C’est curieux et passionnant, la vie. On a beau la retourner dans tous les sens, on s’en saisit jamais tout à fait le fil et là où elle nous entraine. Alors on continue à avancer, comme pour chercher à comprendre. Plutôt que s’obstiner à poursuivre à tout prix des buts, des objectifs, essayons de profiter du voyage, de le rendre le plus agréable possible… pour nous mais aussi et surtout pour les autres.

4 ans

4 ans déjà. Je ne pensais pas tenir la course de fond que cela représente – bien sûr, j’ai fait des pauses dans l’écriture, mais je n’ai jamais arrêté de suivre avec intérêt le milieu de la boulangerie artisanale. Entre temps, j’ai appris à courir tout court, sans doute pour prendre un peu de distance et me détacher de ces ambiances parfois pesantes, de ces retours souvent violents.

Le painrisien est un peu devenu moi, autant que je suis devenu quelqu’un d’autre. Forcément, ma vision des choses et mon ressenti en sont affectés et il faudra que je remette mes premiers articles, mes premières appréciations, en phase avec le goût du jour… mais aussi l’état de la production que réalisent les artisans que j’ai visités : entre les mutations de fonds, le turn-over du personnel, les changements dans les matières premières, … il y a de nombreuses raisons d’obtenir un résultat différent. Ce sera un de mes chantiers pour les mois à venir.

Autre travail à mener, la refonte de l’outil et du painrisien pour aboutir à un site mieux centré sur ce qui fait la singularité et la beauté de ce métier : l’humain. C’est par la sensibilité des artisans que les produits se mettent en place et évoluent. Je voudrais parvenir à mieux le retranscrire ici.
Je vais également achever ma formation au sein de l’EBP et obtenir, je l’espère, mon CAP de boulanger. J’aurai l’occasion de revenir plus longuement sur cette expérience, mais malgré ce que certains pourraient croire, cela n’a pas fait grandir en moi la conviction d’être un boulanger ni de quelconques prétentions. Ma seule préoccupation est de participer à l’évolution du secteur, d’être utile, et d’éviter que l’on se fourvoie dans des écueils regrettables.

Bien sûr, je tenais à vous remercier pour votre lectorat fidèle – vous êtes plus de 3000 à suivre le painrisien sur Facebook ! -, vos retours : c’est vous qui faites vivre cet espace libre, en marge des conflits d’intérêt que connaît la profession.

Les grandes maisons sont de plus en plus utilisées pour garnir des parcours, pour donner de la crédibilité à une expérience professionnelle et à des compétences qui restent parfois bien fictives. Une ligne sur un CV ne suffit pas à décrire le travail que l’on a réalisé au sein d’une entreprise, ni ce que l’on en a retiré. Après tout, peu importe. Si tout le monde y trouve son compte, c’est que le système doit bien fonctionner ainsi.

Bien sûr, certains peuvent justifier de véritables qualités professionnelles en dehors de quelques prétentions liées à des noms prestigieux. C’est précisément le cas de Sébastien Bruno et Erwan Blanche. Ces deux anciens de chez Ladurée ont repris ensemble la boulangerie Charlot, au 20 rue Jean-Pierre Timbaud (Paris 11è), dans le courant de l’été dernier. Le nom de leur entreprise ? Utopie. Pourtant, cette aventure est bien réelle et nous propose de sérieuses nourritures terrestres.

Boulangerie Utopie, Paris 11è

Il fallait du courage pour reprendre cette affaire sur le déclin, aussi bien en terme de produit que de boutique. Cette dernière affichait avec une certaine fierté son rattachement au groupement Banette… ce n’est plus le cas aujourd’hui. Après quelques bons coups de peinture à l’intérieur et à l’extérieur, le commerce est reparti sur de nouvelles bases. Cela n’est que la partie visible du travail à mener : le ménage a continué au sein du laboratoire, et se poursuit aujourd’hui. Changer les méthodes de travail, développer de nouveaux produits… autant de tâches qui prennent du temps et de l’énergie.

Viennoiseries, Boulangerie Utopie, Paris 11è

Néanmoins, on peut aujourd’hui dire que cette Utopie prend forme. A commencer par le travail mené pour développer une gamme de pains identitaire et qualitative. Ici, le travail sur levain naturel a été érigé en signature et se retrouve sur tous les pains, y compris la baguette de Tradition, même si je ne suis pas forcément un grand adepte de ce choix.
La véritable « star » de la gamme se nomme l’Authentic : de grosses pièces, relativement plates, qui laissent pleinement développer les arômes liés à la fermentation. Nature, aux noix ou au muesli, chacun peut choisir selon ses goûts… et ses envies, puisque la taille du morceau reste libre.
On trouve également une tourte de Seigle auvergnate, quelques propositions gourmandes (flûtes garnies, focaccia, …) ou aux graines, ainsi qu’un pain « à base de farines sans gluten » (farine de riz et de sarrasin).
La courbe de progression engagée ces derniers mois est plus qu’encourageante et laisse présager de belles choses pour l’avenir. C’est un fait à saluer tout particulièrement, d’autant plus quand on sait la culture pâtissière initiale des deux associés.

Pâtisseries, Boulangerie Utopie, Paris 11è

Justement, revenons-y, à ce goût du sucré. Il s’exprime très bien en vitrine, à commencer par des viennoiseries de qualité très accessibles. On commence avec le croissant tarifé seulement 1 euro pour continuer sur les brioches (avec une gamme étendue le week-end) ou encore les gâteaux de voyage (madeleines moelleuses, financiers, moelleux chocolat, cookie ou encore cakes chocolat et citron…). Les pâtisseries se déclinent sur le registre des tartes aux fruits et éclairs classiques mais néanmoins soignés, ainsi que des créations comme un savoureux cheesecake thé vert-framboises, des entremets chocolat au lait-noisettes ou blanc manger-fruits rouges, … le choix varie selon les saisons et l’inspiration, c’est frais, gourmand et accessible, que demander de plus ?

Traiteur, Boulangerie Utopie, Paris 11è

La même application se retrouve côté traiteur avec une gamme résolument contemporaine, où les sandwiches bien calibrés côtoient les burgers au saumon, les quiches, … sans jamais dépasser le domaine boulanger.

Le service achève de nous laisser une impression agréable, avec un personnel impliqué et dynamique, accompagnés de façon régulière par les tenanciers du lieu qui prennent plaisir à partager leurs produits et leur univers. On peut prolonger l’expérience sur les mange-debout, avec une boisson chaude. Au fond de la boutique, le fournil ouvert créé le spectacle et rassure la clientèle sur l’origine artisanale des produits. Cela participe à créer une certaine fluidité entre les espaces de vente et de production, pour une entreprise cohérente et efficace.

Infos pratiques

20 rue Jean-Pierre Timbaud – 75011 Paris (métro Oberkampf, lignes 5 et 9) / tél : 09 82 50 74 48
ouvert du mardi au dimanche de 7h à 20h.

Avis résumé

Pain ? Le travail réalisé ici pour développer une gamme avec une identité propre et des « signatures » est à saluer, même si cela manque encore parfois de régularité. Le levain et ses notes acidulées se retrouve sur l’ensemble des produits, un peu trop à mon goût sur la baguette de Tradition. On retiendra surtout l’Authentic, ce pain façonné en de grosses pièces et vendu au poids, ainsi que ses déclinaisons aux noix ou au muesli. Les plus gourmands apprécieront également les focaccia et pains garnis, tandis que les puristes se tourneront vers les tourtes de Seigle auvergnates.
Accueil ? Sympathique et dynamique, il correspond bien au lieu et à son atmosphère. Les deux associés y participent de façon régulière et partagent ainsi leur… utopie gourmande avec la clientèle.
Le reste ? L’identité pâtissière de Sébastien Bruno et Erwan Blanche transparaît forcément dans leurs viennoiseries et gâteaux, et il serait bien malvenu de s’en plaindre : ils nous proposent en effet des gourmandises de très bonne facture, avec des tarifs accessibles. Que ce soit pour un croissant (1€), des madeleines, une brioche, un cake, une tarte aux fruits, un entremets… difficile de mettre en défaut les produits proposés ici. Même constat pour le traiteur, avec des propositions soignées (sandwiches, burgers, quiches…), fraiches et très contemporaines.

Faut-il y aller ? Ce n’est pas tous les jours que l’on a l’occasion de participer à une Utopie…! Quand celle-ci se fait concrète et gourmande, il n’y a plus à hésiter, et c’est avec plaisir que l’on se rend ici pour découvrir les produits des deux associés. Le chemin parcouru en quelques mois est impressionnant, et cette affaire sur le déclin a repris de vives couleurs.

« Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir »… une fois n’est pas coutume, je débute mon billet en paraphrasant l’un de nos plus grands poètes contemporains (sic). Je dois dire que c’est un peu ce que j’ai pensé en chutant de vélo ce samedi matin, il faut dire que cela aurait été un peu plus compliqué de courir le pain sans jambes. Fort heureusement, tout n’était pas si noir, puisque quelques points auront suffi pour recoudre un menton ouvert.

Pour autant, cette fameuse couleur s’est invitée dans les vitrines de nos boulangeries ces dernières années, et ce n’est pas lié à des cuissons qui seraient trop poussées. Ainsi, chez des artisans comme Gontran Cherrier, on peut naviguer dans un noir… d’encre, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit : les pains sont enrichis d’encre de seiche. Le parfum marin que cela confère au produit n’est pas du goût de tout le monde, et il existe d’autres moyens de parvenir à ce résultat. Certains incorporent un mélange d’épices développé par Thiercelin (le Curry Black Pearl, dans des Buns chez Graines de Créateurs à Neuilly), tandis que d’autres cherchent plus loin…

Pain au Charbon de Bambou et Chocolat Blanc, La Gambette à Pain (Paris 20è)

… au point de sérieusement charbonner. Il faut dire que Jean-Paul Mathon ne ménage pas ses efforts au fournil, et que l’expression lui conviendrait tout à fait. Cependant, ce n’est pas de lui qu’il s’agit mais d’une de ses dernières créations. Toujours très inventif, il a eu l’idée insérer dans sa pâte à pain du charbon de bambou.
Le résultat est surprenant, aussi bien visuellement que gustativement. On obtient une mie d’un noir profond, avec de profondes et subtiles notes ambrées, qui nous emmènent sur un terrain que l’on connaît rarement en boulangerie.
Je dois dire que je ne suis pas un grand adepte des pains farinés, mais le contraste noir/blanc est particulièrement réussi.
L’artisan ne s’est pas arrêté là : en ajoutant de généreuses pépites de chocolat blanc, il rend l’expérience encore plus intéresse, puisque l’on navigue entre la douceur et les saveurs sucrées avant de replonger dans cet univers plus « adulte ». Saupoudrées avec gourmandise sur la croûte, les graines de sésame achèvent ce tableau par leur craquant et leur parfum de grillé, de torréfaction.
Au hasard du pétrissage et de la cuisson, le chocolat blanc se retrouve à la surface du pain et caramélise, ce qui enrichit encore la palette des arômes développés par ce pain.

Vue Tranchée, Pain au Charbon de Bambou et Chocolat Blanc, La Gambette à Pain (Paris 20è)

Comme d’habitude à la Gambette à Pain, la mie est fondante, très hydratée et rend la dégustation particulièrement agréable. On commence avec un petit morceau, une tranche, puis une seconde, une troisième, … avec cette insatiable envie de comprendre cette expérience saisissante, mais aussi de céder à la tentation de la gourmandise.
Une fois encore, Jean-Paul Mathon nous propose un produit atypique, exprimant pleinement sa signature d’artisan, sa curiosité et son ouverture sur les cultures du monde. Merci à lui !

Pain au Charbon de Bambou et Chocolat Blanc, La Gambette à Pain (Paris 20è), vendu à la pièce uniquement le mardi, 2,90€ les 250g.

Certains entrepreneurs arrivent avec beaucoup de prétention dans le métier de la boulangerie, alors que l’humilité est sans doute la meilleure des attitudes à adopter. Fort heureusement, la vie est parfois bien faite et ils se font alors rattraper par la réalité. Bien sûr, la casse qui en découle n’est jamais souhaitable, mais c’est le prix à payer pour que le secteur ne soit pas trop parasité par de tels individus.

Souvenez-vous, je vous avais dit beaucoup de bien de l’enseigne Bon’heur de Pains, qui avait ouvert deux succursales à Paris. Avenue Bosquet, en lieu et place de Pain d’Epis, mais aussi rue Réaumur, dans le 3è arrondissement. Ce dernier emplacement n’attendait que d’être valorisé à sa juste mesure : le quartier est très vivant, et le fait d’être placé en sortie de métro est toujours un point positif. De plus, la concurrence directe est d’un niveau plutôt faible, et ce n’est pas l’arrivée de Charles-Didier Tchouassi au 63 rue de Turbigo qui a vraiment changé les choses. La Jeune Rue aurait du nous abreuver en bon pain à quelques pas, mais le destin en a décidé autrement.

Ernest & Valentin, Paris 3è

La chute de Bon’heur de Pains a été aussi rapide que déplorable : entre les nombreux impayés, les expulsions et les salariés laissés sur le carreau, on se dit que l’on vit dans une époque formidable… Les frères Lafond ont donc une belle carte à jouer au 42 rue Réaumur. En effet, après la reprise de l’affaire Dias Gil rue de Charenton en juillet 2013, ils doublent la mise en reprenant cette nouvelle affaire.
Depuis le début de l’année, c’est ainsi l’enseigne Ernest & Valentin qui occupe la devanture de l’établissement et met en avant les engagements de l’entreprise : viennoiserie maison, travail sur levain naturel à partir de farines Biologiques ou Label Rouge (livrées par les Moulins Foricher)… autant d’éléments qui montrent que ces jeunes entrepreneurs ont bien intégré le fait que leur succès passerait par la qualité.

Mur à pains, Ernest & Valentin, Paris 3è

Le travail à mener ici sera de longue haleine : en production, il faudra peu à peu gommer les mauvaises habitudes et stabiliser le fonctionnement du laboratoire. Un challenge qui ne doit pas rebuter ces deux reconvertis, issus du secteur du design et de l’ameublement. La preuve : le résultat est déjà plutôt convaincant.
On saluera tout d’abord l’effort fait sur la baguette de Tradition (la « Valentine »), tarifée 1 euro seulement. Cette dernière présente un caractère marqué, avec de vives notes de levain. Elle est accompagnée par de grosses pièces vendues à la coupe, ainsi que l’Ernestine, une baguette bise. Bien sûr, il y a du chemin à parcourir sur la régularité.

Au premier plan, le fameux flan à l'ancienne et sa texture très crémeuse.

Au premier plan, le fameux flan à l’ancienne et sa texture très crémeuse.

Pour le reste, on retrouve les gammes déjà développées dans le 12è arrondissement. Flan à l’ancienne, déclinaisons autour de la pâte à choux, Pastéis de Nata, quiches, sandwiches variés, salades… le tout dans un registre simple et boulanger, un bon point.

Pâtisseries, Ernest & Valentin, Paris 3è

Voilà donc une affaire que l’on suivra avec… bonheur, et qui, je l’espère, redonnera ses lettres de noblesse aux Arts et Métiers du pain dans ce quartier.

Infos pratiques

42 rue Réaumur – 75003 Paris (métro Arts et Métiers, lignes 3 et 11)
ouvert du lundi au samedi.

Paris est riche en alignements, d’un goût parfois douteux. Avenue de Flandre, ce sont ainsi des boulangeries plutôt médiocres qui se suivent et finissent par se ressembler. Le quartier serait-il donc condamné à consommer du pain de piètre qualité ? Il ne faut pas voir cela comme une fatalité, et même si les artisans les plus talentueux auront tendance à s’installer dans des zones plus « en vue », avec une population au pouvoir d’achat plus élevé, d’autres font honneur à leur vocation d’artisan boulanger, à savoir de proposer un plaisir accessible à chacun, au quotidien.

La devanture, Boulangerie Pauline, Paris 19è

C’est précisément le cas du couple Arrigault. On les connaissait précédemment à Saint-Mandé, les voici à présent dans le 19è arrondissement. La boulangerie Pauline a ainsi ouvert ses portes début octobre 2014, au 36 rue de Joinville, dans le 19è arrondissement.
Ces lieux ont une histoire, puisque c’est ici que Jacques Mabille – ex-président de la Chambre professionnelle des artisans boulangers-pâtissiers de Paris, Hauts-de- Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne – officiait il fût un temps. L’affaire est restée fermée longtemps, et d’importants travaux ont été réalisés pour aboutir à sa réouverture.

Les pâtisseries, Boulangerie Pauline, Paris 19è

Le nom de la boulangerie n’a pas été choisi par hasard, et sonne comme un bel hommage à Pauline Arrigault. Avons-nous des raisons de tomber sous le charme de la douce et des produits proposés ici ? En tout cas, son compagnon Anthony et son équipe font tout pour. Dans le laboratoire, visible depuis l’espace de vente, tout le monde s’affaire pour proposer des gammes particulièrement étendues.

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Il faut dire que les vitrines doivent être remplies pour satisfaire la clientèle particulièrement nombreuse qui se presse ici les jeudis et dimanches : le quartier accueille en effet un marché très animé, et la boulangerie devient alors un lieu de passage obligé.

Pains, Boulangerie Pauline, Paris 19è

Côté pains, les déclinaisons gourmandes ne manquent pas, avec un large éventail de propositions autour des fruits secs (grosses pièces à la coupe, bâtards aux noix, aux figues …), de petits pains fourrés salés ou sucrés, et des références mises au point par les Moulins Bourgeois. Baltik, El Maïs, autant de noms qui se rappèleront aux souvenirs des connaisseurs. Pour rester sur les fondamentaux, on trouve également une baguette de Tradition (1,10€ les 250g) aux douces notes de froment, ou des tourtes de Meule au caractère rustique très agréable. Globalement, les produits sont soignés, autant au niveau des cuissons que des façonnages, pour des prix tout à fait mesurés.

Viennoiseries & brioches, Boulangerie Pauline, Paris 19è

Les viennoiseries ne sont pas en reste : l’artisan maîtrise très bien le feuilletage et nous propose des gourmandises accessibles et savoureuses, avec notamment un croissant de très bonne facture pour seulement 1 euro. La belle gamme de brioches est également à saluer, qu’elles soient feuilletées, tressées, aux pralines, … voilà qui devrait illuminer quelques petit-déjeuners.

Viennoiseries, Boulangerie Pauline, Paris 19è
Je suis particulièrement attaché aux petits gâteaux de voyage que sont les financiers, madeleines et autres moelleux. Chez Pauline, ce segment n’est pas négligé et bénéficie d’une place de choix, avec notamment le « Duo » et ses éclats d’amandes.
Pour rester dans le domaine sucré, la pâtisserie ne manque pas d’idée et de volonté de bien faire, mais cela manque parfois de finesse et de soin dans l’exécution. Il n’est pas toujours facile d’en faire beaucoup et de bien faire… mais je ne doute pas que cela viendra avec le temps.

La vitrine pâtisserie et le fournil visible en fond de boutique

La vitrine pâtisserie et le fournil visible en fond de boutique

En semaine, les sandwiches, plats chauds, soupes… constituent une offre tout à fait sérieuse et qualitative, en alternative aux nombreuses propositions de restauration rapide développées dans ce quartier.

Infos pratiques

36, rue de Joinville – 75019 Paris (métro Crimée, ligne 7) / tél : 01 40 05 06 60
ouvert du mercredi au dimanche de 7h à 20h.

La vitrine pâtisserie et le fournil visible en fond de boutique

La vitrine pâtisserie et le fournil visible en fond de boutique

Avis résumé

Pain ? Le couple Arrigault est resté fidèle aux Moulins Bourgeois, dont ils étaient locataires-gérants au sein de leur précédente affaire de Saint-Mandé… et cela semble leur réussir, puisque la gamme de pains proposée ici est tout à fait digne d’intérêt. La baguette de Tradition développe un beau parfum de froment, tout comme la tourte de Meule séduit par ses notes rustiques. Les amateurs de propositions gourmandes ne seront pas en reste, avec des déclinaisons aux ingrédients variées (noix, figues, chocolat, petits pains fourrés…). Les cuissons sont généralement bien menées, et les façonnages soignés.
Accueil ? Dynamique, souriant et efficace, il contribue à mettre à l’aise la clientèle dans ce lieu élégant et moderne, où les éclairages mettent bien en valeur les produits. Pauline Arrigault mène son équipe avec beaucoup de professionnalisme et de rigueur.
Le reste ? Les viennoiseries et brioches sont particulièrement réussies, avec un croissant généreux et accessible (1 euro), sans pour autant occulter les nombreuses propositions présentées en vitrine. Oranais, escargots, brioches feuilletées, couronnes, tresses, … rien ne manque. En pâtisserie, la créativité de l’équipe ne peut qu’être saluée même si les finitions sont encore un peu aléatoires.
Au rayon salé, la gamme est tout aussi variée, avec des sandwiches classiques et plus originaux (saumon, poulet curry…), ainsi que des plats, salades et soupes.

Faut-il y aller ? Pauline apporte un vrai renouveau dans l’offre boulangère de ce quartier, autant sur le produit, avec des gammes entièrement réalisées maison à partir de produits de qualité, que sur la boutique en elle-même. Lumineuse, moderne et bien tenue, elle se démarque nettement de la plupart des affaires sur le déclin du 19è arrondissement et notamment de l’avenue de Flandre. On appréciera d’autant plus l’ensemble qu’il est tenu par un jeune couple dynamique, entouré d’une équipe engagée dans une belle dynamique. Cela fait plaisir de voir de telles ouvertures, qui contribuent à élever le niveau en dehors des quartiers déjà bien pourvus en adresses recommandables.

Nous sommes parfois bien incertains vis à vis du devenir de certaines enseignes : fermera, fermera pas, par quoi seront-elles remplacées, … les baux commerciaux ne permettent pas de tout faire et les boulangeries ont tendance à rester des boulangeries malgré les changements successifs de propriétaire.

Rue Montorgueil, le sort du Boulanger de Monge fût pendant plusieurs mois l’objet de rumeurs variées : alors que l’enseigne changeait de mains, on s’interrogeait sur la volonté des nouveaux gérants de conserver cette boutique qui avait fini par être tout à fait moribonde. Alors que ces derniers avaient un temps affirmé leur volonté de rester présents dans cette voie piétonne, le magasin avait discrètement fermé « pour travaux » en juillet dernier.

L'état actuel du chantier de la boutique Tartin'Art, 53 rue Montorgueil

L’état actuel du chantier de la boutique Tartin’Art, 53 rue Montorgueil

En réalité, les travaux n’ont pas débuté avant les premières semaines de 2015, et ce n’était pas dans un quelconque esprit de rénovation. Le 24 juin prochain ouvrira au 53 rue Montorgueil le second « pilote » du concept Tartin’Art, comme cela avait été pressenti par plusieurs acteurs de la profession…
Tartin’Art, qu’est-ce que c’est ? On pourrait qualifier la première boutique, ouverte en plein coeur de Dijon, de vitrine des produits Eurogerm : en effet, même si les pains sont pétris et cuits sur place, ils s’appuient sur la gamme de l’ingrédientiste. Pain Egalité, Finepi, Graine de Champion, Grand Family… autant de noms qui font rêver rien qu’à leur évocation.

L’histoire de l’enseigne est intimement liée à cette entreprise, puisque c’est Jean-Christophe Girard – Président d’Eurogerm – qui a créé le concept. L’objectif serait de le porter à l’international, mais il reste avant cela beaucoup de chemin à parcourir : en effet, la première mouture dijonnaise laisse un sentiment d’inachevé, avec un positionnement mal défini entre restauration et boulangerie. On ne sait pas tout à fait où l’on rentre, et le consommateur reste un peu perdu parmi les tartines, quiches, viennoiseries, pains et pâtisseries. Gageons que le message sera plus clair à Paris, puisque c’est une nouvelle étape pour le développement de la marque, avant sans doute d’aller beaucoup plus vite… et beaucoup plus fort. Master franchises et franchises à l’international, le plan de développement est déjà tracé et dénote d’une forte ambition, ce qui n’a rien de surprenant quand on connaît le groupe dijonnais et ses tendances expansionnistes.

Le descriptif du projet apposé sur la devanture de la future boutique

Le descriptif du projet apposé sur la devanture de la future boutique

Bien sûr, on peut voir cela sous l’angle d’un renouvellement de l’offre boulangère du quartier, qui n’est pas particulièrement bien doté en artisans talentueux. Je persiste à penser que ce n’est pas en apportant une gamme à partir de pré-mixes que l’on parviendra à bousculer le paysage local, d’autant plus à Paris où la clientèle commence à faire preuve d’une réelle exigence. A voir. Rendez-vous donc en juin pour l’ouverture.

Certains boulangers connaissent des parcours de vie tortueux. Que ce soit au cours de leur formation, de leur évolution en tant que salarié, ou plus tard, une fois installés, les possibilités de prendre de curieux détours sont nombreuses. Ainsi va la vie… Ceux qui étaient au sommet un jour peuvent tout perdre au fil de choix hasardeux, de rencontres douteuses.

Grégory Desfoux a bien connu les montagnes russes des succès et des échecs. Ce talentueux boulanger-pâtissier, que l’on a connu à la tête de plusieurs affaires dans Paris et à Vincennes (rue Montmartre, rue d’Avron, rue de Belleville…), avait quasiment disparu du paysage boulanger de la capitale à la suite d’une lente descente.

Grégory Desfoux, rue de Belleville

Sa boulangerie de la rue de Belleville, qui comptait sans doute parmi ses plus beaux emplacements, avait suivi le même chemin avant de fermer à son tour. Je m’étais demandé ce qu’il adviendrait de cette boutique : changement de propriétaire, ou même d’orientation ? En définitive, il n’en est rien.
Depuis quelques semaines, et après de longs travaux, la devanture affiche de nouveau le nom de Grégory Desfoux.

Mange-debout, Grégory Desfoux, rue de Belleville

Changement d’ambiance et d’époque. L’espace de vente, qui avait très mal vieilli, a été complètement remanié pour afficher à présent des lignes sobres et modernes. Quelques mange-debout permettent la consommation sur place à l’entrée, tandis que les produits font le spectacle dans la vitrine donnant sur la rue. La disposition de ces derniers est d’ailleurs assez singulière, et on ne retrouve pas le traditionnel « mur à pains » présent dans la plupart de nos boulangeries françaises. A la place, les produits sont disposés plus librement sur le côté de la boutique.

Tourtes de Meule, Grégory Desfoux, rue de Belleville

Au fond, le laboratoire est visible et rassure sur l’origine des produits ainsi que sur leur processus de fabrication. Non contents de faire du pain, les boulangers semblent ici décidés à faire de l’esprit, comme en atteste les citations d’auteurs célèbres qui ornent certains pans de mur… si cela peut donner de la saveur à l’ensemble, pourquoi pas.
En la matière, les produits se défendent très honorablement. Les gammes sont courtes, et il serait bien malvenu de s’en plaindre : quelques pâtisseries boulangères, des sandwiches et quiches, des viennoiseries… et bien sûr du pain.

Viennoiseries, Grégory Desfoux, rue de Belleville

Ce dernier est réalisé à partir de levain naturel et de farines livrées par les moulins Foricher, comme c’était le cas avant la fermeture. Tourte de Meule, baguette de Tradition et ses déclinaisons aux graines de courge ou au curry, Bellevilloise, … tout n’est pas encore tout à fait en place, l’acidité est parfois un peu trop marquée, mais cela suit globalement une pente encourageante. Même constat pour les viennoiseries, où les brioches (Kouglof, au sucre, …) tiennent le haut du pavé, accompagnées de quelques créations gourmandes comme le pain chocolat-framboise. Tartes et éclairs achèvent ce tableau gourmand en toute simplicité. Les prix ont toutefois tendance à s’envoler rapidement, et notamment sur le pain où les spéciaux sont assez chèrement tarifés.

Boissons, Grégory Desfoux, rue de Belleville

Saluons enfin l’effort fait sur l’accueil, jeune et sympathique. Il y a beaucoup de choses à faire dans cette sympathique rue de Belleville, et la maison Desfoux semble engagée pour reprendre ce défi avec sérieux. Affaire à suivre.

Infos pratiques

114 rue de Belleville – 75020 Paris (métro Pyrénées ou Jourdain, ligne 11)

Non, ce n’est pas un poisson, Avril est définitivement le mois des chocolatiers. Oui, c’est Pâques, man. Trêve de plaisanteries, au delà des célébrations religieuses, nos artisans parviennent à tirer leur épingle du jeu en proposant des créations gourmandes qui ravissent petits et grands. Nous sommes habitués aux oeufs, poules, lapins, … mais aussi nids de Pâques et autres pâtisseries qui finissent par être un peu poussiéreuses.

Heureusement, certains ont décidé de renouveler le genre. Les sujets de Pâques prennent de nouvelles formes, parfois insolites, poétiques ou attendrissantes – j’ai moi même fondu pour un charmant Ibis des Marais chez Christophe Roussel. Les gâteaux se font plus légers et inventifs, même chez Ladurée, sous l’impulsion du jeune et créatif Yann Menguy, lequel nous a proposé un savoureux Entremets Paquerette en trompe l’oeil.

Du côté des boulangers, on pourrait penser que le champ des possibles est plus limité. Il n’en est rien. Gontran Cherrier nous avait ainsi préparé un amusant Kouglof chocolaté, à napper au dernier moment d’une crème, d’autres avaient préparé des brioches, tandis que les plus puristes étaient restés dans le domaine strict de la panification en proposant des déclinaisons autour du pain au cacao.
Au mois d’avril, pour accompagner les célébrations pascales, la Maison Kayser propose un pain très abouti et parfumé, qui associe textures, saveurs épicées et bien sûr… chocolat.

Pain Chocolat Noir-Noisettes & Fèves de Tonka, Maison Kayser

Créé en 2014, le pain Chocolat Noir, Noisettes et Fèves de Tonka avait fait forte impression auprès de la clientèle… ce qui justifie naturellement son retour cette année.
L’épice exprime pleinement ses notes de vanille, de musc, de tabac, si particulières et caractéristiques. Elles sont portées par une base de pain Ekmek, à l’huile d’olive et au miel. Ce choix n’est pas anodin, car les matières grasses et le sucre incorporés contribuent à fixer et sublimer les arômes, tout en offrant une texture moelleuse et une meilleure conservation. Cette spécialité d’origine turque faisait partie jadis de la gamme permanente de la Maison Kayser… ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, dommage.

Les morceaux de chocolat, présents en quantité et tailles généreuses, prolongent le plaisir par leur saveur vive et légèrement acidulée. Ces derniers sont de bonne qualité et leur goût s’en ressent : du Valrhona 62% de cacao, s’il vous plaît !
Pour finir, les noisettes complètent ce tableau gourmand par leur croquant. Certaines boulangeries Kayser les torréfient, ce qui exalte leur parfum et leur permet de s’exprimer sur la fève de Tonka, qui a tendance à prédominer sinon.

Les épices sont trop rarement utilisées en boulangerie et c’est bien dommage, ce produit en est une bonne preuve. On mange ce pain comme une vraie gourmandise, seul ou accompagné d’un peu de confiture de fruits rouges, au petit-déjeuner ou au goûter. Le jeu de textures -moelleux, croquant, fondant- et de saveurs rend l’ensemble particulièrement addictif.
Reste la question du prix, assez élevé : 3,50€ pour des pièces d’environ 300g, c’est cher mais pas tant que ça si l’on tient compte des ingrédients incorporés (chocolat, noisettes, huile d’olive, miel, fève de Tonka) et du fait que cela remplace avantageusement une brioche, souvent plus onéreuse.

Il ne reste plus que quelques jours pour en profiter, puisqu’il sera remplacé en mai par le pain Ekilibre… beaucoup moins gourmand !

On perd beaucoup de choses. Beaucoup trop, sans doute. Des objets, des rêves, des idées, des valeurs… mais aussi de l’alimentation et notamment du pain. Quelle quantité est jetée chaque jour chez les consommateurs mais aussi chez les artisans ? Je ne préfère pas le savoir, en réalité.

Le Pain Retrouvé, Paris 18è

Une petite partie devient du pain perdu. Dans le 18è arrondissement, rue Duhesme, on a tout simplement… retrouvé le pain. Voilà une adresse à ne pas perdre de vue.
Le Pain Retrouvé, c’est le nom choisi par Hugues Mestreaud pour sa boulangerie du 60 rue Duhesme. Ouverte depuis le début de semaine, la boulangerie étend déjà ses tables sur cette voie animée, comme un appel aux beaux jours.

Le défi est de taille pour cet ancien Conseiller Technique des Grands Moulins de Paris : en effet, la concurrence est rude dans le secteur, avec notamment une boutique Maison Landemaine en sortie de métro, laquelle capte une bonne partie des passants.
Le parti pris par cet artisan est sans doute le bon : proposer des produits simples et gourmands, avec une gamme mettant bien en avant son savoir-faire boulanger.
Pour le moment, tout n’est pas encore en place : le traiteur et la pâtisserie vont arriver progressivement, mais on peut d’ores et déjà apprécier pains et viennoiseries.

Le pain du mois, La Cabosse, au cacao et cranberries, présenté sous cloche.

Le pain du mois, La Cabosse, au cacao et cranberries, présenté sous cloche.

Sous des cloches et dans le fond de la boutique fraichement rénovée – un bon point, car cela indique nettement le changement de propriétaire -, les pains se mettent en scène et expriment une véritable identité. Réalisés à partir de farines Label Rouge (Grand Siècle des Grands Moulins de Paris, fidélité à son ex-employeur oblige) ou biologiques (livrées par les Moulins de Brasseuil), ils sont tous travaillés à partir de levain naturel.
Sa douceur et sa maîtrise contribuent à proposer des produits savoureux et offrant une bonne conservation, sans développer une acidité marquée comme c’est parfois le cas.

La vitrine traiteur, encore un peu clairsemée.

La vitrine traiteur, encore un peu clairsemée.

On retrouve bien entendu de grands classiques de la boulangerie française : baguette de Tradition (1,15€ les 250g, réalisée en non-façonné), toute de Meule ou de Seigle, pain aux noix, … mais aussi des créations.
Les signatures du lieu sont incontestablement le Nuage Tressé, le pain Santé ou encore la flûte Duhesme. Avez-vous déjà goûté un nuage ? En incorporant un peu de crème fraiche à la pâte, Hugues Mestreaud réalise un pain extrêmement moelleux, avec un final acidulé en bouche.
Pour les gourmands soucieux de leur forme, le pain Santé, mélange de graines de courge et de lin sur une pâte enrichie d’huile de colza, associe de vives notes torréfiées au craquant des graines sur une mie fondante.

Le Nuage tressé et sa description. Une bonne idée : une étiquette précise, avec des conseils de dégustation et une composition détaillés.

Le Nuage tressé et sa description. Une bonne idée : une étiquette précise, avec des conseils de dégustation et une composition détaillés.

Enfin, la flûte Duhesme (et sa déclinaison en pavé) exhale de subtiles notes de Sarrasin, ce qui lui confère un caractère rustique très agréable.
Le week-end, la gamme s’élargit de quelques pains, et notamment de Kamut.

Une gamme de viennoiseries très gourmande

Une gamme de viennoiseries très gourmande

Il ne faut pas s’en aller sans faire un arrêt du côté des viennoiseries, avec un beau choix de brioches (chocolat, pistache, pralines roses, …) et de spécialités feuilletées très croustillantes (croissant et pain au chocolat au beurre Poitou Charente AOP). Là encore, le travail du levain est mis à l’honneur avec la culture d’un levain de lait, qui développe les qualités de conservation et les arômes des produits.

Les habitants du quartier ne seront pas perdus face à tout ce changement, car le personnel de vente reste le même, les salariés ayant été repris. Il suffira donc de prendre de nouvelles habitudes et de se familiariser avec les nouvelles gammes.

Souhaitons donc beaucoup de réussite à ce jeune artisan talentueux, qui, je l’espère, parviendra à créer un climat de concurrence saine et porteuse d’émulation dans ce quartier.

Infos pratiques

60 rue Duhesme – 75018 Paris (métro Jules Joffrin, ligne 12) / tél : 01 42 57 67 42
ouvert du mardi au samedi de 7h à 19h30, le dimanche de 7h à 13h30.
Page Facebook : https://www.facebook.com/BoulangerieLepainretrouve

Avis résumé

Pain ? Au travers de classiques bien exécutés (baguette de Tradition, tourte de Meule, … mais pas de pain courant, un choix courageux) et de créations savoureuses (Nuage tressé, pain Santé, flûte Duhesme, …), Hugues Mestreaud exprime ici son savoir-faire boulanger et propose des produits de qualité. Belle maitrise du levain, lequel exprime sur les produits de Tradition de douces notes lactiques et leur confère des caractéristiques de conservation très appréciables.
Accueil ? Les habitués ne seront pas dépaysés, car le personnel de vente a été repris avec l’affaire. On sent une réelle volonté de bien faire, même si les repères ne sont pas encore tout à fait en place.
Le reste ? Revenons dans quelques semaines pour le traiteur et la pâtisserie. D’ici là, les viennoiseries ne manqueront pas de satisfaire les gourmands : entre un croissant au feuilletage bien développé et des brioches moelleuses aux parfums variés, difficile de ne pas trouver son bonheur. Là encore, on appréciera l’exigence sur les matières premières et le procédé, avec la culture d’un levain de lait pour la fermentation.

Faut-il y aller ? Bien sûr. Rien de plus agréable que de voir des jeunes artisans s’installer et proposer une offre alternative, avec une réelle identité, en marge des « gros faiseurs » de la place parisienne. De plus, l’emplacement est particulièrement charmant, dans une rue piétonne et commerçante, avec quelques tables pour déguster les gourmandises proposées ici.

Savoir rester à sa place, ne pas chercher à en faire toujours plus, toujours trop, ce n’est pas donné à tout le monde… et en définitive, c’est devenu de plus en plus rare, tant nous sommes habités par une soif de conquête et d’expansion. En boulangerie, difficile de se multiplier sans prendre le risque de se disperser, de perdre en qualité. Parfois, c’est encore pire : il semblerait que les artisans ne soient même pas inscrits dans cette démarche « vertueuse » et se contentent de privilégier leurs seuls intérêts économiques.

L'Académie du Pain, Paris 14è

Avec ses affaires parisiennes, Christian Vabret semblerait bien faire partie de ceux-ci. Je vous avais parlé du Petit Versailles du Marais, lors de sa reprise en 2011. Depuis, la qualité des produits n’a pas franchement évolué, malgré les prix obtenus aux concours professionnels. On pourrait bien sûr se contenter du charmant décor… mais je ne suis pas persuadé que ce soit l’essentiel dans une boulangerie.

Vous noterez les pains en plastique disposés au plafond... Du grand art.

Vous noterez les pains en plastique disposés au plafond… Du grand art.

Seconde adresse, même combat ? Là encore, le MOF a mis le paquet pour éblouir la clientèle. Difficile de croire qu’il y a encore quelques semaines se trouvait ici la boulangerie « Le Pain d’Auguste », dont la fin avait été plutôt mouvementée. Exit les teintes violacées qui ornaient précédemment ces murs, bienvenue à… Disneyland. J’exagère à peine : le décor chargé, la lumière tamisée, les costumes du personnel de vente, tout a été fait pour nous raconter une histoire… oui, mais laquelle ? Celle d’une boulangerie traditionnelle, de qualité ?

Pains, L'Académie du Pain, Paris 14è

Vous savez combien j’aime raconter des histoires, et combien j’aime que l’on m’en raconte. Seulement, j’attends toujours un fond de vérité et, en l’espèce, de goût. Dans le cas présent, nous n’y sommes pas.
A commencer par le pain, un comble pour un boulanger aussi couronné que Christian Vabret. La baguette de Tradition, qui devrait être exceptionnelle, se révèle sur-pétrie, insipide et sèche. Ajoutez à cela une conservation plus que moyenne, et vous obtenez un produit qui n’a pas grand chose à voir avec ce que l’on attend de la 4è meilleure baguette de Paris 2015.
Le reste de la gamme n’est pas beaucoup plus reluisant. La « Miche Vabret » fait grise mine, tout comme les pains « spéciaux » que représentent les variations aux raisins, céréales… L’hydratation est insuffisante, pour des pains secs et ternes. Voilà qui ne fait pas honneur aux farines de la Minoterie Trottin, qui livre le fournil.

Les viennoiseries disposées à la hauteur du client, sans vitrine, sont sans doute la meilleure idée de la boutique car elles suscitent forcément beaucoup plus l'envie et incitent à l'achat d'impulsion.

Les viennoiseries disposées à la hauteur du client, sans vitrine, sont sans doute la meilleure idée de la boutique car elles suscitent forcément beaucoup plus l’envie et incitent à l’achat d’impulsion.

Viennoiseries et pâtisseries sont étonnamment régulières, et leurs tarifs sont copieusement augmentés si l’idée nous vient de les consommer sur place. En parlant de l’espace Salon de Thé, il est « introduit » de façon bien étonnante, avec un buffet type petit-déjeuner d’hôtel. J’hésite entre mauvais goût et hors-sujet pour décrire cet aménagement.
Comme il faut faire du chiffre au déjeuner, une offre salée est bien entendu proposée, avec sandwiches, paninis, hot-dog, quiches, salades…

Vitrine pâtisserie, L'Académie du Pain, Paris 14è

Le service est à l’image du lieu : sans réelle âme, il fait un peu pièce rapportée dans le décor et on ressort de cette Académie avec la nette impression de n’avoir rien appris, et pire, que l’artisan nouvellement installé ici s’est attribué des palmes (académiques) bien usurpées…

Le surprenant buffet, délicieusement kitsch.

Le surprenant buffet, délicieusement kitsch.

Infos pratiques

30 rue d’Alésia – 75014 Paris (métro Alésia, ligne 4)
ouvert tous les jours sauf le dimanche.

Avis résumé

Pain ? Sec, terne, sans intérêt, les adjectifs ne manquent pas pour décrire la piètre qualité du pain proposé ici. L’exemple le plus frappant reste sans doute la Baguette de Tradition, récemment primée. Celle-ci est étonnamment insipide, la faute à un pétrissage trop intensif. Sa légèreté et sa perte rapide d’hydratation incite même à se demander s’il n’y aurait pas un peu de vitamine C pour donner un coup de pouce au développement… Les pains au levain (miche Vabret, notamment) ne font pas beaucoup mieux.
Accueil ? Relativement professionnel et efficace, mais sans âme, comme noyé dans ce lieu complètement artificiel.
Le reste ? Viennoiseries et pâtisseries « maison » étonnamment régulières, chèrement tarifées. Le plus amusant est sans doute le salon de Thé et son buffet, qui prêteraient à sourire si ce n’était pas aussi ridicule.

Faut-il y aller ? Vabret nous fait encore vibrer avec sa nouvelle adresse. Entre un décor en carton pâte, des produits plus que médiocres et une volonté délibérée de nous raconter des histoires qui ne présentent aucun fond de réalité, rarement un artisan parisien se sera évertué à avoir aussi faux sur toute la ligne. A croire que les cols bleu-blanc-rouge finissent parfois par empêcher l’oxygène d’atteindre le cerveau.