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Août
Boulangerie des Deux Frères, Paris 18è, de la jeunesse sur la Butte
3 commentairesJe me demande souvent comment je pourrais décrire le travail que j’ai entamé ici il y a plus de 5 ans tout en traduisant son caractère sensible et humain. Quand certains se satisfont de réaliser des classements, de noter ce qui ne devrait pas l’être et croient ainsi enrichir leur existence par une vaine quête du « meilleur », j’ai simplement voulu revenir à des valeurs simples et les partager. L’enfant que je n’ai pas été s’est ainsi saisi d’un arrosoir et est parti à travers champs. Drôle de champs que ces dalles de béton, que tout ce bitume. Sur cette terre dure et inhospitalière, il a du faire le tri entre les mauvaises herbes, les fleurs un peu trop belles pour être honnêtes, celles dont on avait falsifié le parfum, parfois sortir la débroussailleuse… pour essayer de ne jamais se perdre dans ce paysage. Parfois le petit garçon a trouvé une belle plante, comme un miracle. Alors il a tenté de l’arroser à sa façon, et même si son arrosoir n’est pas bien gros, que l’eau vient parfois à manquer, que ses bras ne sont pas assez vaillants pour en transporter des litres, ses efforts n’auront pas toujours été vains. Loin de s’appesantir sur ses succès ou ses échecs, le jardinier en devenir est parti vers d’autres conquêtes, vers d’autres aventures.
Sur la butte Montmartre, les frères Tordeux ont repris en mai 2016 la boulangerie du 111 rue Caulaincourt. Souvenez-vous, je vous en avais parlé en des termes peu élogieux fin 2012, d’une part en raison de la qualité des produits, de l’autre pour son nom au goût douteux. Pour ce dernier, il faudra encore attendre un peu pour s’en débarrasser tout à fait, puisque la devanture n’a pas encore été changée. Seule une large affiche « Changement de Propriétaire » nous indique que les cochonneries sont parties faire un tour… aussi loin que possible, espérons-le.
Le plus surprenant dans cette mutation de fonds est sans doute le profil des acquéreurs : deux frères associés, âgés de 27 et 28 ans. On reproche souvent aux jeunes de manquer d’ambition, de ne pas vouloir entreprendre, à plus forte raison dans des métiers tels que la boulangerie. Thibault et Geoffrey nous prouvent le contraire, à Paris qui plus est, avec ses contraintes et le prix élevés de ses fonds. Grâce à leur apport, ils ont pu reprendre cette affaire d’une taille honorable, avec un chiffre d’affaire annuel dépassant les 500 k€.
La valeur n’attend pas le nombre des années, comme nous le rappelle la fameuse expression. Les métiers de l’artisanat, où l’apprentissage commence souvent très tôt, ne sauraient la faire mentir, même si les compétences se développent naturellement avec l’expérience et les années. Formés au sein de l’Ecole de Boulangerie et de Pâtisserie de Paris, ils ont pu notamment faire leurs armes au sein des laboratoires de Frédéric Lalos au Quartier du Pain.
Aujourd’hui, c’est sur la butte Montmartre qu’ils exercent leurs talents, avec un emplacement plutôt intéressant et offrant des perspectives à qui veut se démarquer par la qualité. De ce côté là, il y a encore un peu de travail, même si l’on peut sentir une vraie bonne volonté et une envie de faire découvrir de nouvelles saveurs à la clientèle. Chaque jour, le semainier décline des créations mises au point par les deux artisans : pain de Bresse le lundi, pain du Nil (mélange de farines de sarrasin et de Kamut enrichi de graines de sésame et de pavot) le mercredi, Sarrasin le jeudi, pain d’épeautre le vendredi, Kamut le samedi, Copain le dimanche… A cela s’ajoute une gamme permanente déjà variée, où farines de Meule et de Seigle ont trouvé leur place. Cette diversité ne doit pas se faire au détriment de la qualité. Malheureusement, la baguette de Tradition est encore un peu décevante en terme d’alvéolage et de craquant, malgré un parfum agréable. Quelques choix, notamment sur les modes de fermentation, ne permettent pas de développer pleinement le potentiel aromatique des farines. Enfin, la régularité reste encore en pointillés.
Inévitablement, la sandwicherie occupe une place importante des linéaires. Entre touristes et parisiens pressés, l’emplacement de cette boulangerie s’y prête forcément. La pâtisserie reste très simple en semaine, avec quelques tartes et éclairs. L’offre se développe un peu le week-end, où l’on retrouve également plusieurs entremets.
Les spécialités feuilletées sont assez nombreuses, en plus des classiques : oranais, kouign-amann, … Peut-être serait-il préférable de se concentrer sur un nombre plus réduit de références pour mieux les maîtriser au quotidien.
Vous l’aurez compris, la boulangerie des frères Tordeux est une entité en devenir : même si l’envie des deux jeunes artisans ainsi que leur savoir-faire s’expriment bien dans leur boutique, accompagnés d’une sympathique équipe de vente, les chantiers sont nombreux pour en faire une adresse tout à fait recommandable. Leur arrivée dans le quartier est encore récente, et ces débuts sont donc prometteurs.
Infos pratiques
111 rue Caulaincourt – 75018 Paris (métro Lamarck-Caulaincourt, ligne 12) / tél : 01 46 06 75 08
ouvert tous les jours sauf mardi de 7h à 20h30.
Je trouve la baguette Caulaincourt très bonne, tout comme le pain du Nil et quelques autres.
En revanche, je suis certaine que les viennoiseries ne sont pas maison et ça, ça me met hors de moi !
Tradition et baguette moyennes.
Pâtisseries très, très classiques et approximatives.
Décevant.
Désolé de vous décevoir mais je peux vous garantir que tout est maison.
Très bon boulanger pâtissier. L’accueil est très montmartrois.. et LAURA est adorable!! Cette boulangerie a su adopter le style du village et nous l’avons adoptée aussi!! Bravo!!