Le plus difficile lorsqu’on reprend une boulangerie, ce doit certainement être de composer avec le personnel et le matériel déjà en place. Bien sûr, c’est un élément dont on a conscience avant la signature scellant la vente, mais il est difficile d’anticiper la capacité d’adaptation des humains, et leur volonté à s’ouvrir à de nouvelles méthodes de travail. Ainsi, un temps de rodage est toujours nécessaire pour parvenir à un résultat à la hauteur des attentes du nouveau propriétaire, et il est presque plus facile d’ouvrir une boutique « de zéro » quand on prend en considération ces éléments. Néanmoins, l’investissement à réaliser est bien plus important, ce qui n’est pas à la portée de tous.
Certains artisans se multiplient dans la capitale, et ce notamment au travers de reprises d’affaires, car les fonds de commerce parisiens ont une fâcheuse tendance à être onéreux, les entreprises bien implantées étant donc mieux positionnées pour obtenir les fonds nécessaires auprès des organismes financiers. Petit à petit, l’oiseau fait son nid, et on assiste à la naissance de petits ’empires’ de la boulangerie. Parmi eux, le Quartier du Pain, propriété de Frédéric Lalos et Pierre-Marie Gagneux avec plusieurs boulangeries à Paris et en banlieue. Il faut dire que l’artisan ne manque pas d’une certaine « aura » : Meilleur Ouvrier de France Boulanger, il propose ses services de conseil à des marques comme Lenôtre, mais aussi Bridor ou encore Philibert Savours… ce qui est beaucoup moins glorieux à mon sens. Ses boulangeries fournissent également de grands palaces parisiens, ce qui devrait nous assurer de la qualité de ses produits.
Je dois dire que j’ai beaucoup apprécié ses boulangeries il fut un temps, mais que j’en suis un peu revenu, notamment en apprenant que le Longuet, un pain réalisé « à partir d’un levain de froment et de sarrasin séché » incluait des produits Philibert Savours, et était d’ailleurs proposé par cette même entreprise « tout près » pour ses clients. Je ne voudrais pas faire de mauvais esprit, mais je ne peux pas dire que je trouve tout cela très « artisanal » : utiliser les levains comme des exhausteurs de goût est une démarche assez particulière…
Peu importe. Une de mes lectrices m’a récemment appris qu’une nouvelle boulangerie avait été reprise dans le 16è arrondissement par Frédéric Lalos. Je me suis donc empressé d’aller voir ce qu’il en retournait.
22 rue des Belles-Feuilles, à quelques pas des institutions de quartier que sont Carton ou Béchu, le challenge est de taille pour se faire une place, tant les habitudes sont ancrées. Cela semble toutefois bien parti : la clientèle se pressait déjà aux portes de la boulangerie ce samedi.
De l’extérieur, peu de choses laissent paraître le changement de propriétaire. La devanture affiche toujours fièrement « Au bon pain » (c’est ce que l’on espère toujours dans une boulangerie, si si), seules des affiches mettent en avant la reprise par Frédéric Lalos. Ce sont les produits qui marquent bien l’identité du boulanger, au travers des gammes que l’on peut retrouver dans l’ensemble des boulangeries Quartier du Pain.
A commencer par le pain : pains de campagne au levain, en boules et miches, ciabattas, le fameux Longuet, et les trois baguettes de l’enseigne (la parisienne, la tradition & « à l’ancienne »). Le problème, c’est avant tout l’extrême pâleur des produits proposés ici : les cuissons sont trop courtes, tout particulièrement sur les petites pièces. Ainsi, la baguette de tradition manque singulièrement d’intérêt et de saveur, la baguette à l’ancienne s’en tire mieux mais rien de bien exceptionnel. La « Parisienne », qui n’est autre que la baguette de pain courant, se négocie à 1,05€, pour un produit plus que moyen, c’est assez triste. Dire que dans certains quartiers des artisans talentueux proposent une tradition exceptionnelle pour le même tarif…
A noter également la « mise en scène » des produits plutôt médiocre, avec un éclairage peu adéquat.
Le reste des produits est de meilleure facture : viennoiseries bien réalisées (croissant de bon niveau, notamment), pâtisseries assez simples et honnêtes, gamme traiteur traditionnelle mais propre. Cela se défend bien face à l’offre développée dans le quartier.
Les jeunes demoiselles attachées au service sont sympathiques et souriantes, on sent encore quelques hésitations mais tout cela se tient bien. On notera la présence de caisses à « monnayeur automatique », ce qui devient de plus en plus automatique dans les nouvelles ouvertures.
Infos pratiques
22 rue des Belles Feuilles – 75016 Paris (métro Victor Hugo, ligne 2)
ouvert tous les jours sauf le mercredi.
Avis résumé
Pain ? Il reste encore des progrès à faire pour parvenir à un résultat convaincant. Les cuissons manquent d’aboutissement sur les petites pièces, et les baguettes font bien triste mine. Du côté des pains au levain, c’est plus honorable, quant au Longuet, l’utilisation des levains Philibert permet dans tous les cas de combler d’éventuelles lacunes. Les façonnages sont plutôt aléatoires, et là encore, les baguettes de tradition manquent d’élégance.
Accueil ? Encore des hésitations, mais on sent une volonté de bien faire et de servir le client avec soin et attention. Tout comme pour le pain, le temps permettra à l’ensemble de se roder.
Le reste ? Cette boulangerie s’en tire bien mieux du côté des viennoiseries, de bon niveau, avec un croissant d’excellente facture. Les pâtisseries reprennent les classiques de l’enseigne, avec simplicité et honnêteté. Même constat pour l’offre traiteur, qui ne présente toutefois pas un intérêt particulier. Du classique maîtrisé, que demander de plus ?
Faut-il y aller ? Attendons un peu, même si je ne doute pas que cette boulangerie trouvera son public dans un quartier très sensible aux titres et aux cols bleu-blanc-rouge. Cela ne fait pas tout, et en l’occurrence, il reste du chemin à parcourir du côté du pain. Dans tous les cas, cela sera sans doute une bonne adresse de quartier… mais quoi de plus normal pour une boulangerie Quartier du Pain.
Je n’ai pas testé leur baguette tradition, mais j’ai effectivement pu comparer la cuisson des grandes et petites pièces (baguette et ficelle à l’ancienne, la seconde était plutôt décevante).
D’accord sur la présentation, mais le changement de propriétaire vient d’être effectué, et j’espère que certains aménagements auront bientôt lieu.
Dans la série des errements de F. Lalos, on pourrait aussi citer:
-Son association avec Moulinex pour promouvoir des machines à pain, et les petits sachets de « préparation pour pain » qui vont avec (farcis de produits Philibert Savours, bien sur)
– Un deal avec Monoprix pour proposer une gamme de pains
« créés par Frédéric Lalos pour Monoprix » dans certains magasins de l’enseigne. Produits pathétiques, on dirait de l’industriel.
Bref, un boulanger certainement doué(MOF quand même…)
mais qui semble préférer faire du blé que du pain.
Ses baguettes (tradition et à l’ancienne) restent des produits que j’apprécie et achète de temps en temps.
Un boulanger qui préfère faire du blé plutôt que du pain, il fallait la trouver, je la garde, merci 😉
Il me semble etre indiqué sur l’affiche que la boutique allait etre refaite trés prochainement !!!!!!!!! j’ai personnellement gouté le longuet qui a beaucoup de saveur et ou la responsable m’a indiqué qu’il avait plus de 24 h de fermentation, j’ai plutot l’impression que nous parlons d’artisanat!!!!!!!!!!!! Je trouve la demarche de Mr Lalos assez interessante lorsqu’il dit qu’il faut aller au devant des consommateurs afin de leur parler de la boulangerie et de leurs envies.
j’y suis allé un dimanche, leur tradition était parfaite, le seul soucis à noter, plus d’un quart d’heure d’attente tellement il y avait de monde !!!!!!!!!!!!!!!
Pour info, la boutique a, en effet, était refaite par une des étoiles montantes (et pas filantes) de la scène du design d’intérieur Laura Gonzalez (qui a à son compteur la rénovation du Bus Palladium, du Régine ou encore du Schmuck, bonjour la carte de visite). Autant dire qu’il est vivement conseillé de retourner faire un tour dans la première boutique Lalos à Paris. Un flagship qui met l’univers vintage chic de Gonzalez au service des produits de Lalos. Le carrelage en damier est juste parfait ! Les produits devront alors être à la hauteur de la nouvelle boutique, ce qui devrait être possible, pour la boulangerie parisienne qui fournit le plus de restaurants étoilés.
Par ailleurs, j’ai eu la chance de rencontrer Frédéric Lalos qui bien loin de vouloir faire « plus de blé que de pain » (elle est pas mal), est un véritable passioné. Passioné qui n’hésite pas à transmettre son savoir faire, avec l’envie que l’artisanat et le goût du bon pain perdure. Certes certains procédés ou partenariats peuvent faire sourire, mais afin de se faire connaître du « grand public » et de donner un visibilité à la « marque » Lalos, il faut ce qu’il faut ! Certains investisseurs ne s’y sont pas trompés puisque les deux premiers points de vente Lalos se trouvent à Tawain et au Japon. De quoi permettre au savoir faire français de s’étendre hors de l’hexagone et de faire du reste du monde le quartier du pain !
Ping : Frédéric Lalos, Paris 16è, la boutique est devenue une… belle feuille | painrisien
bonjour
dites ,dans le figaro madame, il y a un article concernant le bio, dont les lignes concernant les recettes de la tourte auvergnate et la miche au petit épeautre.
je mange du pain pauvre en gluten qui s appel l impériale.
Etant intolérant au gluten, je souhaite savoir si dans ces recettes ces deux pains contiennent de la farine de blé ou a défaut une très faible quantité de farine de blé.
merci pour votre réponse.
gil