« Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir »… une fois n’est pas coutume, je débute mon billet en paraphrasant l’un de nos plus grands poètes contemporains (sic). Je dois dire que c’est un peu ce que j’ai pensé en chutant de vélo ce samedi matin, il faut dire que cela aurait été un peu plus compliqué de courir le pain sans jambes. Fort heureusement, tout n’était pas si noir, puisque quelques points auront suffi pour recoudre un menton ouvert.
Pour autant, cette fameuse couleur s’est invitée dans les vitrines de nos boulangeries ces dernières années, et ce n’est pas lié à des cuissons qui seraient trop poussées. Ainsi, chez des artisans comme Gontran Cherrier, on peut naviguer dans un noir… d’encre, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit : les pains sont enrichis d’encre de seiche. Le parfum marin que cela confère au produit n’est pas du goût de tout le monde, et il existe d’autres moyens de parvenir à ce résultat. Certains incorporent un mélange d’épices développé par Thiercelin (le Curry Black Pearl, dans des Buns chez Graines de Créateurs à Neuilly), tandis que d’autres cherchent plus loin…
… au point de sérieusement charbonner. Il faut dire que Jean-Paul Mathon ne ménage pas ses efforts au fournil, et que l’expression lui conviendrait tout à fait. Cependant, ce n’est pas de lui qu’il s’agit mais d’une de ses dernières créations. Toujours très inventif, il a eu l’idée insérer dans sa pâte à pain du charbon de bambou.
Le résultat est surprenant, aussi bien visuellement que gustativement. On obtient une mie d’un noir profond, avec de profondes et subtiles notes ambrées, qui nous emmènent sur un terrain que l’on connaît rarement en boulangerie.
Je dois dire que je ne suis pas un grand adepte des pains farinés, mais le contraste noir/blanc est particulièrement réussi.
L’artisan ne s’est pas arrêté là : en ajoutant de généreuses pépites de chocolat blanc, il rend l’expérience encore plus intéresse, puisque l’on navigue entre la douceur et les saveurs sucrées avant de replonger dans cet univers plus « adulte ». Saupoudrées avec gourmandise sur la croûte, les graines de sésame achèvent ce tableau par leur craquant et leur parfum de grillé, de torréfaction.
Au hasard du pétrissage et de la cuisson, le chocolat blanc se retrouve à la surface du pain et caramélise, ce qui enrichit encore la palette des arômes développés par ce pain.
Comme d’habitude à la Gambette à Pain, la mie est fondante, très hydratée et rend la dégustation particulièrement agréable. On commence avec un petit morceau, une tranche, puis une seconde, une troisième, … avec cette insatiable envie de comprendre cette expérience saisissante, mais aussi de céder à la tentation de la gourmandise.
Une fois encore, Jean-Paul Mathon nous propose un produit atypique, exprimant pleinement sa signature d’artisan, sa curiosité et son ouverture sur les cultures du monde. Merci à lui !
Pain au Charbon de Bambou et Chocolat Blanc, La Gambette à Pain (Paris 20è), vendu à la pièce uniquement le mardi, 2,90€ les 250g.
Oh, Rémi… Que s’est-il passé ? Pas trop de frayeur ni de séquelles ?
Ce billet est un bel hommage ! Il pique la curiosité et donne envie de découvrir ce pain illico. Dommage que nous soyons vendredi 🙂
Merci à toi aussi !
Je me suis dit que la boulangerie n’était vraiment pas un métier pour moi, du coup j’ai tenté une reconversion accélérée vers le domaine des cascades et acrobaties… non, je plaisante. Beaucoup de fatigue, un poteau vu trop tard qui m’a déstabilisé, j’ai fini sur le bas côté. Je m’en suis bien sorti. Je continue à faire du vélo, je ne dois donc pas être trop choqué 😉