Les herbes aromatiques ont le fabuleux « pouvoir » de relever nos plats, de donner aux aliments d’autres dimensions et de nous permettre de créer des expériences de dégustation sans cesse différentes, en fonction de nos humeurs et envies. Cependant, il faut savoir rester prudent quant à leur utilisation, et toujours garder à l’esprit que l’on cherche à sublimer, mais certainement pas à écraser les mets.
Pour le pain, c’est exactement la même chose. Nos artisans boulangers ne manquent pas d’idées pour agrémenter les pâtes d’ingrédients divers et variés, que ce soit des céréales, fruits secs, épices, fleurs, gourmandises variées… Le problème de ces créations, c’est que l’on perd souvent toute notion d’équilibre, et que l’on quitte presque le domaine du pain pour se retrouver dans tout à fait autre chose. Non pas que le fait d’utiliser la mie et les croûtes comme des « supports de goûts » ait quoi que ce soit de choquant ou dérangeant, mais encore faudrait-il que l’ensemble soit harmonieux.
Chez Arnaud Delmontel, à l’image de plusieurs maisons parisiennes, on propose des pains variés selon les mois et les saisons, destinés à accompagner les plats consommés à ces différentes périodes de l’année. Pain Pruneaux-Lardons, Cumin-Mimolette, Focaccia au romarin, … quelques exemples des créations développées les années passées.
En ce moment, la tendance est à la fraicheur avec un pain à la Menthe, succédant à une déclinaison à l’abricot les deux mois passés. L’idée n’est pas mauvaise, d’ailleurs, elle rejoint un peu celle du pain Marocain proposé à la Grande Epicerie. Seulement, dans le cas présent, la menthe est présente de façon « physique » dans le pain, au travers d’éclats de feuilles dispersés dans la mie.
Bien sûr, le goût de la plante se fait beaucoup plus présent… pour l’être beaucoup trop, en définitive. On finit par avoir la nette impression de manger un Malabar menthe, tant le parfum est puissant. Difficile, dès lors, de lui trouver une quelconque association avec des mets ou plats, au risque de les couvrir littéralement par le goût de ce pain. Peut-être trouvera-t-il sa place aux côtés d’une salade tonique, à l’image de la roquette, à la limite. Les possibilités demeurent limitées, et c’est bien là une preuve de l’erreur commise ici : le pain doit savoir rester « à sa place » à table.
Néanmoins, il ne faudrait pas pour autant oublier de se pencher sur la qualité de réalisation de ce produit. En la matière, peu de choses à redire, ce pain est assez bien réalisé. Très moelleux, il fond en bouche, ce qui est plutôt bien vu car cela contraste avec la « force » de la menthe et parvient à procurer une certaine impression de douceur, grâce à sa texture. La croûte est absente à la dégustation, étant donné que cette dernière est très fine et n’apporte aucun craquant. Côté conservation, rien de particulier à dire, ce produit sèche légèrement mais demeure tout à fait agréable le lendemain de son achat, sans pour autant que son goût évolue.
Ce pain à la Menthe est, en définitive, beaucoup trop « frais ». Cela nous contraint presque à le déguster seul, ce qui aurait presque pour effet de nous donner l’impression d’avaler… un chewing-gum mentholé, la texture en moins. L’utilisation d’une infusion de plante aurait certainement produit un résultat beaucoup plus subtil et moins sauvage. L’idée de proposer des pains rafraîchissants est plutôt intéressante, encore faut-il parvenir à l’accompagner d’une réalisation sans faute, ce qui n’est pas le cas ici. On appréciera tout de même sa texture moelleuse et sa conservation de bon niveau, même si son prix aura de quoi faire bondir : 3 euros 10 pour 330g théoriques, au vu de la qualité obtenue… mieux vaut passer son tour.
Pain à la menthe, Arnaud Delmontel – Paris 9è, vendu à la pièce, 3,10€ les 330g, en juin et juillet dans les trois boutiques de la maison Delmontel (rue des Martyrs, rue Damrémont & rue de Lévis)