Historiquement, la plupart des commerciaux en meunerie étaient d’anciens boulangers. On considérait en effet qu’ils étaient les mieux placés pour vendre de la farine, car ils connaissaient bien les problématiques rencontrées par les artisans et qu’ils étaient à même d’apporter du conseil technique. La situation a nettement évolué au cours de ces dernières années, avec une plus grande variété dans les profils recrutés : il est essentiel de faire entrer du sang neuf et d’intégrer des regards différents sur la profession. La relation commerciale entretenue avec les clients peut s’en trouver enrichie, améliorée par les techniques enseignées par nos grandes écoles de commerce.

L'Atelier du Talemelier, Tours (38)

De rares individus empruntent le chemin inverse. Après avoir fait carrière en tant que commercial en meunerie – il a été responsable commercial chez Decollogne pendant de nombreuses années -, Cyril Chambay a ouvert sa boulangerie à Tours en janvier 2016. C’est l’aboutissement d’un projet mûri de longue date : son bagage comprenait les compétences et diplômes nécessaires pour exercer en boulangerie, et il songeait à lancer une affaire dans « sa » ville.
Nos vies se divisent en de nombreuses phases, plus ou moins longues, il suffit d’observer l’évolution de chacun au fil du temps. Fini le costume-cravate, les tournées en clientèle, place aux fournées et à la tenue de boulanger.

Le mur à pain est situé à proximité immédiate du fournil, visible entièrement au fond de la boutique.

Le mur à pain est situé à proximité immédiate du fournil, visible entièrement au fond de la boutique.

L’exigence forgée au contact des clients prestigieux que pouvait compter Decollogne par le passé (Dominique Saibron, Gérard Mulot, Jean-Luc Poujauran…) est un outil utile pour gérer le personnel et l’amener à l’excellence voulue par l’entrepreneur.
Son projet est en effet de parvenir à créer une nouvelle référence en terme de qualité dans l’offre boulangère locale, chose qui ne semble pas impossible étant donné le faible nombre d’acteurs impliqués dans cette démarche à Tours. Il aura fallu plus de trois mois de travaux pour transformer les lieux, ce qui a eu pour effet direct de disperser une partie de la clientèle : les habitudes se perdent vite et il faut alors redoubler d’efforts à la ré-ouverture.

Détail de la devanture, L'Atelier du Talemelier, Tours (38)

L’investissement réalisé correspond bien au positionnement : une boutique élégante, avec sa façade aux décors sous verre et son intérieur fait de pierre et de bois, un fournil entièrement refait à neuf avec un équipement haut de gamme (four MIWE, …) et visible depuis l’espace de vente…
Toutes les recettes ont changé, avec une gamme de pains spéciaux réalisée à partir de farines Bio et de levain naturel. Ce dernier apporte une note acidulée aux produits, tout en restant bien maîtrisé. De la boule Bio aux variations aromatiques (noix, céréales, …), l’offre est large et profite d’un soin marqué à la réalisation. La baguette de Tradition est, quant à elle, fermentée sur levure et suit une longue fermentation pour développer ses arômes. La viennoiserie aura encore besoin de temps et de savoir-faire avant d’être au niveau.
Pour le reste, l’offre a vocation à rester dans le périmètre boulanger : tartes, quiches, sandwiches, tartines, quelques pâtes à choux… La star désignée de l’offre sucrée est la tarte Tatin, riche en pommes caramélisées. En se concentrant sur un nombre limité de références, l’artisan peut ainsi garantir la qualité et la fraicheur de ses produits. Reste tout de même un point discutable à mon sens, le choix du meunier, puisque c’est Axiane Meunerie qui livre la farine de Tradition. Cela ne me semble pas exactement en phase avec le positionnement du projet, mais j’imagine que d’autres raisons ont inspiré ce choix. Decollogne livre tout de même les farines biologiques.

Offre sucrée, L'Atelier du Talemelier, Tours (38)

Ce qui est le plus appréciable à mon sens est la volonté sincère de Cyril Chambay de partager avec sa clientèle et ses équipes l’idée d’une boulangerie engagée pour la qualité au quotidien. Cela passe par une formation permanente en vente et une implication de la production dans la mise en place des produits et recettes. Cette démarche de transmission trouvera son écho naturel dans la formation des apprentis qui seront reçus dans les mois à venir au fournil. L’activité du compagnonnage étant forte dans le secteur de Tours, cela constitue un véritable vivier de jeunes motivés et passionnés. Les salariés repris de l’ancienne direction ont bien adhéré au projet et sont heureux de voir du changement dans leurs méthodes de travail.

L'ancien espace de vente de Christian Nardeux sous les Halles de Tours, fraichement repris par l'Atelier du Talemelier.

L’ancien espace de vente de Christian Nardeux sous les Halles de Tours, fraichement repris par l’Atelier du Talemelier.

Le changement s’est prolongé juste en face, sous les Halles de Tours, puisque l’Atelier du Talemelier s’y est installé en reprenant le point de vente de Christian Nardeux. Si ce dernier a connu son heure de gloire, il a passé ces dernières années sur le déclin et l’arrivée d’un nouvel occupant sera la bienvenue pour re-créer une dynamique, que ce soit en terme de qualité de produit ou d’achalandage. Des travaux devraient être réalisés très prochainement.

Souhaitons donc bonne route et beaucoup de réussite à cet entrepreneur pour son projet.

Infos pratiques

30 place Gaston Pailhou, 37000 Tours / tél : 02 47 61 34 80
ouvert du mardi au samedi de 7h à 19h, le dimanche de 7h à 13h.

4 réflexions au sujet de « L’Atelier du Talemelier, Tours (37), de la farine au pétrin »

  1. Je viens de découvrir votre site en tapant dans google « CAP boulangerie reconversion adulte », pour vous donner une idée de ce qui m’anime en ce moment (depuis environ 2 ans, en fait). Je réside au Royaume-Uni depuis près de 20 ans mais suis également originaire de Touraine dont je reviens de vacances et suis ravie de voir cet article sur la boulangerie place Gaston Pailhou. Je voulais également vous dire que tout n’est pas noir dans la boulangerie et la nourriture en France, croyez-moi. Je dis ceci par comparaison à mon pays d’adoption, qui a ceci dit beaucoup évolué sur la qualité de la nourriture et son mode de préparation, mais ou l’attitude mercantile à tous les échelons reste tout de même la norme. Mais je le dis également parce que de retour de 3 semaines de vacances passées en province (Touraine donc mais aussi Berry/Limousin puis Monts d’Arrée) je vous assure avoir mangé du pain excellent tous les jours de nos vacances. J’avoue choisir mes boulangeries et je suis rentrée plusieurs fois dans certains établissements et ressortie sans pain (au dam de mon mari, un peu gêné) car l’allure de ce qui était présenté ne me plaisait pas (partant du principe du « beau et bon »!). Mais en règle générale dans chaque village visité ou presque j’ai pu trouver une boulangerie dont le pain valait d’être mangé et beaucoup de boulangers qui aimaient répondre à mes questions et parlaient avec fierté de leurs produits. Je fais mon pain moi-même à la maison, avec levure boulangère (en général sur poolish) ou levain et quand mon pain est réussi et que mes enfants mettent leur nez dans la mie ils me disent « j’adore l’odeur de ton pain Maman ca sent comme la boulangerie en France ». Je vais continuer de vous lire avidement et vous remercie pour ce blog.

  2. Bien d’accord avec votre article. J’ai essayé ce boulanger à coté de chez moi et en effet c’est une bonne adresse. Les pains originaux méritent d’être mis en avant car ils sont également excellents (j’aime beaucoup le pain scandinave, le pain à la courge..).
    Je confirme la qualité des sandwichs et des pâtisseries d’une grande fraîcheur.
    On sent la volonté de bien faire. Bravo.

  3. Bonjour,
    Suite à la participation de cet artisan à l’émission du « Meilleur boulanger de France » nous avons décidé de « tester » les produits. Catastrophe et très grosse déception. Pour ma part j’ai choisis une pâtisserie nommée « EXOTIC »: insipide, aucun goût sauf celui de chimique, aucune mâche, une bouillie informe au centre de ce gâteau…à 3,50euros le gâteau, c’est de l’arnaque. Ma fille décide elle de goûter un grand classique : le St Honoré. Le Choux pas du tout goûteux mais la crème était bonne. Bref si les pains sont à recommander, la pâtisserie est à désertée ou alors le patron doit sérieusement se remettre en question….

  4. Bonjour Monsieur Chambay
    Je suis une cliente quotidienne de votre boulangerie.
    Je constate que 2 de vos vendeuses ne portent pas de masques en ce début mai
    Notamment celles qui servent la marchandise empaquetant les pâtisseries et parfois en répondant au téléphone (portable à la main)
    Je n ai pas très envie de consommer une pâtisserie qui inévitablement bénéficie de ses postillon
    ce serait plus rassurant pour les clients qu’ elles acceptent cette contrainte
    Qu’ en pensez vous ?

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