Suite à mon billet du 30/03/2020, la Fédération des Entreprises de Boulangerie (FEB) m’a fait parvenir, par le biais de son conseil, un droit de réponse. Vous le trouverez en intégralité ci-après.

REPONSE DE LA FEDERATION DES ENTREPRISES DE BOULANGERIE
A L’ARTICLE INTITULE « BOULANGERS EN TEMPS DE CRISE : STOP OU ENCORE ? » DU 30 MARS 2020 DU SITE PAINRISIEN.COM (https://painrisien.com/boulangers-en-temps-de-crise-stop-ou-encore/)

Le 30 mars dernier était publié sur le présent site un article intitulé « Boulangers en temps de crise : stop ou encore ? ». Aux termes de cet article, la Fédération des entreprises de boulangerie voyait sa dénomination et sa médiatisation être qualifiées d’escroquerie, ce sans la moindre mesure.

Conformément à ses droits, la Fédération a donc exercé son droit de réponse auprès du directeur de la publication du présent site.

Tout d’abord, et d’une part, il est essentiel de rappeler le profil des adhérents de la Fédération pour bien comprendre tout ce qu’il y avait de fallacieux dans les termes employés à son endroit.
S’il n’est pas nié qu’y adhèrent également des industriels et franchiseurs partageant, comme la Fédération et tous ses adhérents, la passion du pain, la majorité d’entre eux sont des indépendants ou des franchisés. Or, sauf à méconnaitre délibérément le secteur, force est d’admettre que les indépendants comme les franchisés ne sont que rarement d’énormes structures, mais bien davantage des petits commerçants, qui rencontrent également des difficultés en ces temps de crise et n’ont pas moins droit que les autres à la protection de leurs intérêts. Au demeurant, et n’en déplaise à ses détracteurs, un grand nombre d’artisans boulangers sont également adhérents de la Fédération.

Elle est fière de porter les intérêts de cette diversité de professionnels et d’entreprises de boulangerie et n’a donc ni à rougir ni à s’excuser de sa dénomination. Pour rappel notre fédération a été fondée en 1939, ce qui prouve que l’action qu’elle mène trouve un écho de plus en plus important au sein du secteur.

Quelle est l’unique différence aujourd’hui entre un artisan et un industriel ? La taille des pétrins.

Les matières premières (farine, beurre, levure, eau) sont strictement les mêmes.

D’autre part, puisqu’il est question de l’ouverture de la vente de pain sept jours sur sept et du sondage qu’avait commandé la Fédération, il doit être souligné à quel point cette possibilité, plébiscitée par les Français, n’est pas contraire aux intérêts de la boulangerie, en ce compris ses artisans.

S’agissant de la période de crise sanitaire actuelle, il est indiscutable que la décision de suspendre les mesures de fermeture hebdomadaire de la vente de pain s’imposait. En effet, comme le mentionne à juste titre l’article auquel il est répondu, les commerçants et artisans rencontrent des difficultés pour ouvrir en assurant le respect des gestes barrières et donc la sécurité et la santé de leurs employés, de leurs clients et les leurs. Beaucoup sont d’ailleurs fermés. C’était malheureusement, dès le début de la crise, ce qui était à prévoir.

D’ailleurs il est intéressant de noter que la préfecture des Yvelines vient ce jour (10 avril 2020) d’accorder une nouvelle dérogation pour permettre à l’ensemble des vendeurs de pain d’ouvrir quand ils le souhaitent.

Dans ces conditions, l’argument habituel en faveur de ces mesures de fermeture, à savoir celui de permettre prétendument une concurrence loyale entre tous les établissements exerçant l’activité de vente de pain, n’avait plus sens. L’urgence n’était plus à la gestion de la concurrence, dans un secteur qui allait de toute façon majoritairement connaître de multiples difficultés pour poursuivre ses activités et donc subir des distorsions du fonctionnement habituel de son économie, mais bien àl’approvisionnement de la population.

Or, il apparaissait particulièrement important, pour assurer l’approvisionnement d’une denrée de première nécessité aussi commune et traditionnelle que le pain, de permettre à ceux qui le pouvaient encore de rester ouverts, autant que faire se peut, d’autant qu’une ouverture 7/7 permettait de fluidifier le flux de chalands et donc de favoriser le respect des mesures sanitaires mises en œuvre.

La moyenne et grande distribution ne pouvaient assurer seuls ces approvisionnements. Elles le pouvaient encore moins que, bien souvent, les arrêtés de fermeture hebdomadaire s’imposent également à la simple fabrication de pain, et non seulement à la vente. Elle aurait donc pu être empêchée, y compris ses jours de vente autorisée, de se fournir auprès de ses partenaires industriels, interdit de fabriquer, donc de répondre à la demande des Français, phénomène qui aurait été amplifié par les difficultés logistiques de transport.

En conséquence, compte tenu de la situation sanitaire, la suspension de la fermeture hebdomadaire a permis, à tout le moins amélioré significativement, la poursuite de l’approvisionnement des Français en pain, tout en limitant les effets de la crise sur ceux qui pouvaient encore s’adapter et permettre de répondre à une demande légitime pour ce produit, qui réunit et fédère.

Elle a également permis à la boulangerie, tous acteurs confondus, de participer, à sa manière, à la gestion de la crise et à l’épreuve collective que nous subissons.

La Fédération n’a ni à rougir ni à s’excuser d’avoir œuvré en ce sens pour les intérêts de la boulangerie.

S’agissant, pour finir, de la fermeture hebdomadaire, hors période de crise sanitaire, elle n’est pas davantage utile à la boulangerie. Outre que les modes de consommation ont largement évolué, ce qui ne peut être nié, et la circonstance que certains artisans sollicitent aussi l’arrêt de cette fermeture, l’argument habituel susmentionné relatif à la concurrence est inopérant. Le risque prétendu pour les artisans est celui d’une perte de chiffre d’affaires, qui les obligeraient, eux aussi, à ouvrir tous les jours de la semaine, ce qui nuirait à leur vie familiale et diminuerait l’intérêt des jeunes pour la profession, ou à subir une baisse de la valeur de leurs fonds de commerce, dont le prix de cession permet une retraite méritée.

Le propos de la Fédération n’est évidemment pas de dire que cette inquiétude est illégitime, mais plutôt qu’elle est infondée.

Et pour cause, rien ne permet de prétendre qu’un commerce de vente de pain qui déciderait de fermer un jour par semaine dans un environnement autorisant une ouverture ininterrompue subirait effectivement une perte de chiffres, ce d’autant moins dans un univers concurrentiel qui est géographiquement très limité et qui dépend beaucoup de la qualité. Par ailleurs, dans l’immense majorité des cas, la fermeture hebdomadaire ne concerne que la vente de pain et n’impose donc pas la fermeture de tout l’établissement de sorte qu’il existe toujours une concurrence sur le reste des produits, ceux à plus forte valeur ajoutée. Au surplus, la fermeture hebdomadaire n’est pas applicable à la vente de pain par des distributeurs automatiques de sorte que de plus en plus de commerçants, et des artisans, ont désormais installé une telle machine devant leur boutique afin que les clients puissent s’y approvisionner le jour de non vente de pain. La concurrence n’est donc pas arrêtée non plus sur le produit du pain par la fermeture hebdomadaire. Dans ces circonstances, le risque d’une atteinte significative au chiffre d’affaires est inexistant.

Pour finir de s’en convaincre, il suffit de constater qu’il n’existe aucun chiffre en ce sens pour les départements dans lesquels il n’y a pas ou plus d’arrêtés préfectoraux imposant la fermeture hebdomadaire.
Or, en l’absence de risque de perte de chiffres et donc de distorsion de concurrence, on ne voit pas ce qui justifierait d’interdire aux établissements qui le souhaitent d’ouvrir sept jours sur sept alors que la loi les y autorise par principe.

Enfin, au-delà de la problématique économique, la Fédération, attachée à l’Etat de droit, qui impose le respect par l’Administration des lois votées par le Parlement, ne peut accepter les conditions dans lesquelles les arrêtés de fermeture hebdomadaire ont été et sont encore édictés. La loi qui les autorise est claire, et la Justice administrative également. Pour être valables, ces arrêtés doivent recueillir l’assentiment de la majorité indiscutable de tous les établissements exerçant la vente de pain dans un département.

Le Conseil Constitutionnel a estimé, lui aussi, que cette loi, bien qu’étant une atteinte à la liberté d’entreprendre en autorisant ces arrêtés, était néanmoins proportionnée, donc constitutionnelle, compte tenu, précisément, du fait que cette atteinte devait être fondée sur la volonté de la majorité indiscutable des établissements qui allaient la subir.

Pourtant, force est de constater que les préfets, qui sont les autorités compétentes sur ce sujet, sont presque tous dans l’incapacité de produire les éléments qui ont fondé leur appréciation de l’existence d’une majorité en faveur de la fermeture hebdomadaire. Et lorsqu’ils le font, les éléments fournis sont peu probants et font, en réalité, sérieusement douter non seulement de l’existence d’une majorité, mais aussi d’une recherche effective de son existence par les services du préfet. Or, dans un Etat de droit, aucun citoyen ne peut se satisfaire de la contrainte exercée sur une liberté par des actes de l’Administration dont elle est incapable de justifier la légalité.

La Fédération n’a, là encore, ni à rougir ni à s’excuser d’œuvrer pour la protection des droits et des libertés des entreprises de boulangerie face à des atteintes inutiles et illégales.

4 réflexions au sujet de « Droit de réponse de la FEB suite au billet du 30/03/2020 »

  1. Je note à cette lecture , que le fond de pensée reste orienté sur les industriels, où était cette même fédération quand les franchises point chaud vendait du pain 7/7 ? Quand les GMS le faisait également et le fond toujours ….
    Ce droit de reponse ne les avantages pas , c’est pire …

  2. Bonjour Rémy, je lis ou était cette même fédération, ne faudrait t’il pas plutôt lire cette confédération ? ou alors m’égarerais je dans ces dénominations quelque peu absconses ?
    Concernant ton analyse sur l’évolution de la boulangerie vers le snacking, pour m’y être moi aussi engagé, je la partage tout à fait : moins de rentabilité, corrélée à une augmentation du CA, de la main d’oeuvre et du temps/paperasse s’y rattachant . Je suis aussi de l ‘avis de Baptiste concernant les boulangeries de moins de 150k, voire de 300k, la qualité de vie du chef d’entreprise est plus délicate, car à la merci du moindre incident de parcours, défaillance de personnel, maladie, qu’il devra compenser de sa personne. Alors le choix s’il en est un ? « Revenir aux fondamentaux de la boulangerie, sans investissement superflu en agencement et en matériel, devient de plus en plus urgent. » très probablement un essai ici https://www.lamaisondukouign.com/ … à bientôt , bon confinement, cordialement Alain Gueguen

Répondre à Delveque Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.