Si j’aime le pain, c’est aussi parce que c’est un formidable vecteur d’échanges. On ne s’en rend pas forcément compte de l’extérieur, mais il existe une véritable « communauté » autour de l’aliment, et cette dernière prend parfois de bien curieuses formes. Bien sûr, il y a celle qui existe naturellement entre nous, consommateurs et amoureux de pain, puisque nous avons tous nos avis sur la façon de le consommer, sur le goût qu’il devrait avoir, sur les artisans les plus talentueux… mais de l’autre côté de la barrière, en coulisses, d’autres échanges se font pour parvenir à faire aboutir le processus, à nous délivrer chaque jour un produit savoureux.
Le plus évident est celui qui a lieu entre le boulanger et son meunier. Recettes, variétés de farine, souvent mélanges pré-conçus et autres questions ou mises au point au quotidien, l’artisan en appelle souvent à son premier fournisseur pour lui apporter des solutions.
Ce qui est plus intéressant à mon sens, c’est quand les spécialités plus ou moins régionales donnent lieu à des dialogues plus complexes, plus poussés. En effet, autant la baguette de Tradition doit se contenter de farine, d’eau, de sel et de levain et/ou levure, ce qui laisse peu de place à la fantaisie, autant les pains « spéciaux » constituent parfois des mélanges bien étudiés.
Prenons la Foccacia, cette spécialité italienne moelleuse et aromatique. On la voit bien souvent maltraitée en restauration rapide, car réalisée de façon industrielle et avec des matières premières de piètre qualité. Seulement, quand on s’y intéresse, elle peut exprimer tout autre chose, nous raconter des histoires… et justement, ces fameux dialogues.
C’est précisément le cas chez des Gâteaux et du Pain. Non seulement la Foccacia aux Graines de Fenouil nous transporte directement en Italie, mais elle met en valeur la qualité exceptionnelle des matières premières mises en oeuvre pour sa fabrication. Il y a bien sûr la farine de Tradition T55 fournie par la minoterie Viron, mais aussi l’huile d’olive et les graines de chez Cédric Casanova. Aucune boulangerie n’avait fait le choix de se fournir chez lui pour réaliser du pain, et ce fut pourtant vers « La Tête dans les Olives » – le nom de sa boutique – que David Granger s’est tourné. Après une sélection minutieuse de la variété, nous retrouvons aujourd’hui un résultat particulièrement fruité et entêtant.
A la dégustation, c’est une succession de saveurs et sensations qui s’offre à nous. On commence bien sûr par le moelleux et le fondant de cette mie légère, la douceur de l’huile d’olive, puis on rencontre les fameuses graines de fenouil et leur fraicheur anisée… pour terminer sur les grains de fleur de sel, qui relancent le plaisir, l’envie et contribuent à donner à l’ensemble de la longueur en bouche. Bien sûr, on peut choisir de la consommer seule, en l’émiettant presque sans façon… mais ce serait négliger sa capacité à sublimer des mets venus des douces contrées italiennes. Ainsi, une fois tranchée en deux, il est possible de la garnir de fromages frais – type ricotta -, de tomates, de jambon ou de Bresaola, d’un peu de roquette… puis d’écouter chanter les cigales, vous savez, une douce soirée d’été…
Je dois dire également que j’apprécie tout particulièrement l’idée d’avoir incorporé des graines de fenouil et pas un mélange d’herbes – généralement dites « de Provence » – comme c’est souvent le cas. La spécificité de cette herbe aromatique donne une dimension toute particulière au produit et le relève avec beaucoup de succès. David Granger et son équipe signent encore une fois un pain de caractère, en mettant en valeur des matières premières de qualité.
Foccacia aux Graines de Fenouil, des Gâteaux et du Pain – Paris 15è, vendue à la pièce – 3€ les 250g.
Dans le genre « pain italien »; quel est ton avis sur la focaccia du café-restaurant Cosi? (Si tu as testé, bien sûr)
Je n’ai pas pris le temps de m’y arrêter pour en acheter une part, il faudra que je le fasse, mais j’en ai entendu beaucoup de bien.