Les jeunes générations ont une tendance certaine à perdre le sens de l’effort et se tournent de plus en plus facilement vers des métiers du secteur tertiaire, forcément moins physiques et mieux valorisés au sein de notre société. Dès lors, difficile d’attirer de la main d’oeuvre vers des filières plus « difficiles », telles que l’artisanat. En réalité, et sans vouloir tenir des propos clivants, cela concerne surtout les jeunes issus des classes moyennes ou aisées, qui ne sont pas en recherche d’un quelconque ascenseur social.

A côté, il y a des personnes qui peinent pour boucler leurs fins de mois, qui doivent se lever très tôt pour faire les tâches que les autres auront refusé… Malheureusement, beaucoup de personnes issues de l’immigration. Le « rêve » français et son modèle intégrationniste dans toute sa splendeur.
On les retrouve dans beaucoup de cuisines parisiennes… mais également dans des fournils, car il ne faudrait pas oublier la boulangerie. Là aussi, même modèle : horaires décalés, pénibilité physique… Ce qui explique la crise de vocations que l’on connaît.

Dans l’édition du Monde datée du 27 juin, la journaliste Elise Vincent revient sur la présence de plus en plus forte de boulangers issus de l’immigration dans la profession. En effet, ils sont autant ouvriers que chefs d’entreprise, et représentent 1 reprise d’affaire sur trois, autant dire que le mouvement n’est pas anecdotique.
On peut y voir une véritable opportunité d’ascension sociale, la boulangerie pouvant être relativement lucrative lorsque l’affaire tourne bien. En la matière, ces entrepreneurs parviennent de mieux en mieux à faire fonctionner leurs affaires. Au départ, la qualité était bien loin d’être au rendez-vous, et la clientèle devait bien souvent faire face à des baguettes désespérément blanches, ainsi qu’à des arômes absents. Avec le temps et les efforts – autant des artisans eux-mêmes que de la meunerie, qui a compris qu’il y avait là une clientèle à soigner et à former -, les pains proposés parviennent à être de plus en plus intéressants.

Au delà de la préoccupation légitime pour la qualité des produits, on peut y voir un symbole qui est attaqué : la boulangerie française deviendrait-elle maghrébine ? Cela n’a rien de gênant, après tout : chacun a le droit d’exercer le métier qu’il souhaite… et je ne vous cache pas qu’au final, je trouve que cet intérêt pour la boulangerie est positif : si le bon pain se développe et se déploie dans les zones plus défavorisées, cela créé du sens.
Egalement, c’est l’occasion de parvenir à des métissages : la baguette de tradition française peut ainsi côtoyer des pains typiques tels que le matlouh tunisien, un pain plat réalisé à partir de semoule. La boulangerie devient le lieu de rencontre des cultures et des individus. Un soupçon d’exotisme dans le quotidien ne fait jamais de mal…

Il faudrait tout de même se poser la question de savoir pourquoi les « français d’origine » perdent le goût de ces traditions et ne sont plus si attachés que cela au pain et à la transmission de ce savoir-faire. Peut-être ne sommes-nous pas assez sensibilisés au goût et à l’importance qu’il peut avoir, nous nous endormons peu à peu sur nos acquis et laissons se développer des industries dont les produits sont parfois réalisés bien, bien loin de chez nous, avec des matières premières de qualité et de provenance douteuses. Alors que l’artisan soit français, marocain, japonais, serbo-croate… seule la sincérité de la démarche compte, et le résultat également.

6 réflexions au sujet de « Et si la boulangerie française devenait maghrébine ? »

  1. Ce qui vous n’évoquez pas dans votre article, c’est que ces entrepreneurs maghrébins refusent d’utiliser du porc dans leurs productions.

    En discutant souvent avec des maghrébins, parfois même des turcs, je ne comprends toujours pas cette aversion pour le cochon alors que l’alcool, autre interdit de l’Islam, est abondamment consommé par ceux que je connais.
    Je n’ai jamais entendu parlé d’un conducteur à contre-sens sur l’autoroute ou un mec qui a tué sa femme, parce qu’il avait mangé deux tranches de jambon. Alors que si c’est deux verres de vodka…

    Plus généralement, si on accepte aujourd’hui de ne plus avoir de porc dans les boulangerie, n’y-a-t-il pas un risque de se voir imposer d’autres contraintes du Coran en France pour aller acheter sa baguette ? Se voiler quand on est une femme ? Fermer pendant les heures de prière ? Acheter son pain la nuit pendant le Ramadan ?

  2. Pourquoi toujours faire le lien, un amalgame entre Maghreb et Islam! C’est fou ça… Les clichés disent la boulangerie comme un métier de raciste, dépoussiérons ces idées, ou alors je vais vraiment le croire…
    Personne ne vous oblige à acheter une fougasse au comté et non une fougasse aux lardons et dans ce cas ce qui vous gène est ce le fait que la fougasse soit au comté ou qu’elle soit sans porc…

  3. Effectivement, il est toujours dangereux de généraliser. Et visiblement c’est la solution de facilité pour beaucoup. Exemple, je mange régulièrement dans trois pizzerias qui sont tenues par des maghrébins (algériens et tunisiens) et bien, on y trouve des pizzas avec du porc et c’est d’ailleurs celles qui se vendent le mieux. Autre exemple, la boulangerie à côté de chez moi a été reprise il y a une année par un marocain qui continue de faire des sandwiches jambons beurre tous les midis.

    • bonjour,
      le jambon beurre dont vous parlez est du jambon de dinde hallal, toutes ces boulangeries ne font des sandwichs saumon, thon et dinde hallal, fini les rillettes, pâté, saucisson ! Si c’est votre représentation de la France gastronomique d’aujourd’hui je vous en félicite !!!
      NON il n’y aucun problème ! C’est à se demander ce que vous mangez ; plat préparé, pizza, burger et autre bouffe rapide !

  4. Effectivement, ne faisons pas de généralités trop hâtives et faciles… Ce qui compte avant tout pour ces boulangers, c’est de faire tourner leur commerce ! De fait, la plupart ne se priveront pas de proposer des jambon-beurre ou autres produits similaires…

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