouget a tenu à conserver des présentoirs en métal pour ses pains, du fait de leur caractère authentique.
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La devanture met bien en valeur les différents prix obtenus par l’équipe de la boulangerie, que ce soit le patron, les ouvriers ou les apprentis.
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La boulangerie nous invite à rentrer, allons-y !
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Beaumont, ce n’est pas uniquement le pain, c’est aussi cette rivière qui nous apaise et nous accueille… On la contemple là, tout simplement, sur le pont qui nous mène à la boulangerie.