Vous devez finir par savoir combien je suis attaché aux valeurs de partage et d’accessibilité que doit véhiculer le pain selon moi, et c’est pourquoi je suis toujours sensible au prix des produits proposés dans une boulangerie. Une baguette de tradition doit être vendue à un prix raisonnable, pour que chacun puisse déguster un pain de qualité. C’est un droit et non un luxe.
Pourtant, chez les Desgranges, cela semble loin d’être évident. Le métier s’est partagé et transmis de père en fils dans cette famille, mais ils semblent vouloir garder le pain dans ce ‘cocon’. En effet, dans leur boutique de la rue de Passy, la baguette de tradition coûte la bagatelle de… 1,45 euros les 250g. Rien que ça. J’ai rarement vu aussi cher pour ce type de pain, d’autant qu’elle ne justifie pas d’une réalisation exceptionnelle. Certes, elle n’est pas mauvaise, mais il y a bien meilleur, et sa cuisson est… plus qu’aléatoire : soit elle sera blanche, soit elle sera grillée. Dans les deux cas, les saveurs ne sont pas intéressantes.
Ce qui est assez déroutant chez les Desgranges, c’est le nombre de baguettes différentes. Quignonette, Passy Passion, Tradition… En réalité, seul le façonnage et la cuisson changent, c’est du moins ce que m’avait répondu une vendeuse lorsque je l’avais interrogée à ce sujet. Dès lors, on peut se poser des questions sur l’intérêt d’une telle pratique. Il y a en effet plus de baguettes en boutiques, limitant la rotation de chacune d’entre elles, ce qui n’est pas bon pour garantir leur fraicheur. C’est pourtant essentiel lorsque l’on achète ce type de pain.
Le reste de la gamme n’est pas tellement plus intéressant, beaucoup de classiques et là encore des cuissons très aléatoires. Rien qui ne justifie les prix pratiqués. Les tarifs semblent d’ailleurs dépendre de la boutique et sont moins élevés rue Pierre Demours, même s’ils demeurent dans une moyenne haute.
Le reste ne relève pas vraiment cette entrée en matière. Au delà des viennoiseries sans intérêt particulier, les patisseries entretiennent les classiques du genre, sans fantaisie ni réussite particulière. On peut tout de même leur accorder un certain soin et des finitions honnêtes.
Coté traiteur, même constat, des produits corrects mais rien de remarquable. Ou plutôt, si, encore et toujours une chose : les prix. Chez les Desgranges, rien n’est donné, tout se mérite, il faut croire. Bien entendu, le quartier n’est certainement pas étranger à cet état de fait : les loyers sont relativement élevés, et la clientèle a les moyens de payer quelques centimes ou euros de plus. Est-ce pour autant normal ? Les prix ne devraient-ils pas refléter la valeur réelle des produits ?
Ici, tout est un peu surfait, j’avoue ne pas me sentir à l’aise dans cette boulangerie qui vit d’une certaine réputation. Le personnel ne participe pas vraiment à donner une impression plus agréable de l’endroit, on ne peut pas dire qu’il respire la joie de vivre, même si des exceptions existent. Globalement, le client est servi sans plus d’enthousiasme, le travail étant fait, à minima.
Infos pratiques
4 boutiques à Paris, une en banlieue. Toutes les informations à ce sujet ici : http://www.maison-desgranges.com/boutiques.htm
Avis résumé
Pain ? Rien de bien intéressant. Les différentes sortes de baguette pourraient offrir un certain choix, mais en réalité, tout cela n’est que très virtuel car la pâte reste la même. Dès lors, les tarifs se justifient difficilement, d’autant plus au vu du caractère aléatoire des cuissons. On retrouve de nombreux petits pains aux graines ou aux fruits secs, quelques pains spéciaux (noix, ciabatta, céréales…) dont les prix s’envolent rapidement et pour lesquels la réalisation reste somme toute très passable. Disons simplement que l’on a vu pire, le pain a tout de même du goût, mais rien qui justifie tout ce décorum.
Accueil ? Variable, pas franchement enjoué ni réellement au fait des produits qu’il propose. Les questions à leur sujet sont répondues sans enthousiasme. On peut toutefois reconnaître une bonne organisation de la boutique, divisée en plusieurs pôles : une caisse est ainsi dévolue au traiteur, une autre au pain, ce qui permet d’éviter un quelconque risque d’engorgement à l’heure du déjeuner. Le personnel reste cependant assez efficace.
Le reste ? Les viennoiseries ne présentent pas d’intérêt particulier, de même que les pâtisseries. La réalisation reste toutefois sérieuse, les finitions correctes. Les produits sont très traditionnels : éclairs, religieuses, mille-feuilles, opéras… Pas d’inventivité. Côté traiteur, même constat, les propositions sont de bonne facture, classiques mais tarifées à prix d’or.
Faut-il y aller ? Si l’on a peu de temps, que l’on est dans le quartier et que l’on possède une somme d’argent à liquider, oui, pourquoi pas. Sinon, tant les produits que l’accueil ne parviennent pas à justifier le déplacement. J’ai tendance à penser que les Desgranges vivent sur une certaine réputation et ne cherchent pas à en faire plus. Ainsi, rien n’est mauvais, les pains sont corrects en terme de saveurs, mais rien d’exceptionnel. Souvent, la multiplication des boulangeries fait perdre en authenticité et en qualité. Cela semble être le cas ici.
« la valeur réelle des produits » vous dites ; je ne voudrais pas défendre Desgranges mais vous devriez savoir qu’on calcule un prix de vente en fonction de plusieurs coûts et non pas seulement à partir des matières premières. Et parmi ces coûts, il y a le loyer, plus élevé sans doute dans le XVIe qu’à Barbes…
Désolé mais pour moi l’argument ne tient pas, des boulangers dans le même secteur que lui parviennent à produire du pain moins cher et de meilleure qualité. Loyer vous dites ? Je sais bien qu’il rentre en ligne de compte, merci pour la leçon d’économie. Cela ne doit pas être une excuse, de plus, la main d’oeuvre reste l’un des postes de coût principaux.
Bonjour, je connais bien cette boulangerie et je tient à signaler qu’elle fait un pain de campagne particulièrement bon, qui vaut le détour. La baguette Passy Passion est pour moi la meilleure du quartier, même si effectivement vendue particulièrement chère !