Rien de plus triste qu’une boulangerie fermée. On pourrait se dire que la chose est rare, car il y a presque toujours de la clientèle pour ce type de commerce, surtout en Ile-de-France où les villes comptent un certain nombre de bouches à nourrir. Malgré tout, au fil de mes promenades painrisiennes, j’en rencontre de temps en temps. Parfois de très banale, parfois d’autres dotées de belles devantures « à l’ancienne ». J’ai, à chaque fois, un petit pincement au coeur… mais ainsi vont les aléas de la vie et de l’économie.
Olivier Baussan partage sans doute cette tristesse devant ces boutiques aux portes définitivement closes, et c’est peut-être l’une des raisons qui l’ont poussé à reprendre la boulangerie du 7 rue Sainte-Croix de la Bretonnerie. En effet, cette adresse située en plein coeur du Marais arbore fièrement les couleurs de l’enseigne depuis déjà quelques mois. En passant devant, difficile d’imaginer qu’une boulangerie se tenait là auparavant, et pourtant. Le fournil demeure présent au fond, visible à travers une vitre. Seulement, ce dernier a changé de destination.

Derrière la caisse, le fournil est bien visible et les lettres dorées nous l’introduisent avec beaucoup d’élégance. Elles nous rappellent l’ancienne vocation du lieu, celle de produire du pain, et même si cette dernière a un peu changé, je trouve que la reconversion est plutôt réussie.
Difficile d’imaginer cette épicerie produisant du pain (même si l’idée d’y trouver des fougasses provençales n’aurait pas été déplaisante !), pour autant, hors de question d’abandonner l’héritage de ces lieux. Première Pression Provence nous emmène donc tout droit dans le sud avec… une navette ! Le fameux biscuit s’est vu retravaillé par Pierre Hermé himself, sur demande de son ami Olivier Baussan. Le résultat est plutôt convaincant : réalisées à partir d’une farine – biologique – de Blés de variétés anciennes moulus à la meule de pierre par Frédéric Ratto à Cucuron, ainsi que de poudre d’amandes et de fleur d’oranger de Grasse, elles croquent puis fondent en bouche. On ne pourra qu’apprécier l’exceptionnelle longueur en bouche du produit, ce qui nous fera pardonner la présence de beurre, liberté prise vis à vis de la recette originale. L’engagement sur la qualité des matières premières est aussi à noter : une bonne recette ne serait rien si elle était ensuite réalisée avec des ingrédients sans saveur.

Les fameuses navettes, proposées dans différents conditionnements. A noter l’existence d’un format à partager, les « Gibassiers », déclinés en trois tailles.
Depuis ce fournil, ce sont l’ensemble des boutiques parisiennes que l’enseigne qui sont approvisionnées chaque semaine, même si la production est réalisée quotidiennement. Voilà une belle façon de redonner vie à une ancienne boulangerie, bien plus intéressante que le sort réservé à d’autres dans le même quartier : en effet, plusieurs boutiques de mode affichent encore une devanture rappelant le passé des lieux, cette dernière étant classée. Les loyers pratiqués dans l’arrondissement auront sans doute eu raison de l’activité initiale.
A noter que deux autres fournils existent dans le sud, où Première Pression Provence est également implantée.
Les navettes chez Première Pression Provence – 8 euros le sachet de 13 biscuits – 7 rue Sainte-Croix de la Bretonnerie – 75004 Paris