La capacité de certains artisans à fédérer une communauté d’adeptes autour d’eux mériterait sans doute d’être étudiée avec plus d’attention. Dans un monde où les relations ont tendance à être toujours plus éphémères et fragiles, tout ce qui peut aller à contre-courant devient remarquable. Il n’y a pas que la qualité des produits qui puisse justifier un tel phénomène. Une ambiance, un univers, … autant d’éléments qui représentent des pistes à développer pour ceux qui peinent à s’imposer auprès de leur clientèle.
En la matière, les époux Charbonnier semblent avoir bien compris comment fidéliser les gourmands. Dans le 15è arrondissement, leur boulangerie jouissait d’une réputation particulièrement florissante, et leur départ aura fait plus d’un déçu.
Il n’aura fallu attendre que quelques mois pour les retrouver, puisqu’ils ont repris une affaire fin août 2014. C’est à présent en haut du boulevard Malesherbes qu’on les retrouve, au sein d’une boutique beaucoup plus spacieuse.
Dans cet emplacement d’angle, avec une terrasse et un espace salon de thé à l’intérieur, le couple dispose de bien plus d’espace pour dérouler son univers… nous sommes bien loin du boyau étroit du 123 rue de Vaugirard. On retrouve avec plaisir la générosité et l’inventivité de l’artisan, au travers d’une large gamme de gourmandises et de propositions salées. Les gâteaux de voyage (financiers, quatre-quart, cakes …) sont toujours bien représentés, en plus des tartes à la part, flans, fars, sablés et cheese-cakes. Les propositions plus pâtissières achèvent de garnir les vitrines.
En traiteur, sandwiches, plats chauds, quiches, pizzas et autres options variées assurent le déjeuner de nombreux travailleurs du secteur, tout particulièrement ciblés avec cet emplacement bien en vue.
Je l’avais déjà regretté en 2012, mais la situation n’a pas évolué malgré un changement de meunier (les Moulins Bourgeois livrent ici la farine) : le pain demeure toujours en retrait. La baguette de Tradition culmine à 1,25€ pour un produit juste médiocre, au façonnage peu élégant et à la mie sans consistance. Les grosses pièces ne font pas mieux, toujours trop denses et manquant d’hydratation. C’est tout à fait regrettable car le secteur n’est pas riche en artisans de qualité, alors qu’il y aurait une véritable carte à jouer sur le pain. La viennoiserie ne fait pas beaucoup mieux, avec des spécialités feuilletées sans volume ni intérêt et des idées discutables pour un artisan, comme un chausson au Nutella.
L’accueil, toujours mené par M. Charbonnier, est aussi chaleureux que dynamique et efficace. On se sent bien dans cette boulangerie et c’est avec plaisir que l’on s’y attable pour prendre une pause autour d’une boisson chaude ou pour un instant gourmand en toute simplicité.
Infos pratiques
153 Boulevard Malesherbes – 75017 Paris / tél : 01 42 27 86 02 (métro Wagram, ligne 3 ou Transilien lignes L & J gare de Pont-Cardinet)
ouvert du lundi au vendredi de 7h30 à 20h, jusqu’à 18h le samedi.
Avis résumé
Pain ? C’est assurément le point faible de cette boulangerie… et c’est aussi regrettable qu’anormal pour un lieu dont la vocation devrait justement être de porter haut et fort les couleurs de ce savoir-faire artisanal. De plus, les tarifs sont élevés, avec notamment une baguette de Tradition proposée à 1,25€. Ajoutez à cela des façonnages approximatifs, des hydratations mal maîtrisées et des cuissons aléatoires, cela donne autant de bonnes raisons de passer son chemin sur cette offre.
Accueil ? Dynamique et efficace, il s’inscrit bien dans l’esprit que l’on connaît au couple Charbonnier. La boutique est accueillante, avec une terrasse et un espace salon de thé qui mettent bien en valeur cet emplacement d’angle.
Le reste ? Comme dans le 15è arrondissement, ce sont les propositions gourmandes qui séduisent le plus ici : entre les gâteaux de voyage et les pâtisseries, le choix est particulièrement large pour les becs sucrés, à des prix toujours très accessibles. Dommage qu’il n’en soit pas de même du côté de la viennoiserie, qui se révèle très décevante de par un feuilletage peu développé. On retrouve également de nombreuses options salées, entre sandwiches, tartes, quiches, plats chauds… ce qui nous oriente naturellement sur la nature de la clientèle des lieux.
Faut-il y aller ? Pourquoi pas, pour une pause gourmande. Malheureusement, il reste encore du chemin à parcourir pour que l’ensemble des gammes soient cohérentes, en particulier sur le pain et les viennoiseries. C’est cependant avec plaisir que l’on retrouve ce couple à l’identité forte, qui sait fédérer autour de lui l’adhésion de sa clientèle.