Il y a des marques qui basent leur image sur une histoire créée de toutes pièces, c’est un choix et on ne peut pas vraiment le remettre en question. Mamie Nova a-t-elle existé ? La Laitière ? Pas sûr. De cette façon, le consommateur associe un côté affectif à la marque et sera certainement plus à même de s’en souvenir.
Au Café Pouchkine, c’est un peu le cas. Toute l’histoire a été créée de l’imagination de quelques personnes, et notamment de Gilbert Bécaud, qui le cite dans sa chanson Nathalie. Il n’en fallait pas beaucoup plus à Andrey Dellos pour se lancer dans l’aventure, pour donner vie à la légende. Cet homme d’affaire n’en était pas à son coup d’essai. Propriétaire d’une chaine de restauration rapide à succès en Russie, il a installé en 1999 le fameux Café Pouchkine à Moscou, avec l’ambition non dissimulée d’en faire un lieu incontournable, comme s’il avait toujours existé.
Quelques années plus tard, on peut dire que le pari est réussi, et l’ennui a fini par gagner M. Dellos, qui a pris la décision de partir à la conquête du monde… en commençant par Paris.
Pour le moment, ce n’est qu’un corner au sein du Printemps Haussmann, mais l’entreprise ne cache pas ses ambitions et devrait ouvrir dans les prochains mois un lieu « en propre », beaucoup plus spacieux et en phase avec l’image que l’on peut se faire du Café Pouchkine. Si cela n’a pas été encore fait, c’est en raison des ajustements qu’il reste à faire sur le concept en France, et la nécessité de construire quelque chose de stable et d’éprouvé, sans chercher à grandir trop vite.
Parlons du présent, et notamment de ce nous propose ce lieu gourmand. Andrey Dellos n’étant pas pâtissier, il s’est adjoint les services d’un homme de talent, Emmanuel Ryon (Meilleur Ouvrier de France Pâtissier et Champion du monde dans la même discipline), qui a développé l’ensemble de la gamme du Café Pouchkine. Viennoiseries, pâtisseries, cakes, macarons, petits pains fourrés… Rien ne manque à l’appel et les gourmands seront comblés. Les curieux également : les produits parviennent à marier les deux cultures, nous faisant faire un aller-retour permanent à l’est, ce qui est loin d’être désagréable. Roulé au pavot, utilisation de « Tvorog » (fromage frais Russe), un Paris-Moscou intégrant une gelée de kvas (boisson traditionnelle russe)… Autant de saveurs que l’on ne retrouve pas ailleurs dans notre capitale. Ce qui est amusant, c’est que l’effet est aussi ressenti en Russie, où la note française surprend tout également. Les cultures s’entrechoquent et se mélangent habilement.
Au delà des produits, le Café Pouchkine c’est aussi un décor. On cherche vraiment à nous raconter une histoire, pleine de tsars et de féérie russe. Un vrai conte. Dorures, sculptures, rien ne manque pour que l’effet soit complet. Pas même les tenues du personnel, semblant sortir tout droit des contes des milles et une nuits. Cela peut surprendre, mais pas tellement plus que ce que l’on peut retrouver dans d’autres boutiques alimentaires « de luxe », telles que Ladurée.
Tout cela ne serait pas grand chose si les produits n’était pas à la hauteur en terme de saveurs et de réalisation. Or, c’est bien tout sauf le cas. Nous avons là affaire à l’une des plus belles vitrines de pâtisserie de la capitale, où l’ensemble des gâteaux sont toujours finis au millimètre, avec des visuels parfois impressionnants. Comment ne pas fondre devant la « Rose Pouchkine » et ses pétales en chocolat blanc, ou encore devant le Baba Stanislas et des feuilles de pâte film caramélisées ?
Certes, on pourra reprocher à certaines créations leur caractère riche, mais la générosité des portions permet de les partager sans difficulté, ce qui rend dans le même temps les prix plus « abordables ». Bien entendu, les tarifs demeurent toujours élevés, à la hauteur du caractère luxueux de la maison. Pour autant, il n’est pas désagréable de s’offrir un petit plaisir de temps en temps. Certains d’entre eux restent cependant très accessibles, comme les viennoiseries, toutes aussi créatives. Difficile d’être déçu, les produits tiennent le haut du pavé de la place parisienne. Textures, saveurs, couleurs, … tout est là. La technique est maîtrisée.
Côté service, il y a eu quelques aléas, mais comme je l’écrivais plus haut, l’entreprise est encore en pleine implantation sur Paris et il est inévitable que des ajustements soient à réaliser. Ceux-ci sont en cours, et l’accueil s’est nettement amélioré au cours de ces derniers mois, rendant l’expérience client bien plus agréable, en phase avec la qualité des produits proposés.
Infos pratiques
64, bd Haussmann – 75009 Paris – Printemps Mode, Étage 0. (métro/RER Opéra/Havre-Caumartin/Auber, lignes A, 3, 8 et 9) / tél: 01 42 82 43 31
ouvert du lundi au samedi de 9h35 à 20h (22h le jeudi).
Faut-il y aller ? Pour se faire vraiment plaisir, oui, bien sûr. Certes, cela reste de l’ordre de l’exceptionnel, du luxe, au vu des tarifs pratiqués. Cela n’en est pas pour autant inaccessible, et la qualité autant visuelle que gustative des produits justifie de tels tarifs. Je suis toujours impressionné par ces finitions impeccables, ce sens du détail et ces associations de saveurs inhabituelles mais maîtrisées et intéressantes. C’est un style unique dans notre capitale, et les inspirations de l’est ne peuvent pas être reniées, pour le plus grand plaisir de notre gourmandise, ainsi que de notre curiosité.
Ping : Janvier, un mois royal ? | painrisien
Ping : Pâtisserie du jour : Pavlova Cassis, Café Pouchkine (Paris 9è) | painrisien