J’ai déjà comparé la boulangerie à de la musique, mais on pourrait faire une analogie similaire avec la mécanique. En définitive, il s’agit d’une grande chaine où chaque maillon compte : de l’agriculteur au boulanger, en passant par le meunier… Le consommateur en fait aussi partie : sans lui, le reste n’existe pas. Une faiblesse à un des niveaux et c’est la machine qui s’emballe. Heureusement, certains sont là pour resserrer les vis et donner l’espoir que la profession s’oriente vers des pratiques plus vertueuses. La mécanique, c’est compliqué. Il faut le savoir et l’accepter… en comptant sur les bons mecanos pour nous guider.

Je vous avais parlé de la boulangerie de l’un d’eux, située à Boulogne-Billancourt. Boulogne, boulonnais, boulonné, insérons là dedans des ressorts… Bref, vous aurez compris mon trait d’humour. Chez Mickael Morieux, la mécanique est bien huilée, preuve en est du succès rencontré par ses deux boutiques.
Cette affluence n’est sans doute pas le fruit du hasard, ni seulement du titre de Meilleur Ouvrier de France, qu’il a obtenu en 2011. Non, les raisons sont plus profondes.

Mickael Morieux devant sa boulangerie, rue d'Aguesseau à Boulogne-Billancourt.

Mickael Morieux devant sa boulangerie, rue d’Aguesseau à Boulogne-Billancourt.

Quand on rencontre cet artisan, on ne peut qu’être frappé par sa simplicité – malgré le col bleu-blanc-rouge -, son franc-parler et son dynamisme. Même si j’ai eu souvent l’occasion de critiquer des boulangers, pâtissiers ou chocolatiers ayant obtenu le titre prestigieux de MOF, Mickael Morieux l’utilise au contraire pour porter haut et fort les couleurs d’un artisanat de qualité, riche en valeurs et en savoir-faire.

Il n’a pas attendu 2011 pour partager et être en recherche permanente du « meilleur » : compagnon du Tour de France, il a longtemps participé à l’activité de l’entité même s’il s’en est aujourd’hui éloigné en raison des querelles qui minent cette organisation. Cela ne l’empêche pas de continuer à donner beaucoup à des jeunes et à leur inculquer des valeurs d’exigence et de droiture. Ainsi, on retrouve dans ses fournils une équipe largement constituée d’apprentis et d’ouvriers fraichement diplômés… ce qui n’empêche pas de retrouver côté boutique des produits de grande qualité.

Pour notre artisan, l’essentiel est de savoir s’entourer et impliquer chacun dans une même démarche. Sa spécialité n’est pas de réaliser des pâtisseries, qu’à cela ne tienne : il a récemment intégré dans son équipe un passionné du sucré pour donner un nouveau souffle à sa gamme de gourmandises. Transmettre et responsabiliser chacun pour aboutir à une entreprise cohérente, et qui puisse surtout donner envie de faire perdurer l’artisanat : les ouvriers d’aujourd’hui sont les patrons potentiels de demain. Ainsi, il n’est pas rare que Mickael Morieux déjeune en toute simplicité avec son équipe, plaisante, et entretienne une belle proximité que j’aimerais tellement retrouver chez plus d’artisans, dont la position est plus souvent de mettre en avant les problèmes de personnel que de tenter d’y apporter des solutions durables…

En parlant de durabilité, là encore, le boulanger ne manque pas d’idées sur la question : il accorde ainsi une importance toute particulière au choix de ses matières premières, à commencer par la farine. Une partie lui est livrée par les Moulins de Chars, une autre par les Moulins de Brasseuil – pour les farines biologiques, mais il ne s’interdit pas de faire appel à d’autres fournisseurs plus atypiques pour réaliser des produits particuliers. Hors de question de devoir se contraindre dans des labels et autres certificats coûteux, le Meilleur Ouvrier de France préfère choisir les ingrédients pour leur goût. Son objectif est en effet de porter la profession vers le haut en défendant l’idée que les boulangers ne sont pas de simples mélangeurs de farines et d’eau, se contentant souvent de suivre des recettes pré-établies ou d’utiliser des pré-mixes. Au contraire, selon lui, chacun devrait chercher à développer son caractère singulier pour susciter l’intérêt de la clientèle… et ainsi assurer la pérennité de la boulangerie artisanale.

A Boulogne, la revente non annoncée de l’affaire Lohézic n’a pas manqué de lui apporter toujours plus de clients, qui ne sont sans doute pas déçus de leur choix : impossible de ne pas apprécier la tourte de seigle (farine Biologique), la tourte de meule au levain, la baguette de Tradition… même si l’ensemble des produits proposés dans ses boutiques ont le bon goût d’être réalisés maison. Preuve, s’il en fallait une supplémentaire, de son engagement : l’artisan se rend à Rungis chaque semaine pour sélectionner ses produits et tenter de mettre en valeur des terroirs. Cette notion compte beaucoup pour lui, mais quoi de plus naturel pour un homme ayant parcouru les régions françaises afin d’en découvrir les richesses et les spécificités ?

Dans tous les cas, il ne fait pas de doute que l’on entendra parler de ce passionné de boulangerie : des projets plein la tête, la vie devant lui – il n’est âgé que de 39 ans -, Mickael Morieux a encore beaucoup à faire… tout en continuant dans la droite ligne de ses valeurs, simplicité, honnêteté et rigueur.

Une réflexion au sujet de « Rencontre avec un MOF Boulanger qui ne manque pas de ressort, Mickael Morieux »

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