Dans le commerce de proximité, il y a deux ficelles pour réussir : soit vous êtes très bon, soit vous avez un emplacement. Dans le premier cas, on viendra de loin pour chercher vos produits, dans le second cas, vous obtiendrez une clientèle naturelle, de par un trafic conséquent autour de la boutique, ou bien une quasi-absence de concurrence à proximité.
Pour le couple Maillard, j’aurais tendance à penser que c’est la seconde option qui assure à leur commerce sa subsistance. En effet, leur petite boulangerie est nichée en plein Saint Germain des Prés, où l’on retrouve plus de chocolatiers, restaurants ou galeries d’arts que d’artisans boulangers. Dans ces conditions, quoi de plus providentiel pour les touristes ou les habitants/travailleurs du secteur que de trouver une boulangerie sur la rue Jacob ? Forcément, la clientèle se presse devant la boutique, particulièrement à l’heure du déjeuner, même si le flot de clients s’étend également sur le reste de la journée.
C’est assez fou comme la qualité des produits proposés par un artisan peut baisser au fil des années. Pour rappel, cette boulangerie avait obtenu un 14/20 pour son pain dans le guide des Meilleures Boulangeries de Paris publié par Michel de Rovira et Augustin Paluel-Marmont en 2005. Aujourd’hui, je ne suis pas certain que la note serait la même.
En effet, les pains proposés ne sont pas d’une qualité exemplaire comme on aurait pu l’espérer. Réalisés avec une farine fournie par la minoterie Viron, on pourrait espérer que la baguette Rétrodor soit au niveau. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Entre une mie peu alvéolée et rapidement pâteuse à la dégustation ainsi qu’un manque patent d’arôme, il n’y a pas de quoi être satisfait. Certes, sa croûte est fine, elle est peu présente en bouche et se conserve plus que moyennement. Bien sûr, elle n’est pas chère, surtout pour le quartier : seulement 1,2 euros les 300g, forcément, le rapport quantité/prix est intéressant.
Plus coûteuse, la baguette Saint-Germain, réalisée avec un peu de levain, connaît un façonnage plutôt étrange et un manque de cuisson assez évident. Rien d’intéressant du côté de cette création, de même que pour les divers pains de tradition (Mannedor, …) ou les petits pains variés (figue-châtaigne en saison, céréales, …). Pour l’ensemble des produits les cuissons ne sont pas assez abouties, les façonnages peu travaillés.
Le constat est relativement similaire du côté des viennoiseries, les croissants sont onéreux et manquent d’élégance autant que de saveur. Seules d’appétissantes brioches fourrées parviennent à relever le niveau du rayon.
Pour continuer dans le secteur sucré, les pâtisseries ne présentent pas d’intérêt particulier, assez traditionnelles et manquant de finesse. On notera toutefois le large choix de tartes à la part, qui achèveront les repas pris sur le pouce avec une relative note de légèreté et de fraicheur, même si les fruits incorporés sont loin d’être tous de saison.
L’offre traiteur propose des sandwiches réalisés à partir de baguette blanche, des « burgers maison », diverses salades ainsi que des quiches ou pizzas. Rien de bien exceptionnel (mis à part les burgers, qui ne sont pas franchement monnaie courante dans les boulangeries), mais c’est certainement l’une des seules échoppes à proposer ce type de produit à proximité immédiate, ce qui suffit à rendre l’ensemble plutôt attractif pour la clientèle.
Ce qui parvient à rendre l’ensemble plus digeste, c’est certainement le décor de la boutique, délicieusement rétro et bien inscrit dans son quartier, mêlant ancien et chic, ainsi que l’accueil, souriant et dynamique. Mme Maillard est généralement présente en boutique et assure le service en menant son personnel de vente avec un certain succès, puisque l’attente demeure modérée malgré l’affluence que connaît l’endroit à certaines heures de la journée.
Infos pratiques
42 Rue Jacob – 75006 Paris (métro Saint-Germain-des-Prés, ligne 4) / tél : 01 42 60 20 39
ouvert du lundi au vendredi de 7h à 20h.
Avis résumé
Pain ? Très décevant. L’âge d’or de cette boulangerie semble être passé, car je doute que Michel et Augustin lui auraient attribué un 14 pour sa gamme de pain comme ils l’ont fait en 2005. Aujourd’hui, la baguette Rétrodor manque vraiment de cuisson, mais aussi d’arômes et d’une mie alvéolée. L’ensemble est insipide et n’est pas agréable à la dégustation, du fait d’une mie peu alvéolée et rapidement pâteuse. Dommage que la farine de la minoterie Viron soit utilisée ainsi, car elle a déjà su me prouver qu’elle savait donner bien plus. Le constat est assez similaire du côté du reste des pains, que ce soit pour la baguette Saint-Germain, au façonnage étrange et à l’intérêt limité, le levain ne parvenant pas à relever la qualité de réalisation, ou pour les petits pains dont les prix atteignent vite des hauteurs qui ne sont pas justifiées par leur saveur.
Accueil ? Souriant, efficace, professionnel. Madame Maillard sait mener son équipe avec succès et la clientèle est plutôt bien servie dans cette boulangerie au décor très saint-germinois.
Le reste ? Pour les viennoiseries, les gourmands préféreront aller voir ailleurs, sauf peut-être pour ces gourmandes brioches fourrées. S’ils préfèrent les pâtisseries, mieux vaudra sans doute faire de même, l’ensemble demeure assez classique, sans grande finesse. A noter le large choix de tartes vendues à la part. L’offre traiteur est assez étendue, du sandwich (réalisé à partir de baguette blanche, ce qui est toujours aussi dommage, même si la tradition est ici loin d’être exceptionnelle) à la quiche en passant par les salades ou les burgers maison. Rien à signaler de ce côté là, les produits sont frais et permettent aux passants comme aux travailleurs du quartier de prendre un repas rapide sans forcément se ruiner, ce qui n’est pas gagné dans ce secteur.
Faut-il y aller ? Je ne vois pas de raison particulière de le faire, mis à part si l’on se trouve dans le secteur et que l’on a besoin de se restaurer rapidement sans pour autant vider son portefeuille, tout en évitant les produits plus industriels que peuvent proposer les supermarchés et points chauds implantés à proximité. Ce n’est en tout cas pas pour le pain que je m’y arrêterais, dommage pour une boulangerie.
encore 1000 merci pour ses critiques de pro riches d’enseignement….
et qu’ainsi vos mots guident nos pa(in)s
L’ouvrier boulanger qui était là depuis plusieurs années est parti à la mi Décembre,cela pourrait expliquer en partie ce résultat.
Ping : Joséphine passe la seconde à Saint-Germain-des-Prés, accompagnée par Benoît Castel | painrisien