Notre héritage peut parfois être un fardeau. Combien ont été écrasés d’être le « fils de » ou la « fille de » ? C’est un peu la même chose quand il s’agit de reprendre une entreprise familiale sans entrain, ou que les facilités ont rendu l’enfant un peu trop feignant. La transmission est un sujet central pour chacun d’entre nous, que ce soit personnellement ou professionnellement. Accepter de laisser son empreinte, c’est prendre le risque qu’elle ne soit pas toujours aussi positive qu’on le souhaitait. Si l’on a un minimum de bienveillance vis à vis de son prochain, il faut essayer de faire en sorte de ne pas trop charger le dos de ceux qui viendront après nous.

Benjamin et Adrien Pelletier sont nés dans une famille d’agriculteurs : la ferme d’Orvilliers, située à Broué, en Eure-et-Loir (28), se transmet depuis 5 générations. Cet héritage n’est pas neutre, et si de nombreux jeunes font le choix de se tourner vers d’autres horizons, ils ont au contraire choisi de reprendre le flambeau en 2012. Cela fait suite à des réflexions menées en parallèle, dans des parcours singuliers : Benjamin a appris la boulangerie en autodidacte dans le Jura, tandis qu’Adrien a suivi une formation d’ingénieur agricole, qui l’a conduit à découvrir l’agriculture Biologique, les semences paysannes, l’agroforesterie…

Dans la cour de la ferme d'Orvilliers

Dans la cour de la ferme d’Orvilliers

Dès lors, quoi de plus beau que de croiser à nouveau les deux chemins, qui plus est sur leurs terres d’origine ? Le projet d’une activité de paysans-meuniers-boulangers bio était né… en plein coeur de la Beauce, cette fameuse région autrefois surnommée « grenier à blé de l’Europe. Aujourd’hui, le grenier a été sérieusement mis à mal, et ses terres durablement affaiblies paient le lourd tribut de nos pratiques intensives… et abusives. Des initiatives comme celle développée à la Ferme d’Orvilliers sont donc particulièrement bienvenues.

Le four à biomasse et sole tournante Tayso

Le four à biomasse et sole tournante Tayso

Comme préalable à leur nouvelle activité, il aura fallu installer les équipements de meunerie  et de boulangerie. C’est dans l’ancienne bergerie qu’ils ont trouvé leur place, avec notamment un four à biomasse et sole tournante Tayso, une chambre de fermentation, le stockage des farines, le moulin à meule de pierre en granit …

Autour de la ferme, des champs à perte de vue. L'urbanisation n'a pas encore frappé à la porte de cette zone, et on aurait bien du mal à s'en plaindre !

Autour de la ferme, des champs à perte de vue. L’urbanisation n’a pas encore frappé à la porte de cette zone, et on aurait bien du mal à s’en plaindre !

Dans les champs, les céréales se répartissent sur 50 hectares. Blé, sarrasin, seigle, petit épeautre ou engrain, il y a là de quoi assurer une production auto-suffisante. Si des variétés modernes de blé sont aujourd’hui cultivées (avec du Camp Remy, notamment, même si ce dernier n’est plus si moderne !), une parcelle a été réservée pour des blés anciens, dits « de population ». La ferme travaille en collaboration avec l’INRA pour trouver un mélange équilibré, adapté au terroir de la ferme, qui permettrait de réaliser de bout en bout le « pain d’Orvilliers ». La réflexion va plus loin car les associés veulent conserver un pain accessible à tous, le confort de travail mis en place au fournil et le volume de production de farine pour continuer à la distribuer en sac. Ces évolutions devraient se mettre en place à l’avenir, en accord avec l’ensemble des personnes impliquées dans le projet.
En effet, les deux frères ne sont pas seuls, et leur engagement a notamment séduit Hélène, qui les a rejoint après un parcours en reconversion professionnelle. Cette ancienne infirmière a développé une véritable passion pour le levain et n’hésite pas à la partager lors de stages, auprès des adultes ou des enfants. Son implication permet aujourd’hui de réaliser des volumes de pain toujours plus importants.

L'espace de vente au fournil de la ferme d'Orvilliers

L’espace de vente au fournil de la ferme d’Orvilliers

La demande était « dormante » dans cette zone géographique : peu ou pas de bon artisan à proximité, une sensibilité de la population à consommer des produits plus sains et locaux… Dès lors, il n’en fallait pas plus pour faire de ce projet un succès. Les produits de la ferme d’Orvilliers sont distribués directement à la ferme les mardis et vendredis de 16h à 19h, mais également sur le marché de Dreux ou au travers d’AMAP, fermes et magasins bio. Pour autant, la vocation de cette aventure n’est pas d’essaimer partout, de développer de nombreux points de vente et de ne plus maitriser l’évolution de la structure, ainsi que la qualité des produits.

Le bâtiment refermant le fournil et l'ensemble des outils liés à la production du pain (meunerie, etc.)

Le bâtiment refermant le fournil et l’ensemble des outils liés à la production du pain (meunerie, etc.)

Ces derniers sont d’ailleurs de très bonne facture, avec une gamme courte mais savoureuse. Ici, pas de baguette, uniquement de grosses pièces à longue conservation. Cela s’applique tout autant pour la miche (et sa déclinaison au graines), le complet, le pain d’Olaf (style nordique, aux graines et farines de seigle, sarrasin et blé) ou le pur engrain (sur levain d’engrain). Les levains sont doux et relèvent subtilement les arômes des pains. Leur prix est particulièrement appréciable, d’autant qu’ils sont tous certifiés biologiques : la miche est ainsi vendue 5€/kg, ce qui montre bien l’intérêt de ces circuits courts, sans intermédiaire.
Seule exception à ce tableau locavore, un pain sans blé aux farines de riz -on n’en cultive pas encore dans la Beauce !-, lentilles et sarrasin, sans matières grasses ni épaississant. C’est un produit assez particulier, avec une texture se rapprochant plus du cake que du pain. Je n’adhère pas vraiment.
Une brioche est également proposée le vendredi.

Ici, on travaille en froid ! Les bacs de pâte reposent dans cette grande chambre de fermentation pour développer leurs arômes.

Ici, on travaille en froid ! Les bacs de pâte reposent dans cette grande chambre de fermentation pour développer leurs arômes.

Voilà une démarche porteuse de sens et créatrice de valeur, autant pour les consommateurs que pour les producteurs, avec un réel ancrage dans une terre riche en histoire… et l’engagement de deux frères.

Infos pratiques

Ferme d’Orvilliers – 28410 Broué (gare de Marchezais – Broué, Transilien ligne N) / tél : 06 13 35 38 49
site internet : http://www.fermedorvilliers.fr/

Une réflexion au sujet de « La Ferme d’Orvilliers, Broué (28), deux frères de retour dans leurs terres »

  1. J’habite Dreux depuis un an et votre démarche familiale, écologique, biologique, me séduit. Le voici une fidèle cliente et plus de votre démarche,de vos produits et de votre accueil sans faille.

    MERCI

    Vos cakes régalent mes amis de passage. Je ne manque aucune occasion de parler de votre investissement. Et cela rebondit vers vous.

    MERCI
    Daniele Mallet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.