Les couples en boulangerie-pâtisserie se sont vus historiquement attribuer deux secteurs de l’entreprise bien distincts : madame derrière la caisse, monsieur au fournil. Leurs vies étaient orientées autour du fonctionnement de l’affaire, avec un logement souvent attenant à la boutique. Dans un monde sans cesse changeant, les codes et les cases n’ont plus lieu d’être : il n’y a plus un modèle unique mais une multiplicité d’envies, de modes de vie, d’équilibres. Ne pas être dogmatique c’est s’ouvrir à plus de liberté, de plaisir et en définitive devenir maître de son destin.
Antonia et Richard Ildevert ont ouvert le 23 juin dernier leur boulangerie-pâtisserie « De Pâte à Pain » à Jouars-Pontchartrain (78). Pour cette aventure commune, ils ont associé leurs compétences et oeuvrent à 4 mains au laboratoire pour préparer les gourmandises proposées à la clientèle. Boulangerie et viennoiserie pour lui, traiteur et pâtisserie pour elle, en plus d’un peu de vente pour remplacer leur vendeuse quand c’est nécessaire, les tâches ont été réparties sans tomber dans le schéma traditionnel des couples d’artisans.
Ici, tout est fait maison… même la boutique, dont l’essentiel des travaux ont été réalisés par leurs soins. Le choix de cette petite ville des Yvelines n’est pas un hasard (même si leur projet aurait pu se concrétiser au Brésil, dont Antonia est originaire) : Richard Ildevert est originaire de cette localité, et c’est ainsi une sorte de retour aux sources qu’il réalise ici. Entre sa jeunesse ici et la transformation de cette boutique qui fut anciennement une pâtisserie-chocolaterie (avant de devenir plus récemment un magasin d’antiquités), l’artisan aura parcouru le monde. Chef pâtissier à Genève en 2007, lauréat du prix Rabelais des Jeunes Talents catégorie Glacier en 2012, puis formateur à l’école Lenôtre (d’ailleurs située tout près, à Plaisir), … ses compétences et son goût de la transmission l’ont amené à changer régulièrement de poste. Au cours de l’un de ses nombreux voyages, il rencontre Antonia, elle aussi passionnée par l’univers du sucré. Elle fera ses classes chez Lenôtre et au restaurant étoilé le Taillevent.
Cette nouvelle étape est l’occasion de poser leurs valises, de mettre leur savoir-faire au service direct du grand public et de construire un projet qui leur ressemble.
Un espace de vente sobre, ouvert sur le laboratoire, des gammes courtes et maîtrisées : c’est ainsi qu’ils ont choisi d’exprimer leur univers. L’offre locale en boulangerie-pâtisserie était habituée à la surabondance, au détriment de la qualité. Ils se différencient nettement de leur concurrence, ce qui ne manque pas d’interpeller la clientèle. Les consommateurs recherchent des produits sains, savoureux et faits maison. Le positionnement du couple Ildevert répond parfaitement à ces attentes, et n’a pas tardé à attirer ses premiers fidèles.
Au fournil, Richard prépare chaque jour des pains savoureux, à partir des farines des Moulins Viron. Il faut dire qu’il connaît bien ce meunier, qui est partenaire de longue date de Lenôtre. Ici, pas de baguette « blanche », mais une Tradition (de type Rétrodor, 1,15€) et une baguette de Meule (sur farine T80, 1,50€). Le boulanger aime travailler sur levain naturel (dur et liquide) avec des farines typées, et sa gamme a été mise en place dans cet esprit, sans marketing meunier. Une ciabatta ou un pain aux fruits pour les gourmands, un pain au poids pour les amateurs de produits rustiques, … l’essentiel des besoins seront comblés, même si l’artisan ne refuse pas de réaliser des commandes particulières.
En pâtisserie aussi, les créations sont recentrées sur l’essentiel pour permettre un renouvellement régulier. Quelques entremets -fraise & pistache ou tout chocolat-, des éclairs et choux gourmands chocolat-cacahuète, des tartes aux fruits de saison ou encore un millefeuille monté minute : le choix des matières premières permet d’offrir des produits frais et savoureux, pour des prix mesurés. Même constat en salé, avec quelques sandwiches, fougasses et quiches. Ce poste a été volontairement limité pour garder l’essence même d’une boulangerie-pâtisserie.
Il serait difficile de quitter les lieux sans s’arrêter sur les viennoiseries -que l’on peut d’ailleurs accompagner d’un café, vendu à prix coûtant-. Les classiques sont de très bonne facture, avec un croissant et un pain au chocolat bien feuilletés, mais le plus attirant reste sans doute les créations fruitées et colorées de la maison : brioche craquelin à la framboise, feuilleté ananas-vanille ou abricot-noisette selon l’inspiration du jour, … sans compter la généreuse brioche feuilletée. De quoi donner aux petits-déjeuner et goûters des airs de fête.
Quelques gâteaux de voyage complètent la gamme, et même si les multiples talents du couple leur permettent d’envisager le développement de nombreuses autres gourmandises, il ne faut pas sauter les étapes au risque de mal faire.
Pour aller de la pâte au pain, les artisans doivent mettre en oeuvre tout leur savoir-faire et leur envie de partager un beau et bon produit. Antonia et Richard nous montrent ici qu’on peut le faire à 4 mains, et que même si les journées sont parfois longues (surtout dans le cas d’une création comme ici), le plaisir apporté à la communauté et les relations de confiance créées avec la clientèle récompensent ces efforts. Souhaitons leur beaucoup de réussite.
Infos pratiques
13 route de Paris – 78760 Jouars-Pontchartrain (Transilien ligne N, gare de Villiers – Neauphle – Pontchartrain) / tél : 09 86 41 81 81
ouvert du mercredi au samedi de 7h30 à 19h30, le dimanche de 7h30 à 13h.