Les fruits, c’est (un peu) la vie. Un concentré de saveurs, de couleurs, de fraicheur. Ils accompagnent en légèreté nos repas, nos envies… Selon les saisons, ils seront présents en quantités plus ou moins abondantes sur nos tables, et revêtiront des manteaux plus ou moins chatoyants. Leur présence demeure, toutefois. Pommes, poires, kiwis, ananas, fraises, oranges, … les choix sont nombreux et s’accordent sans difficulté avec les goûts de chacun.
Parmi toutes ces espèces et variétés, je dois confesser que j’ai un penchant naturel pour la fraise… Belle, douce, légère, je ne peux cacher ma joie quand elle revient sur les étals des maraîchers. Bien sûr, toutes ne se valent pas, et beaucoup sont malheureusement « gonflées aux hormones », cultivées hors sol et sous serre pour maximiser la productivité, mais certainement pas le goût. On commence donc la saison avec les ciflorettes et les gariguettes, pour la continuer voire la terminer avec les Mara des Bois, qui sont sans doute mes préférées.
En pâtisserie, le fruit se doit d’être mis à l’honneur, c’est à dire mis en oeuvre lorsqu’il est à pleine maturité, en saison. Ainsi, évitons les tartes aux Fraises en plein hiver, car il est aussi question de l’impact écologique de notre gourmandise : privilégions toujours un approvisionnement local, car lui seul est garant d’un minimum de maintien de l’agriculture dans nos campagnes, en plus de limiter les transports inutiles.
Ensuite, il est question de la façon d’utiliser ce fameux fruit. La plus simple et « naturelle » est bien sûr la tarte, mais nos chefs ont trouvé bien d’autres façons de mettre en oeuvre les produits dont ils disposent. Le traditionnel confit de fruit est certainement le plus commun, pouvant être utilisé par tout temps et sans contrainte particulière de saisonnalité. Cependant, il a une fâcheuse tendance à dénaturer le fruit en lui apportant des touches de sucre peu souhaitables.
Du côté de chez des Gâteaux et du Pain, dans le 14è arrondissement, Claire Damon veille à respecter le caractère saisonnier des fruits, et donc de ses pâtisseries. Ainsi, certaines ne demeurent en boutique que quelques semaines. Si j’apprécie autant les créations de cette pâtissière, c’est aussi sans doute car elle partage mon amour pour la Fraise… preuve en est de la création que je souhaitais partager aujourd’hui avec vous, le « J’adore la Fraise ». Adam en avait parlé il y a presque un an sur son excellent blog Paris Pâtisseries et je partage son enthousiasme : cet entremet est une véritable réussite. Cette année, la présentation a un peu évolué, et comme il avait pu l’indiquer, l’enrobage de chocolat blanc utilisé initialement n’est plus qu’un souvenir.
Mlle Damon n’a pas pris sa plume comme je le fais chaque jour pour chanter une ôde à la Fraise, mais a utilisé tout son talent pour mettre en avant ce fruit. Ainsi, il est décliné en diverses textures et formes, nous le faisant découvrir et redécouvrir de façons différentes, mais toujours respectueuses du produit. Biscuit moelleux aux amandes et fraises cuites, crème onctueuse à la fraise, compotée acidulée de fraise, biscuit imbibé de jus de fraise, mousse de pulpe de fraise. Le jeu serait de compter dans cette phrase le nombre d’occurrences au mot fraise, mais passons plutôt à la dégustation.
On commence tout d’abord par entamer ce délicat manteau moelleux que constitue le biscuit à la fraise entourant le gâteau, pour découvrir l’intérieur et les différentes textures. La mousse, son côté doux et presque moelleux, enveloppe la compotée où le sucre paraît avoir été oublié, mais également cette fameuse crème dont les notes lactée et onctueuses subliment la douceur du fruit. La base de biscuit moelleux, avec son parfum d’amande bien prononcé, achève de faire de l’ensemble une expérience gourmande inoubliable. En effet, l’amande relève le tout avec une belle douceur. Les fraises fraiches, en décor, sont bien parfumées et apportent un peu de consistance à l’ensemble. Le petit cube de brioche, en décor, amuse autant qu’il orne. On pourrait rechercher du croquant, du craquant, d’autres textures, mais non, ce ne serait pas respecter cet univers infiniment doux et savoureux qu’est celui de ce rouge ovoïde…
Lorsque l’on termine cette pâtisserie, on ne peut que saluer le travail réalisé ici, tant ce produit est vecteur d’émotions et de sensations. Son nom l’exprime bien, d’ailleurs. Peu de chefs parviennent à réaliser un tel travail d’équilibre et de cohérence, et c’est ce que je souhaitais souligner ici. Bien sûr, on pourra toujours s’étendre sur le prix d’une telle pâtisserie, mais au vu du travail nécessaire pour assembler ces différents éléments de façon harmonieuse et de la qualité des fruits utilisés, je serais presque tenté de trouver cela très honnête… un plaisir d’exception.
J’adore la Fraise, des Gâteaux et du Pain – Paris 15è, 7€ la portion individuelle – disponible également en entremet à partager.