La boulangerie, c’est le pain, mais c’est aussi toutes les gourmandises que l’on peut y retrouver : viennoiseries, pâtisseries, biscuits secs… Pour chacun, ce sont des recettes et des compétences différentes à mettre en oeuvre. Parmi elles, on compte nombre de spécialités régionales qui présentent des caractéristiques propres et des procédés de fabrication parfois bien spéciaux.

C’est notamment le cas d’une brioche arménienne, le Tcheurek. Je l’ai découvert grâce à Jonathan Blot, le chef pâtissier d’Acide Macaron, qui réalise actuellement des essais autour de ce produit.
Cette spécialité ne manque pas d’attrait et c’est pour cela que j’ai choisi de vous faire partager un peu de son histoire et de son mode de fabrication.

Réalisé chaque année dans les familles arméniennes à l’occasion des fêtes de Pâques, le Tcheurek possède avant tout la particularité d’incorporer une épice bien particulière : le Mahleb. Cette poudre est issue de l’intérieur (des graines, donc) des noyaux de cerise, qui sont broyés afin de parfumer ce type de gourmandise. Coûtant environ 50 euros le kilogramme, son prix n’est pas le seul obstacle à son utilisation. En effet, il est difficile d’en trouver en dehors de la période pascale. C’est fort dommage, car même si consommée seule elle exprime une forte amertume, incorporée dans la pâte elle révèle une superbe saveur florale, plus riche et entêtante que ne peut l’être, par exemple, celle de la fleur d’oranger.

Ainsi, cette brioche exprime un parfum frais et soutenu, assez inhabituel. Ce qui surprend également, c’est sa texture assez dense. Elle doit se situer en réalité entre la brioche et le pain au lait. Généralement, elle est trempée dans une boisson, comme du lait ou du thé. Cette fameuse densité est liée à son procédé de fabrication surprenant. Pour réaliser la pâte, on mélange bien entendu des oeufs (deux fois moins que dans une brioche « traditionnelle »), du sel, de la farine, du beurre (en quantité réduite, là encore)… et beaucoup de levure : 80g par kilogramme de farine. Une fois le pétrissage réalisé, elle pousse pendant 2h et prend énormément de volume, du fait de la forte quantité de levure. C’est alors que l’ensemble est repétri, fortement aplati et dégazé. On façonne alors une boule ou une tresse, que l’on laisse pousser de nouveau.
Avant la cuisson, la brioche est dorée au jaune d’oeuf, qui va caraméliser à la cuisson, et décorée de graines de sésame.

Grâce à ce travail, le Tcheurek offre une excellente conservation et est généralement enveloppé dans un linge pour être consommé sous une semaine à dix jours. Ce temps est d’autant plus long dès lors que l’on façonne de grosses pièces. Dans tous les cas, le résultat ne manque pas d’être agréable dès lors que la recette est réussie. Dans ce cas, la brioche est dense mais moelleuse… dans l’autre, elle est difficilement consommable car assez ‘étouffe chrétien’. Jonathan Blot n’était pas satisfait du résultat obtenu et va travailler à nouveau le produit avec une autre recette. En effet, chaque famille possède la sienne, et certains détenteurs du ‘secret’ l’emportent avec eux… Ce qui rend la tâche plutôt compliquée !
Chez Acide, on réfléchit également à la forme à donner à cette spécialité, pour l’adapter aux besoins de l’entreprise mais surtout aux goûts de sa clientèle. Ainsi, il est envisagé de l’enrichir de prunes légèrement acidulées pour casser cette douceur florale, mais aussi de la proposer avec une boisson particulière.

Vous vous demanderez sans doute pourquoi une boutique spécialisée dans la réalisation de macarons et petites pâtisseries cherche à développer un tel produit. La raison est toute simple : d’ici septembre, l’équipe d’Acide inaugurera un salon de thé, non loin de la boutique actuelle, dans le 17è arrondissement. Leur objectif est d’y proposer des gourmandises simples, accessibles et savoureuses, à l’image du Tcheurek. Un retour aux fondamentaux, une pâtisserie sans artifices qui sera ainsi à la portée de tous : voilà un objectif très painrisien, et bien plus sensé que les tendances qui se dessinent actuellement, où c’est avant tout l’apparence qui est privilégiée… au détriment du prix et du goût.

Voilà dans tous les cas une belle découverte, que j’ai hâte de pouvoir retrouver dans ce nouveau lieu sur lequel les esprits toujours très créatifs d’Acide planchent déjà avec ardeur… Cela promet !

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