Réflexions

30
Juin

La folie du « pain » maison

A une certaine époque, les Machines à Pain ont déferlé dans les chaumières, surfant sur la vague du « fait maison ». L’idée n’est pas mauvaise, c’est convivial, et puis c’est assez tentant d’avoir toujours la possibilité de déguster du pain frais, en plus de profiter des odeurs. Cependant, il y a vite de quoi déchanter.

Ce que l’on obtient avec ce type d’appareil ne ressemble que de loin à du pain. Cuit dans une cuve à l’électricité, le pavé ainsi formé n’a pas beaucoup de croûte et reste très spongieux. Sa conservation est assez mauvaise, par ailleurs. Cela ne tient pas au fait du hasard : la fermentation est très courte, la plupart des programmes étant réalisés en moins de 3 heures. 3 heures, c’est à peine le temps que mettent les boulangers pour produire leurs baguettes « blanches » – autant dire un produit de qualité discutable, aux arômes évanescents.
Bien entendu, au moins, cela a l’avantage d’offrir au consommateur une totale visibilité sur la composition de son pain. Il peut être assuré de l’absence d’additifs, et aura la possibilité de mettre en oeuvre des farines biologiques ou issues de blés non traités (Label Rouge, CRC…).

Tout cela est bien loin de la qualité que peuvent fournir certains artisans boulangers, car la boulangerie est réellement un métier, pas un jeu d’apprentis sorciers. De plus, on se lasse très vite de déguster un produit à la forme toujours identique, à la cuisson anecdotique (cela donne l’impression de manger « du mou », comme si tous les pains étaient des pains de mie) et au goût parfois douteux (oh, j’ai mis trop de levure aujourd’hui!).
Cela explique certainement le fait que « le soufflé » soit retombé. A présent, la plupart de ces machines sont retournées dans leurs cartons ou sont très peu utilisées. Le côté ludique n’est pas parvenu à compenser les inconvénients que présentait cette préparation.

Cependant, il reste toujours possible de faire du vrai pain chez soi. Certes, nous n’avons pas chez nous des chambres de fermentation ou des fours comme ceux des boulangeries, mais avec un peu d’astuce et de savoir-faire, on peut parvenir à un résultat très correct. Il est ainsi possible d’entretenir son propre levain, de nombreuses méthodes circulent sur Internet pour le faire. Les méthodes décrites par Florence sur son blog Makanai ou sur http://votrepain.com/ ne sont pas dépourvues d’intérêt. Egalement, le « levain liquide » décrit par Eric Kayser dans son ouvrage 100% pain offre une bonne base pour la réalisation de miches assez réussies.
Ici, il faut mettre la pain à la pâte, c’est moins simple que de mettre des ingrédients dans une cuve. C’est aussi beaucoup plus gratifiant, et on donne vraiment vie au pain que l’on dégustera ensuite. Pétrir, façonner, suivre la cuisson… Tout cela prend du sens, ce sont des gestes ancestraux, répétés jour après jour par des milliers d’hommes et de femmes. Essayez, vous verrez que c’est une expérience sensorielle intéressante.

Au final, ce pain maison peut être agréable, mais il faut le partager, faire en sorte que cela soit un plaisir commun. Seul, cela a beaucoup moins d’intérêt. Ca n’en a même aucun quand on confie la réalisation à une machine. Le pain ne mérite pas cela, il a besoin de recevoir de l’âme, de l’amour. Certains boulangers savent encore le faire. C’est ce que je « cours », jour après jour, et que je cherche à mettre en avant.

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