Cela ne vous aura sans doute pas échappé, la période est marquée par l’actualité politique, avec des enjeux qui marqueront sans doute notre pays pour les cinq années à venir. Ainsi, tout devient politique, on se lève politique, on marche politique, on mange politique… les hommes, les femmes, autant que les partis s’opposent et s’indisposent. Cette campagne aura mis en exergue des sentiments peu reluisants, et même si nous arrivons à sa fin et qu’ils finiront par être rangés à nouveau dans les placards, ils ne disparaîtront pas pour autant. Dans tous les cas, on pourrait essayer de mettre de la politique dans le sucré, dans la pâtisserie. Pas sûr que la recette soit très harmonieuse en définitive, mais soit.
Du côté de chez Angelina, sur la rue de Rivoli mais aussi dans les nombreuses autres adresses que compte à présent l' »enseigne » portée par le groupe Bertrand, nous sommes également à l’aube d’un changement de mandat. La carte Printemps / Eté arrivera la semaine prochaine, avec quelques nouveautés (une religieuse à l’abricot et un éclair à la fraise, notamment), ce qui marquera la fin du séjour dans les prestigieuses vitrines de la « boutique des Anges » pour un certain nombre de créations. Ainsi, il se pourrait bien que deux Carla aient à quitter leurs appartements… qui ne sont d’ailleurs pas si éloignés les uns des autres.
Les deux sont douces, attirantes selon les goûts, mais celle que j’ai pu déguster est plus accessible que la seconde, bien installée et protégée au sein du Palais de l’Elysée. Au programme de la dégustation, du marron, de la myrtille, mais aussi du chocolat blanc, du cream-cheese et de la pâte sablée. Une composition complexe pour une pâtisserie qui a tout d’une grande dame, malgré une taille assez mesurée. Pensez-vous, il faut bien que Carla puisse manger Carla sans trop de complexes… Histoire de permette une savoureuse mise en abîme.
Trêve de jeux de mots, parlons plutôt du goût. Sébastien Bauer, le chef pâtissier d’Angelina, semble être un grand amoureux du cheesecake, car sa carte actuelle ne compte pas moins de trois pâtisseries en contenant. Ici, il apporte une note de rondeur en contraste avec le côté légèrement acidulé du confit de myrtille, par ailleurs bien parfumé et peu sucré. La saveur particulière du cream-cheese est bien marquée, et s’associe bien avec la douceur du marron. Ce dernier est représenté au travers d’une mousse légère et onctueuse. La base de sablé exprime un croquant et un arôme de beurre agréables, sans pour autant prendre le pas sur le reste des saveurs. Ce qui est plus regrettable, c’est l’utilisation d’une coque en chocolat blanc pour envelopper l’ensemble, car même si cela complète le jeu de texture par un apport de craquant, son côté sucré et assez gras a tendance à couvrir les autres éléments de la pâtisserie, plutôt délicats. De plus, elle rend l’ensemble plutôt difficile à déguster, en résistant sous l' »assaut » paisible des couverts, ce qui est lié à son épaisseur assez importante. Ainsi, il est presque préférable de la déguster à part, de la retirer puis de l’associer ou de la dissocier au fil des bouchées (elle est plutôt agréable à déguster avec un peu du confit de myrtilles, par exemple).
En définitive, le contraste entre les différentes textures et intensités, entre le doux et l’acidulé, confèrent à cette pâtisserie un caractère plutôt intéressant et subtil, que le chocolat blanc vient malheureusement malmener. En décor, la guimauve n’apporte qu’une note sucrée, dommage.
Dernière chose, l’inflation qu’a connu cette pâtisserie au fil des mois est assez remarquable, et le prix auquel elle est aujourd’hui proposée – 6,5€ – est très élevé, d’autant plus quand on tient compte de la taille de la portion. Malheureusement, c’est un mal assez commun dans notre belle capitale.
Il ne vous reste plus que quelques jours pour vous laisser tenter par cette demoiselle plutôt réussie, même si quelques points seraient à parfaire. Si vous vous décidez à épouser cette jeune fille par votre gourmandise, prenez bien soin d’essayer d’obtenir une pâtisserie dont la coque ne soit pas cassée… c’est malheureusement monnaie courante chez Angelina, chez qui le soin des produits ne semble pas vraiment la priorité. Il serait bien dommage et anormal de déguster un gâteau endommagé.
Pâtisserie Carla, Angelina – Paris 1er (mais également dans l’ensemble des salons de thé Angelina à Paris et en Banlieue), vendu en portion individuelle, 6,5€.