Il m’est difficile de résister à des boulangeries qui affichent un univers, un ancrage dans des traditions voire une région. Peu d’artisans peuvent se vanter de proposer cela à leur clientèle, au vu de l’uniformité croissante des aménagements de boutique et des gammes de produits au sein de la capitale et même ailleurs.

Parfois, il m’arrive d’en rencontrer par hasard, au détour des rues. Ce fût le cas ici, pour la boulangerie « La Bretagne », située au 70 boulevard Soult, dans le 12è arrondissement. Une devanture bleue, un nom qui nous transporte directement à l’Ouest, l’annonce de quelques spécialités régionales (gâteau & far breton, Kouign-Amann), il ne m’en fallait pas plus pour passer la porte. Certes, quelques détails auraient du m’inciter à me poser des questions, mais voilà, l’irréparable était commis. J’étais entré.

« Artisan boulanger et fier de l’être », c’est le slogan développé par le groupement Festival des Pains pour mettre en avant l’engagement de leurs clients. L’idée n’est pas mauvaise, mais si seulement elle trouvait un quelconque sens dans la qualité des produits… car c’est bien ce qui pèche, ici.
On nous parle d’un pain qui serait la spécialité de la maison, le « Breizhig », réalisé à partir de levain et d’un mélange de farines. Proposé à 5,5€ le kilogramme, il est décliné en différents formats : bâtards de plusieurs tailles, baguettes et ficelles. Spécialité, vous dites ? En définitive, au goût, cela tiendrait plutôt du prémixe à la mie cotonneuse et aux notes de seigle persistantes. Ce n’est pas mauvais, non, mais rien de bien exceptionnel.
Dans tous les cas, on le préférera nettement à la baguette de Tradition insipide, au façonnage peu appliqué et donnant la nette impression de déguster de l’air, à l’image d’une baguette de pain courant.
Les autres pains de la gamme reprennent les prémixes Festival sans trop de succès ni d’aventures, avec quelques petites boules rapidement dégustées rapidement oubliées.

Pour le reste, le Kouign-Amann ne nous fait pas quitter terre, de même que le gâteau breton, bien consciencieusement emballé dans du film alimentaire (?!). Ne citons pas les autres viennoiseries et pâtisseries, ni les sandwiches et autres produits salés.

On appréciera uniquement le charmant accueil de la tenancière des lieux, qui, accompagnée de ses vendeuses, parviendrait sans doute à nous faire passer le goût, ou plutôt l’absence de goût, de ses produits. Malheureusement, il en faudrait tout de même un peu plus.

Infos pratiques

70 boulevard Soult – 75012 Paris (métro Porte de Vincennes, ligne 1) / tél : 01.43.43.30.97
ouvert du lundi au vendredi de 7h à 20h30.

Avis résumé

Pain ? Chouette, on nous promettait une spécialité, le « Breizhig », réalisé à partir de levain, d’un mélange de farines et de sel de Guérande – bien sûr ! -. Seulement voilà, le résultat s’apparente plutôt à un prémixe de type pain de campagne traditionnel, à la mie cotonneuse et aux notes de seigle et de levain assez peu équilibrées. On le préférera tout de même à la baguette de Tradition, qui n’en a que le nom tant elle se rapproche de la baguette blanche, de par sa mie presque vaporeuse et son absence de saveurs. Pour le reste, la gamme Festival des Pains est représentée, au travers des différents prémixes développés par la marque.
Accueil ? La propriétaire des lieux nous accueille avec le sourire, tout comme ses sympathiques vendeuses. En définitive, le lieu est agréable, le service tout autant, si seulement les produits étaient à l’avenant…
Le reste ? Les spécialités bretonnes (gâteau breton, Kouign-Amann) ne parviennent pas à convaincre, le côté gras et sucré l’emportant sur nos espoirs de saveurs. Rien de mieux à dire au sujet du reste des viennoiseries et pâtisseries, ainsi que du traiteur.

Faut-il y aller ? On peut passer devant, regarder, et se dire que ça aurait été chouette si l’on nous avait vraiment amené un petit bout de Bretagne, avec toute les saveurs que cette région sait proposer. Malheureusement, c’est une déception, le pain est à l’Ouest, vraiment pas un Festival.

La créativité est généralement une qualité appréciable, que ce soit au quotidien ou dans le cadre d’une activité professionnelle. Seulement, il ne faudrait pas que cette dernière devienne trop envahissante, farfelue… ce qui serait alors contre-productif. Cela arrive de temps à autre, inévitablement.

La boulangerie n’est pas épargnée. Ainsi, on trouve parfois des pains aux associations de saveurs saugrenues, aux formes improbables ainsi que des pâtisseries qui auraient du rester dans l’imagination de leurs auteurs. Rien de bien troublant, dans l’absolu, puisque les faits demeurent éphémères et peinent souvent à rencontrer leur clientèle, ce qui a pour effet de les faire rapidement tomber dans l’oubli.
Malheureusement, certaines décisions font date… à l’image de celle prise par les propriétaires de cette boulangerie de la rue Caulaincourt.
« La Bonne Cochonnerie », un tel nom associé à un couleur rose, il fallait oser, et ils l’ont fait. Du mauvais goût ? Sans doute, oui.

Passons tout de même la porte pour savoir si l’intérieur nous réserve ce que nous venons chercher dans une boulangerie, en l’occurrence du goût, du vrai, du bon.
Pour le coup, c’est raté, ce qui pourrait nous faire dire que l’adjectif « bonne » du nom serait presque superflu… passons sur les plaisanteries.

A défaut de regarder les produits, regardons le superbe plafond sous verre.

Du pain, il y en a, encore heureux, sur des présentoirs en métal et non pas dans des auges comme on aurait pu le craindre. La gamme est relativement variée, allant de la baguette de Tradition, juste correcte même si l’on appréciera le goût de froment et la cuisson bien menée, aux pains aux fruits secs (noix, figues…) en passant par les céréales. Le problème, c’est que le tout a une fâcheuse tendance à être gonflé à la levure, sans présenter un grand intérêt gustatif. Non, les ingrédients ajoutés ne doivent pas servir de « cache-misère »…

Est-il nécessaire de s’étendre sur les pâtisseries approximatives – de la tarte au citron à l’Opéra, en passant par le très chic empilement de rochers… non, pardon, de choux ou par les tartes fines pas si fines ? Ou encore sur les médiocres viennoiseries et gourmandises (même s’il y a du choix, muffin, brownie, financiers, cookies, … rien ne manque… mais cela ne ferait-il pas un peu trop ?)…

Viennoiseries & gourmandises

Rien de plus intéressant côté salé, avec des sandwiches sur fond de baguette de pain courant, certes très garnis, mais qui peinent bien à susciter une quelconque envie. Même constat pour les salades et autres quiches.

Relevons tout de même l’accueil sympathique et le décor plutôt agréable : le plafond sous verre d’époque a été conservé, et on peut prendre plaisir à s’arrêter quelques minutes dans la boutique grâce aux tables et chaises qui y ont été disposées.

Infos pratiques

111 rue Caulaincourt – 75018 Paris (métro Lamarck-Caulaincourt, ligne 12) / tél : 01 46 06 75 08

Avis résumé

Pain ? Les farines des Moulins Bourgeois, utilisées ici, peinent à être mises à l’honneur. La baguette de Tradition demeure à peine acceptable, grâce à une cuisson bien menée et à un façonnage correct. Pour le reste, les pains aux ingrédients gonflés à la levure ne présentent qu’un intérêt bien limité, même s’ils offrent une certaine diversité de saveurs… Encore qu’il serait sans doute préférable de déguster les fameux fruits secs dépourvus de cette enveloppe encombrante.
Accueil ? C’est sans doute ce qui demeure le plus charmant ici, avec un service efficace et plutôt souriant. Dans ce lieu bercé par une belle lumière naturelle, offerte par les larges baies vitrées de la boutique, on aimerait juste que les produits soient à l’avenant…
Le reste ? Pâtisseries, viennoiseries, sandwiches, gourmandises… Je ne peux pas dire que j’ai trouvé quoi que ce soit qui sorte du qualificatif inspiré par l’enseigne. Cochonneries, vous disiez ?

Faut-il y aller ? Pour avoir un exemple de mauvais goût, sans doute. Mis à part cela, nous sommes en présence d’une boulangerie comme il en existe – malheureusement ? – des centaines sur la place de Paris.

J’aime voir des projets se concrétiser. On m’en parle parfois comme ça, négligemment, entre deux sujets, comme une douce ponctuation dans cet amas d’informations qui constitue nos journées. Ils me reviennent à l’esprit de temps à autre, et je me demande quel en est l’avancement… L’occasion parfois de le demander aux intéressés.

Dans d’autres, c’est le hasard qui me donne la réponse et ce fut le cas hier, étant de passage rue d’Odessa, dans le 14è arrondissement. En effet, au 19 de cette voie, la boulangerie a changé de propriétaire il y a tout juste trois jours. La devanture affiche encore « Aux Délices d’Odessa », mais à l’intérieur, c’est la gamme de… La Parisienne que l’on retrouve. En effet, Julien – le précédent boulanger oeuvrant pour le compte de Mickaël Reydellet sur le boulevard Saint-Germain – et son épouse se sont installés ici, comme le jeune artisan me l’avait annoncé il y a plusieurs mois.

Dans cette boulangerie un peu vieillotte, les produits étaient restés sur la même dynamique – ou plutôt, absence de dynamique. Une large gamme de pains, tous issus de prémixes fournis par le groupement Banette, peu de propositions à l’heure du déjeuner… Des faits qui font dors et déjà partie de l’histoire ancienne, puisque les recettes de la maison sont à présent appliquées, avec quelques suppléments puisqu’un pain Bio – en cours de certification – a fait son apparition. La baguette de Tradition aura encore besoin de changement, puisqu’elle demeure réalisée la méthode du prédécesseur pour ne pas trop perturber les habitués des lieux. L’artisan compte cependant proposer un large éventail de produits le week-end, sa boulangerie étant la seule ouverte dans le secteur. Baguettes aux figues, tradition feuilletée (une des spécialités que je vous avais présenté)… Le tout réalisé à partir d’une farine livrée par les Moulins de Chars.

Un travail sur l’aménagement des lieux sera sans doute à mener en parallèle, mais laissons les choses se mettre en place. Dans tous les cas, on peut déjà apprécier l’accueil charmant et les larges horaires d’ouverture (du mardi au dimanche, de 7h à 20h).

Côté pâtisserie, la gamme reprend les standards développés dans les deux autres adresses de l' »enseigne », avec des classiques et divers entremets simples et honnêtes.
La démarche de Mickaël Reydellet est en tout cas plus qu’appréciable : il donne en effet de l’indépendance à ses salariés, en les accompagnant dans leur installation, tout comme cela avait pu être le cas à ses débuts avec la famille Julien. Un bel état d’esprit que plus de patrons devraient développer, surtout que l’homme a su rester simple et à l’écoute malgré le succès de son entreprise.

La Parisienne applique donc l’adage « jamais deux sans trois », on ne va certainement pas s’en plaindre !

Infos pratiques

19 rue d’Odessa – 75014 Paris (métro Edgar Quinet, ligne 6 ou Montparnasse-Bienvenüe, lignes 4, 6, 12 et 13) / tél : 01.42.79.92.58
ouvert du mardi au dimanche de 7h à 20h.

J’ai souvent l’occasion de me lamenter en passant devant de vieilles boulangeries parisiennes, aux façades d’époque. Pour plusieurs raisons : beaucoup d’entre elles ont changé de vocation tout en conservant leur devanture (forcément, cette dernière étant classée, difficile d’y toucher), ce qui donne lieu à des situations parfois cocasses (une boutique de mode annonçant « boulangerie », cela surprend forcément), mais aussi pour la qualité des produits. En effet, malgré les références courantes à un « pain à l’ancienne », on ne peut pas dire que ces boulangeries brillent souvent par leur offre… A croire que les artisans qui y sont installés pensent que le décor doit suffire.

C’était précisément le cas dans la boulangerie Au Panetier, dans le 2è arrondissement. Cette belle boutique de style « art déco », avec une façade déclinant des tons entre le vert et le bleu, avec un intérieur tout aussi authentique. Certes, le temps est passé par là et l’entretien ne semble pas été suffisant pour assurer un parfait maintien des lieux. Les produits avaient tout autant de mal à se maintenir, avec notamment un pain très médiocre.

Fort heureusement, les choses changent, les propriétaires passent. Depuis deux semaines, la boulangerie Au Panetier a changé de mains et cela s’est immédiatement ressenti : le nouvel artisan (boulanger, en l’occurrence, puisque c’était lui le tenancier des lieux) est arrivé avec la volonté de bousculer cette routine. Avec un certain talent, je dois dire, puisque la spécialité des lieux, le « Petit Père », un pain assez plat, bien cuit et façonné en de grandes pièces découpées à l’envie du client se révèle un excellent choix : on appréciera ainsi ses notes acidulées et boisées, sa mie d’excellente tenue, assez dense mais bien hydratée. La baguette de Tradition n’est pas en reste, plutôt soignée et savoureuse, même si l’on se tournera plus volontiers vers ce petit père qui nous tend les bras.
Au delà de ça, la gamme est très courte : quelques petits pains aux fruits secs et boules, rien de bien élaboré. Dans un sens, c’est sans doute mieux ainsi : l’artisan semble avoir fait le choix de réaliser les produits qu’il maîtrise, accompagné par les farines des Moulins Bourgeois.

La Fouace et le Petit Père sont les stars de la vitrine… D’ailleurs, ce dernier ne vous rappelle-t-il pas la spécialité d’un célèbre boulanger parisien ?

Côté viennoiseries et pâtisseries, on passera notre tour, le personnel n’ayant d’ailleurs pas changé sur ce secteur, laissons un peu de temps à l’ensemble pour prendre de la consistance : une reprise n’est jamais de tout repos. Cependant, une gourmandise doit retenir notre attention : la Fouace, une brioche assez dense mais « légère » (assez peu
sucrée et beurrée), parfumée à la fleur d’oranger et à l’angélique se révèle très savoureuse. Vendue à la coupe pour 15 euros/kg, c’est l’autre spécialité des lieux à ne pas manquer, d’ailleurs elle nous interpelle dès l’entrée.

En boutique, l’accueil n’a pas changé non plus, et on retrouve ainsi un service sympathique et efficace, forcément bien accoutumé aux lieux. Ajoutez à cela le charme de la place, on s’accorderait bien quelques minutes très parisiennes à l’une des tables disposées devant la boutique.

Infos pratiques

10 Place des Petits Pères – 75002 Paris (métro Bourse, ligne 3) / tél : 01 42 60 90 23
ouvert du lundi au vendredi de 7h30 à 19h.
Avis résumé
Pain ? Le changement qui vient de s’opérer ici aura été plus que bénéfique pour le pain. Au travers d’une gamme courte, le nouvel artisan propose des produits bien maîtrisés, dont un « Petit Père » aux notes acidulées, à la croûte épaisse et bien cuite ainsi qu’à la mie d’excellente tenue. L’ensemble dégage un parfum boisé que l’on retrouve bien à la dégustation. On regrettera tout de même un prix assez élevé : 8 euros le kilogramme, cela commence à faire. La baguette de Tradition (1,2€ les 250g) est également de bonne tenue, même si c’est la spécialité maison qui tient la vedette.
Accueil ? Sympathique et bien à sa place dans les lieux, le service est efficace et défend ses produits, assez différents depuis la reprise par ailleurs. Cela accompagne bien le superbe décor et l’ambiance apaisée de cette petite place, en retrait de l’agitation. A noter les quelques tables qui peuvent servir de point de chute appréciable pour une pause gourmande.
Le reste ? Passons sur les pâtisseries, viennoiseries et l’offre salée qui font encore bien triste mine, mettons cela sur le compte de la reprise récente, en se promettant d’y refaire un tour d’ici quelques temps. Une gourmandise mérite cependant de ne pas être négligée : la Fouace, sa belle cuisson et ses notes de fleur d’oranger s’avère une belle surprise, d’autant qu’elle est vendue au poids, chacun choisissant ainsi la taille de sa part.
Faut-il y aller ? Pour un morceau de Petit Père ou de Fouace, bien sûr ! Avant la reprise, on n’y serait allés que pour le plaisir des yeux, le décor étant sympathique. Maintenant, les  produits commencent à être à l’avenant, et l’on ne peut que s’en réjouir.

J’aime toujours lire les commentaires que vous, visiteurs, laissez sur le painrisien au fil des journées. Certains me font sourire, d’autres me touchent ou parfois m’agacent… mais dans tous les cas, ils ne peuvent me laisser indifférent, car c’est votre expression en retour de mon travail, un effort que je ne saurais négliger. Je prends parfois un peu de temps à y répondre, mais c’est une belle source d’inspiration et de motivation pour moi.

Parfois, les informations qu’ils contiennent m’amènent à faire des visites, ou des re-visites. C’est le cas ici, dans la boulangerie reprise par Frédéric Lalos et Pierre-Marie Gagneux en plein coeur du très chic 16è arrondissement. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en avril dernier, la boutique un peu vieillotte n’était pas au diapason du « standing » du secteur, chose à laquelle l’entreprise devait remédier rapidement.

Ainsi, quand un certain « Ben » m’a indiqué (non sans précisions et emphases qui laisseraient à penser que ce dernier est bien plus qu’un simple client, mais passons) que la boulangerie du 22 rue des Belles Feuilles offrait une nouvelle devanture, je n’ai pas tardé à m’y rendre.
Ici, plus question de parler de l’enseigne « Le Quartier du Pain », c’est le nom Lalos qui est mis en avant. Un patronyme qui s’est peu à peu mué en marque, au travers des différents partenariats noués par le fameux Meilleur Ouvrier de France. Cela s’inscrit donc dans le prolongement de cette démarche.

On m’avait promis une boutique soignée, j’ai effectivement été servi, le résultat est plutôt probant. Un mélange assez chic et rétro, qui s’inscrit parfaitement dans son environnement. Ici, on n’a pas fait appel à des agenceurs traditionnels tels que CMC, mais à une spécialiste du « design d’intérieur », en la personne de Laura Gonzalez, excusez du peu. Cela se veut la figure de proue d’un nouveau concept, qui, je le pense, sera surtout amené à se développer à l’international, les ambitions de notre artisan au col bleu-blanc-rouge semblant être à peu près aussi dévorantes que celles de l’ami de la rue Monge…

Passons à ce qui est le plus important, les produits. Si l’écrin a repris des couleurs, ils en ont fait autant, avec des pains de bonne facture, à l’image de la boule au levain douce et parfumée ou d’un Longuet (en baguette et en pavé) et ses notes de sarrasin made-in-Philibert-savours. Reste que les pains de Tradition et ‘à l’ancienne’ (1,20€ les baguettes de 250g) ne sont pas particulièrement intéressants, avec des cuissons un peu justes et un effet « gonflé à la levure » – ce qui les rapproche dangereusement de la baguette de pain courant. Du chemin reste encore à parcourir… Les déclinaisons des ciabattas (nature, olive ou tomate) n’en sont pas moins gourmandes et bien vues.
Les viennoiseries se défendent toujours très honorablement, tout comme les pâtisseries (entremets, tartes fines feuilletées, éclairs…) même si leurs tarifs sont assez élevés (de 3,6€ l’éclair à près de 5,2€ l’entremet).

On appréciera également l’accueil, plutôt chaleureux et sympathique, chose à laquelle nous ne sommes pas toujours habitués dans ce quartier… Même si la présence d’une superbe « machine à sous » en caisse est toujours aussi regrettable pour la qualité de la relation client.

Un cimetière de pains décoratif… J’adore toujours autant ça.

Infos pratiques

22 rue des Belles Feuilles – 75016 Paris (métro Victor Hugo, ligne 2)
ouvert tous les jours sauf le mercredi.

Avis résumé

Pain ? Ce n’est toujours pas ça. Certes, les boules au levain sont de bonne tenue, mais les cuissons demeurent trop justes sur les pains de tradition, et les baguettes (de Tradition & à l’ancienne) manquent vraiment d’intérêt. Dans tous les cas, on est bien loin de ce que l’on pourrait attendre d’un boulanger au tel pédigrée.
Accueil ? Sympathique, souriant, poli et bien formé. Rien à redire sur ce point.
Le reste ? Les gourmands apprécieront viennoiseries, cakes et pâtisseries de bonne facture, même si les tarifs n’en demeurent pas moins élevés – somme toute en droite ligne de ce qui est généralement pratiqué dans l’arrondissement.

Faut-il y aller ? Pour découvrir la « nouvelle identité » de Frédéric Lalos, pourquoi pas. Cela semblait en tout cas fasciner le public japonais qui se pressait en masse devant les lieux. C’est assez significatif des ambitions de ce boulanger à l’international : je pense qu’il ne fait pas de doute que cette première boutique « Lalos » se verra largement exportée… d’ailleurs, cela a déjà commencé au Japon et à Taiwan, si l’on en croit le très bien renseigné Ben… Quant à nous, français, nous n’aurons qu’à nous contenter d’un pain juste moyen, en définitive.

Il y a des billets que je mets plus de temps à écrire que d’autres. A cela plusieurs raisons, différentes dans chaque cas. Parfois parce que je considère que cela n’a pas grand intérêt, parfois parce que j’ai d’autres choses à dire sur le moment… mais aussi, et surtout en fait, parce que certaines appréciations laissent à penser qu’elles doivent s’affiner sur la durée pour prétendre à un espoir de justesse.

C’est précisément le cas ici, pour la boulangerie Bonneau, dans le 16è arrondissement. Installé ici avec son épouse Sylvie et ses cinq enfants depuis 1992, et fêtant donc cette année ses 20 ans d’ancienneté dans le quartier, l’engagement de cet artisan dans le secteur ne date vraiment pas d’hier. Ce normand, Compagnon Boulanger du Devoir, a débuté sa carrière à seulement 16 ans, lui permettant ainsi d’appréhender différentes méthodes de travail au sein d’établissements dispersés sur le territoire. Tours, Bordeaux, Biscarosse, Verdun… Tout cela pour revenir là où il avait commencé, à Paris, en s’installant dans le 14è arrondissement en 1988.

En parallèle, notre artisan a également fondé en 1997 le site Boulangerie.net, l’un des principaux sites d’actualité et de partage de la profession, où se retrouvent quotidiennement des dizaines de boulangers pour échanger sur des sujets divers. C’est notamment dans ce cadre qu’il a développé, parmi les premiers, des actions de défense de la viennoiserie maison (« je suis artisan, je fais mes croissants »), ainsi que d’autres orientées autant sur le prix du pain, le travail au levain naturel ou encore la baguette de tradition.

Une spécificité amusante : même si le fournil n’est pas visible directement depuis la boutique, une télévision permet de voir les boulangers travailler… des images visibles également sur le site http://www.bonneau.fr !

Seulement, il est difficile d’être présent sur tous les fronts, et c’est certainement celui de sa propre boulangerie qui en a pâti. On n’oubliera pas de citer le fait que Laurent Bonneau est parvenu à se classer 2ième au concours de la meilleure baguette de Paris en 1996, 8ième en 1997 et 8ième en 2004… avec depuis une certaine forme d’endormissement. Routine, volonté de développer ses autres projets ? C’est un peu le sentiment que j’ai eu la première fois que je me suis rendu dans les lieux, fin 2011. A l’époque, les pains étaient réalisés avec une farine des Grands Moulins de Paris, ces derniers ayant financé en partie l’installation de l’artisan dans le 16è arrondissement.

Au fil des mois, c’est un réveil, un véritablement changement de fond que j’ai pu suivre, et je ne vous cache pas que ce sont des évolutions qui me donnent espoir dans le fait que la profession n’est pas perdue, et que des « brebis égarées » peuvent encore reprendre le chemin de la qualité en y étant sensibilisées. Sensibilisé, c’est bien le mot. Tout cela fait suite à des rencontres, et à un voyage. A Cucugnan, il découvre le travail de Roland Feuillas et le pain qu’il en ramène ne manque pas de faire sensation, dès son trajet de retour d’ailleurs. L’odeur n’a en effet pas laissé indifférent ses compagnons de voyage, et cela n’a fait que conforter son sentiment : il y avait là matière à opérer un changement, à tenter quelque chose de nouveau dans son fournil.

Depuis deux semaines, Laurent Bonneau travaille également un pain pur Engrain (Petit Epeautre) le dimanche. La céréale et son parfum très puissant y sont bien mis à l’honneur.

Cela a commencé avec des sacs de farine des Maîtres de mon Moulin, livrés quelques semaines après. De cette matière première est née du pain, le fameux « pain de Cucugnan » que l’on retrouve à présent du mercredi au dimanche dans les présentoirs du 75 rue d’Auteuil. Rome ne s’est pas faite en un jour, et il aura fallu de la pratique pour parvenir à un résultat convainquant tel que celui que peuvent apprécier les clients aujourd’hui. Certes, ici, le pain est réalisé à partir d’un levain liquide et l’on pourrait reprocher le fait que cela a, de fait, moins de caractère que les produits issus du fournil du Moulin… mais ne soyons pas intégristes. Apprécions simplement le fait de voir des habitués demander tout naturellement un « Cucugnan » en boutique, signe que la qualité et le goût ne laissent pas indifférents, peu importe le lieu.

Le lieu est important, car même si la clientèle du 16è arrondissement est plutôt aisée, elle n’en est pas moins difficile et pas forcément réceptive à des messages tels que ceux adressés par la démarche entamée par notre artisan. Peu importe, car le succès de ces pains n’est pas à remettre en question. A côté de cela, c’est l’ensemble de la gamme qui a repris des couleurs, avec un changement de meunier (la farine est aujourd’hui livrée par les moulins de Chars) et plus de soin : la baguette de Tradition retrouve ses lettres de noblesse, tout comme les tourtes de Seigle ou pains dits ‘de Campagne’.

Pour le reste, je ne vous cacherai pas que je ne serais pas client des viennoiseries, pâtisseries, gourmandises et produits traiteur proposés ici, mais ils ont au moins le bon goût d’être tous réalisés sur place, un fait suffisamment rare pour le signaler. L’ensemble des gammes se situent dans un domaine très traditionnel, sans relief particulier. Eclairs, entremets, tartes variées, spécialités feuilletées salées ou sucrées, rien ne manque.

Le pain dit « de Cucugnan », à ses débuts. Nous sommes bien loin du résultat obtenu à présent, que vous pourrez retrouver sur la page Facebook de la boulangerie : http://www.facebook.com/pages/Boulangerie-Pâtisserie-Bonneau/154341821270979

Quant à l’accueil, on appréciera sa simplicité dans un arrondissement ayant plutôt tendance aux courbettes et figures de style fort inutiles. Même si le tout est parfois un peu expéditif, les jeunes filles qui oeuvrent ici tentent de servir la clientèle avec efficacité et courtoisie, qui n’est d’ailleurs pas toujours réciproque…

Infos pratiques

75 rue d’Auteuil – 75016 Paris (métro Michel Ange-Auteuil, ligne 9 & 10 ou Porte d’Auteuil, ligne 10) / tél : 01 46 51 12 25
ouvert du mercredi au dimanche de 6h30 à 20h30

Avis résumé

Pain ? Lors de ma première visite en décembre 2011, je dois dire que j’avais été plutôt désagréablement surpris, attendant mieux d’un compagnon, aussi impliqué dans des démarches tentant de valoriser l’artisanat boulanger. C’est par la suite que j’ai compris combien le temps et la routine pouvaient être des ennemis redoutables pour la qualité des produits et du pain en particulier. Réalisé alors à partir d’une farine des Grands Moulins de Paris, il n’offrait pas une qualité et des saveurs de bon niveau. Le temps a passé, et les rencontres qu’a pu faire Laurent Bonneau ces derniers mois ne sont sans doute pas étrangères au changement qui s’est opéré ici. Après un voyage dans les Corbières, l’artisan a en effet décidé de changer de meunier, en plus de travailler cette farine moulue par Roland Feuillas dans son moulin de Cucugnan. Aujourd’hui, les habitués peuvent retrouver un pain réalisé à partir de variétés de blés anciens du jeudi au dimanche, avec toutes les qualités nutritionnelles et gustatives que ces céréales peuvent avoir. En plus de cela, les pains « traditionnels » ont gagné en qualité de par l’utilisation de farines moulues par la famille Maurey à Chars. Ainsi, baguettes de Tradition, pains de campagne, tourtes de Seigle et autres spéciaux ont retrouvé « de la couleur », même s’il reste sans doute du chemin à parcourir.
Accueil ? Le service est d’une simplicité tout à fait appréciable dans ce quartier. On pourra lui reprocher son caractère parfois un peu sec, mais c’est un peu à l’image de la clientèle à laquelle les femmes qui oeuvrent ici sont confrontées. Néanmoins, elles demeurent de bonne volonté et servent les produits avec efficacité et rigueur.
Le reste ? Chez les Bonneau, les produits sont fait maison, et c’est un point important à l’heure actuelle, car c’est trop peu souvent le cas. Même si je ne vous cacherai pas que j’ai tendance à penser que les viennoiseries, pâtisseries, gourmandises et propositions salées manquent de finesse, elles semblent rencontrer leur clientèle et c’est sans doute ce qui importe.

Faut-il y aller ? Ne serait-ce que pour apprécier le pain réalisé à partir des farines de Cucugnan, oui, bien sûr : Laurent Bonneau peut se vanter d’être l’un des seuls artisans boulangers à avoir choisi de les travailler de façon pérenne, avec toutes les contraintes que cela peut présenter : dépourvues de « correction meunière », il faut à chaque livraison adapter sa façon de faire pour parvenir à un résultat de qualité. Nous sommes bien loin des produits standardisés développés par les GMP, auxquels notre artisan avait choisi de faire confiance. Le signe qu’une véritable « révolution boulangère » s’est produite ici, dans le fournil de ce boulanger qui a fêté hier ses 50 ans. Un demi-siècle, dont une grande partie aura été consacrée à la boulangerie, pour parvenir aujourd’hui à réveiller une endormie qui aura, je l’espère, encore de belles années devant elle.

Les goûts et les couleurs. Nous avons tous nos préférences, ces teintes qui reviennent plus souvent au cours de nos vies. Cela s’applique tout autant chez nos artisans boulangers, et plus particulièrement chez eux qui décident de se bâtir une réelle identité visuelle, à laquelle la clientèle peut se rattacher. Un processus qui s’avère souvent nécessaire dès lors que l’on vise à ouvrir plusieurs points de vente.

Chez Stéphane Secco, impossible de passer à côté : on voit la vie… en rose. Cela pourrait paraître surprenant pour un homme, mais Gérard Mulot en fait de même, il faut croire que le sucre aide nos pâtissiers à voir les événements du bon côté.
Je vous parlais il y a quelques temps de son départ de la rue Jean Nicot, où il avait pris la suite du célèbre Jean-Luc Poujauran. Décidément, sa spécialité semble être de remplacer des « grands noms » de la boulangerie parisienne, même si dans ce cas, on s’en passerait plutôt bien.

En effet, c’est sur la rue de Rennes, en lieu et place de la famille Hakkam, que Stéphane Secco vient tout juste de poser ses valises. Il aura profité de la fin de l’été pour assurer la passation et réaliser des travaux dans la boutique, afin de la mettre en phase avec ses aspirations. Le résultat est plutôt convaincant, on passe ainsi d’un aménagement « standardisé-CMC » à un lieu personnalisé et bien rose, signe de bonne santé ?

Dans tous les cas, ce qui a changé et c’est sans doute le plus important, ce sont les produits. Exit les macarons tapageurs et autres pâtisseries de provenance industrielle, la gamme bien spécifique à cet artisan remplit à présent les vitrines pour le plaisir des gourmands du 6è arrondissement. Entre le fameux cheesecake, la tarte tropézienne, les tartes fines aux pommes ou encore les sablés, pas de doute, Secco est dans la place. Il en est de même côté traiteur, avec un large choix de produits (salades, plats chauds, quiches et tartes…) en libre-service ou en vente assistée. On notera la possibilité de les consommer sur place, grâce à un espace de dégustation au fond de la boutique.

Malheureusement pour les painrisiens que nous sommes, le pain s’est vu amputé d’une partie de ses déclinaisons. Les pains de campagne au levain naturel – une signature héritée de chez Poujauran et bien représentée ici, pavés Max, baguettes de Tradition à la farine certifiée Label Rouge et autres sont présents, ainsi que quelques grosses pièces que l’on ne connaissait pas chez cet artisan jusqu’alors. Les cuissons sont plutôt bien menées, même si les façonnages manquent un peu d’application. La qualité de réalisation est encore un peu aléatoire – en particulier sur les baguettes, mais l’ouverture étant récente, laissons le temps à ses équipes de prendre leurs marques.

Par contre, le service, même si encore un peu perdu dans les diverses formules et tarifications, se révèle avenant et sympathique, un point souvent reproché précédemment. Dans tous les cas, on ne peut qu’apprécier le changement opéré ici…

Viennoiseries variées, dont quelques spécialités, comme un sympathique « pain aux noix »

Infos pratiques

101 Rue de Rennes – 75006 Paris (métro Rennes, ligne 12) / tél : 01 45 48 35 79
ouvert du lundi au samedi de 7h30 à 20h.

La vie est faite de rencontres, dont certaines sont plus marquantes que d’autres. Ce que j’aime avec la boulangerie, c’est que l’on a la possibilité de rencontrer des produits avant des hommes, et que l’on accède ainsi à leur sensibilité profonde, car dans chacun de leurs produits se retrouve un peu de leur âme et de leur nature. Vous comprendrez pourquoi j’ai souvent tendance à fustiger les mélanges « prémixes » développés par les meuniers : certes, ils facilitent le travail du boulanger, mais comment peut alors se produire cette rencontre, cet enrichissement des sens ?

La devanture met bien en valeur les différents prix obtenus par l’équipe de la boulangerie, que ce soit le patron, les ouvriers ou les apprentis.

Cette boulangerie de Beaumont-sur-Oise, on m’en avait parlé, à plusieurs reprises. Un fou de pain, me disait-on. J’avais été le constater par moi-même, j’avais fait un voyage dans son univers, et plus loin encore, dans le détroit du Bosphore… Une rencontre gustative, certes, mais également un terrible goût d’inachevé et d’approximatif, car je n’avais pas pu toucher l’homme et son engagement quotidien. Un acte manqué qui devait être réparé… ce qui est à présent le cas.

Cette fresque représente la boulangerie et Beaumont, avec toute la « communauté » rassemblée autour de cette table. Aucun détail ne manque, puisque l’on retrouve même les chiens de Christophe Rouget au premier plan – même s’ils sont trois en réalité !

Chez Christophe et Sylvie Rouget, la boulangerie est bien plus qu’un métier ou même une histoire de famille. Non, cela va plus loin : dès lors que l’on pénètre ici, c’est un peu comme si l’on rejoignait une tribu, une communauté… Un lien fort qui trouve ses symboles au quotidien. Ainsi, quand l’un de ses membres la quitte, souvent à l’insu de son propre gré, cela ne laisse pas indifférent : on me parlait d’un pilote de ligne récemment décédé, ce qui n’avait pas manqué de provoquer l’émoi au sein du personnel de vente… Des histoires, oui, toujours des histoires, mais la boulangerie n’existerait pas sans elles.

La Tresse de Saint-Gilles, un clin d’oeil à David Sausseau, installé à La Réunion. Ce pain, au façonnage soigné, incorpore un mélange de céréales.

Tout cela forme une vie, un quotidien sans cesse changeant. Christophe Rouget n’est pas un artisan renfermé dans son fournil, bien au contraire : son pain exprime sa soif de partage et d’échange. Ainsi, on retrouve dans sa boutique des produits qui ont une histoire. La Tresse Saint-Gilles ? Un clin d’oeil à son ami David Sausseau, implanté à La Réunion. Le pain Noémia ? Une création dédiée à la fille d’un confrère, qui souhaitait un goûter sans ajout de sucre. Des recettes qui voyagent et sont reprises dans d’autres boulangeries.
Tout cela se résume en une phrase : savoir, savoir faire, et savoir faire-faire. C’est pour cela que l’on retrouve tant d’apprentis au sein du fournil de la maison : ces jeunes sont les chefs d’entreprise potentiels de demain, et il faut leur transmettre cette connaissance et ce goût pour un pain de qualité, produit dans des conditions irréprochables.

Une boutique simple, chaleureuse et accueillante. On y ressent une ambiance apaisée, avec de beaux produits.

Parlons-en, des conditions et du cadre, car ils sont des éléments particulièrement forts ici. A leur arrivée à Beaumont en 1995, les Rouget ont repris une ancienne affaire Banette, dans laquelle ils ont petit à petit inscrit leur marque tout en mettant en avant l’histoire du lieu. Le faux-plafond de l’époque a ainsi vite disparu pour retrouver ses dessins d’époque… et ces fameux blés et coquelicots. Pourquoi ces fleurs ? Tout simplement car, à l’époque, les champs n’étant pas traités, les coquelicots y proliféraient naturellement. On les retrouve ainsi en « fil rouge » dans l’ensemble de l’établissement, en fer forgé sur les vitrines, mais aussi dans les diverses fresques qui ornent les murs.

Le plafond d’origine a été remis en valeur par Christophe Rouget à son arrivée dans les lieux. On peut y voir les fameux coquelicots, qui sont aujourd’hui un des emblèmes de la boulangerie : ils sont d’ailleurs présents sur la vitrine, avec des fleurs en fer peint.

Impossible de rester indifférent devant ce goût du détail et du dessin. Que ce soit au fournil, dans les couloirs, ou encore au laboratoire de viennoiserie et de pâtisserie, de magnifiques peintures accompagnent le personnel au quotidien. Rien d’anecdotique là dedans, puisqu’elles racontent des histoires : celle de la boulangerie tout d’abord, mais aussi celle des ingrédients mis en oeuvre dans les produits. Une façon originale de toujours transmettre du savoir-faire. Quelques détails qui en disent long sur la capacité à voir toujours plus loin de notre artisan.

L’histoire du chocolat et cette fresque font presque partie des ustensiles de pâtisserie utilisés au laboratoire.

Voir plus loin, oui, c’est ce qui guide Christophe Rouget dans l’ensemble de ses actions. Que ce soit en rénovant l’ensemble de ses locaux pour les rendre irréprochables et pleinement exploités, en développant des gammes de produits gourmands et accessibles pour faire face à la concurrence de chaines telles que la Boulangerie de Marie – récemment implantée à proximité -, ou même en fidélisant dans son entreprise ses meilleurs apprentis et ouvriers… Nous avons affaire à un chef d’entreprise responsable et dynamique, peut-être des restes de la formation de gestion et de comptabilité que son père lui avait imposé. Dans cette famille originaire du Nord, la boulangerie est une affaire de famille (on retrouve d’ailleurs le frère au tourage), même si cela a parfois des mauvais côtés : cette étude des calculs et autres règles de gestion a en effet privé notre artisan de toute possibilité d’apprentissage en boulangerie, le réorientant de fait vers un CAP de Pâtissier et le « condamnant » à un statut d’autodidacte dans son coeur de métier.

Au tourage, c’est le frère Rouget qui réalise des viennoiseries bien feuilletées.

Cela importe bien peu, car j’aimerais souvent voir des autodidactes aussi méticuleux et rigoureux que lui. De la rigueur, il y en a dans ses préparations : la farine torréfiée, incorporée selon des grammages très précis dans les recettes, est fabriquée « maison » au travers d’un processus méticuleux, tout comme pour la nougatine incorporée dans le pain Bosphore. De la folie, vous trouvez ? Non, au contraire, beaucoup de clairvoyance à mon sens.

Avez-vous vu souvent cela dans un fournil ? Moi pas ! Il s’agit de la nougatine utilisée pour la réalisation du pain Bosphore. Ce nom n’a pas été choisi au hasard : la Turquie produit énormément de quantité de ce fruit sec, de plus, ce pain trouve ses origines dans l’Ekmek, un pain plat turc à l’huile d’olive et au miel.

Une même clairvoyance qui l’a amené dès le début à s’engager aux côtés d’acteurs engagés tels que la famille Foricher et le Club le Boulanger, défenseurs d’une farine Label Rouge, produite en Culture et Rendements Contrôlés (CRC). Si aujourd’hui ces démarches trouvent de l’écho auprès d’un public toujours plus large, c’était bien loin d’être le cas il y a 15 ans. Pour autant, notre artisan voudrait rendre les spécificités de ce processus plus lisibles pour le grand public… Le partage, toujours le partage.

Grosses pièces, Bosphore, Ciabattas, … rien ne manque pour les gourmands de pain !

Le partage passe aussi par des prix particulièrement abordables, avec une baguette de pain courant – très soignée – proposée à 0,80€, et une Tradition à 1€. Malgré l’augmentation du coût des matières premières, Christophe Rouget tient à maintenir ces tarifs, qui représentent pour lui une véritable porte d’entrée pour des clients qui seront ensuite prêts à dépenser un peu dans des achats « de plaisir », qui contribueront au chiffre d’affaires de la boutique. Donner pour recevoir, une pratique qui a fait ses preuves depuis bien longtemps.
D’ailleurs, le boulanger voudrait continuer à donner longtemps, même si c’est aujourd’hui son corps qui lui fixe des limites. Passionné de sport en plus de son métier, la fatigue ne manque pas de se faire ressentir. Cela l’incite sans doute à être moins catégorique qu’il avait pu l’être par le passé, à tenter de parvenir à des compromis pour continuer à avancer… et à faire avancer. Donner de la latitude à ses apprentis, voire à terme leur « offrir » une seconde boulangerie où exercer leur talent… L’histoire continuera à s’écrire pour cette communauté boulangère, et nous en serons pour la suivre avec attention.

Infos pratiques

39 rue Basse de la Vallée – 95260 Beaumont-sur-Oise (gare de Persan-Beaumont, Transilien ligne H) / tél : 0134700290
ouvert du jeudi au lundi de 6h à 19h30. (ouverture le mardi également à partir d’octobre)

Peu d’acteurs de la boulangerie peuvent se vanter d’être passés par plusieurs des « niveaux » qui constituent la chaîne permettant de réaliser du pain. En effet, la filière regroupe des métiers très différents : produire de la farine, le rôle du meunier, n’est certainement pas la même tâche que de la mettre en oeuvre comme le fait le boulanger au quotidien dans son fournil.

Parmi ces quelques personnes, il y a bien sûr les « paysans boulangers », qui ont fait le choix de maîtriser le processus dans sa totalité, aussi vertical soit-il. Roland Feuillas, Nicolas Supiot, … des hommes à l’engagement remarquable.
D’autres font également leur chemin, d’une manière un peu différente. C’est le cas de Jean-François Celbert. Plus de 22 ans de meunerie au compteur, notamment en tant que PDG du groupement Banette et chez AMO – Axiane, avant un virage un peu forcé en 2009 avec la reprise de la boulangerie Joséphine de l’avenue Marceau. Il a également repris « Chez Fred » sur l’Ile de Ré, avec son associé Stéphane Leyssenot. Pour la petite histoire, les deux compères ont tenté d’imposer le nom et concept Joséphine pour cette affaire… sans succès, les locaux ne souhaitant pas voir s’implanter un concept parisien sur leur petit coin de paradis, d’où un retour à la dénomination initiale.

Malgré ces petits ennuis, cela n’arrête pas notre entrepreneur, puisqu’il a choisi de faire voir double à sa douce Joséphine, en la dotant d’une adresse en plein coeur de Saint-Germain-des-Prés. En effet, depuis quelques semaines, le couple Maillard et sa baguette Rétrodor que j’avais passé dans mon viseur a passé la main.
Dans cette zone où peu de boulangeries sont présentes, il n’est pas difficile de se faire une place, et les nombreux touristes de passage ne manqueront pas de s’arrêter ici, peu importe les produits et les prix, en définitive.

Jean-François Celbert est loin d’être seul ici, puisqu’il s’est associé à une pointure du milieu, en la personne de Benoît Castel, l’ancien chef pâtissier de la Grande Epicerie toute proche. Le lieu a été légèrement remanié pour fluidifier le service, mais on retrouve toujours le charme sobre de cette petite boulangerie, à laquelle on a voulu donner des accents anglais en lui affublant le nom de « Bakery »…
A l’entrée, ce sont des salades classiques ou plus créatives qui nous accueillent, accompagnées d’une courte proposition de sandwiches. Ils sont rapidement suivis par une déclinaison de pâtisseries plutôt simples et soignées, ressemblant fortement à celles proposées à l’institution parisienne où oeuvrait précédemment notre chef (cheesecakes et leur pipette, éclairs, tartes…), même si plutôt onéreuses (4€ la pièce en moyenne). Les viennoiseries s’en sortent honorablement, avec un croissant proposé à 1,05€ et un pain au chocolat à 1,20€. Les origines bretonnes de Jean-François Celbert ne sont pas oubliées, avec un charmant kouign-amann, riche en beurre et en sucre comme il se doit. On retrouve aussi de généreuses madeleines, nature ou parfumées au chocolat, des gâteaux de voyage…

Avec tout cela, on en oublierait presque l’élément de base d’une boulangerie, le pain, relégué au fond de la boutique, avec une gamme presque aussi courte que celle de l’avenue Marceau. Une baguette de tradition à 1,20€, très crémeuse mais sans grande personnalité ni conservation exceptionnelle, ainsi qu’une autre dite « de campagne » en plus de celle aux céréales. Quelques bâtards accompagnent le tout, bref, vous l’aurez compris, rien de très intéressant. On se concentrerait presque plus sur les fougasses gourmandes et créatives, dont une parfumée au curry, ou encore sur les petits pains aux ingrédients variés.

Reste tout de même l’accueil plutôt chaleureux et souriant, qui font de cette « bakery » une halte sympathique dans ce quartier très touristique.

Infos pratiques

42 rue Jacob – 75006 Paris (métro Saint-Germain-des-Prés, ligne 4) / tél : 0142602039
ouvert du lundi au samedi de 7h à 20h.

Avis résumé

Pain ? Gamme courte et sans grand intérêt, un peu à l’image de ce qui était proposé jusqu’alors en ces lieux. La baguette de Tradition, vendue 1,20€ la pièce, peine à séduire, et les amateurs de pain auront du mal à trouver de quoi se sustenter ici. Façonnages approximatifs tout autant que les cuissons. Quelques gourmandises (petits pains aux pépites de chocolat, au roquefort et aux noix…) complètent la courte gamme, en plus de fougasses un peu plus créatives.
Accueil ? Les jeunes femmes au service assurent un accueil agréable et souriant, plutôt efficace. L’organisation de la boutique est plutôt bien vue, ce qui permet une certaine fluidité en heure d’affluence.
Le reste ? On appréciera le choix de salades plutôt créatif et frais, même si les sandwiches demeurent assez classiques, accompagnés toutefois de quelques burgers très gourmands, qui satisferont sans peine les gros appétits. Les viennoiseries et pâtisseries sont soignées, tout cela pour des tarifs acceptables compte tenu du quartier.

Faut-il y aller ? La toute jeune Joséphine de la rue Jacob a pour mérite d’offrir une boulangerie – pardon, bakery – propre et bien tenue à la clientèle, avec un « grand chef » aux manettes côté douceurs. On sent bien que la clientèle touristique reste l’un des « piliers » du fonctionnement du lieu, avec une gamme profondément tournée vers la restauration rapide et les gourmandises.

La période estivale est assez intéressante à étudier. Tandis que certains métiers se mettent en sommeil, d’autres voient au contraire leur activité décuplée. En réalité, c’est le moment où l’on fait ce que l’on ne pourrait pas faire avec de la clientèle : des travaux, de la maintenance. Ainsi, les aménageurs de boutiques sont très sollicités en juillet et août, à l’occasion des vacances de nos artisans.

J’avais eu l’occasion de vous parler de la nouvelle boutique de la Maison Pichard, mais aussi de la charmante Alexine revisitée l’an passé. Ces changements d’apparence ont aussi pour effet d’attirer mon attention sur des boulangeries que je n’avais pas visité jusqu’alors. Parfois à tort, parfois à raison.

J’avais souvent descendu la rue Monge sans prendre le temps de m’arrêter à la Boulangerie des Arènes, située au niveau du métro Cardinal Lemoine. Cet été, ce nom a disparu pour mettre en avant le patronyme des propriétaires du lieu, les Gaumer. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils ont… gommé l’ancienne boutique, certes un peu vieillissante, mais possédant beaucoup d’âme que ce nouvel écrin au lignes bien standardisées. Encore une boulangerie « sacrifiée » sur l’autel des normes d’hygiène et des agencements vendus sur catalogue. Le tout reste cependant assez élégant et agréable.

Peu importe, les produits et le service doivent demeurer nos principales préoccupations. De ce côté là, la maison nous propose des prestations de bon niveau, à commencer par le pain. La baguette de Tradition, réalisée comme le reste de la gamme à partir d’une farine des Moulins de Cherisy, présente un diagramme assez intéressant : elle pèse en effet 300g, ce qui a pour effet de lui donner un caractère assez charnu. A cela s’ajoute une texture et un parfum de crème agréables, même si un peu trop soutenu à mon goût. Les cuissons sont bien menées, un constat qui se réalise tout autant sur les autres produits de la gamme.
Ils sont nombreux, d’ailleurs : pains au levain (baguette, seigle, pain à la coupe) à la douceur agréable, pain Lutèce aux céréales et épices, petits pains individuels variés… Une belle offre et des tarifs modérés, un combat que bien d’autres boulangers devraient mener… mais tous ne sont pas aussi proches des arènes.

Sandwiches en libre-service

Pour le reste, on retrouve des viennoiseries classiques plutôt modestes, à l’image des pâtisseries qui ne dénotent pas particulièrement. On y préférera les produits les plus « simples » et boulangers, à l’image des tartes à la part et des gourmandises variées (financiers, …). Côté traiteur, ce sont des sandwiches dans la moyenne, accompagnés de quiches et tartes salées qui assurent le service.

En parlant de service, on appréciera le dynamisme et la « fraicheur » des jeunes filles oeuvrant en boutique, apportant le côté humain qui a un peu tendance à faire défaut dans ces boutiques modernes.

Infos pratiques

31 rue Monge – 75005 Paris (métro Cardinal Lemoine, ligne 7) / tél : 01.43.26.29.29
ouvert tous les jours sauf le mercredi de 7h à 20h30.

Avis résumé

Pain ? Une gamme étendue, du soin et des prix raisonnables, le combat est gagné pour la boulangerie des arènes. La baguette de Tradition possède son petit caractère, avec un côté assez charnu dû à son diagramme de fabrication (elle pèse en effet 300g) et un parfum de crème soutenu. Les pains au levain ne sont pas en reste, avec une baguette et un pain à la coupe tout aussi sérieux. Les amateurs de saveurs originales pourront se tourner vers le pain et la baguette Lutèce, intégrant un mélange de céréales et d’épices. Des petits pains aux ingrédients variés (50cts la pièce) satisferont quant à eux les gourmands. Conservation honorables, également.
Accueil ? Jeune et souriant, plutôt dynamique, c’est appréciable dans ce lieu un peu froid et moderne qui a pris place ici depuis l’été. On appréciera tout de même le côté pratique de l’agencement, avec un armoire dédiée au sandwiches et boissons en libre-service, ainsi qu’une caisse prévue pour leur paiement.
Le reste ? Les viennoiseries sont honnêtes, sans plus, tout comme les pâtisseries qui ont tendance à manquer de finesse dans leur réalisation. Du classique, qui nous incite à nous tourner vers les propositions les plus simples et « boulangères ». Si l’on s’intéresse au salé, ce sont les sandwiches dans la moyenne qui occupent le plus de place, accompagnés de quiches, pizza et tartes variés. De quoi constituer un repas rapide.

Faut-il y aller ? La maison Gaumer nous propose une belle gamme de pains et propose des produits tout à fait honnêtes, à des tarifs abordables. Dotée de sa toute nouvelle boutique, elle pourra certainement proposer une organisation plus efficace à l’heure du déjeuner, même si l’on regrettera le charme que pouvait avoir l’endroit précédemment. Néanmoins, l’accueil demeure toujours agréable, et c’est certainement l’élément qui compte le plus.