J’ai longtemps écouté le dicton selon lequel les voyages forment la jeunesse, sans y attacher une quelconque importance. Non seulement je m’en moquais mais l’effort de sortir de mon quotidien pour aller chercher un ailleurs très incertain représentait pour moi une chose tellement conséquente que j’y ai longtemps renoncé. La vie prend parfois des détours bien étranges : à la fois on peut être assoiffé de liberté et s’enfermer soi-même, en pleine conscience. Les barrières sont faites pour tomber un jour ou l’autre, balayées par le vent ou par d’autres forces.

Sur la Grand Place, Lille

Sur la Grand Place, Lille

J’avais donc décidé de partir voir ailleurs, dans le Nord, à Lille. C’était un peu facile, rapide, mais il faut bien commencer quelque part. J’irai plus loin, voir comment la vie s’écrit dans des secteurs plus reculés, moins balisés, mais ce sera l’objet d’autres aventures… et donc d’écrits.

Dans les rues de LilleLa capitale des Flandres, puisque c’est l’un de ses surnoms, est une ville agréable, avec son vieux centre, son fort Vauban, ses vives couleurs par beau temps… à la fois forte d’un passé mais riche d’un avenir, on y sent une belle jeunesse et un certain dynamisme.
Elle n’échappe pas aux maux de notre époque : ses rues commerçantes sont peuplées par des enseignes très uniformes, aux allures bobo-chic. En définitive, le coût des loyers a fini par supprimer une bonne partie des perspectives de différenciation profonde de l’offre, car il faut disposer de moyens importants avant de pouvoir « s’offrir » de tels emplacements.

Devanture Paul, Lille

Bon, on repassera pour le dépaysement, mais il ne fallait tout de même pas se priver d’essayer de goûter un peu de la couleur locale. Nous sommes ici sur les terres historiques de la famille Holder, et les boutiques Paul que l’on découvre au fil des rues ont conservé leur cachet. Bien sûr, en terme de produits, pas de miracles – heureusement, dans un sens, il y aurait de quoi être frustré sinon ! La force des emplacements et l’ancrage dans la cité assurent encore aujourd’hui le succès de l’enseigne. Il faut dire que les artisans boulangers ne sont pas légion dans l’hyper-centre.

Boulangerie Brier

Boulangerie Brier

Je vous avais parlé d’Alex Croquet précédemment, mais on pourrait aussi citer le couple Brier à quelques pas. Peut-être qu’ils brillèrent avec les pains de Briard (ils sont affiliés à la marque Banette), mais aujourd’hui, rien de bien détonnant.

Pâtisseries chez Meert

Pâtisseries chez Meert

Il y a bien sûr l’institution locale, la pâtisserie-salon de Thé Meert et ses fameuses gaufres. En vitrine, les pâtisseries appellent le passant avec un visuel particulièrement léché. A quelques pas, Patrick Hermand (4 boutiques dans la région Nord, tout de même) déploie lui aussi ses douceurs dans un style tout aussi soigné, le décor « à l’ancienne » en moins. N’oublions pas non plus de citer les fameux Merveilleux de Fred, qui ont tellement colonisé les grandes villes françaises qu’on en oublierait presque qu’elles sont nées ici.

Maison Doucet, dans le quartier de Wazemmes.

Maison Doucet, dans le quartier de Wazemmes.

En réalité, c’est en s’éloignant un peu de ce secteur que l’on trouve sans doute les adresses les plus authentiques. Dans le quartier de Wazemmes, Patrick Doucet et son équipe proposent une très belle gamme de pains, allant des classiques aux céréales anciennes (Kamut, petit épeautre) en passant par des déclinaisons gourmandes (noix, foccacia aux multiples saveurs, …). Les viennoiseries sont également de très bonne facture, et même si la pâtisserie n’est pas le domaine de prédilection de l’artisan, il a su rester dans le domaine boulanger.
D’autres artisans régalent également leur clientèle, à l’image de Christophe Pitman à Lambesart, de Vianney Degruson un peu plus loin dans le Vieux Lille, …

Eric Kayser, Gare de Lille Flandres

Eric Kayser, Gare de Lille Flandres

Parmi les derniers arrivants, on compte également Eric Kayser, qui est entré en Gare de Lille Flandres au travers d’un partenariat conclu avec Relay. La nouvelle pourrait paraître anecdotique, mais le boulanger globe-trotter n’a pas trahi ses fondamentaux en installant un vrai fournil sur place. Bon, on repassera pour l’aménagement décidément très… orange, ce qui ne correspond plus aux standards développés par la maison aujourd’hui.

Boulangerie Degruson

Boulangerie Degruson

Bref, Lille c’était joli et gourmand, bien qu’un peu uniforme. On repassera pour le dépaysement, mais on reviendra pour découvrir un peu plus les adresses locales, et notamment côté restaurants où des jeunes chefs comme le très tendance Florent Ladeyn agitent le secteur.

Enfant, on rêve tous de grandir pour sortir de ces rythmes scolaires imposés par nos institutions : vacances, rentrée, tout est planifié… Le temps passe et on finit forcément par arriver dans le monde des « adultes », pour se rendre compte qu’en définitive les choses ne sont pas bien différentes. Le semblant de liberté que l’on pensait gagner n’était qu’en fait un leurre, car les contraintes qui se présentent à nous sont tout aussi nombreuses et rigides. Entre le poids des employeurs, des saisons, des envies de la clientèle, … on finit par se rendre compte que notre vie est réglée bien en dehors de notre champ d’action. Plutôt que de tenter de se défaire complètement de cette routine et de se placer en marge comme certains le font, écrivons simplement une histoire heureuse où ces impératifs représentent autant d’opportunités de faire… différemment.

Nos artisans respectent tout autant les rythmes observés par les consommateurs… à cela près qu’ils doivent souvent profiter des congés pour engager des travaux ou leurs mutations de fonds. Dès lors, difficile de dire qu’il s’agit pour eux de vacances. Tout naturellement, c’est à la rentrée que l’on a le plaisir – ou le déplaisir, c’est selon – de découvrir les changements.

Carole et Emmanuel Morange ont coupé les Chants de Blés

Je vous en avais parlé plus tôt dans l’été et la boutique a ré-ouvert hier. La seconde Maison Morange, au 113 rue Mouffetard, a subi d’importantes transformations. Adieu bois, bienvenue gris brillant. Le pain ? Disposé dans un espace contraint, il est assez peu visible. Ce sont surtout les pâtisseries et viennoiseries qui arrêtent les passants, ces dernières étant disposées dans des vitrines avancées sur la rue. Si les produits sont bien réalisés, on peut se demander si ce style très moderne correspond vraiment à une rue plutôt pittoresque. L’élément le plus surprenant est sans doute ce large tableau, disposé sur le mur situé dos à la clientèle. C’est à se demander s’il n’a pas été installé seulement pour casser le côté froid et impersonnel du lieu…

Quand Eric Kayser rencontre Diderot

Eric Kayser Diderot

Face à la gare de Lyon, la boulangerie Kayser du 13 boulevard Diderot a ouvert le 1er septembre. Les changements réalisés sont assez limités, la boutique étant récente, même si l’identité d’artisan boulanger a été, un peu paradoxalement d’ailleurs, réaffirmée par l’entreprise au travers d’une grille à pains élargie. On y retrouve la gamme habituelle de la maison, avec la baguette Monge, qui tend à se faire rare dans les nouvelles ouvertures de l’enseigne. Nul doute que cet emplacement et sa vaste terrasse fermée seront mis à profit par le nouvel arrivant, même si le couple Quévreux aurait été bien en peine de se plaindre du fonctionnement de l’affaire jusqu’alors.

En parallèle, le 14 rue Monge a terminé sa mue. Malgré l’espace contraint, les équipes de CMC Agencement sont parvenues à redonner de la lumière à cette boutique où le temps avait considérablement terni l’ensemble. Le pain est plutôt bien mis en valeur, tandis que les propositions salées bénéficient d’un espace dédié au fond de la boutique.

Maison Landemaine signe un tiercé estival

Et un, et deux, … je m’égare. Cette année, les équipes de Rodolphe Landemaine et de ses partenaires en agencement n’auront pas chômé. Que ce soit par Pep’s Création pour la rue de la Roquette ou par CMC à Asnières, les travaux réalisés affirment toujours plus l’identité du boulanger-entrepreneur. Il a d’ailleurs dévoilé son nouveau logo, plus moderne, qui orne dès à présent sa boutique fraichement rénovée du 11è arrondissement.
Non content de mener à bien ces deux chantiers, il s’est rapproché de la place de la Bastille pour s’installer dans la boulangerie classée du 28 boulevard Beaumarchais. Le travail à mener ici est important, tant la boutique avait été délaissée.

Maison Landemaine Roquette

Maison Landemaine Roquette

La prochaine étape aura lieu lundi avec l’ouverture à côté de la gare d’Asnières-sur-Seine, au 2 rue de la Station. Les grands volumes de cette boulangerie traduisent bien l’ambition de l’entreprise qui multiplie les ouvertures… le principal risque étant, à mon sens, l’indigestion. Un trop gros appétit mène parfois à vouloir trop manger. Le phénomène est alors similaire avec celui produit par le corps humain…

Carlos Marques imprime sa trace dans le 17è arrondissement

Les travaux n’auront pas tardé au 6 rue de Lévis. Peu de temps après la reprise, Carlos Marques a souhaité donner un nouveau visage à sa boulangerie, à raison tant la boutique faisait triste mine. Cela n’aura pas pris beaucoup de temps, mais le changement est net : l’ensemble est plus moderne, dans un style sobre. Le pain est mis en avant dès l’entrée avec une dégustation quasi-permanente. On peut d’ailleurs saluer les progrès réalisés sur ce point en quelques semaines, tant le niveau était faible. Même si l’artisan exprime une vraie identité de pâtissier, gageons qu’il parvienne à proposer des gammes cohérentes et que sa nouvelle affaire rencontre le même succès que celle d’Asnières, où les gourmands se pressent nombreux pour découvrir ses créations.

Laurent Venuat prend son envol à deux pas de République

Laurent Venuat, Paris 10è

Dans un métier aussi marqué par les hommes et leurs histoires, il me serait bien difficile de rester insensible aux rencontres que je peux faire et aux parcours que je découvre. Laurent Venuat, issu d’une formation initiale dans le secteur du commerce, a quitté une carrière dans la finance pour tomber dans le pétrin. Tenace et convaincu, il a pu acquérir les compétences nécessaires à son installation à Ferrandi puis au sein de Maison Landemaine. Son projet s’est concrétisé cette semaine avec la reprise d’une affaire au 17 rue du Château d’Eau, dans le 10è arrondissement. Cette petite boulangerie de quartier avait bien besoin de recevoir un nouveau souffle, et c’est précisément ce que va tenter d’apporter le « jeune » boulanger. Bien sûr, il y a du travail, que ce soit dans l’aménagement de l’espace de vente ou dans l’aboutissement de la gamme de produits, mais on ne peut que saluer l’engagement et la volonté mis au service de ce projet.

Arnaud Cimmati prend des cours à Assas

Parfois je suis partagé entre l’étonnement et la consternation. L’entrepreneur Arnaud Cimmati a récemment réouvert sa boulangerie du 31 rue d’Assas. Si la devanture et la boutique ont été rafraichis, quelques éléments demeurent assez gênants… comme la vitrine traiteur et pâtisserie ! De même, les produits n’ont pas ou peu évolué et demeurent toujours aussi approximatifs. La logique adoptée ici est claire : il s’agit de faire du chiffre et de capitaliser plus que de se soucier des fondamentaux du métier. Quelle tristesse.

… et la suite ?!

Ne nous arrêtons pas là, voyons plus loin : des travaux sont encore en cours.

  • La famille Huré a repris la boulangerie du 10 place d’Italie, placée en gérance jusqu’alors. Mosaïc Agencement est en train de transformer la boutique pour intégrer le coiffeur attenant, racheté il y a plusieurs années, et proposer ainsi un large espace de vente ;
  • Rue de Lévis, l’ex-Nature de Pains puis « Boulanger de Lévis » est encore en pleine transformation pour accueillir un entrepreneur-boulanger déjà présent à Neuilly et dans le 15è arrondissement ;
  • Thierry Racoillet doit achever les travaux engagés mi-août au sein de sa boulangerie de la rue de Douai la semaine prochaine ;
  • Cyril Lignac ouvrira prochainement deux nouvelles boulangeries-pâtisseries, au 55 boulevard Pasteur et au 133 rue de Sèvres ;
  • De nombreux pâtissiers vont éclore dans les jours et semaines à venir (Bulliz rue d’Hauteville, Michalak rue de la Verrerie, un concept autour des éclairs rue des Acacias, une deuxième adresse pour She’s Cake, …).

J’ai toujours voulu défendre une position : le pain n’est pas un produit comme les autres, et on ne devrait pas le vendre comme on vend aujourd’hui la plupart des biens de consommation courante, c’est à dire sans âme ni conscience. Seulement voilà, à l’épreuve des faits, je devrais bien m’avouer vaincu. Ce serait bien mal me connaître : je persiste et je signe, je continue avec mon baton de pèlerin. Baton de pèlerin ou baton de berger, c’est selon, car il y a des fois où j’aimerais bien l’utiliser pour faire filer droit le troupeau…

A force de proposer des éléments de communication aux artisans sans les accompagner, on se retrouve avec ce type de vitrine : un véritable amas de mauvais goût, où tous les messages se mélangent...

A force de proposer des éléments de communication aux artisans sans les accompagner, on se retrouve avec ce type de vitrine : un véritable amas de mauvais goût, où tous les messages se mélangent…

Une belle histoire de têtes pensantes et de gros sous

L’histoire avait pourtant si bien commencé. Dans les années 90, quelques têtes pensantes ont mis sur pieds une idée révolutionnaire : plutôt que de chercher à valoriser la singularité de l’artisan, il fallait tout miser sur le marketing « de masse », développer des réseaux de boulangeries aux produits uniformes en créant de nouveaux repères pour les consommateurs. Banette, Baguépi, Ronde des Pains, Festival, … vous les connaissez aussi bien que moi, sans doute. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, ce serait dommage et un peu criminel : ils ont participé à leur façon au « sursaut qualitatif » de la boulangerie. L’exemple de la Banette et ses fameux bouts pointus est frappant : tous les consommateurs voulaient une « Banette » et la demandaient à leur artisan… qui ne la proposait pas forcément, mais était contraint à se remettre en question face à un tel mouvement.
En coulisses, les entreprises porteuses de ces marques ont vécu leurs belles années, en enfermant autant que possible les boulangers dans ces concepts qui leur échappaient complètement, au point de perdre leur savoir-faire et le sens de leur métier. Forcément, il est tellement rentable de vendre des préparation prêtes à l’emploi, tout comme des produits industriels. Le double jeu de ces acteurs est devenu aujourd’hui flagrant et leurs pots de peinture marketing ne suffisent plus à cacher le fond de leurs préoccupations.

Revenez, promis, on a compris !

Les sachets sont un élément de communication important. Seulement, il ne faudrait pas les utiliser pour proposer des poèmes d'un goût douteux.

Les sachets sont un élément de communication important. Seulement, il ne faudrait pas les utiliser pour proposer des poèmes d’un goût douteux.

Il ne fallait pas espérer que cette situation soit éternelle : au fil des années, la puissance de ces marques s’est essoufflée, que ce soit par la lassitude des artisans ou celle des consommateurs, du fait de la qualité plus que relative des produits. Bien sûr, certaines zones géographiques restent encore très marquées par leur présence, et la région parisienne s’est plus fortement émancipée de ces groupements que le reste du territoire.
Pour tenter d’inverser la tendance, certains ont changé leur fusil d’épaule pour donner l’impression de développer une stratégie mieux centrée sur l’artisan et sur le développement de son identité propre. C’est ainsi que l’on a vu naitre « Le Pain Boulanger » chez Banette, le nouveau concept Campaillette chez les Grands Moulins de Paris plus récemment, mais aussi l’avènement de « marques » plus diffuses chez des acteurs artisanaux comme les Moulins Bourgeois, les Moulins de Chars ou de Chérisy. L’enseigne « Artisan Boulanger » s’est vue accompagner de nombreux adjectifs (« de qualité », …) puis déclinée en de nombreuses couleurs.

Seulement voilà. A mon sens, il ne suffit pas de comprendre, il faudrait apprendre. Chercher à renouveler profondément le genre, arrêter de produire du marketing pour lui-même et re-bâtir l’approche sur le produit, sur le goût et les émotions qu’il peut produire. Au delà de ça, c’est un véritable travail de recentrage sur les fondamentaux du métier qui est à mener : faire du ménage dans toutes ces marques, dont certaines sont des doublons volontaires, et inciter les boulangers à s’exprimer.

Quand les industriels s’en mêlent, un beau mélange des genres

Banette au Carambar

Comme s’il fallait en rajouter, les industriels s’en mêlent et invitent leurs marques au sein des boulangeries artisanales. Récemment, le groupement Banette a eu la fine idée de proposer la « Banette Carambar », un pain viennois garni de crème au carambar. On se demande encore si la blague est le produit lui-même ou si elle est seulement inscrite sur le sachet.

Un petit-déjeuner Nutella chez Gontran Cherrier, ça fait rêver !

Un petit-déjeuner Nutella chez Gontran Cherrier, ça fait rêver !

Mieux encore, certains artisans, sans doute portés par leur notoriété et par l’appât du gain, signent des partenariats au goût douteux. Le meilleur exemple est sans doute celui de Gontran Cherrier, qui fait une fantastique publicité au groupe Ferrero dans ses boutiques. Petits pots de Nutella, éléments de communication présents en abondance, rien ne manque… est-ce vraiment cohérent avec les valeurs que devrait porter un boulanger, d’autant plus quand on connaît la qualité de cette fameuse pâte à tartiner ? Les consommateurs ne valent-ils pas mieux que cela ?

Communiquer oui, mais sur en parlant vrai et concret

A mon sens, les artisans ne savent pas assez communiquer. Il faudrait que leurs partenaires prennent en mains la chose pour les accompagner sur ce terrain en leur apportant des solutions personnalisées et porteuses de leur histoire, sans chercher à les « canaliser » dans des concepts. Bien sûr, certains éléments de communication peuvent être développés de façon globale, dès lors qu’il s’agit de parler de matière première, de santé, … autant de points sur lesquels les réponses ne varient pas.
Ensuite, plutôt que de vendre des pré-mixes et autres poudres de perlimpinpin, c’est sur l’humain qu’il faudrait investir pour impliquer les artisans dans une démarche qualitative et riche en savoir-faire. Dès lors, plutôt que d’inventer de nouvelles marques, il y aurait beaucoup plus de choses à dire… et les histoires prendraient une toute autre tonalité. Quelques acteurs ont déjà travaillé le sujet : le Label Rouge (sur la baguette de Tradition et plus récemment le croissant) porté par le Club le Boulanger s’inscrit dans cette dynamique, même si cela ne suffit pas. Fort heureusement, quelques artisans ont bien compris l’intérêt de porter leur propre histoire et de développer une identité singulière. Ce sont eux que j’ai à coeur de mettre en avant ici depuis avril 2011. Leur parcours est souvent semé d’embûches, et le sentiment de solitude qu’ils peuvent ressentir est accentué par une forte tendance à la marginalisation de la différence, que ce soit en boulangerie ou dans la société en général.

Je pense que beaucoup de meuniers disposent des moyens suffisants pour mettre en place de telles démarches et outils auprès de leurs clients. Seulement, ils préfèrent souvent se décharger du sujet et le confient à des entreprises ne comprenant pas les spécificités du métier qu’elles doivent traiter. Dès lors, elles préconisent des solutions inadaptées, bien souvent portées par leur seul intérêt financier. Le système s’entretient lui-même et nous n’en sortons pas : il faudrait faire du ménage là-dedans et faire rentrer des idées neuves. En bref, revenir à une définition saine du marketing, qui ne serait pas de stimuler les besoins du consommateur mais créer des produits répondant vraiment à leurs attentes tout en assurant une commercialisation efficace.

En se développant, certains boulangers changent radicalement d’attitude et se prennent pour des princes ou autres monarques et ont une fâcheuse tendance à oublier leurs fondamentaux, en délaissant peu à peu leurs équipes pour adopter une posture de « chef d’entreprise ». Il me paraît difficile de parvenir à créer des entreprises cohérentes de cette façon, mais la compétence de management n’est pas donnée à tout le monde… tout comme le bon sens, en fait.

Boulangerie du Château, Chantilly (60)

A l’inverse, d’autres savent garder la tête froide et continuent à avancer humblement. Je vous en avais parlé il y a quelques semaines : les frères Yvan et Gérard Cardon étaient en train de reprendre une seconde affaire, à Chantilly.
On peut dire maintenant qu’ils mènent la vie de château, puisque c’est la Boulangerie… du Château qu’ils ont repris ce mercredi. Plutôt que de se comporter comme des monarques hautains, ils ont eu à coeur de redonner un nouveau souffle à leur royaume.

Pains, Boulangerie du Château, Chantilly (60)

Les habitués des lieux ne pourront que louer le changement opéré ici, à commencer au sein de l’espace de vente. Ce dernier a été rafraichi, avec un bon coup de peinture. Les investissements les plus importants ne sont pas visibles et se concentrent sur l’outil de production : achat d’un pétrin, aménagement du poste de tour, mise en place de la diviseuse pour la méthode PanovA… autant d’éléments qui ont un impact direct sur la qualité des produits.

Pâtisseries, Boulangerie du Château, Chantilly (60) Le parti-pris d’Yvan Cardon pour cette nouvelle aventure est particulièrement intéressant et prouve toute l’étendue de ses compétences d’artisan. En effet, plutôt que de reprendre à l’identique la gamme et les recettes développées à Senlis, il a souhaité développer une identité sensiblement différente. Les produits sont plus doux, moins typés par le levain. Plusieurs d’entre eux sont d’ailleurs travaillés sur base de levain de lait, à l’image du pain de Seigle, du complet ou du Tour de Mains (un pain riche en céréales de type nordique), ce qui leur confère une belle douceur.
La baguette de Tradition incorpore, quant à elle, du levain liquide. Ce dernier reste discret et porte les arômes en fond, en plus d’améliorer la conservation du produit. Il n’était pas question pour autant de renoncer à proposer des créations plus aromatiques, à l’image d’un pavé sarrasin enrichi de graines de sarrasin torréfiées. La gourmandise est également au rendez-vous avec des propositions aux figues ou au chocolat blanc et cranberries.

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Les amateurs de viennoiseries seront servis. Les produits sont de qualité comparable à ceux, très réussis, proposés jusqu’alors à Senlis. A noter la belle gamme de brioches, avec notamment une attirante et savoureuse Brioche Marbrée au chocolat.

Brioche marbrée, Boulangerie du Château, Chantilly (60)

Il y a plusieurs éléments à retirer de ces choix : tout d’abord, cela exprime une véritable démarche d’artisan, prêt à écouter et à se remettre en question pour proposer une offre adaptée à sa clientèle. Bien peu de grandes enseignes seraient capables de mener une telle réflexion et c’est mieux ainsi : les acteurs de proximité peuvent continuer à se démarquer.
La transmission de ces nouvelles pratiques auprès de l’équipe déjà en place fait également partie des chantiers d’ampleur à mener au laboratoire. Ce changement doit être mené avec pédagogie et patience, deux éléments qu’Yvan Cardon a bien intégré. Il pourra ainsi mettre à profit de nouvel outil, particulièrement spacieux, afin de continuer à réaliser des produits de qualité 100% faits maison.

Annonce du changement de propriétaire, Boulangerie du Château, Chantilly (60)

J’ai peu de doutes sur la réussite de cette nouvelle implantation, car elle associe toutes les qualités professionnelles de ces artisans à un marché où la qualité n’était pas suffisamment présente jusqu’alors, malgré la présence d’une clientèle sensible à cette dernière et disposant d’un pouvoir d’achat suffisant. Voilà en tout cas une excellente raison de faire une halte dans cette cité pleine d’histoire et de paysages.

Infos pratiques

24 rue du Connétable – 60500 Chantilly (RER D / TER gare de Chantilly-Gouvieux) / tél : 03 44 57 05 38
ouvert du lundi au vendredi (sauf mardi, jour de fermeture) de 6h45 à 19h30, le samedi de 7h à 19h30, le dimanche de 7h à 19h.

Je suis souvent perplexe quand je vois des entrepreneurs se positionner sur des sujets sensibles, notamment dans le domaine de la santé. Leur démarche répond-elle à une véritable conviction, ou bien ne font-ils que profiter d’une tendance pour faire du chiffre ? On ne peut le mesurer et l’apprécier que sur la durée, par la qualité de leurs propositions et leur engagement quotidien. Il y a parfois de beaux pétards mouillés, mais aussi -et heureusement- de belles découvertes.

En découvrant la marque Eugène et son projet de développer une boulangerie-pâtisserie adaptée aux diabétiques, mon enthousiasme était modéré. Cela était lié aux allégations particulièrement fortes : moins de matières grasses (les matières animales étant remplacées en partie par des huiles végétales, comme l’huile de pépins de raisins), moins de sucre (substitué par du sirop d’agave ou du fructose)… sachant que ces deux éléments comptent parmi les principaux vecteurs de goût en pâtisserie, il me semblait difficile de parvenir à proposer des créations intéressantes. La communication associée ne manquait pas de vigueur, c’était d’ailleurs un peu trop à mon goût. Qu’importe, j’ai tout de même été déguster quelques produits, qui ne m’ont pas convaincu à l’époque. J’ai fait part de mes remarques à Christophe Touchet et Luc Baudin, les deux créations de l’enseigne, et j’ai laissé le temps passer.

Eugène, 28 rue des Lombards, Paris 4è

Eugène, 28 rue des Lombards, Paris 4è

Revenons d’ailleurs sur le parcours de ces deux hommes : le premier a bâti sa réussite sur des activités immobilières puis dans le domaine des produits sans gluten outre-Atlantique, tandis que le second a développé ses compétences au sein de l’Ecole Nationale Supérieure de Pâtisserie. Le duo s’y est d’ailleurs rencontré, Christophe Touchet l’ayant rejointe suite à la découverte de son diabète. Pour ce grand gourmand, difficile de se passer de douceurs, il fallait donc trouver comment proposer des produits adaptés à cette pathologie sans perdre le plaisir.

Au delà du travail sur le sucre et le gras, il aura fallu intégrer des fibres (avec notamment des farines de Meule) pour ralentir le passage du sucre dans le sang et améliorer l’effet de satiété, intégrer des épices pour relever les saveurs… bref, une réflexion poussée, visant notamment à réduire l’index glycémique des produits.
Comme je l’ai indiqué précédemment, la mise en place aura pris un peu de temps, mais le résultat s’avère à présent tout à fait probant.
Côté pains, toute la gamme est élaborée à base de levain naturel, avec des farines livrées par la Minoterie Hoche. Une baguette de Tradition (sur farine T65) a récemment fait son apparition dans la gamme pour répondre à une demande des consommateurs, la « baguette Eugène » (sur farine de Meule T80) étant assez typée et segmentante. Réalisés en non-façonné, les produits ne manquent pas de saveurs et d’identité. Dans le 17è arrondissement, le jeune Florent Lehmann (passé chez les Compagnons du Devoir et des entreprises comme Eric Kayser) participe activement au projet.

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La pâtisserie n’est pas en reste avec des créations au visuel abouti et souvent inventives : associations de saveurs originales, finitions nettes, on serait bien en peine de les distinguer de douceurs plus conventionnelles. Bien sûr, certaines textures sont plus « légères », le sucre est peu marqué, c’est parfois déroutant. Il faut voir cela comme autre chose, une expérience différente, sans avoir d’à-priori. La pâte à choux, réalisée à partir de farine de lentilles, se révèle particulièrement convaincante en terme de texture et de goût.
La viennoiserie est un terrain où la réduction des matières grasses peut paraître être un combat perdu d’avance. Pourtant, les croissants, pains au chocolat et autres roulés proposés ici demeurent relativement gourmands. Je préfère bien sûr un feuilletage traditionnel et son côté riche qui enveloppe les papilles, mais le croustillant est bien là. La dégustation reste agréable.

Pains & viennoiseries, Eugène, rue des Lombards, Paris 4è

Le chocolat est un domaine où Luc Baudin excelle tout particulièrement. Il a d’ailleurs participé aux World Chocolate Masters en janvier 2015, où il a présenté de superbes pièces tout comme il l’a fait en boutique à l’occasion de Pâques. Ses tablettes et bonbons n’ont rien à envier aux produits traditionnels : de la tablette chocolat blanc-thé vert-baies de goji à la demi sphère sauge-combawa, les créations sont élégantes et savoureuses.

Aujourd’hui, Eugène ouvre sa seconde implantation en plein coeur de Paris. C’est à présent au 28 rue des Lombards, dans le 4è arrondissement, que l’on pourra découvrir cet univers particulier. Le lieu est beaucoup plus passant et accessible que ne l’est la boutique « historique » du 17è arrondissement, ce qui devrait contribuer à donner à la marque la visibilité dont elle a besoin pour continuer à se développer.
Au laboratoire, la pâtisserie est entièrement réalisée sur place, ce qui permet de libérer l’espace rue Guillaume Tell pour développer l’activité chocolaterie. Léa, la compagne de Luc Baudin, gère la production au quotidien… une histoire de coeur et de confiance, comme celle entretenue par Christophe Touchet avec ses équipes, qui a à coeur de mettre à disposition ses moyens financiers pour l’épanouissement de ces jeunes talents.

Les défis auxquels doit faire face Eugène sont nombreux : difficile en effet de se cantonner à une clientèle exclusivement diabétique, l’entreprise ne serait pas viable économiquement. Dès lors, il faut aussi s’adresser à un public « au régime » ou faisant attention à ses apports en sucre et matières grasses. Le positionnement me paraît un peu glissant, mais il faut croire que l’on doit vivre avec son époque…
L’entreprise doit parvenir à s’imposer sur son créneau, et cela passe notamment par la communication et la mise en avant des produits. Quand on connaît la jungle que représente l’espace médiatique, difficile de s’affirmer. Il faut également parvenir à former le personnel de vente pour assurer un conseil pertinent au quotidien.
Le travail ne manque pas… mais en présence d’entrepreneurs courageux et convaincus, on ne peut que saluer l’initiative et l’accompagner.

Infos pratiques

28 rue des Lombards – 75004 Paris (métro Châtelet, Métro lignes 1, 4, 7, 14 & RER A, B, D)
ouvert du mardi au samedi de 7h30 à 20h, le dimanche de 9h à 13h30

Dans la vie, la distribution des cartes n’est pas toujours équitable. Certains sont plus avantagés que d’autres et bénéficient d’un jeu plus avantageux dès le départ. Il appartient ensuite à chacun de savoir garder ses atouts, d’avoir à coeur de les entretenir pour les faire durer. Quelques mauvais choix peuvent rapidement changer la donne… difficile de reprendre la main ensuite. D’un côté, c’est sans doute mieux ainsi : nous sommes maîtres de notre destin, en dehors de toute forme de déterminisme.

Un emplacement original avec un double angle.

Un emplacement original avec un double angle.

L’exemple des Grands Moulins de Paris pourrait bien servir de cas d’école : cet acteur majeur du secteur de la meunerie a perdu du terrain ces dernières années, particulièrement dans la région francilienne. Les raisons ? Un certain manque de dynamisme, des choix parfois discutables, la difficulté de sortir d’une image écornée… et la présence d’acteurs de plus en plus vivaces en concurrence frontale. Au fil des années, leurs meilleures cartes ont disparu. Adieu As, Roi, Reine, Valet… le risque étant de ne plus avoir en main que le pouilleux et de le devenir à son tour.

Difficile de passer à côté des stores orange vif.

Difficile de passer à côté des stores orange vif.

Nous n’en sommes pas là et l’entreprise possède encore de belles ressources pour réagir. Aujourd’hui, l’actualité nous amène au 71 rue d’Alésia, dans le 14è arrondissement. C’est ici que le pilote du nouveau concept Campaillette a été installé. L’artisan boulanger Laurent Roperh a fait le choix de déployer la nouvelle identité en lieu et place de la marque Ronde des Pains qu’il avait adopté précédemment. Le changement est intéressant à noter : les Grands Moulins de Paris semblent vouloir se recentrer autour de l’identité associée à leurs produits et abandonner une enseigne dont la crédibilité a été nettement entachée.

On mettra cette baguette sur le compte d'une reprise difficile.

On mettra cette baguette sur le compte d’une reprise difficile.

Exit aussi le marron, place à un orange vif, beaucoup plus dynamique. L’identité visuelle est simple, il n’y a visiblement pas une quelconque volonté de développer un marketing massif et agressif. Au contraire, le message est plus souriant et orienté sur l’humain : de la sacherie avec son trait d’humour au portrait de l’artisan présenté au mur, valorisant le travail manuel, on peut constater un net changement dans le discours. On ne va pas s’en plaindre.

Plus que Campaillette, c'est l'humain et son engagement qui sont mis en avant ici. Le changement est important pour une entreprise comme les GMP qui a longtemps tout misé sur la force de sa marque.

Plus que Campaillette, c’est l’humain et son engagement qui sont mis en avant ici. Le changement est important pour une entreprise comme les GMP qui a longtemps tout misé sur la force de sa marque.

L’aménagement intérieur de la boutique se veut plutôt moderne et innovant : avec des présentoirs proches de la clientèle dans un esprit « marché », les produits sont bien mis en valeur et l’ambiance est plutôt chaleureuse : les matériaux s’y prêtent bien, avec une association élégante de pierre et de bois. Remettre l’humain et le produit au centre de l’espace de vente, voilà deux axes qui ont du sens. Pep’s Création a été sélectionné pour mettre au point ce concept, suite à une consultation lancée auprès des nombreux acteurs que compte le secteur de l’agencement. L’avenir nous dira si ce choix était judicieux, il marque dans tous les cas une nette rupture avec les codes développés jusqu’alors.

Des présentoirs très "aériens" dans un esprit marché.

Des présentoirs très « aériens » dans un esprit marché.

Bien sûr, il a la boutique… et ce que les artisans en font. On pourra créer tous les emballages du monde, s’il n’y a rien à mettre dedans, cela ne change pas grand chose. C’est sur ce point que les GMP devraient avoir à coeur de travailler : redéployer du savoir-faire au sein de leur clientèle, pour mettre en place des gammes de qualité, pas seulement portées par quelques pré-mixes. Au vu des moyens considérables dont l’entreprise dispose, elle pourrait tout à fait s’engager dans cette démarche et créer une vraie dynamique. Reste à savoir si cela fait partie de leurs projets…

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Infos pratiques

71 rue d’Alésia – 75014 Paris (métro Alésia)

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J’ai tendance à me tenir éloigner des concerts d’éloges. Sans doute cette musique est un peu trop monotone à mes oreilles, à moins que ce ne soit un mécanisme de défense : plus on me dit « tu devrais », moins j’ai tendance à faire. En définitive, il y a une belle liste de choses que je devrais aller faire ou voir, sans que l’on puisse vraiment espérer connaître une issue favorable un jour. Verre à moitié plein ou à moitié vide, on peut voir la chose de deux façons : soit je me prive de formidables découvertes, soit il me reste de grandes possibilités d’étonnement et d’apprentissage. On fera les comptes à l’arrivée.

La devanture est discrète.

La devanture est discrète.

J’avais entendu tellement de choses au sujet d’Alex Croquet que j’avais donc adopté cette fameuse posture de retrait. Parfois, à force de tenir en place, on s’effondre. J’ai donc été découvrir la capitale des Flandres -je vous en reparlerai plus largement prochainement- et le plus fameux de ses boulangers.
L’artisan annonce la couleur : il est « fou de pain ». Je n’ai rien contre les fous, au contraire, je pense que la folie peut être créatrice, et puis Michel Audiard n’avait-il pas dit « Bienheureux les fêlés car ils laisseront passer la lumière » ?

En boutique, Alex Croquet, Lille (59)

En arrivant devant cette petite boutique de la rue Esquermoise, en plein coeur du vieux Lille, je dois dire que j’ai peiné à voir cette fameuse lumière passer. Il ne s’agit pas d’une boulangerie, puisque les produits sont fabriqués à Wattignies, en proche banlieue, avant d’être livrés ici. Le lieu est très moderne, sans grande identité. Je ne sais pas si c’est le parti-pris d’Alex Croquet mais cela ne correspond pas tout à fait à l’univers qu’il met en avant, porté par les traditions et le savoir-faire boulanger. Qu’importe, ce n’est pas l’essentiel. Les produits sont plutôt bien mis en valeur, le service agréable et efficace.

Tourte de Seigle aux raisins

Tourte de Seigle aux raisins

Avant même de déguster les produits, j’ai été frappé par leur caractère terne, par le manque de vie qu’ils exprimaient. Pourtant, tout a été fait pour me rappeler combien la maison s’engageait afin d’aboutir à un produit d’exception : de la sélection rigoureuse des farines (Label Rouge ou Biologique) au travail sur levain naturel – les pains Bio sont « pur levain », c’est à dire sans levure ajoutée – en passant par un façonnage manuel, les critères sont réunis. J’en oublierais presque de parler de l’eau, à laquelle l’artisan accorde tant d’importance : cette dernière est purifiée et « dynamisée », grâce à un système de cascade artificielle, pour lui « redonner de la vie ». Après avoir lu et entendu tout cela, je me disais que l’aspect n’importait pas, et que j’allais vivre une expérience sensorielle inoubliable.

Sans commentaire.

Sans commentaire. A noter l’avertissement de la vendeuse « vous avez un bon couteau à pain ? »…

Le soucis quand on saute sans parachute, c’est qu’il y a un sol pour nous ramener à la réalité et nous prouver combien l’atterrissage peut être douloureux. Ce fut précisément le cas ici. Sur l’ensemble des pains, j’ai retrouvé des mies très denses et des croûtes épaisses, ce qui a eu pour effet direct de rendre la dégustation assez peu plaisante. Le phénomène est particulièrement marqué sur la baguette Lilloise, qu’il est assez peu envisageable de rompre simplement… mieux vaut la trancher fin.
L’autre point gênant pour moi était le manque d’hydratation des pâtes : même du jour, les pains étaient secs, avec un sérieux manque de souplesse. Si encore le goût avait fait oublier ces points de texture, l’affaire aurait été vite oubliée. Seulement voilà, là encore, rien d’exceptionnel : que ce soit sur la tourte de Seigle ou d’autres pains comme le Zebulon, l’acidité du levain relève légèrement l’ensemble mais cela reste plat.

Pain Zebulon

Pain Zebulon

La viennoiserie exprime un bon goût de beurre sans que le feuilletage soit particulièrement développé : c’est correct, sans plus. En définitive, ce sont sans doute les brioches qui s’en sortent le mieux, avec notamment une surprenante création, l’Ensaimada. Son façonnage en escargot cache une mie comme feuilletée à la crème d’amandes, pour un résultat très fondant et savoureux.
La pâtisserie reste simple et boulangère (on y retrouve des babas, flans, tropéziennes, …), ce qui est appréciable, tout comme l’absence d’offre traiteur : l’artisan s’est concentré sur son métier de base et c’est un choix que plus d’acteurs du secteur devraient adopter.

Brioche Ensaimada

Brioche Ensaimada

Suis-je passé à côté du travail de cet artisan ? Peut-être. Je ne remets pas en question son honnêteté et l’amour qu’il porte à son métier. La largeur de sa gamme en témoigne : il cherche à partager avec sa clientèle un véritable univers autour du pain. Je suis juste un peu perplexe. Quand on annonce ne pas mettre en vente des produits ne donnant pas entière satisfaction, il faut aller jusqu’au bout… à moins que ce que j’ai pu déguster ne soit que la norme. Peut-être faudrait-il en faire moins, dans ce cas. Les gammes courtes sont plus faciles à maîtriser.
Autre point sur lequel je souhaitais revenir : aimer le levain, en parler pour développer son usage, c’est bien. Seulement, il ne faut pas trop en faire. Cela ne reste jamais qu’un agent de fermentation qui aboutit à… de la nourriture, car le pain demeure avant tout un aliment. Sachons garder une certaine mesure.

Infos pratiques

66, rue Esquermoise – 59000 Lille
ouvert du lundi au samedi de 8h à 19h30
56 rue Faidherbe – 59139 Wattignies / tél : 03 20 95 01 29
ouvert du lundi au samedi de 7h à 13h et de 15h à 19h

Avoir des convictions ne sous-entend pas être dogmatique ou sectaire – au contraire. Il faut savoir les utiliser comme outil de lecture pour le monde qui nous entoure, rester curieux et écouter les messages que l’on nous transmet au quotidien en sachant les analyser au travers de ce filtre. Sans elles, on finit par se perdre, à oublier nos idées et notre identité.

Tartin'Art, Paris 2è

J’avais déjà eu l’occasion de vous parler de Tartin’Art et de son ouverture prévue à Paris, en vous faisant part de mes réserves vis à vis de ce concept.
La boutique a ouvert jeudi, soit bien après l’échéance prévue. Les travaux ont connu un véritable glissement en terme de délais et de coûts, notamment en raison d’opérations imprévues à réaliser sur la structure du bâtiment. Le Boulanger de Monge a donc achevé de laisser sa place à l’enseigne développée par Eurogerm, donnant ainsi un nouveau souffle à cet emplacement délaissé.

La devanture annonce « Pains, Café et Tartines ». En effet, Jean-Philippe Girard et son équipe ont voulu faire de ces lieux de véritables vitrines de leur savoir-faire, dont une bonne partie est associée au pain. Au sein du fournil visible au fond de l’espace de vente, des boulangers s’activent pour préparer les produits proposés aux clients. Finépi, Graine de Champion, Pain Egalité, … autant de noms marketés qui correspondent à des préparations mises au point par l’ingrédientiste. La plupart d’entre eux sont réalisés en non-façonné, grâce à une diviseuse-formeuse Paneotrad. La gamme biologique reste, quant à elle, réalisée de manière plus classique.
Je crois qu’il serait difficile de faire encore mystère sur mes à-prioris vis à vis de ce type de pains… ce qui ne m’a pas empêché d’en goûter plusieurs. Si les étiquettes sont prolixes en terme d’ingrédients et de saveurs potentielles (ma Finépi devait avoir un goût de « beurre noisette », je cherche encore), le palais peine à les retrouver : le résultat n’est pas meilleur ou pire que celui obtenu par les concurrents du groupe bourguignon. Les pains ont du volume, des couleurs (parfois bien exagérées, avec des mies aux teintes jaunes surprenantes)… mais peu de goût.

Flyer, Tartin'Art, Paris 2è

Le plus intéressant est ailleurs. Le travail réalisé sur les tartines et l’offre salée est intéressant, avec des recettes élaborées et plutôt fines (un chef étoilé a collaboré à leur mise en place, m’a-t-on indiqué). L’assemblage est transparent, puisque réalisé face au client : c’est un gage de fraicheur non négligeable. C’est un des points forts de la boutique : elle associe un espace de dégustation, avec quelques chaises, à la production tout en développant des linéaires modernes. Ici, pas de grille à pain, ils sont tous présentés à l’horizontale sur un meuble circulaire, créant ainsi une proximité agréable avec la clientèle. L’éclairage qui y est associé est particulièrement réussi et l’ambiance ainsi créée s’avère très plaisante.

Viennoiseries & pains, Tartin'Art, Paris 2è

Tout cela n’a pas été fait par hasard : si ces éléments aboutissent à attirer les consommateurs, ils servent également de démonstration du savoir-faire global d’Eurogerm. L’objectif ? Proposer une source d’inspiration pour les clients de l’entreprise. On pourra sans doute voir défiler des représentants de groupes meuniers, entre autres acteurs de taille dans la filière. Cette vitrine coûte cher de par son emplacement, et il faut espérer qu’elle rencontrera tout de même un certain succès auprès du public, sinon quoi elle ne pourra être viable.

Pains, Tartin'Art, Paris 2è

J’ai évoqué au début de mon billet le Boulanger de Monge. Il faut croire que son esprit n’a pas tout à fait quitté ces murs, puisque l’on retrouve dans l’équipe dirigeante de Tartin’Art un certain Bertrand Robert, impliqué… dans la reprise de la fameuse affaire du 5è arrondissement, en plus d’occuper des responsabilités au sein d’Eurogerm. Comme diraient nos amis de chez Disney, it’s a small world. Petit, mais sans doute pas suffisamment pour limiter les ambitions de ce groupe tentaculaire. La portée de l’investissement réalisé ici est en effet très large : le concept doit être déployé à l’international, comme pour mieux asseoir la position de ce « leader dans les ingrédients et auxiliaires technologiques au cœur de la filière Blé-Farine-Pain ».

Flyer, Tartin'Art, Paris 2è

Je ne critique pas la démarche qui est intéressante et dénote d’une vraie dynamique d’entreprise, mais je m’inquiète de la progressive concentration du savoir-faire en boulangerie : si les ouvriers en détenaient autrefois, c’est à présent de moins en moins le cas. Peu à peu, leurs responsables laisseront se déchargeront sur leurs meuniers, eux-mêmes faisant le choix de recevoir des solutions de la part d’acteurs tels qu’Eurogerm… la boucle est bouclée. On ne va pas s’étaler plus que ça sur le sujet, évitons le risque d’en faire… des tartines.

Chaises, Tartin'Art, Paris 2è

Infos pratiques

53 rue Montorgueil – 75002 Paris (métro Sentier, ligne 3) / tél : 0182092829
ouvert du mardi au dimanche de 7h30 à 20h.

L’engagement des individus et le fond de leurs intentions se mesurent sur la durée, et il faut redoubler d’attention pour ne pas signer des chèque en blanc. Bien sûr, si l’on se trompe, on aura toujours l’excuse de ne pouvoir apprécier que de l’extérieur, même s’il faut tenter de se placer en observateur attentif pour distinguer le vrai du faux. Le parcours des gens se résume souvent en une feuille sur laquelle on aurait tracé des traits. Les plus vertueux parviennent à tracer des lignes droites, tandis que d’autres se contentent de courbes aux nombreux détours.

Derrière une façade bien tranquille, la boulangerie Pains, Beurre et Chocolat bouillonne d'idées gourmandes.

Derrière une façade bien tranquille, la boulangerie Pains, Beurre et Chocolat bouillonne d’idées gourmandes.

Dans le cas de Cathy et Eric Marché, on peut dire que le dessin est net, rectiligne. Sans doute car il ne s’est pas fait sans… règles. Souvenez-vous, je vous avais parlé de ce couple de passionnés il y a déjà près de 4 ans (!). Le temps a passé mais pas leur engagement. Leur boulangerie s’est faite connaître en participant à l’émission de M6 La Meilleure Boulangerie de France saison 1, où l’artisan était parvenu à se classer 4è sur le plan national. Bien sûr, cela représente une fierté pour ce boulanger issu d’un parcours en reconversion professionnel, mais pas question de perdre de vue l’essentiel : continuer à satisfaire la clientèle… et partager un univers gourmand riche et singulier, où la qualité tient une place essentielle.

Le Matlouh est un pain plat, à la mie jaune et moelleuse. Il se révèle être un compagnon idéal des plats en sauce.

Le Matlouh est un pain plat, à la mie jaune et moelleuse. Il se révèle être un compagnon idéal des plats en sauce.

Les rencontres générées par l’émission comme celles du quotidien ont enrichi les gammes de produits, en affirmant un peu plus leur identité. Le pain reste toujours à l’honneur dans cette boutique sobre et accueillante en occupant une bonne partie des linéaires. L’an passé, l’équipe Pains, Beurre et Chocolat a fait voyager sa clientèle en lui proposant chaque mois un pain du monde. On y trouve toujours le Matlouh, un pain d’Afrique du Nord, très moelleux et au goût légèrement sucré. En 2015, ce sont des créations de l’équipe qui régalent les gourmands de nouveauté, comme en juin où l’on retrouvait une surprenante couronne à la carotte au cumin.

Le Pain Nordique, un savoureux mélange de trois farines et de graines. Excellente conservation et goût marqué.

Le Pain Nordique, un savoureux mélange de trois farines et de graines. Excellente conservation et goût marqué.

Pour le quotidien, le Norvégien et son mélange de graines apporte une énergie durable particulièrement bienvenue au petit déjeuner, tandis que la « Crème des pains » (une création de Pascal Emeriau, dont la boulangerie Une tartine de Bonheur se trouve en périphérie nantaise) offre un moelleux et une douceur exceptionnels grâce à l’incorporation de crème fraiche au pétrissage.
Vous l’aurez compris, Eric Marché et son équipe ont développé un savoureux mélange entre savoir-faire, gourmandise et éveil de la curiosité.

Un étal de viennoiseries bien coloré : les croissants bicolores ont du succès, avec notamment une création récente, le croissant anis-réglisse.

Un étal de viennoiseries bien coloré : les croissants bicolores ont du succès, avec notamment une création récente, le croissant anis-réglisse.

Même constat en viennoiserie où l’étal a pris des couleurs : croissants bicolores, moulins à vent, mojito, … autant de créations croustillantes qui rendent les petits-déjeuners et goûter plus savoureux et brisent la routine. La qualité du feuilletage n’a pas changé et on ne peut que saluer la régularité au fil des années, alors que de nombreux artisans ont tendance à se laisser aller avec le temps.

Le mur à pains. La tourte au Sarrasin exprime bien le goût de la céréale, grâce à l'incorporation de farine de sarrasin toastée.

Le mur à pains. La tourte au Sarrasin exprime bien le goût de la céréale, grâce à l’incorporation de farine de sarrasin toastée.

Ce qui préoccupe notre artisan n’est pas son développement : il ne déploie pas de grands projets d’expansion comme beaucoup et cherche avant tout à satisfaire sa clientèle. C’est justement dans cette optique qu’il s’était impliqué dans la démarche Agri-Ethique, pour proposer un pain qui puisse être profitable à tous, du producteur de céréales au consommateur. L’arrivée d’un acteur du milieu de la boulangerie positionné sur les prix, dont les valeurs sont bien éloignées de l’artisanat, l’a poussé à s’interroger sur la sincérité du processus… jusqu’à le quitter.

Chez Pains, Beurre et Chocolat, le levain naturel est bien maîtrisé et se retrouve dans la plupart des pains, à l'image de la Tourte de Grand Chemin, qui ne contient pas de levure.

Chez Pains, Beurre et Chocolat, le levain naturel est bien maîtrisé et se retrouve dans la plupart des pains, à l’image de la Tourte de Grand Chemin, qui ne contient pas de levure.

Aujourd’hui, il souhaite se rapprocher d’acteurs impliqués dans la même dynamique que lui et ayant à coeur de défendre une certaine vision de la boulangerie. Ses partenaires historiques – la Minoterie Girardeau et son pendant Biologique Suire – ont pris un virage stratégique important ces dernières années, en cherchant à se développer par les volumes. Cela se ressent forcément sur la relation qu’ils entretiennent avec leurs clients, et sur les farines : d’où proviennent les céréales biologiques ? L’indication « Agriculture UE » laisse songeur.

Mais d'où vient le Seigle ? "Agriculture UE"

Mais d’où vient le Seigle ? « Agriculture UE »

La difficulté de trouver des meuniers indépendants et engagés laisse nos boulangers parfois bien seuls dans leur démarche, qui devient alors un véritable chemin de croix. Certains sont plus « chanceux » que d’autres, en pouvant s’adresser à des acteurs de petite taille situés à proximité. Eric Marché continue ses recherches, le seul risque étant… le découragement. En parallèle, il essaie de fédérer des artisans portés par le même état d’esprit que lui : un projet ambitieux mais porteur de sens, car c’est en se échangeant que les boulangers seront mieux armés pour répondre aux problématiques auxquelles ils doivent faire face. Aller à contre courant de la stratégie de l’isolement jouée par certains acteurs de la profession relève aujourd’hui de l’acte héroique…

Une partie de l'équipe de Pains, Beurre et Chocolat... il manque les équipiers de l'après-midi !

Une partie de l’équipe de Pains, Beurre et Chocolat… il manque les équipiers de l’après-midi !

En effet, pas facile d’évoluer dans un environnement où les gens qui réussissent sont souvent ceux qui parlent le plus sans avoir quoi que ce soit à raconter… mais il faut continuer, il y a toujours de belles histoires à partager, écrire, imaginer. C’est particulièrement vrai dans cette petite boulangerie de Nantes.

Infos pratiques

10 boulevard Amiral Courbet – 44000 Nantes (Tramway ligne 2, arrêt Saint-Felix) / tél : 02 40 20 09 02
ouvert du lundi au vendredi de 7h à 19h30, le samedi de 7h à 13h.
site internet : http://www.pains-beurre-chocolat.fr

Je ne suis pas assez fleur bleue pour m’émouvoir des histoires d’amour, mais cela ne m’empêche pas de les entendre et d’essayer d’en saisir l’intensité et les implications. Quand elles s’associent à des histoires… d’humour, cela prend un autre sens. Il paraîtrait que l’un ne pourrait aller sans l’autre, et que les gens trop sérieux seraient donc condamnés à une vie triste et sans passion. Vivons léger, alors.

Le QG des Boulangers, Rezé (44)

A Rezé, les deux histoires se sont rejointes pour construire un projet au service des autres, montrant à quel point on peut être sérieux sans se prendre au sérieux, et faire quelque chose de beau. Si je parle d’humour, c’est que le nom de cette boulangerie est un savoureux clin d’oeil aux prénoms de ses deux propriétaires : Gwénola Bosson et Quentin Planchais ont ouvert leur Q.G. des Boulangers il y a un peu moins de deux ans. Les connaisseurs de la boulangerie parisienne reconnaîtront sans doute deux noms bien connus, et pour cause. Leurs frères respectifs – Alexandre Planchais et Anthony Bosson – sont des artisans reconnus dans la capitale, et c’est d’ailleurs au sein de la boulangerie Alexine rue Lepic que nos deux associés se sont rencontrés.

Pâtisseries, Le QG des Boulangers, Rezé (44)

Quentin se prédestinait plutôt à la pâtisserie, ne souhaitant pas suivre la route de son frère, mais les expériences ont fait qu’il s’est rapproché des pétrins et de la farine. Ayant réalisé son apprentissage à Nantes, c’est dans sa région de coeur qu’il voulait revenir. Gwénola a, de son côté, participé à la force de vente de plusieurs affaires parisiennes. Leurs parcours complémentaires leur ont permis de se forger une véritable vision du métier… et ainsi faire de leur Q.G. un lieu très recommandable, repaire de produits de qualité.

Au premier plan, la baguette QG et sa grigne "naturelle".

Au premier plan, la baguette QG et sa grigne « naturelle ».

Le parti-pris ? Ne proposer que des pains et gourmandises faites maison, réalisés à partir de farines CRC et/ou Label Rouge. Seuls les chocolats sont achetés à un MOF vendéen, en l’indiquant clairement. Ici, pas de marketing associé à un moulin, mais des gammes courtes correspondant à l’identité de l’artisan.
La baguette de Tradition (la « QG », 1,07€ les 250g) est ainsi élaborée à partir d’une recette propre à Quentin Planchais, avec une pointe de levain doux et une grigne naturelle qui lui confère un visuel rustique. La gamme boulangère se prolonge avec le pain à la farine de meule, le moelleux aux céréales, la baguette à l’épeautre, la ciabatta… des produits soignés et savoureux.

Le fournil est visible derrière la caisse, grâce à une large baie vitrée.

Le fournil est visible derrière la caisse, grâce à une large baie vitrée.

La viennoiserie conjugue les spécialités feuilletées, avec des produits bien développés et croustillants, à des brioches variées (une sympathique déclinaison aux fruits confits, notamment). En pâtisserie, on décline le registre boulanger avec des tartes et pâtes à choux. Même positionnement sur le traiteur où les sandwiches sont accompagnés de focaccias garnies et quiches.

Ficelles salées, quiches, sandwiches, ...

Ficelles salées, quiches, sandwiches, …

Le plus difficile aura sans doute été de se faire une place dans le paysage local, car les obstacles auront été nombreux pour le jeune couple. Leur parcours parisien leur a été reproché, attestant d’un certain manque d’ouverture d’esprit au sein de la population locale. En reprenant une affaire « marquée » par la Flûte Gana, ils ont dû redoubler d’efforts pour effacer cette identité et imposer la leur, en plus de contrôles répétés la première année d’activité. Cela ne les a pas empêchés de réaliser des investissements importants, comme la réfection de la façade ou l’achat d’un nouveau four. De cette façon, ils ont pu construire une boulangerie à leur image, à la fois simple, sympathique et souriante.

Au moment de partir, pourquoi ne pas se laisser tenter par une gourmandise, comme le P'tit choc, sur base de pâte à pain enrichie de nombreuses pépites de chocolat ?

Au moment de partir, pourquoi ne pas se laisser tenter par une gourmandise, comme le P’tit choc, sur base de pâte à pain enrichie de nombreuses pépites de chocolat ?

Aujourd’hui, les jours d’ouverture sont devenus pour eux un réel sujet de réflexion : devraient-ils ouvrir le lundi plutôt que le dimanche, ou même 7 jours sur 7 si la législation le leur permettait ? Les emplois qui pourraient être potentiellement créés pèsent dans la balance, que ce soit à leur niveau ou auprès des décideurs politiques. Ma position sur le sujet n’est pas particulièrement enthousiaste, avant tout pour protéger la qualité de vie des boulangers, mais la question mérite d’être posée.
L’arrivée récente d’une concurrence supplémentaire, avec l’installation de Pascal Emeriau et sa Tartine de Bonheur est une autre source d’incertitudes, notamment vis à vis de la fidélité de leur clientèle.

Le four de marque Werner, un équipement indispensable pour assurer une cuisson de qualité.

Le four de marque Werner, un équipement indispensable pour assurer une cuisson de qualité.

Dans tous les cas, on ne peut que saluer l’engagement de ce couple envers sa clientèle et les efforts déployés pour proposer une offre qualitative, détachée de tout élément marketing extérieur et porteuse d’une vérité de produits. Souhaitons leur de rencontrer à présent tout le succès qu’ils méritent, pour que l’on puisse se retrouver longtemps dans ce sympathique QG.

Les pains suspendus dans un présentoir en fer : un élément original qui met bien en avant les produits.

Les pains suspendus dans un présentoir en fer : un élément original qui met bien en avant les produits.

Infos pratiques

92 rue Jean Jaurès – 44400 Rezé / tél : 02 40 75 63 44
ouvert du mardi au vendredi de 7h à 20h15, le samedi de 7h à 13h et de 15h à 20h15 et le dimanche de 7h à 13h.