Allons faire un tour là où l’herbe est vraiment plus verte, l’air plus pur. Gare de Lyon Grandes Lignes, l’impression de partir pour un long voyage, j’aime cette ambiance mêlant tension, espoirs et excitation. Dans notre cas, cela ne sera qu’une quarantaine de minutes en empruntant la ligne R.

Quelques paysages, forêts et champs plus tard, nous voici en gare de Fontainebleau-Avon. Pour l’anecdote, celle-ci est desservie… par le TGV ! Cela surprend quand on voit son aspect plus proche d’une gare de campagne que d’un noeud ferroviaire important. Ainsi, il est possible de se rendre à Lyon ou Marseille en quelques heures. (plus d’informations sur http://www.yonne-tgv.com/).
Il faut faire encore un peu de chemin pour arriver dans la commune la plus étendue de la région Ile-de-France (!).

Ville impériale, chargée d’histoire et maintenant accueillant une grande école de commerce (l’INSEAD), la cité ne manque pas de rayonner et attire de nombreux touristes. Il n’est pas rare de croiser des japonais en pleine balade, sûrement un peu surpris par l’espace et la sensation de calme des lieux.
D’ailleurs, notre ami du jour est également présent au Japon. Frédéric Cassel, président de l’association des Relais Desserts et ayant fait ses classes chez Paul Manu et Fauchon, s’est en effet bien exporté… Peut-être aurait-il du se concentrer sur sa boutique historique, au 71 rue Grande, à Fontainebleau.

L’échoppe est agréable, le décor assez moderne, dans des tons orange et beige. L’écrin assure ainsi le vernis de la maison. C’est assez similaire pour le salon de thé installé à quelques pas, dans une charmante ruelle piétonne de la ville. Seulement, l’enrobage ne suffit pas, il faut que les produits soient du même niveau. Dans le cas présent, c’est raté. Les promesses ne sont pas tenues.
Le pâtissier devrait porter les valeurs « d’excellence » de l’association Relais Desserts, sensée représenter le savoir-faire français sur le plan international. Pâtisseries à la finition douteuse (j’ai déjà pu voir en vitrine des gâteaux endommagés), souvent assez sucrées et roboratives, je ne retrouve pas la finesse à la laquelle j’étais en droit de m’attendre. En réalité, les portions individuelles semblent complètement négligées, seuls les entremets à partager ont un visuel attirant. On passera sur le non-respect de la saisonnalité des fruits lié à l’adoption d’une politique de « collections » : des pâtisseries à l’abricot sont proposées… en avril. Pourquoi pas.

L’homme ne s’est pas arrêté au sucré, on retrouve ainsi une large gamme traiteur, du jambon, des conserves… Il y a de quoi avoir le tournis. Ne reculant devant aucun challenge, il propose également du pain, réalisé à partir d’une farine fournie par les moulins Viron. La Rétrodor fera le bonheur des amateurs de levure, puisque c’est la principale saveur qui s’y exprime. Les pains « fitness », à base de levain et de farine complète, sont néanmoins relativement intéressants et de conservent honorablement. Les viennoiseries, assez onéreuses, affichent une qualité plutôt correcte.

Quant à l’accueil… considérons simplement qu’il est resté figé à l’époque impériale. Précieux et surfait, il est bien en ligne avec les prétentions de la maison, mais en aucun cas avec la réalité. Cela achève de donner l’image d’une entreprise ennuyeuse et embuée dans une tradition française poussiéreuse et maniérée. Je suppose que si elle perdure, c’est grâce à son « prestige » et au fait que nous soyons ici dans un royaume d’aveugles : les bellifontains n’ont certainement pas l’habitude de courir les boulangeries et les lieux gourmands de la capitale. Ils se fient donc aux titres prestigieux qu’a reçu M. Cassel (« pâtissier de l’année » par deux fois), quoi de plus normal. Le chemin est balisé. Cela n’empêche pas de se tromper.

Infos pratiques

Pâtisserie / boulangerie / traiteur : 71-73 rue Grande – 77300 Fontainebleau / tél : 01 64 22 29 59
ouvert du mardi au vendredi de 7h30 à 19h30, le samedi de 7h à 20h, le dimanche de 7h à 14h.
Salon de thé / Chocolaterie : 21 rue des Sablons, 77300 Fontainebleau / tél : 01 60 71 00 64
ouvert du mardi au vendredi de 10h à 19h, le samedi de 10h à 19h30, le dimanche de 10h à 13h.

Des boutiques sont également implantées à Casablanca, Berlin, Tokyo ou encore Kyoto. Plus d’informations sur http://www.frederic-cassel.com/.

Avis résumé

Pain ? Pain de tradition (Rétrodor) inintéressant et fleurant « bon » la levure (sic!). La gamme fitness est plus originale et savoureuse, plutôt agréable à la dégustation, sa conservation est de plus dans une bonne moyenne.
Accueil ?
Cérémonieux, peu enjoué, à l’image des prétentions très impériales de la maison. Il faut bien être raccord avec la ville. Seulement, ce n’est pas cohérent avec la qualité des produits, cela donne juste une impression désagréable.
Le reste ?
Les pâtisseries devraient être les stars de l’endroit. Raté. Sucrées, peu attirantes sur le plan visuel, assez traditionnelles, cela tient plus de l’échoppe de quartier que de la pâtisserie rayonnant à l’international comme on est en droit de s’y attendre. La déception est vraiment amère. Quant aux macarons sur lesquels l’entreprise fonde une partie de sa réputation (avec notamment son fameux macaron pétillant, au champagne), là encore, même écueil : sucre et manque de saveur.

Faut-il y aller ? Pour acheter un morceau de pain afin de compléter son panier de pique-nique à l’occasion d’une balade dans le parc du château ou après une séance d’escalade, pourquoi pas. Quoique, d’autres artisans boulangers installés dans la ville se défendent tout aussi bien, voire mieux. Cela vaut tout de même le coup d’oeil, pour admirer comment l’on peut vivre sur une réputation. M. Cassel aurait mieux fait de ne pas se multiplier comme il l’a fait : il est impossible d’être partout, et la qualité s’en ressent.

4 réflexions au sujet de « Détours en banlieue : Frédéric Cassel, Fontainebleau, au royaume des aveugles »

  1. Whouaa, tu n’hésites pas à aller loin pour tester les boulangeries.
    As-tu l’intention de faire une critique sur la boulangerie Poilâne ? Je ne suis pas de Paris mais j’ai déjà entendu de nom plusieurs fois cette boulangerie.
    Sinon continue comme ça, ton blog est agréable à lire, ça donne envie d’être Painrisien.

    • C’est vrai que j’aime bien me promener pour essayer de nouvelles adresses, sinon je finis par m’ennuyer !
      Oui, bien sûr, il faudra que je parle de Poilâne, c’est une véritable institution, qui a d’ailleurs largement dépassé Paris… sans jamais faire de baguette, qui est pourtant le symbole même du pain français 😉
      Merci en tout cas, c’est très chouette d’avoir des retours sur mes billets.

  2. Je suis Bellifontain et fier de l’être ! Ceux-ci ne sont pas des ploucs et « montent » à Paris pour « faire les boutiques » ! Le ton de votre édito est insultant à la fois pour les Bellifontains et pour la famille Cassel. L’accueil est toujours chaleureux … avec les clients qui ne sont pas méprisants. Bon, je vais arrêter là car votre article ne mérite pas mieux que le titre de « pisse-vinaigre ».

  3. Bonjour,
    Bien que ça ne soit pas toujours le cas, je suis entièrement d’accord avec cette critique. J’en avais publiée une sur mon compte Instagram juliette_mange au sujet de son flan, bien décevant et en effet trop sucré; Fontainebleau est ma ville natale et celle où j’ai grandi, vivant en campagne proche, et je trouve très dommage qu’on ait d’yeux que pour lui. À croire que ce serait le seul pâtissier-boulanger du sud francilien qui vaille le détour… Les macarons sont en effet trop sucrés et sans saveur et l’attitude de service hautaine. Je n’ai jamais essayé le pain ni les viennoiseries, mais ne serait-ce qu’à Fontainebelau-Avon il y a bien des endroits plus intéressants, à commencer par Dardonville, petit lieu sans prétention situé dans les rues piétonnes mais dont la longue file d’attente, fréquente, dit tout. J’ai mangé de bien meilleurs flans, et du très bon pain, en banlieue moins sexy telle que Corbeil-Essonnes (allez voir le pain au levain de La Huche à Pain, les flans et les quiches de La Fontaine des Douceurs ou de la boulangerie Charpentier, par exemple). On se demande en effet sur quelles bases sont construites certaines réputations…

    Ma dent contre Cassel avait été renforcée après avoir cet article du monde: https://www.lemonde.fr/m-gastronomie/article/2016/10/14/les-dessous-de-la-patisserie-de-luxe_5013853_4497540.html – je doit dire que je me retrouve bien plus dans la philosophie de Claire Damon (et elle se retrouve également dans l’assiette! Jamais déçue chez elle).

     » Les framboises et les fraises sont partout, tout le temps, des tartes estivales aux bûches de Noël. « Le client s’en fout complètement du bio, assure Frédéric Cassel, pâtissier à Fontainebleau et président de l’association Relais Desserts. Il vient chercher du plaisir chez nous, il nous fait confiance, et se fiche de savoir d’où viennent les fraises, tant qu’elles ont du goût. » Des déclarations qui ont le don d’irriter Claire Damon, l’une des rares de la profession à se pencher réellement sur la question. « Justement parce que nous faisons du haut de gamme et parce que le client nous fait confiance, il en va de notre responsabilité de chercher les meilleurs produits, et de soutenir ceux qui les font. » « 

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