On peut parfois me reprocher de critiquer sans faire les choses moi-même, de ne conserver qu’un rôle d’observateur, qui serait alors bien confortable. Difficile de donner tort à un tel raisonnement, mis à part en s’engageant : pour ma part, cela commence en assumant pleinement mes écrits, je ne suis pas caché et il a toujours été possible d’en savoir plus sur moi, et même de voir à quoi je ressemble. Vient ensuite le temps des actes, et je ne suis pas le dernier à me déplacer pour participer à des événements lorsqu’on me le propose.
Ainsi, j’ai pu prendre part hier au second concours du meilleur Pain Bio d’Ile-de-France, organisé au sein des locaux de la Chambre Professionnelle des Artisans Boulangers-Pâtissiers, au 7 quai d’Anjou. J’ai souvent eu l’occasion de critiquer ce genre de concours, où certains boulangers peu scrupuleux présentent des produits bien éloignés des pains proposés quotidiennement en boutique. Il me sera ainsi possible de comparer de façon réelle et objective.
18 artisans avaient répondu présent en apportant leurs pains. Pour la plupart, il s’agissait de boules au levain, et cette unicité de format nous a permis de comparer les produits sans trop de difficulté : difficile en effet d’établir un cliché type du pain Bio, sinon qu’il est généralement réalisé sur levain, et présente donc un caractère plutôt acide. Certains originaux avaient cru bon d’apporter des baguettes, pains aux céréales ou couronnes… Ce qui était leur droit, après tout.
Nous étions 4 jurés à noter les pains, selon des critères d’aspect, de cuisson, d’alvéolage, de goût et de parfum. Le pain ne doit pas seulement être agréable en bouche, il doit aussi séduire l’oeil, éveiller les sens, susciter l’envie, tout simplement. En ce qui concerne l’alvéolage, il y a là un problème : en effet, l’acide ascorbique n’est pas interdit pour les pains Biologiques, ce qui signifie que les pains les plus développés et donc alvéolés y ont sans doute eu recours. Difficile de le vérifier pour nous, mais le doute persiste, et c’est une des raisons pour lesquelles le pain de Tradition est parfois préférable : ce dernier en est forcément dépourvu, puisque les additifs sont proscrits de sa recette.
Il y avait du bon et du moins bon, mais dans l’ensemble, je dois reconnaître que le niveau était assez élevé : des mies gourmandes et bien hydratées, une acidité assez maîtrisée, et pour certains des arômes soutenus (céréales, fleurs, épices…), de beaux bouquets concentrés.
Cela a été aussi l’occasion d’échanger avec des passionnés du pain, et même si je peux regretter une certaine tendance à rencontrer des têtes grisonnantes plutôt que des jeunes (à croire que l’on parvient difficilement à transmettre la passion du pain…), c’est toujours un moment agréable. J’ai également pu discuter rapidement avec Jacques Mabille, le président de la Chambre, qui travaille actuellement à l’instauration d’un label valorisant la réalisation artisanale des viennoiseries et autres gourmandises, un engagement sans doute difficile à soutenir auprès de certains acteurs influents du secteur, mais qui ne pourra que faire du bien à la profession.
Pour les résultats, rendez-vous jeudi prochain, à l’occasion de la remise des prix !